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 « Seigneur Jésus,
apprenez-nous à être généreux,
à vous servir comme vous le méritez,
à donner sans compter,
à combattre sans souci des blessures,
à travailler sans chercher le repos,
à nous dépenser sans attendre d’autre récompense
que celle de savoir que nous faisons votre Sainte volonté. »

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No 18 – Novembre 2004

Sommaire :

  • Editorial
  • Dossier : l’eau, problème majeur du Proche-Orient (2) :

       l’eau dans les Territoires 

  • Histoire : du « Séisme politique » à l’opération « Paix en Galilée ».
  • « Ville trois fois sainte » 
  • L’opération « Jours de repentance »
  • Au pays de la rue Jonas
  • Flashes d’espoir : pour la vie
  • No’omi Shémer
  • Sagesse et humour.

Editorial

En cette fin d’octobre 2004, Israël commémore le 9° anniversaire de l’assassinat d’Itzhak Rabin alors que le pays vit  peut -être, après tant d’espoirs déçus, un des moments les plus difficiles de son histoire : des décisions cruciales à prendre, une menace de guerre civile, une division dans l’armée…

Nous voulons aujourd’hui vous partager quelques soucis et quelques espoirs. Nous voyons d’une manière très positive le retour de pèlerins, ce qui implique tout de suite du travail pour les guides, les hôtels etc. et redonne un peu d’espérance à la population, mais ces rencontres avec des groupes francophones nous font prendre conscience aussi du décalage entre ce que l’on peut vivre ici et ce qui peut est perçu à l’étranger. Des réactions simplistes, du genre, « Il n’y a qu’à quitter les territoires », « Sans le problème Israël-Palestine qui dure depuis 50 ans, il n’y aurait pas de terrorisme dans le monde », ou des questions comme « Peut-on être chrétiens, donc en lien avec les chrétiens arabes et se sentir proches d’Israël ? » « Y a-t-il encore de l’espérance pour ce pays ? »

Après quelques jours d’un pèlerinage, un membre du groupe a exprimé tout simplement : « Tout est compliqué ici, » C’est vrai et plus on y vit, plus on le constate. Nous le savons, nous qui sommes ici depuis 50 ans, 30 ans, 12 ans, en contact avec la population, qui entendons des Israéliens et des Palestiniens, qui avons avec les uns et les autres des relations de travail et d’amitié, même si notre insertion est en Israël, et nos relations surtout avec la population juive.

Différents livres qui viennent de sortir font écho à certaines de  ces questions et montrent leur complexité.  Des Israéliens et d’autres, qui  souvent vivent en Israël, réfléchissent sur des solutions qui sont loin d’être « simplistes » ! Vous pouvez trouver de plus amples renseignements sur ces lectures sur  notre site Internet

<http : www.afiq.net/echo>.

Les titres sont parlants : Aidez-nous à divorcer ! d’Amos Oz. Un divorce n’est jamais facile, mais il n’y a pas aujourd’hui, semble-t-il, d’autres solutions pour les deux peuples qui vivent sur cette terre,  et Amos Oz de conclure « alors si vous avez le plus petit élan d’aide et de sympathie à offrir, qu’il aille non pas à l’un ou l’autre des patients, mais aux deux. « Vous n’avez plus à choisir  entre être pro-israélien ou pro-palestinien, vous devez être pro-paix ».

Avi Primor, ancien Ambassadeur d’Israël en Allemagne nous propose : Du terrorisme et de ceux qui l’exploitent.  - « La paix a un prix, osons le payer », il n’y aura pas d’issue sans concessions.

Dans Le droit d’Israël pour une défense équitable, Alan Dershowitz, juriste, professeur de droit à Harvard, cherche à « réfuter de manière définitive trente deux attaques, diffamations, et dénaturations des faits dont on entend accabler Israël depuis quelques années ».

Ces réflexions sérieuses et bien d’autres sont pour nous des signes d’espoir. Malgré une vraie lassitude et beaucoup de souffrances, nous savons que des solutions se cherchent à bien des niveaux, et que des hommes de bonne volonté, qu’ils soient juifs, chrétiens ou musulmans, essayent de vivre ensemble et de se comprendre. Nous en avons quotidiennement des exemples. Nous sentons aussi combien les enjeux actuels sont importants pour la survie d’Israël et la paix entre ces deux peuples. Je termine par un souhait exprimé dans le « courrier des lecteurs » : « Je vous souhaite bien du courage et de la compassion, afin de  garder ce regard qui ne juge pas mais qui cherche à comprendre ». C’est ce que nous voudrions partager avec vous tous.

                                                                                                                                                                                                                                                      Myriam Selz

 

Dossier : l’eau, problème majeur du Proche-Orient (2) :

L’eau dans les Territoires : bande de Gaza, Judée-Samarie

Israël (6.7 millions d’habitants), les Territoires de l’Autonomie palestinienne (Gaza, Judée-Samarie : 3.5 millions d’habitants) et la Jordanie (5 millions) manquent d’eau et partagent pratiquement les mêmes ressources :

- Le Jourdain, fleuve frontalier de 250 km, alimenté par des rivières et des sources du Liban, de Syrie, de Jordanie, d’Israël et des Territoires palestiniens, se jette dans la mer Morte, avec un débit annuel moyen d’un demi-milliard de m3. Si Israël capte une grande partie des eaux du Jourdain, le Liban également capte de l’eau de la source du Hasbani et les eaux du Yarmouk, affluent du bas Jourdain, sont captées par la Syrie et la Jordanie.

- deux aquifères souterrains :

- l’aquifère montagneux des collines de Judée et de Samarie a une capacité de 640 millions de m3 par an, dont 460 millions sont captés par Israël et 110 millions par les Palestiniens.

- l’aquifère côtier, étiré de Haïfa à la bande de Gaza, a une capacité de 570 millions de m3 par an, dont 100 millions sont utilisés par les Palestiniens.

La pénurie en eau potable règne :

      La quantité disponible d’eau potable par personne et par an diffère d’un pays à l’autre : Israël : 250 m3 ; la Jordanie : 105 m3 ; les Territoires palestiniens : 85 m3. En revanche les deux pays en amont du Jourdain, le Liban et la Syrie disposent de ressources en eau importantes.

      La solution aux problèmes de pénurie réside dans un partage équitable entre la Jordanie, Israël, les Territoires palestiniens d’une part et avec le Liban et la Syrie d’autre part, pays riches en eau.

Historique géopolitique de la gestion des ressources en eau :

Depuis plus d’un siècle les fermiers juifs ont créé des moyens d’approvisionnement en eau dans la région, et ont mis en œuvre, déjà sous l’Empire ottoman, des systèmes de pompages.

L’aquifère des montagnes du centre du pays a toujours constitué une part importante de l’approvisionnement en eau d’Israël. Sous les Turcs, ainsi que pendant le Mandat britannique, les pionniers juifs utilisaient déjà cette réserve d’eau. Bien avant l’occupation israélienne des Territoires (Judée-Samarie), les Israéliens utilisaient les eaux des régions ouest et nord-est de l’aquifère des montagnes. Israël fonde ses revendications pour le droit d’utilisation de ces eaux, sur l’utilisation antérieure et sur les problèmes que la perte de ces eaux causerait à son économie.

Cet aquifère de capacité annuelle de 640 millions de m3 se régénère facilement par les pluies abondantes. Depuis 1967, près de 300 puits creusés à l’est de la Ligne verte fournissent à Israël approximativement 460 millions de m3 d’eau par an ( soit près de 80%) et 110 millions aux Palestiniens. L’on estime que 60 millions de m3 d’eau peuvent être pompés sans danger pour cet aquifère. L’aquifère des montagnes reçoit la plus grande partie de son eau des pluies qui tombent à l’est de la Ligne verte (80%), qui s’écoulent ensuite vers le territoire israélien et dont 80% est utilisé par les puits creusés dans le territoire israélien. Suivant la loi internationale cet aquifère est considéré comme un bassin international commun.

      En 1964, Israël achève la grande conduite nationale acheminant l’eau du lac de Tibériade jusqu’au nord du Néguev, ce qui permit l’interconnexion des eaux sur l’ensemble du territoire israélien. De même, la Jordanie, grâce au captage des eaux du Yarmouk qui alimentent le canal du Ghor, mit en valeur la vallée du Jourdain. L’agriculture irriguée dans ces deux pays absorbe à elle seule de 50% (en Israël elle est passé de +60 à -50) à 70% (Jordanie) de l’eau consommée. L’Autorité palestinienne quant à elle n’a pas encore fait grand-chose pour gérer les ressources disponibles.

      En 1967, à l’issue de la guerre des Six jours, Israël occupa la Cisjordanie et le Golan en augmentant son contrôle des ressources en eau que représentent l’aquifère des montagnes et le bassin du Jourdain. Les nouvelles méthodes d’irrigation et de fertilisation ainsi qu’une meilleure gestion de l’eau provoquèrent une économie des systèmes hydrologiques.

