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à vous servir comme vous le méritez,
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à combattre sans souci des blessures,
à travailler sans chercher le repos,
à nous dépenser sans attendre d’autre récompense
que celle de savoir que nous faisons votre Sainte volonté. »

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N° 51 – Mars/Avril 2010

Mines dites de Salomon – Timna

Sommaire

Editorial: Des centenaires

Histoire: l’affaire de la ligne d'autobus 300

« Les jeunes des collines », nouvelle génération de colons

« Nous aussi nous étions esclaves » : La première aggadah éthiopienne

Le Jardin de Vie

Prix annuel 2010 de l'Amitié judéo-chrétienne à Michel Remaud

Faut-il être sourd pour s'entendre ?

Tout crédit pour la guêpe Bombus terrestris

Flashes d'espoir: Cn Palestinien décide de faire traduire un livre hébreu en arabe

L'importance d’un mot et d'une lettre

Un jour de Yom Hashoa au Yad Vashem

L'antisémitisme en nette progression dans le monde

Chant du mois: Une espèce rare - Zan nadir

Humour en finale

Editorial : Des centenaires

Il y a un an on fêtait les cent ans de Tel Aviv, cette année on commémore le centenaire du Mouvement des Kibboutz. La cérémonie officielle eut lieu le 31 mars 2010 au kibboutz Degania, en présence de Shimon Pères et de six centenaires du kibboutz. Tel Aviv, la première ville hébraïque, Degania, le premier kibboutz « du monde entier », pouvait-on lire dans Haaretz le lendemain.

Ce mouvement a vraiment une carrière nationale. Il a donné vie à la terre ; les pionniers cultivaient des terres que l'on disait incultes. Ils ont créé des industries et accepté de les moderniser, faisant la révolution du collectivisme à la pri­vatisation plutôt que de disparaître. « On a changé », dit Aaron Wallembi de Kfar Guiladi. « Il y a eu une crise, on est descendu de la scène et on a fait quelque chose d'autre. On a eu le courage de se remettre en question. » L'influence des kibboutz est très grande encore aujourd'hui, même s'ils ne représentent que 1,(/% de la population israélienne, ils constituent 7% de l'industrie, et 40% de l'agriculture. Mais, au-delà des chiffres, on peut dire que le kibboutz a donné son caractère au pays. S'il n'y avait pas eu de kibboutz, Israël aurait un autre visage.

Dans ce numéro, vous trouverez des échos d'un kibboutz religieux SdéEliahou et un aperçu du caractère d'un kibboutzi­que dans cette interview de 1 'lm d'eux décrivant les exploits de l'abeille Bombus et autres insectes et oiseaux très utiles pour l'agriculture.

Les sujets des articles sont des plus divers, iech ve iech, comme on dit dans le pays, il y a ceux-ci ct il y a ceux-là. On vous parle entre autres des Jeunes des collines des enfants sourds, arabes et juifs ensemble ... de cette sale affaire de l'autobus 300 ... d'un étonnant jardin de la vie du livre de l'écrivain israélien Amos Oz traduit en arabe par un Palestinien et mis en vente à Beyrouth.

Sans oublier ce jour national de la Shoa, le 12 avril, où l'on commémore les « 6 millions de fois une victime », 6 mil­lions « manquant à l'appel i) du retour.

S.M.

Histoire:

Cécile Pilverdier

L’affaire de la ligne d’autobus 300

Retour sur l'une des affaires qui a se­coué le plus en profondeur Israël au milieu des années 80 et qui a engen­dré de nombreuses polémiques. Les services de sécurité sont-ils tout-puis­sants dans un pays où le terrorisme est un danger permanent? La presse doit-elle toujours révéler la vérité? La justice ne met-elle pas en péril la sé­curité d’Israël?

Les faits

Le 12 avril 1984, quatre terroristes venus de la Bande de Gaza prirent d'assaut l'autobus 300 de la compa­gnie Egged, de la ligne Tel Aviv -As­hkelon. Ils tinrent les voyageurs en otage, pour exiger un échange de prisonniers internés en Israël.

Le lendemain très tôt, une force spéciale intervint, près de Dir El Balah, et libérèrent les otages.

Au cours de l'opération, Irit Portogaz, une soldate qui était dans l'autobus fut tuée, ainsi que deux terroristes. Les deux autres furent arrêtés, menottés et amenés dans un champ proche. Le patron de la Sûreté Générale (Shabak), Abra­ham Shalom et le chef du groupe, Ehud Yatorn, vinrent auprès des deux terroristes. Avant de quitter l'endroit, Shalom ordonna de les tuer. Yatom et ses gens les laissèrent dans la voiture dans un lieu isolé ct les frappèrent à la tête avec des pierres et des barres de fer, jusqu'à ce qu'ils meurent. Leurs corps furent amenés à l'hôpital où le méde­cin constata leur mort.