      Sous l’administration israélienne le système d’adduction d’eau de la région sud d’Hébron s’est amélioré et de nombreux puits furent creusés près de Jénine, de Naplouse et de Toulkarem. Plus de 60 villes arabes sur la rive occidentale du Jourdain ont ainsi bénéficié de nouveaux systèmes d’adduction d’eau et l’ancien réseau a été amélioré.

      A la fin des années 1970 et au début des années 1980, le Moyen-Orient souffrit d’une des pires sécheresses de l’histoire moderne de cette région. Le niveau des eaux du Jourdain, du lac de Tibériade et des deux aquifères ont connu des seuils critiques. La situation s’est aggravée dans les années 90 et au début du nouveau millénaire. Le gouvernement israélien restreignit le forage de nouveaux puits en Cisjordanie et en Israël pour éviter une surexploitation des nappes souterraines risquant d’entraîner une infiltration d’eau salée. Les fermiers arabes de Cisjordanie sont alimentés en eau par environ 100 sources et 300 puits creusés il y a quelques années et qui sont déjà surexploités.

La Judée-Samarie

La qualité des eaux traitées par les Palestiniens n’est pas la même que celle des eaux traitées par les Israéliens, de plus, de nombreux égouts ont des pertes qui polluent le sol et les nappes souterraines. Les eaux usées sont très souvent rejetées dans la nature sans épuration préalable et certaines de ces eaux s’écoulent vers la nappe phréatique du littoral méditerranéen. La pollution des eaux de la Judée-Samarie est très critique. Cependant le plus grand danger réside dans la salinité de l’eau et du sol et de la destruction de l’aquifère des montagnes.

C’est en 1967 que le contrôle de l’eau des Territoires fut enlevé aux villages et communautés locales pour passer sous le Commandement militaire israélien. Les autorités israéliennes prétendent que le réseau de distribution d'eau existant sous l'occupation a été développé, et que depuis lors les Palestiniens consomment 20% d'eau en plus grâce aux nouveaux quotas d’eau qui leur sont attribués. Elles soutiennent que si les quantités sont insuffisantes ils n'ont qu'à s'en prendre à eux-mêmes car ils gèrent mal leurs infrastructures. Le gouvernement israélien dénonce les accusations des médias du deux poids deux mesures concernant la répartition de l’eau entre Israéliens et Palestiniens.

De leur côté, les autorités palestiniennes prétendent que les quantités d'eau supplémentaires par rapport à 1967 signifient en pratique une nette diminution par tête d'habitant, parce que pendant le même temps la population a subi une croissance de 84%. Selon des chiffres israéliens récents, un Israélien dispose de cinq fois plus d'eau qu'un Arabe palestinien de Cisjordanie. Dans la bande de Gaza, en 1990, la différence était de vingt fois plus.

De nombreuses communautés palestiniennes ne sont pas reliées à un réseau d’eau potable et dépendent des précipitations dont les eaux sont récoltées dans des citernes. Ces eaux répondent aux besoins de quelques mois seulement et ils doivent se ravitailler aux sources locales ou acheter de l’eau à prix fort aux réserves d’eau privées.

Une autre ressource naturelle d'eau très importante se trouve sous la partie ouest de la vallée du Jourdain, occupée par Israël depuis 1967. On accuse les Juifs des implantations de cette vallée de faire un usage quasiment illimité de cette eau souterraine, pour irriguer leurs cultures et remplir leurs piscines. Leur agriculture intensive contraste avec celle des villes et des villages palestiniens de la région, où la consommation d'eau est restreinte par le contrôle israélien. D’après certains médias, la modernisation et l'expansion des infrastructures hydrauliques existantes sont interdites, et la permission d'opérer des travaux d'entretien est rarement donnée (Source : B’Tselem).

Des sources non officielles estiment que les autorités israéliennes pompent quelque 60 millions de m3 d’eau des puits de Judée-Samarie pour la population juive des implantations (environ 240 000 habitants), tandis que les Palestiniens ne sont autorisés à pomper que deux fois cette quantité pour une population dépassant les 2 millions.

Depuis l’Intifada d’El-Aqsa en sept. 2000 et depuis le retour de l’armée israélienne dans les centres urbains des Territoires en 2003, la situation de nombreux villages s’est détériorée. A cause des couvre-feux fréquents la pénurie en eau potable est cruciale pour beaucoup de Palestiniens.

Un rapport de B'Tselem paru sous le titre original « The water crisis in the Occupied Territories » dénonce le contrôle israélien sur les ressources en eau des Territoires : « … Le contrôle strict d'Israël sur le secteur de l'eau dans les Territoires occupés a empêché le développement qui aurait permis à ce secteur de satisfaire à la demande croissante des Palestiniens. Israël a instauré des restrictions et des interdictions qui n'existaient pas sous les contrôles jordanien et égyptien. Ces restrictions et interdictions sont la principale raison du manque d'eau et de la crise qui en découle... ». B’Tselem, Centre israélien des Droits de l’Homme en Palestine, établi en 1989, scrute les actions du gouvernement israélien et des Juifs des Territoires. Pour cet organisme « la pénurie d'eau viole les droits humains fondamentaux des résidents palestiniens vivant dans les Territoires occupés, y compris leur droit à la santé, à un logement décent, à l'égalité, et leur droit de jouir de leurs ressources naturelles ». B’Tselem accuse les mesures israéliennes mises en pratique depuis 1967 et qui se « fondent sur une répartition injuste des ressources partagées par Israël et les Palestiniens ». (http://www.btselem.org)

Le sous-développement des Territoires peut être illustré par l'exemple de l'agriculture. Le secteur agricole, tant pour Israël que pour les Palestiniens, est le plus grand consommateur d'eau (-50% pour Israël et +70% pour les Palestiniens, de la consommation totale d'eau). La part de l'agriculture dans l'économie israélienne n'a cessé de diminuer dans la dernière décennie, elle est maintenant environ de 2% du PIB. L'économie palestinienne est beaucoup plus dépendante de l’eau pour l’irrigation de son agriculture : la part dans le PIB est de 32,9% et plus d'un tiers des habitants palestiniens est dépendant de l'agriculture pour ses revenus. Néanmoins, le développement agricole palestinien a été durablement empêché par les quantités trop faibles d'eau qui leur furent attribuées par les autorités israéliennes.

La bande de Gaza

Le problème de l’eau dans les Territoires telle la bande de Gaza est relativement préoccupant. Des centaines de puits qui furent creusés sont déjà remplis d’eaux salines, ce qui met en danger l’aquifère de la plaine côtière. L’eau contient une forte proportion de chlore qui dépasse les normes sanitaires. Le système défectueux d’évacuation des eaux usées et le manque de recyclage rendent l’eau impropre à la consommation.

En 1996, un rapport de la Banque mondiale soulignait que la situation de Gaza état « plus inquiétante que n’importe où dans le monde » (07/11/2003). Creuser des puits et pomper l'eau salée qui provient d'Israël pourrait régler le problème d'eau potable dans la bande de Gaza, affirme une équipe internationale de scientifiques. Les géochimistes israéliens, palestiniens et français qui participent à cette étude ont présenté leurs conclusions à la rencontre annuelle de la Société de géologie américaine, qui s’est tenue à Seattle.

L'aquifère côtier de la bande de Gaza est la principale source pour la population arabe. Dans cette nappe souterraine, l'eau se renouvelle par infiltration. « En général, l'eau salée, plus dense que l'eau douce, reste au fond des aquifères », explique Miroslav Nastev, hydrogéologue à la Commission géologique de Ressources naturelles du Canada, « mais si on pompe trop, le niveau de la nappe baisse et on se rapproche de la zone saline qui est alors attirée vers la surface. » L'aquifère côtier fournit 96 % de l'eau consommée dans la bande de Gaza, et déjà deux fois trop d'eau par rapport à sa capacité de régénération y est pompée. Selon les chercheurs, la surexploitation de l'aquifère a changé la pente de déversement des eaux. Les scientifiques ont conclu que le problème de salinité à cet endroit vient, en fait, du débit des eaux souterraines salées qui affluent d’Israël par l’est. Ils proposent donc de créer sur la frontière israélo-palestinienne, à l'est de la bande de Gaza, un barrage de puits. Il faut pomper l'eau salée avant qu'elle n'atteigne le territoire palestinien. Baisser le niveau du côté israélien réduirait ainsi la salinité de l'aquifère sous la bande de Gaza. « Le scénario semble réaliste », confirme M. Nastev. Il pense qu’il « faudrait, bien sûr, jouer avec le débit des puits pour garder l'équilibre, sinon on peut facilement aggraver les choses. De plus, les modèles numériques utilisés doivent subir l'épreuve du terrain. » D'après Avner Vengosh, qui a présenté l'étude à Seattle, « les eaux provenant d'Israël sont de toute façon trop salées pour être utilisables. Mais il serait judicieux de profiter de ces puits frontaliers pour en dessaler l'eau et faire ainsi d'une pierre deux coups. » (The Palestinians, an Analysis of the Israeli-Palestinian conflict and CA/ICCO policy guidelines for the period 1996-2000, Christian aid, Icco, Netherlands)

A Gaza, la superficie territoriale (400 km2) est petite et les précipitations sont faibles. On estime que seulement 35 millions de m³ d’eau pénètrent le sol pour gagner la nappe phréatique. Vu l'accroissement de la population (de 50.000 personnes avant 1948, elle est passée à près d’un million aujourd'hui), cette nappe d'eau est surexploitée et 70% de ses ressources sont endommagées. Les Israéliens pompent de façon trop importante près de la bande de Gaza et assèchent les puits palestiniens où l'eau disponible est saumâtre et désormais polluée. De plus, il n'existe pas de rivière dans la bande de Gaza mais seulement un wadi (oued) qui rassemblait les eaux de plusieurs wadis dans la région. Les Israéliens ont établi de petites digues sur ces wadis et la seule eau qui coule désormais dans le wadi Gaza est celle usée et non recyclée de la ville de Gaza... 