On annonça au public que tous les ter­roristes avaient été tués lors de l'opé­ration d'assaut, mais trois jours plus tard le journal «Les Nouvelles» an­nonça au «New York Times», en outrepassant la censure militaire, que deux terroristes avaient été pris vivants. Quelques jours plus tard le journal afficha en première page des photos prises par Alex Libck, où on voyait un des terroristes pris vivant et en pleine connaissance après être descendu de l'autobus. La publication provoqua une tempête, et il fallut faire une en­quête sur la mort des terroristes.

En réaction à la publication des dé­tails dans le journal «Les Nouvelles», la censure militaire, ordonna de façon exceptionnelle, la fermeture dujournal pendant plusieurs jours. Le personnel du quotidien fut jugé pour n'avoir pas respecté la loi de censure et subit une longue série de procès jusqu'à ce qu'il soit acquitté finalement par la Haute Cour de Justice 10 ans après le début de l'affaire.

Enquête sur la mort des terroristes

Suite à la demande de Itzhak Zamir, conseiller juridique du gouvernement, le ministre de la Défense Moshé Arens fut forcé de nommer une commission d'enquête intérieure, avec à sa tête le général à la retraite Méïr Zorea, en vue d'examiner les circonstances de la mort des terroristes. Au départ, Moshé Arens s'y opposa. D'après Za­mir la raison pour laquelle le ministre de la Défense essaya d'empêcher la mise en place d'une telle commission est que ce dernier était arrivé sur les lieux et avait donné l'ordre de tuer les terroristes. Cette rumeur ayant enta­ché sa réputation, il fut contraint de suivre les revendications du conseiller juridique du gouvernement.

La nomination de cette commission avait été gardée secrète, mais le 27 avril 1984, le quotidien «Les Nou­velles» en révéla l'existence. Yatom et ses proches, qui avaient témoigné devant la commission, avaient caché une partie des éléments de la mort des terroristes. Yatom avait communiqué de faux éléments, disant qu'il avait vu comment le colonel Itzhak Mordechaï, commandant l'opération, avait donné un coup de son révolvcr sur la tête des terroristes. Après cela, Yatom raconta qu'il avait fait monter les terroristes dans son véhicule pour les interroger, mais ils avaient saigné durant le trajet et leur état s'était em­piré, aussi ils les avaient amené à J'hôpital, où on avait constaté leur mort. L'entourage de Yatom avait lui aussi menti devant la commission, et cela sur son or­dre.

L'enquête conclut le 20 mai 1984 que les deux terroristes étaient décédés suite à des coups sur la tête, et personne ne fut inculpé de responsabilité sur leur mort. Sur recommandation de la com­mission, Yatorn fut condamné pour avoir frappé, selon lui, un des terroristes. Sur la base de son témoignage, Itzhak Mordekhaï, fut aussi condamné, mais les condamnations furent rapidement le­vées. L'affaire de l'autobus 300 en­tacha sa carrière militaire, il quitta Tsahal quelques années plus tard sans avoir été nommé vice-chef d'état ma­jor comme il l'espérait.

Des détails de l'affaire sont dévoi­lés

Au mois de novembre 1985, trois res­ponsables de la Sûreté Générale, Rafi Malka, Reuven Hazan ct Radai Pe­leg s'adressèrent au chef du service, Abraham Shalom, pour demander soit la publication des détails de l’affaire soit sa démission pure et simple. Shalom refusa et les trois présentèrent leur démission. Six mois plus tard les mêmes s'adressèrent au conseiller ju­ridique du gouvernement Zamir et lui transmirent les détails de l'affaire.

Le 18 mai 1986, Zamir rapporta que des éléments lui avaient été remis per­mettant de penser à des délits de la part de la Sûreté Générale et il demanda de traduire les responsables en justi­ce. Le chef du gouvernement d'alors, Shimon Pérès, s'y opposa fermement et déclara : «On veut jeter le chef de la Sûreté aux chiens». Une confronta­tion eut lieu entre Zamir d'un côté et Pérès et Itzhak Shamir de l'autre. Ces derniers défendirent A. Shalom, Sur l'exigence de Shamir. vice-Premier ministre à cette époque, Yossef Harish remplaça Zamir.