La bande de Gaza a d'ores et déjà reçu un certain soutien international pour résoudre en partie la crise de l'eau (dessalement, importation d'eau et lutte contre la pollution). Les Israéliens refusent pour le moment de discuter d'une nouvelle répartition des sources d'eau de Cisjordanie et de la bande de Gaza (pour l'heure 80% des ressources sont orientés vers Israël, contre 20% pour les Palestiniens).

Revendications palestiniennes

Les Palestiniens revendiquent aujourd’hui 80% des ressources de l’aquifère des montagnes, en prétendant avoir un « droit moral » et « historique » sur ces eaux et affirment qu’Israël leur vole l’eau. Ils invoquent les principes de la législation internationale qui recommande un partage équitable des ressources transfrontalières. Pour appuyer leurs revendications, les Palestiniens présentent le fait que la consommation moyenne israélienne est de 300 m3/personne/an, tandis que leur consommation n’atteint pas les 75 m3.

Les puits creusés en Cisjordanie ne leur donnent accès qu’à 20% de cette nappe, qui s’étend des deux côtés de la frontière. Selon Israël, les revendications palestiniennes sont contraires aux lois internationales et elles priveraient l’Etat juif de 360 millions de m3 d’eau, soit une diminution de 20% des ressources actuellement disponibles. Une des craintes d’Israël est que les Arabes n’épuisent cette nappe comme dans la bande de Gaza. L’eau qui provient de ces territoires est très pure, avec une faible salinité et peu de bactéries. Pour Gershon Baskin, codirecteur du Centre de recherche et d’information israélo-palestinien (CRIIP), « le but n’est pas de partager l’eau mais de prendre conjointement de bonnes décisions de l’utilisation. Il faut un accord commun pour augmenter la production de l’eau ».

Les Palestiniens ont du retard sur le développement des ressources en eau. Déjà avant la création de l’Etat d’Israël les fermiers arabes n’avaient pas d’organisations ni de finances pour développer les ressources en eau et en conséquence l’aquifère montagneux n’était pas exploité. Avant 1948 peu de villages arabes palestiniens avaient développé des systèmes centralisés d’adduction d’eau. Sous l’administration jordanienne des Territoires de 1948 à 1967, rien n’a été réalisé, ou fort peu, dans cette direction, car des marécages recouvraient les régions de l’ouest et du nord-est où les eaux de l’aquifère s’écoulaient.

Depuis 67, Israël a creusé des puits dans les aquifères ouest et est pour fournir de l’eau aux implantations à l’intérieur de la Ligne verte. Bien que les chiffres ne soient pas officiels il est estimé que l’équivalent de 60 millions de m3 sont pompés annuellement pour les juifs établis dans les Territoires. Les Palestiniens étaient autorisés par l’Administration civile israélienne à pomper seulement le double de cette quantité pour les 2 millions de personnes.

Les Palestiniens prétendent, ainsi que certains experts israéliens en matière de droit international – comme le professeur Eyal Benvenisti de l’Université hébraïque de Jérusalem – que toute eau pompée dans les Territoires depuis 1967 pour la population civile israélienne de ces Territoires est faite en violation de la quatrième Convention de Genève (1949) et de La Haye (1907).

La législation internationale reconnaît le droit d’un pays à utiliser les eaux des ressources hydrauliques transfrontalières (rivières internationales, nappes souterraines). Par exemple les principales ressources en eau de la Syrie et de l’Irak proviennent de la Turquie, tandis que les sources du Nil se trouvent en amont de l’Egypte et les 2/3 de l’eau consommée en Israël viennent de l’extérieur de ses frontières de 1948.

En 2001, malgré la pénurie, Israël, par le biais de la Compagnie des eaux (Mekorot), a fourni à la bande de Gaza 4.5 millions de m3 et à la Cisjordanie 35 millions de m3. Les pays nantis en eaux comme la Syrie et le Liban ne leur en fournissent pas.

Israël exerce dans son pays, en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, une politique de gestion des ressources en eau, afin de protéger ces ressources, pour éviter la pollution des nappes, pour traiter les eaux usées et dans le but de rechercher de nouveaux approvisionnements.

Les accords d’Oslo, prévoyaient qu’Israël et l’AP subventionnent leurs citoyens. En réalité l’AP ne subventionne rien, ce qui fait que les Arabes palestiniens paient leur eau plus cher que les Israéliens.

Dans la bande de Gaza, depuis longtemps déjà, les ressources souterraines sont surexploitées (du temps de l’administration égyptienne avant 1967). La propagande arabe accuse Israël d’exploiter 90% de l’eau de Gaza, alors que la plupart des fermes israéliennes utilisent l’eau du réseau israélien. Déjà en 1985, à la Conférence Mondiale de Nairobi sur les femmes, ces chiffres avaient été présentés.

Les problèmes d’eau et les Accords d’Oslo

La question du problème de l’eau devait être réglée durant la période intérimaire, mais vu sa complexité elle a été reportée aux négociations finales. Israël qui utilise la plus grande partie de l’eau de la nappe phréatique des montagnes de Judée-Samarie, exige de garder ce contrôle de l’eau. En revanche l’AP refuse toute ingérence israélienne sur l’eau de l’aquifère montagneux.

Israël contrôle l’eau du Jourdain et des aquifères de la plaine côtière et de Judée-Samarie :

- 57% des eaux proviennent de l’extérieur des frontières de 1967: 35% de l’aquifère de la Cisjordanie (Judée-Samarie), 22% du plateau du Golan, ces eaux s’écoulant par gravitation vers le lac de Tibériade.

- Le reste des eaux d’Israël provient de son propre territoire.

En 1991, à Madrid, se déroulèrent les premières discussions sur l’eau du Moyen-Orient. Du côté israélien aucune concession territoriale ne peut être envisagée au détriment de pertes en eau du pays. L’année précédente la sécheresse avait grandement diminué les réserves en eau d’Israël et la capacité en eau était de 1,8 milliards de m3, avec une consommation domestique moyenne de 100 m3 par habitant. Les Palestiniens recevaient d’Israël 120 millions de m3 par an ; un tiers était utilisé pour les usages domestiques et le reste pour l’agriculture. A la fin de 1991, une conférence internationale en Turquie, devant traiter des problèmes de l’eau dans la région, a été torpillée par la Syrie. Les discussions multilatérales qui s’ensuivirent à Moscou en janvier 1992 ont été boycottées par les Syriens, les Jordaniens et les Palestiniens. Le processus de paix engagé à Madrid avait permis la mise sur pied d'un groupe de travail « Eau », qui a débuté ses travaux en 92 à l'issue de la Conférence de Moscou.

Dans le but de résoudre les problèmes de l’eau, l’Institut polytechnique de Haïfa, le Technion, s’est doté d’un Centre de Recherche sur l’Eau (1993) reconnu mondialement. En 1996 fut également crée le Laboratoire Rabin de dessalement.

L’accord de Taba, dit aussi Oslo II, signé à Washington le 28 septembre 1995, a reporté aux négociations finales la question de l’eau. Ces négociations devaient déboucher sur un accord avant le 13 septembre 2000. Cet accord précise « qu’Israël reconnaît les droits des Palestiniens sur l’eau en Cisjordanie » (article 40). Cet accord aurait dû permettre d'aboutir aujourd'hui au règlement de la majeure partie du conflit israélo-palestinien. A l'époque, il avait été décidé qu'un certain nombre de dossiers, parmi lesquels celui des réfugiés, mais aussi celui de l'eau, seraient négociés dans le cadre du statut final de l'autonomie.

En 1995, à Zichron Yaacob, près de 150 négociateurs d’Israël et de l’OLP s’étaient réunis pour conclure un accord sur l’extension de l’autonomie en Cisjordanie et le problème de l’eau fut évoqué. Shimon Pérès, alors ministre des Affaires étrangères a exigé qu’Israël ait le contrôle de l’or bleu en Cisjordanie : « Dans ce domaine, il ne peut y avoir qu’un seul chef d’orchestre », a-t-il affirmé. Fayçal Husseini a réagi en proclamant : « C’est dégoûtant. Ce partage injuste permet à Israël de se réserver 85% des réserves de Cisjordanie ». Pour lui l’AP devait obtenir le contrôle des terres et du sous-sol.