La grâce présidentielle

Suite à la tempête publique, A Shalom dut démissionner de son poste de chef de la Sûreté Générale, mais il préten­dit pour sa défense, que tout ce qu'il avait fait était «autorisé et permis». Le chef du gouvernement à l'époque de l'assassinat, Itzhak Shamir ne ré­pondit rien à cela. Yossef Hermelin, qui avait été patron de la Sûreté Gé­nérale 12 ans plus tôt, fut rappelé pour prendre les rênes du service tellement ébranlé et affaibli par cette affaire. Suite à la démission du chef de la Sûreté, le président de l'Etat, Haïm Herzog, gracia Abraham Shalorn, Ehud Yatom ct deux autres membres de la Sûreté. Cette grâce fut donnée avant même le jugement et devint un précédent dans l’histoire du pays: un président graciant une personne avant qu'elle ne soit condamnée. La grâce fut également accordée à Yossi Gi­nossar et aux officiers de Tsahal qui avaient été mêlés à l'affaire.

Dans sa demande de grâce, Yatom avait écrit que lui et ses subordonnés avaient tué deux terroristes sur l'ordre du chef de la Sûreté et que, selon ce qu'il savait et ce qu'il croyait, la chose avait été faite «pour que de cette prise d'otage meurtrière, les terroristes n'en sortent pas vivants».

Suites de l'affaire

Yatom, qui avait été gracié par le pré­sident de l'Etat, continua à servir dans la Sûreté pendant encore 13 ans. Il es­saya d'en être nommé le patron mais la Cour Suprême s'y opposa, disant que « l'ordre donné par le chef de la Sécurité avait été hors la loi, et Yatom n'aurait pas du lui obéir». Avant cela, Yatom n'avait pas pu être nommé chef de la Sécurité du parlement. Cela ne l'empêchera pas de sc joindre à la liste du Likoud pour lal 6èllle Knesset, et, en 2003, de devenir député. Il était 32ème sur la liste de la l 7"111e Knesset, mais ne fut pas élu. Itzhak Mordechaï, quant à lui, fut nommé des années plus tard ministre de la Défense mais termina sa carrière par une condamnation pour harcèlement sexuel.

Y. Ginossar fut également gracié, mais la Cour Suprême empêcha sa nomination comme chef de cabinet du ministère de la Construction. «L'affaire de la ligne 300 » eut des répercussions importantes sur le sys­tème gouvernemental et la société en Israël. Elle dévoila de profonds dis­fonctionnements au sein du service de la Sûreté générale, touchant à son in­tégrité. Ses membres faussèrent l’en­quête, mentirent, s'arrangèrent entre eux et essayèrent même d'accuser un officier qui n'avait pas participé à la tuerie. La publication de l'affaire causa du tort à la Sûreté Générale aux yeux du public et exigea une clarifica­tion dans le service.

En plus, au milieu de l’enchevêtre­ment de l'enquête, on découvrit des erreurs supplémentaires des services de Sécurité, comme l'emploi de la tor­ture lors de ses enquêtes. Ceci amena à la création de la commission Lan­dau, chargée d'enquêter sur les procé­dés d'interrogatoires employés par la Sûreté entraînant l'intervention de la Cour Suprême et en fin de parcours, des changements de méthode.

« Les jeunes des collines », nouvelle génération de colons ?

Mvriam Ambroselli

Enfants et petits-enfants des premiers colons envoyés par les gouverne­ments israéliens dans les territoires palestiniens pour s)! implanter après la guerre des Six Jours en 1967, les « jeunes des collines », souvent anar­chistes et visionnaires, sont en pre­mière ligne pour s 'opposer au «gel» des nouvelles constructions et sont prêts à tout pour défendre la cause du « Grand Israël »,

Toutes générations confondues, les habitants juifs des implantations en Judée et Samarie sont environ 300 000. Les trois quart d'entre eux vi­vent à proximité de la Ligne Verte, à l'est de Jérusalem, dans des grandes implantations comme Ariel, Ma' aleh Adumim, Guivat Zeev ... Mais il y a les autres, 50 000 pers Olmes qui vi­vent dans de petites implantations de quelques centaines ou dizaines d'habi­tants, ou dans les Mahazim, les avant­postes. Situés dans les endroits les plus inaccessibles et les plus perdus, ces avant-postes constituent la nou­velle forme d'implantation qui s'est multipliée ces dernières années avec la «jeunesse des collines» comme on l'appelle ici en Israël. Aujourd 'hui, on compte plus d'une centaine d'avant-­postes dans les territoires palesti­niens. Toutes ces mini-implantations sont sans exception illégales pour le gouvernement d'Israël. Dans un rituel désormais établi, les jeunes, qui sont souvent des adolescents, les construi­sent. L'armée israélienne les détruit. Pourtant, il en ressurgit sans cesse de nouvelles car les jeunes en question sont téméraires et sont prêts à braver les interdits gouvernementaux aussi bien que 1 'hostilité des