Pour gérer l’eau des Israéliens et des Palestiniens il faudrait créer un contrôle conjoint des eaux où les deux peuples aient des accès et des droits égaux sur l’eau en l’utilisant chacun suivant ses besoins. L’accord du Caire de 1994 a abouti à la création d’un directorat palestinien de l’eau dont la seule latitude est de superviser les puits situés dans les zones autonomes et de négocier avec Israël la part des ressources hydrauliques qui lui reviennent.

Un premier pas fut franchi en 1995 quand le ministre israélien de l’Agriculture Yaacob Tzur et le représentant palestinien Ahmed Qoreia ont signé un accord reconnaissant le droit à l’eau aux Palestiniens des Territoires : « Ceci sera négocié  et établi dans le Statut permanent concernant les différentes sources d’eau ».

Selon la Banque mondiale, 90% de l’eau de Cisjordanie sont utilisés au profit d’Israël, les Palestiniens quant à eux ne disposant que des 10% restants. Le gouvernement israélien a promis d’augmenter sérieusement la quantité d’eau allouée aux Palestiniens sur une période de deux ans.

Israël a demandé la mise en place d’une banque de données régionales sur les ressources en eau à laquelle pourraient avoir accès toutes les parties ainsi que les organisations internationales. Pour tenter de résoudre le problème de l’eau il faudra prendre en compte, non seulement l’hydrographie, la géologie et la géographie, mais aussi les besoins des sociétés.

Des projets furent discutés, tel que la création conjointe israélo-palestinienne de cinq grandes usines de dessalement ou d’une centrale nucléaire de dessalement avec le financement des USA, du Japon et de l’Europe. Ce dernier projet a connu une opposition en Israël.

Depuis la création de l’État d’Israël il existe de fortes tensions entre Juifs et Arabes concernant l’eau. Entre 1953 en 1955, le Jourdain fut une source de conflit. Des tensions furent enregistrées en 1960 à la construction de la Conduite nationale. Le sommet de la Ligue arabe voulut faire cesser le projet israélien. En novembre 1964, l’aviation et l’infanterie israéliennes détruisent les bulldozers et autres équipements syriens utilisés à détourner les eaux du Jourdain. En 1987, Jordaniens et Syriens décidèrent d’un projet de partage des eaux du Yarmouk.

Le secteur agricole palestinien représente 15% du produit national brut et emploie 1/5 de la population active. 6% des terres arables sont irriguées. Le secteur de la construction représente 25% du PNB en utilisant 13% des ressources en eau. Il faut réorienter l’économie palestinienne vers l’industrie avec l’aide des banques mondiales.

Avant l’Intifada d’El-Aqsa, le problème de l’eau avec celui de Jérusalem et des réfugiés palestiniens restaient les obstacles majeurs en vue d’un statut final des négociations du processus de paix.

Depuis cette Intifada, malgré la sécheresse et une grave pénurie d’eau, les Israéliens n’ont pas diminué la quantité d’eau transférée annuellement à l’Autorité palestinienne. Israël a rempli toutes ses obligations prévues dans l’accord intérimaire israélo-palestinien, selon les accords d’Oslo. La juridiction sur l’eau a été transférée à l’Autorité palestinienne intégralement et dans les délais prévus. Israël essaie également de remplir ses obligations envers la Jordanie.

L’eau ne sera peut-être pas un obstacle à la paix mais elle peut-être un argument de guerre et c’est parce qu’il y a un conflit qu’elle est instrumentalisée.

Exploitation annuelle des ressources en eau

 

        Cisjordanie et Bande de
        Gaza

Israël

Jordanie

 

Palestiniens

Israéliens

 

 

Usage domestique total (millions m³ /an)

53

13

520

180

Agriculture (millions m³/an)

152

56

1200

660

Industrie (millions m³/an)

7

-

120

43

TOTAL (millions m³/an)

212

71

1840

880

Usage domestique par habitant (litres/jour)

22

108

110

52

Consommation  totale  par  habitant
              (litres/jour)

114

592

400

256

(Source: Palestine Hydrology Group datas 1996, dans “The Palestinians, an Analysis of the Israeli-Palestinian conflict” and “CA/ICCO policy guidelines for the period 1996-2000”, Christian aid, Icco, Netherlands). Ce tableau nous montre que suivant les sources, palestiniennes, israéliennes ou autres, les chiffres varient en fonction des tendances politiques. Le tableau ci-dessus prétend que les Juifs des Territoires utilisent 592 litres/jour tandis qu’en Israël la consommation est moindre : 400 litres/jour.

Une politique de gestion à long terme a toujours été écartée au profit de matières qui paraissent politiquement plus intéressantes à court terme. Il est caractéristique à ce sujet que le Commissaire chargé de l'eau, Shimon Tal, a voulu imposer une restriction importante du quota d'eau attribué au secteur agricole israélien. Les opposants ont considéré cela comme un arrêt de mort de l'agriculture et la fin de « l'idéal sioniste » des déserts fleuris. Le Conseil National de Sécurité israélien n’est pas encore arrivé à trouver une solution au problème du manque d'eau. Les insuffisances de stocks sont toujours plus importantes et il est à craindre que certaines mesures n’arrivent trop tard. Le projet de construction d'installations de traitement des eaux prendra environ deux années et ne pourra pas résoudre la disette, pas plus que l'importation d'eau de Turquie.

« Le véritable défi auquel la politique est confrontée n'est pas l'événement de surface, mais bien les problèmes et défis plus profonds tels que la stabilisation de la croissance de la population et la révision de la manière avec laquelle le problème de l'eau sera résolu. Des techniques d'irrigation améliorées, recyclage et dessalement, ou consommation rationnelle de l'eau ne sont que des solutions à court terme que politiciens et ingénieurs du Moyen-Orient conviennent d'attaquer si l'insuffisance d'eau devient à nouveau péniblement ressentie. C'est seulement quand tous les pays de la région prendront en main le problème imminent du manque d'eau qu'une catastrophe peut être évitée. Et donc, plus que par de grands travaux d'infrastructure, c'est par la coopération au développement et la stabilité économique et sociale que seront remplies les conditions nécessaires pour permettre aux pays de la région de mieux s'adapter aux conséquences du déficit croissant en eau. Provisoirement, nous n'en sommes pas là. Mais le temps presse, et chaque jour qui passe sans solution à la crise est un jour de plus de perdu pour l'eau. Rappelons les mots de John Friedman, conseiller du précédent Premier Ministre Ehud Barak, à la Conférence Mondiale sur l'eau en mars 2000 à La Haye: "Une solution régionale au problème de l'eau doit intervenir au plus tôt. Nous devons conclure la paix dans les prochains mois, sinon nous serons des criminels". Plus d'une année après nous en sommes toujours à attendre ». (Stefan Deconinck, licencié en Histoire et Relations Internationales. Attaché en qualité de collaborateur scientifique au Centre pour le Développement Durable (CDO) de l'Université de Gand (Belgique), il s’est spécialisé dans la problématique de l'eau au Moyen-Orient). (http://cdonet.rug.ac.be; http://waternet.rug.ac.be).

                                                                                                                                                                                                                                    Loïc Le Méhauté

HISTOIRE

17 mai 1977 à 1982.

Du « Séisme politique » à l’opération « Paix en Galilée ».

Aux élections le 17 mai, le Herout, parti de droite, remplace le parti Travailliste au pouvoir depuis la fondation de l’Etat. Menahem Bégin est élu premier ministre, lui l’ancien chef de l’Irgoun. C’est le grand bouleversement. Il veille à garder la modération, rassurant l’opinion nationale et internationale. Simha Erlich le nouveau ministre des finances prône la libéralisation des changes dès octobre. Ce bouleversement économique amènera vite une inflation galopante. M.Bégin pense aux implantations en Judée et Samarie mais s’active pour une paix avec les Etats arabes , auprès du président Carter des U.S.A. et Ceaucescu de Roumanie, ami d’Anouar El-Sadate.Moshé Dayan, ministre des Affaires étrangères se rend à Londres, au Maroc, pour essayer d’établir des contacts avec l’Egypte. Sadate veut des négociations directes, sans les U.S.A. De son côté le président Sadate annonce en novembre à son Parlement qu’il est prêt à venir à la Knesset à Jérusalem. M.Bégin, par l’entremise d’un ami journaliste, lui répond : « Je suis prêt à rencontrer le président Sadate, s’il le veut à Jérusalem, à la Knesset. Si ce n’est pas une parole en l’air, je salue cette initiative, et je  répète ce que j’avais dit lorsque je suis entré en fonctions, je suis disposé à le rencontrer partout, même au Caire, pour négocier une paix réelle au Proche -Orient ».

 Témoignage de Shlomo Nakdimon et de Dan Patir, Tel-Aviv, 1995.

Et les choses se précipitent à travers les différents discours de Sadate et de Bégin, puis ce dernier envoie une invitation par l’intermédiaire des Américains. Le 19 novembre, Anouar el.Sadate atterrit à Tel-Aviv, c’est la première fois qu’un avion égyptien se pose en Israël.

A la Knesset, Sadate prononce un discours combatif pour une paix générale, y compris avec les Palestiniens. En Israël c’est l’euphorie, mais il y a encore tout à faire. Bégin propose un projet d’autonomie pour les Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza qui pourront gérer leurs affaires économiques et civiles ; Israël sera responsable de la sécurité. Les négociations continueront avec deux commissions : une pour les affaires politiques avec Moshé Dayan et une pour les affaires militaires avec Abdul Ghani Gamasy.

Les négociations seront très difficiles : le 25 décembre Menahem Bégin, accompagné de M.Dayan et de E.Weizman, rencontre Sadate à Ismaïlia. Ce dernier est très mécontent du refus de Bégin de discuter des implantations dans le Sinaï et de la question palestinienne. En Israël, la gauche et d’anciens héros de la guerre de Kippour écrivent à Bégin et bientôt le mouvement « La Paix maintenant » se renforce.

Peu à peu les pays arabes s’éloignent de l’Egypte et, le 4 janvier 1978, le représentant de l’OLP à Londres Saïd Hammami  est assassiné par un membre de l’organisation d’Abou Nidal, le considérant comme « traître ».

 Le 23 janvier, c’est l’inauguration de la ville de Katzrin sur le Golan.

Le 11 mars, un groupe du Fatah venant du Liban, capture un autobus en faisant 35 morts ; 9 terroristes sont tués et 2 capturés. Le 15 mars, Tsahal entre au sud-Liban : c’est l’opération « Litani », qui vise à détruire des bases terroristes. Tsahal se retire après avoir confié une large bande le long de la frontière aux chrétiens libanais et à la force de la FINUL créée par le Conseil de Sécurité.

Le 11 avril, Itzhak Navon est élu cinquième président d’Israël.

Le mouvement « La Paix maintenant » s’élargit et 100.000 personnes se rassemblent à Tel-Aviv avant le départ de Menahem Bégin le 5 septembre pour Camp David, où Jimmy.Carter a convoqué Egyptiens et Israéliens par peur d’une détérioration de la situation. Le 17 septembre, ce sera le premier accord entre Israël et un pays arabe. A la Knesset, Bégin conclut, après la présentation du texte des accords : « La nation subit les contractions d’une naissance. Toute grande chose naît dans la douleur…Pour cette paix, nous avons sacrifié douze mille de nos fils, parmi les meilleurs, au cours de cinq guerres .Nous voulons mettre fin à cela. Adoptons la résolution et commençons à discuter ».

                                                                                                                     Cité par Arié Naor, Bégin Bashilton, p.182.

Le 10 décembre, Menahem Bégin et Anouar el.Sadate reçoivent le prix Nobel de la paix.

Après de difficiles tractations, l’accord de paix entre l’Egypte et Israël est signé à Camp David le 26 mars 1979.

Yosef Burg, ministre de l’Intérieur, est nommé à la tête de la délégation israélienne aux pourparlers avec les Egyptiens sur l’autonomie palestinienne. Mais les quinze rencontres, boycottées par l’OLP, n’aboutissent à rien.

Au gouvernement, Bégin se heurte à de nombreux problèmes ; lui-même dit : «Le gouvernement fonctionne mal ».  Avec Ariel Sharon, ils développent leur politique de colonisation en Cisjordanie mais E.Weizman, tout en laissant faire, dit à Bégin :

Monsieur le Premier ministre, les implantations ne sont pas l’élément principal de notre sécurité !

- Quel est cet élément ?

- La paix, la puissance de notre armée et la fibre morale de notre nation ».

                                                                                                        E .Weizman, The battle for peace, p.229-230

M.Dayan, du même avis, démissionne le 21 octobre et E.Weizman le suivra le 24 mars 1980 et fera alliance avec le parti travailliste. Le journaliste Yaacov Talmon dans Haaretz publie une lettre ouverte à M.Bégin dans le même sens, alors qu’au même moment des tractations d’armes se font entre Israël et le sud-Liban chrétien avec Bachir Gemayel.

En même temps le traité de paix est appliqué : le 27 mai 1979.Sadate est à Beershéva et la frontière entre l’Egypte et Israël est ouverte.

Le 2 mai 1.980 des colons se rendant à la prière au tombeau des Patriarches à Hébron sont attaqués. Le 2 juin en réponse un groupe terroriste juif dirigé par le rabbin Kahana est découvert, attentant à la vie des maires de Naplouse, Ramallah et El Bireh. Les deux sont grièvement blessés.

Le 30 juin, le Conseil de sécurité de l’ONU adopte la résolution 476 réaffirmant que l’acquisition de territoires par la force est inadmissible.

Le 30 juillet la Knesset approuve la « loi de Jérusalem capitale d’Israël », qui provoque de vives réactions dans le monde.

Le 11 janvier 1981, le ministre des Finances démissionne, Y.Horowitz est remplacé par Y.Aridor. La bourse de Tel-Aviv s’effondre, l’inflation atteint les 100%.

Le 19 février la période électorale débute, les élections auront lieu le 30 juin. S. Peres, réélu à la tête du parti travailliste, a plusieurs atouts : la situation économique déplorable, les grèves des universitaires, le piétinement du processus de paix, la démission de Y.Yadin de la vie politique. Mais M.Bégin et son parti s’activent à boycotter les meetings des Travaillistes avec leur slogan : « Voter pour S.Peres, c’est voter pour un Etat palestinien dirigé par Y.Arafat ».

En avril, les Syriens bombardent des Chrétiens libanais et Israël attaque les Syriens qui soutiennent les terroristes. C’est la guerre des missiles à la frontière libanaise et le 7 juin 1981 Israël détruit le réacteur nucléaire irakien. S.Peres en condamnant l’opération perd de nombreux électeurs et M.Bégin et ses adeptes deviennent de plus en plus violents. Le 30 juin, le Likoud obtient 48 sièges et le parti travailliste 47. A.Sharon sera nommé ministre de la Défense.

La frontière israélo-libanaise s’enflamme. En Israël, le professeur Zeev Sternhell écrit une lettre ouverte à Menahem Bégin : « L’ancien commandant de l’Irgoun est Premier ministre et le ministre des Affaires étrangères a, dans le passé, dirigé le Groupe Stern…Votre politique est fondée sur la croyance naïve en la force de la terreur pour régler les problèmes du sionisme…Un petit pays courageux et pionnier apparaît à présent aux yeux de ses meilleurs amis comme une entité bizarre, parfois déséquilibrée, parfois effrayante… ».Bégin répond le lendemain : « Les gouvernements travaillistes avaient une politique de représailles systématiques contre les populations civiles arabes, utilisant l’armée de l’air contre les infrastructures civiles. Monsieur Sternhell, avez-vous, à l’époque, jamais protesté face aux massacres des populations innocentes ? ».

                                                                                                                                                 Haaretz, 3 août 1981.

Le 6 octobre 1981, lors de la parade fêtant le huitième anniversaire de la guerre de Kippour, Anouar El-Sadate est assassiné. A son enterrement, à côté des dirigeants occidentaux et américain, seul le président du Soudan est là.

Hosni Moubarak qui, ce jour là, a échappé de justesse à la mort, devient le Premier ministre et, avec M .Bégin, ils se promettent que les engagements seront tenus. Le Sinaï sera évacué le 26 avril 1982 comme prévu.

En Cisjordanie et à Gaza, Ariel.Sharon met en place une administration militaire dont l’objectif sera de créer des responsables locaux à la place de l’OLP.

Le 14 décembre 1981, la Knesset vote  « la loi du Golan »selon laquelle le Golan fait partie du territoire israélien.

Pendant ces cinq années de pourparlers intenses, la vie continue en Israël.

En mai 1977, le premier centre de tennis est inauguré à Ramat ha Sharon. En juin ; un bateau vietnamien transportant des réfugiés est recueilli en Israël.

 En juillet 1977, les Juifs religieux protestent contre la circulation routière le samedi.

 En décembre, plus de 120.000 personnes se réunissent pour une marche en faveur de la paix. En mai 1978, Beit ha- Tfoutsot,  le musée d’histoire juive, est inauguré à Tel-Aviv. Le 7 novembre, pour la première fois en Israël, les maires sont élus au suffrage direct. Le 8 décembre, décès de Golda Meïr à 80 ans.

Le 16 janvier 1979, un vieux vendeur de journaux découvre une voiture piégée à Jérusalem et elle est désamorcée. Le 22 janvier, l’organisateur des massacres des athlètes de Munich en 1972 est tué. En février, le ministre des Finances annonce une diminution des subventions pour les produits alimentaires.

Le 26 mars, vente de plus d’un million de timbres émis pour la signature de l’accord de paix avec l’Egypte. Le 29 avril, sept prisonniers de Sion sont libérés par l’URSS. Pour la deuxième fois, Israël remporte un prix à l’Eurovision et l’équipe nationale de basket-ball remporte la médaille d’argent au championnat d’Europe.

En janvier 1980 ; les prix augmentent de 30%. Le 2 février, Hana Rovina, une très grande actrice et cofondatrice du théâtre Habima  meurt à90 ans. Le 29 février, c’est Y.Allon qui décède à 62 ans.

L’année 1.981 est marquée par les décès de grands poètes : Yonatan Ratosh et Uri Grünberg. Une nouvelle fois, l’équipe de basket-ball gagne la Coupe européenne le 26 mars. En août ; les religieux manifestent contre les fouilles archéologiques près du Kotel (le Mur occidental, dit aussi “Mur des Lamentations”). La Haute Cour de justice ne leur donne pas gain de cause. Le 16 octobre, mort de Moshé Dayan. Le 29 octobre, un musicien indien, Zubin Mehta, est nommé directeur à vie de l’orchestre philharmonique d’Israël.

Cécile Pilverdier

« Ville trois fois sainte »

« Ville trois fois sainte », « ville sainte des trois grandes religions », « ville des trois monothéismes »… Autant de formules répétées mécaniquement, mais qui ne résistent pas longtemps à l’examen dès qu’on entreprend d’en vérifier le contenu.

Pour les juifs, Jérusalem est le lieu que Dieu a choisi pour y faire résider son Nom (Dt 12,11 ; 1R 8,16 ; 14,21 etc.). Dans la prière liturgique juive, Jérusalem est d’abord le mont du temple et, par extension, la ville elle-même, dont les limites n’ont cessé de se déplacer depuis David.

Pour les chrétiens, Jérusalem est, en outre, le lieu où le juif Jésus est monté en pèlerinage, a prié, enseigné, avant d’y célébrer sa dernière pâque, d’être crucifié à proximité de ses remparts et, selon la foi chrétienne, de ressusciter. C’est le lieu de naissance de la communauté chrétienne, d’où s’est diffusé l’Évangile.

Pour les musulmans, ce que les juifs et les chrétiens reconnaissent comme le mont du temple est le lieu d’où Mahomet est monté au ciel. Que la tradition musulmane fasse mémoire de cet événement à cet endroit précis n’est évidemment pas une pure coïncidence, mais il faut souligner que, pour l’islam, la sainteté de Jérusalem ne s’inscrit pas dans la continuité des traditions religieuses du judaïsme et du christianisme : au contraire, elle s’y substitue, se considérant comme la seule authentique. La position officielle de l’autorité palestinienne est qu’il n’y a jamais eu de temple juif à Jérusalem. Yasser Arafat précise même que le temple de Salomon se trouvait au Yémen-sud.

Entre juifs et musulmans, il y a au moins un point commun : pour les uns et les autres, le lieu saint par excellence est celui que les uns appellent le mont du temple et les autres l’esplanade des mosquées. Quant à la tradition chrétienne, elle vénère en priorité, non le mont du temple, avec lequel elle entretient depuis la fin du premier siècle une relation ambiguë, mais le lieu de la crucifixion et le tombeau de Jésus, qui se situent hors des limites de la ville telles qu’elles existaient au début de notre ère ; ce que souligne l’Épître aux Hébreux en commentant la formule « hors du camp » (He 13,11-13).

Sur le site du temple, seuls les musulmans se reconnaissent le droit de prier. Les juifs religieux s’abstiennent d’ailleurs d’y accéder. Ils peuvent s’en approcher en venant prier au pied du mur occidental du temple. Quant aux chrétiens, ils ne peuvent prier publiquement, ni devant le mur, ni, à plus forte raison, sur l’esplanade.

« Ville trois fois sainte », « ville sainte des trois monothéismes » : formules commodes et en partie vraies, au moins du point de vue de la sociologie religieuse et des agences de voyages ; mais très approximatives théologiquement, puisqu’elles entretiennent l’idée d’un pôle de convergence et d’unité, ce que Jérusalem est bien loin d’être, sinon sur un horizon eschatologique.

                                                                                                                                                                                                                                                                 Michel Remaud

L’opération ‘jours de repentance’

Suite aux pressions internationales, Ariel Sharon a demandé le retrait des troupes israéliennes de la bande de Gaza le 16 octobre alors que le Ramadan commençait. L’opération ‘jours de repentance’ avait duré 17 jours. Le bilan est lourd : 129 palestiniens, dont 42 civils, ont été tués, il y a plus de 500 blessés et environ 90 maisons ont été démolies par Tsahal.

Derrière ces chiffres, il y a des drames humains et des vies définitivement brisées. On peut se poser la question de savoir si cette opération était justifiée mais l’on ne peut en aucun cas parler, comme l’ont fait de nombreux médias, de représailles israéliennes suite à la mort de 2 enfants à Sderot par des tirs de roquettes. Cette opération n’a pas été lancée pour venger la mort de qui que ce soit mais pour faire cesser les tirs de roquettes sur la petite ville israélienne fondée en 1955 pour les émigrés juifs d’Afrique du Nord. Cette localité de 24 000 habitants – située à quelques centaines mètres de la Bande de Gaza et qui n’est pas une implantation – vit depuis le 15 avril 2001, date de la première roquette lancée, un cauchemar permanent. Israël aura attendu que plus de 400 roquettes  soient tombées pour enfin réagir. Le but de cette opération fut de faire cesser ces tirs. A plusieurs reprises, les dirigeants palestiniens s’étaient engagés auprès des Israéliens et des Américains à faire cesser ces attaques. Rien n’a été fait.

Personne ne se fait d’illusion : l’efficacité d’une telle opération est limitée. Les Palestiniens de Jebalya sont fatigués des incursions israéliennes et payent un prix bien lourd au Hamas. De plus en plus de voix s’élèvent pour que cessent ces tirs.

Le 5 octobre dernier, une fille de 13 ans a été tuée à Rafiah alors qu’elle se rendait à l’école. Elle a été atteinte de 20 balles dans diverses parties de son corps. Deux versions sont avancées pour expliquer les faits. Les soldats présents accusent leur officier d’avoir mis son arme en position automatique et vidé son chargeur à bout portant sur la fillette déjà morte. L’officier récuse cette version et explique que Imane Al-Hams a été tuée par des tirs croisés de soldats. Une seule certitude, l’officier a donné l’ordre d’ouvrir le feu. Dans la presse palestinienne, on a tout de suite parlé du juif qui tue les enfants palestiniens. Dans l’armée israélienne, il n’y a pas de que des juifs, il y aussi des bédouins, des chrétiens, des druzes et des musulmans. Dans ce cas précis, le capitaine n’est justement pas juif (la presse ne peut pas, pour l’heure, publier son identité).

Du 29 septembre au 13 octobre, 30 enfants palestiniens ont été tués par Tsahal, soit deux enfants par jour. Ce chiffre est effrayant. Toutes les justifications comme le fait que les activistes palestiniens utilisent les enfants comme bouclier humain (ce qui est malheureusement vrai) n’expliquent pas tout.

Il y a un mythe répandu dans la société israélienne qui consiste à penser et à dire - et donc à se persuader -  que Tsahal est l’armée la plus morale du monde. Toute armée dans la situation où se trouve Tsahal n’agirait sans doute pas mieux. Elle n’est pas ni plus ni moins morale qu’une autre armée occidentale mais elle n’est pas, comme certains l’affirment, une armée composée de soldats qui auraient soif de vengeance et qui auraient perdu tout repère éthique. Un jeune militaire rencontré il y a quelques semaines et qui fait son service dans les territoires me disait qu’il avait honte parfois de son comportement  et qu’il se garde bien, quand il rentre dans sa famille à Tel Aviv, de raconter à ses parents ce que lui et ses camarades font.

La différence entre les Palestiniens et les Israéliens est que ces derniers sont capables de reconnaître leurs erreurs. Il y a quelques mois, des soldats qui ont servi  à Hébron ont réalisé une exposition de photos intitulée ‘on brise le silence’. Ils ont eu le courage de faire leur auto-crique et de raconter comment ils se sont comportés face aux Palestiniens. On en a même fait une émission de télévision où certains racontaient, par exemple, comment par ennui, ils tiraient sur les pneus des voitures ou comment un jour un des leurs a lancé une grenade dans la cour d’une école, histoire ‘de se détendre’. Coïncidence : presqu’au même moment, la télévision française donnait la parole à d’anciens combattants d’Algérie. Ils n’auraient jamais pu apporter leur témoignage à la télévision française il y a quarante-cinq ans, au moment des faits. Cela n’excuse rien, mais conduit à nuancer sérieusement les jugements.

                                                                                                                                                     Jean-Marie Allafort

Au pays de la rue de Jonas

Comme dans tous les pays du monde, les noms des voies publiques israéliennes honorent la mémoire de personnalités civiles, artistiques, littéraires, scientifiques, militaires, qui ont marqué d’une manière ou d’une autre la vie du pays. Rien d’étonnant, par conséquent, à ce qu’on trouve en Israël des rues rappelant les fondateurs de l’État, les pères du sionisme moderne ou les artisans de la résurrection de la langue hébraïque : Herzl,  Ben Gourion, Weizmann,  Ben Yehuda, etc. Madame Renée Neher a écrit un petit livre passionnant intitulé Une rue, un nom, la mémoire d'Israël (Jérusalem, Erez, 1997), composé de notices historiques sur les personnalités dont les principales artères des villes israéliennes portent les noms. Le touriste, l’Israélien de fraîche date ou l’usager habituel de l’autobus ne sait pas toujours qui étaient Arlozorov, Tchernichowsky ou Ahad Ha`am, ni pourquoi la voirie perpétue leur mémoire.

Le plus inattendu, pour le nouvel arrivant, est de lire sur les plaques des noms plus ou moins familiers que l’on est habitué à rencontrer dans de tout autres contextes.

De Rébecca et Rachel à Zorobabel, en passant par Josué, Jonas et Cyrus, ce sont d’abord les grandes figures bibliques. Il n’y a pas à Jérusalem de rue Abraham, mais la plupart des fils de Jacob ont droit à leur plaque, les pères des tribus étant groupés à proximité de la route de Bethléem.

À quelques centaines de mètres de là, ce sont les sages de l’époque de la Mishna : Yohanan ben Zaccaï, Shimon ben Gamliel, Shimon bar Yohaï, Éliézer le Grand… Les deux inséparables que sont Hillel et Shammaï ont donné leurs noms à deux rues parallèles situées dans le centre. En revanche, les rues portant les noms des rois d’Israël et de Juda ne sont pas groupées dans un quartier particulier : si les rues David et Salomon traversent la partie centrale de la ville, celle du roi Ezéchias occupe une position plus excentrique. À l’inverse, il y a aussi, si l’on ose dire, des « regroupements familiaux » : la rue de la reine Salomé Alexandra (Shlomtsion ha-malka) se trouve entre celle qui porte le nom de son époux Alexandre Jannée et celle qui est dédiée à son frère Shimon ben Shétah, l’un des artisans de la réconciliation entre le parti pharisien et la monarchie asmonéenne au premier siècle avant notre ère.

Élisée, Isaïe, Jérémie, Ézéchiel, Amos et la plupart des prophètes ont chacun sa rue, ce qui n’empêche pas qu’il y ait aussi une rue des Prophètes, de même qu’il y a une rue des Tribus d’Israël. Les grands noms du judaïsme médiéval (Rachi, Ibn Ezra, Maïmonide, Abravanel et d’autres) peuvent eux aussi figurer dans des adresses postales.

Le privilège de donner son nom à une rue est évidemment fonction du souvenir qu’on a laissé dans l’histoire : si le roi Hérode-Agrippa 1er, qui jouit de la faveur de la tradition malgré la brièveté de son règne (les années 41-44 de notre ère), est immortalisé par une des voies les plus animées de Jérusalem, à proximité du marché du Mahané-Yehuda, c’est en vain qu’on chercherait dans les index des plans de la ville les noms d’Hérode le Grand, d’Archélaüs ou d’Antipas.

D’autres voies sont désignées en référence à des épisodes bibliques : la rue de Suse, près de la poste centrale de Jérusalem, rappelle l’histoire d’Esther et de Mardochée, et la rue Méa-Shearim, qui dessert le quartier du même nom, ne signifie pas « les cent portes », comme on le dit parfois à tort, mais le centuple, en référence à Genèse 26,12 : « Isaac fit des semailles dans ce pays et moissonna au centuple (méa shearim) cette année-là. ».

Il arrive aussi que des rues soient désignées par des appellations bibliques, mais en référence à des événements contemporains : la rue des Ailes d’Aigles (kan’fei nesharim) est ainsi nommée à partir du verset 19,4 de l’Exode (« Je vous ai portés sur des ailes d’aigles »), mais elle veut rappeler l’opération, désignée alors par la même formule, du transfert des Juifs du Yémen dans le jeune État d’Israël en 1949-1950.

D’autres rues reprennent purement et simplement des noms désignant dans l’Écriture des lieux qui se trouvent aujourd’hui englobés dans la ville moderne, telle la rue Emeq-Refaïm, la « Vallée des Rephaïtes», dont il est déjà question en Josué 15,8.

Ces appellations, cela va sans dire, ne sont classées selon aucune chronologie : la rue Agrippa débouche dans celle du roi George V, et la rue Yéhuda, du nom du quatrième des fils de Jacob, rejoint celle du Général Pierre Kœnig — un des très rares français non juifs a être ainsi honorés à Jérusalem.

Arpenter les rues de la ville, c’est parcourir plusieurs millénaires d’histoire, pourvu qu’on prenne la peine de lire les plaques.

                                                                                                                                                                                                                                                                 Michel Remaud

Flashes d’espoir : pour la vie

Tout drame peut devenir « moteur » de vie. C’est vrai partout, en Israël en particulier. Refuser de baisser les bras lorsque la mort frappe, mais, au contraire, désirer et travailler pour que celui dont la vie a été coupée puisse apporter pourtant quelque chose à la société.

Nous connaissons plusieurs « histoires » où la famille en deuil a créé un nouveau projet au nom du disparu, pour faire du bien, pour donner vie à d’autres.

En voici quelques exemples.

A – Guilgoulon  ou les « roues » de Guil

Guil Badihi, officier, a été tué dans son tank à Ramallah le 13 mars 2002 lors d’une opération militaire de secours. Fils aîné de Yaël et Avner Badihi, premier petit fils, premier arrière petit fils. A 22 ans déjà il était particulièrement attentif aux autres, toujours prêt à aider et écouter ses soldats en particulier.

Pour Guil, ses parents décident en mars 2004 de créer au sein de l’association « Etgarim » (défis) un nouveau projet : permettre à des personnes handicapées de naissance ou par accident, à des blessés de l’armée et du terrorisme, de faire des excursions dans la nature, hors des chemins et des routes. Ils découvrent en France un artisan ayant inventé et fabriqué une chaise roulante à une roue, portée par deux porteurs, l’un devant l’autre derrière, permettant à l’handicapé de sortir des routes et de faire du tout terrain. Yaël et Avner se proposent de faire venir de France ces « guilgoulons » pour les mettre à disposition des handicapés.

Déjà l’association « Etgarim » fondée par un handicapé blessé pendant la guerre de 6 jours permettait aux enfants, jeunes et adultes de faire toutes sortes de sport : natation, montagne, danses.(www.etgarim.org).

Des soirées sont organisées pour présenter le projet et proposer des souscriptions. Fin 2004, le projet se concrétise : cinq guilgoulons sont déjà arrivés en Israël et les contributions des amis permettent la commande de dix autres. Plusieurs instances sont déjà intéressées par ce projet :

- le ministère de l’Education, pour les handicapés,

-Yad Sarah, une organisation humanitaire de prêt de matériel médical,

- une société organisant des tours archéologiques.

Selon les besoins et les demandes, les « guilgoulons » seront prêtés à des familles ou à des organisations, écoles, sociétés, pour telle ou telle occasion, excursions, cours, camp, etc…

Et le projet n’en est qu’à ses débuts !

Le site :( www.gilbadihi.com)

P-S : En France, cette chaise à une roue est connue sous le nom de « joëlette » du nom du jeune handicapé pour lequel elle a été inventée et fabriquée.

                                                                                                                                                                                                                                                     Antoinette Brémond

B – La fondation « Malki »

Kinésithérapeute de métier, j’ai soigné pendant plusieurs années un bébé très handicapé qui, vers 4 ans, est entré dans un jardin d’enfants spécialisé. Le 9 août 2001, Malki, sa grande sœur de 15 ans, était tuée avec sa meilleure amie dans l’attentat du restaurant « Sbarro » à Jérusalem. En 2003, soignant une jeune fille très handicapée, j’apprenais par la Maman de celle-ci qu’à « Yad Sarah » existait une fondation créée par les parents de Malki au nom de leur fille assassinée et mettant toute une réserve de matériel à la disposition des familles d’enfants handicapés. 

C – Les arbres

Et plus simplement, dans toutes les forêts d’Israël, des plaques mentionnent les noms d’êtres chers disparus. La coutume est de planter des arbres comme signe de la vie qui continue après la mort. Je peux dire ici combien j’ai été touchée par le geste d’une amie, lorsqu’à mon retour des obsèques de ma mère elle m’a remis un texte attestant qu’un arbre avait été planté à sa mémoire.

                                                                                                                                                                                                                                                                 Cécile Pilverdier

 

No’omi Shémer

Le 26 juin dernier nous quittait No’omi pour “un monde meilleur”, où l’on peut chanter sans limite.

Elle eut droit à des funérailles nationales, malgré sa demande de faire les choses modestement et sans discours (mais elle avait prévu quatre de ses chants), elle qui a laissé à son pays, à chaque membre de son peuple, un trésor littéraire et humain.

Il est difficile de résumer en un article, avec des mots sans la musique, ce qu’elle fut pour ce pays. Compositrice, chansonnière d’une variété et d’une richesse rares, elle a marqué la vie du pays, et elle a traduit cette vie en musique année après année, depuis 1955 jusque fin juin 2004. Des centaines de chants, presque tous connus du public, ont fusé, au fil des ans.

Née en 1930 au kibboutz Kinnereth, sur les bords du lac du même nom (ou Lac de Tibériade) elle y chanta comme enfant, puis fit son service militaire dans un des chœurs de l’armée. En 1955 elle commença ses études à l’Académie de musique de Jérusalem.

Son œuvre musicale est le fruit de la rencontre d’un amour de la langue et d’une passion pour la beauté de son pays. Deux éléments qui méritent quelques commentaires :

– Elle avait une maîtrise de la langue de la Bible – elle était puriste et ne tolérait pas la négligence –  et une connaissance de la poésie contemporaine, mais aussi un sens de la langue populaire, et c’est ce qui fascinait dans tout ce qu’elle composait, ce qui plaisait aux gens cultivés comme à l’homme de la rue. Le rythme des mots qu’elle modelait avec la musique, les jeux de mots, le son et les rimes, tout cela est difficile à rendre dans une traduction. Certains petits chants une fois traduits doivent sembler banals, et pourtant on est ravi de les chanter en hébreu. Les expressions et allusions bibliques pointent le nez de ci de là. Ou encore la tradition juive dans le chant du Rabbi Nahman de Breslav “Le chant du berger, le chant des brins d’herbe”. La fantaisie et l’humour font que ses chants sont toujours légers, les phrases courtes, le rythme et la mélodie généralement faciles à saisir.

– Par ailleurs sa création est marquée par les paysages et par les événements de l’histoire de son pays, l’effort de développement agricole, le clair de lune sur les champs de Galilée, mais aussi les guerres successives, l’espoir d’un lendemain de retour au calme, la paix qui viendra demain, “et si pas demain, après-demain”. C’est toute la vie de son peuple, dans les grands moments historiques comme dans la vie de tous les jours.

Juste avant la guerre des Six jours (1967), Teddy Kolek le maire de Jérusalem lui avait demandé de composer un chant sur sa ville, et de là naquit le chant “Jérusalem d’or”, connu et aimé de tous, mis en valeur par la voix pure d’une jeune chanteuse encore inconnue, Shuli Natan, et devenu comme un deuxième hymne national. Puis en 1973, la guerre de Kippour, la surprise, la demi-défaite et les deuils, et le chant “Si seulement…” (ou : “Que cela soit…” ), donné ci-dessous, inspiré peut-être par le chant des Beatles  Let it be.

Son amour sans limite, naïf, romantique, pour ce pays, semblait la rendre aveugle – suivant l’expression de certains journalistes – aux aspects problématiques de la conquête du pays. Ce n’est pas par hasard que les mouvements de la droite, les habitants des implantations de Judée-Samarie, ont vu en elle un peu leur porte-parole. Le couplet du chant “Jérusalem d’or” qui dit en parlant de la Vieille Ville (alors inaccessible aux Israéliens) “La place du marché est vide /  Personne ne visite le Mont du Temple”, semble ignorer une autre présence humaine, et No’omi aurait dit à ce propos : “Pour moi si aucun Juif n’y va, c’est vide”. Juste après l’ouverture de la Vieille Ville, elle ajouta un couplet :

Nous voici revenus aux citernes d’eau,

Au marché, à la place,

Le shofar appelle sur le Mont du Temple,

Dans la Ville ancienne.

Les dernières années de sa vie, elle ne s’est plus prononcée sur des questions politiques, comme échaudée par la réalité qui s’imposait à elle : on a commencé à reculer, on doit être prêt à partager, il faudra renoncer au grand rêve. Il est frappant que même ceux qui lui étaient politiquement opposés, chanteurs ou journalistes de gauche, parlaient d’elle avec affection, comprenant sa passion naïve et sincère, et admirant son talent, sa gentillesse dans les rapports personnels.

On ne peut oublier aussi sa période “française”, son séjour à Paris, sa découverte de Brassens, Brel, les Compagnons de la Chanson, tout cela source d’un surcroît d’inspiration. Certains de ses chants en hébreu sont plus ou moins des traductions de chants de ce répertoire français.

Mais il faut se limiter, sous peine d’écrire un livre. Et n’importe comment, il manquerait la musique…

Lou yehi – Que cela soit

 

Je vois encore une voile blanche à l’horizon

Face au nuage sombre et lourd

Tout ce je demande :

Que cela soit…

Si près de la fenêtre dans le soir

La lueur des bougies de fête vacille

Nous demandons : Que cela soit…

Voici, j’entends des acclamations

Le son des trompes et des tambours,

Tout ce que je demande :

Que cela soit…

Que seulement s’entende aussi

La prière murmurée de mes lèvres :

Que cela soit !

Si soudain brille dans l’obscurité

Au dessus de nous l’éclat d’une étoile

Tout ce que je demande :

Que cela soit…

Que tu donnes le calme, la force

A tous ceux que nous aimons,

Nous te le demandons :

Oui, fais cela.

 

Citons encore quelques bribes de certains chants, pour illustrer leur variété :

 

 

● Toi et moi sous le même parapluie

Sautant par-dessus les flaques d’eau

Bonheur de la rencontre,

C’est beau, la vie…

● Nous sommes tous deux du même village

Même houppette, mêmes traits de visage

Même ton de voix,

Oui, nous étions, toi et moi…

Et le vendredi soir,

Quand le vent dans le noir

Agite le feuillage

De toi je fais mémoire.

(souvenir d’un camarade disparu).

● Chanter

C’est être comme le Jourdain.

Tu commences là-haut, tu descends,

Frais, déferlant, arrosant

Tous les champs,…

Ton destin c’est de te fondre

Comme le Jourdain

Dans la Mer de la Mort,

Mais tes flots derrière toi

Continuent le refrain

Chanter, c’est être le Jourdain.

● Parfois, la fête se termine

On éteint les lumières,

La musique se tait, adieu les violons,

Et la nuit nous saisit.

Se lever de nouveau, demain

Au matin

Au cœur un nouveau chant

Le chanter avec vigueur,

Le chanter dans la douleur

Et recommencer au commencement.

● Je n’ai pas assez aimé

Je n’ai pas assez planté

Pas foré des puits au désert,

Pas encore dessiné une fleur

Je n’ai pas tout essayé

Non, pas assez aimé.

● Sur le miel et sur le dard,

Sur le doux et sur l’amer

Sur le bébé qui dort,

Veille, ô mon Dieu, Dieu d’amour,

Sur le feu et l’eau limpide

Sur l’homme à son retour

Veille, ô mon Dieu, toujours.

● Je lis dans le Livre des Rois,

Au chapitre dix-sept

Je lis que l’homme de Dieu a dit :

« La cruche de farine ne se videra pas

La fiole d’huile ne fera pas défaut

Jusqu’à ce que vienne la pluie

Sur la face de la terre.»

 

 

Sagesse...

Haïm Weizman, le premier président d’Israël, le scientifique qui obtint la Déclaration Balfour, rencontra bien des officiels britanniques. L’un d’eux, écoutant ses arguments, lui rétorqua :

– Très bien, Monsieur, mais les Arabes aussi vont venir faire valoir leurs droits. Qu’en dites-vous?

– Sir, ils viendront, ce n’est pas à moi de parler pour eux. Moi, je vous expose le bien-fondé de notre aspiration. Et, je dois vous dire : il ne s’agit pas de quelqu’un qui a raison contre un autre qui a tort, d’un qui a des droits et d’un autre qui n’en a pas. Il s’agit de deux peuples qui ont leurs raisons et leurs droits, et c’est là tout le drame.

… et humour

Un des étudiants d’une Yeshiva (école talmudique) de Jérusalem est si remarquable que l’on vient le consulter de loin dans le pays. On demande au directeur du séminaire :

– Rabbi, que pensez-vous de cet élève? On dit qu’il lit beaucoup et qu’il sait des tas de choses…

– Moi aussi je me pose la question :  il passe tellement de temps à lire, où trouve-t-il le temps de savoir?

 

Livres conseillés :

  • Alan Dershowitz, le droit d’Israël pour une défense équitable, Eska, 2004
  • Avi Primor, Du terrorisme et de ceux qui l’exploitent, Bayard – Centurion, 2004
  • Amos Oz, Aidez-nous à divorcer, Gallimard, 2004
  • Jacques Ellul, Islam et Judéo-christianisme, PUF, 2004

 

Même si nous avons une ligne commune dictée par notre présence en Israël, il semble bon de rappeler

le principe qui guide bien des publications et qui donne une certaine liberté à chacun :

 

La revue laisse aux auteurs des articles et comptes rendus l’entière responsabilité

des opinions et jugements qu’ils expriment.

 

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