Palestiniens et même de leurs parents. Les avant-postes, considérés comme l'un des obstacles à l'avancée des pourparlers de paix, sont aussi au cœur des tractations entre le Premier ministre israélien Netanyahu ct le président Obama. « Mélange de culture hippie et de racisme violent » (Claire Sne­garoff, Michaël Blum Qui sont les Colons )), la « jeunesse des colli- nes » est perçue en Israël comme une minorité idéaliste dont la radicalité inquiète.« La Terre d'Israël appartient au peuple d'Israël », « Nous sommes revenus à la maison ». Tels sont les slogans des jeunes colons. A Guivat Assaf, avant-poste qui porte le nom d'un Juif tué par un Palestinien, le leader de la communauté Benny Gal, interrogé en août 2009 par le quoti­dien italien Il Foglio, qui a mené une enquête sur cette question, explique : «A cet endroit précis, il y a 3 800 ans, la terre d'Israël a été promise au peuple juif. Si on nous chasse d'ici, l'aéroport international Ben Gourion sera en danger». Guivat Assaf est un des bastions de la «jeunesse des col­lines» où est organisée la résistance à l'évacuation des implantations jugées illégales.

Ces avant-postes ne sont pas tous considérés par le gouvernement comme des enclaves rebelles si l'on en juge par les importantes forces de sécurité consacrées à leur protection. Certaines ont des routes pavées, des arrêts d'autobus, des synagogues ct même des terrains de sport. Les instal­lations vont du simple container placé en haut d'une colline ou de quelques rangées de baraques ou de caravanes, jusqu'à de véritables installations en préfabriqué, du type après-séisme. Il y a comme des « implantations de pointe » en Cisjordanie, qui sont bel et bien « implantées ». Certains avancent l'ar­gument réaliste de la croissance na­turelle pour expliquer et justifier leur développement.

Les « jeunes des collines », très sou­vent religieux, sont entiers dans leurs conceptions idéologiques. Certains ont même décidé d'abandonner leur toit paternel dans les grandes agglo­mérations pour aller s'installer au sommet des collines et habiter «la terre de leurs ancêtres». Les synago­gues où ils prient sont souvent bâties en terre séchée. Ils construisent leur maison de leurs propres mains, sont célibataires ou jeunes mariés, parents depuis très peu de temps. Ils se consi­dèrent comme la nouvelle avant-garde des colons. Après l'annonce du « gel des nouvelles constructions » adopté par le gouvernement suite à la pres­sion internationale, révoltés, ils ont pris pour devise: «Construisons et le permis viendra».

David Ha'ivri, originaire de Long Is­land, est l'un des leaders de la «jeu­nesse des collines». Il vit avec sa femme et ses enfants dans une im­plantation de Cisjordanie, à Kfar Ta­pouah, village célèbre pour le miel qui y est produit mais surtout paree qu'il est cité dans la Bible, au chapitre 12 du livre de Josué. C'est l'une des tren­te villes conquises par les fils d'Israël à leur entrée en Terre Promise. David fait partie de cette nouvelle génération dont le nationalisme mystique s'asso­cie à l'esprit pionnier et à l'ascétisme qui rejette la société de consomma­tion des grandes villes israéliennes de la côte pour une vic idyllique proche de la nature. Les hommes ont les cheveux au vent, des an­glaises sur les côtés du visage et des chemises à carreaux ; les fem­mes portent le foulard, la mitpahat. Ils ont pour bu t « d'incarner l'idéologie de la Tora et le sacrifice de soi» souligne-t-il. «Le salut d'Israël et du peuple juif ne peut pas venir de politiciens qui pen­sent que la lutte pour la terre est un jeu tac­tique. Il y a dix ans, nous avons commencé à créer des avant-postes. Ce sont de très jeunes couples qui ont décidé d'être des pionniers comme leurs parents. Ils croient au sionisme. ils sont idéalistes, prêts à renoncer à l'existence confortable des grandes villes ou des grandes colonies. Ils veu­lent être autosuffisants, avec toutes les limites que cela comporte».

Vie idyllique mais aussi dangereuse : l'année dernière, l'un d'entre eux a été tué à coups de hache par un Pa­lestinien. Mais les « jeunes des collines » en sont conscients, le prix de la terre est pour eux parfois celui du sang - ils sont en quelques sortes les héros défenseurs de la cause du Grand Israël biblique. Il semblerait que cette deuxième génération de colons soit encore plus attachée à la terre que la première: ces jeunes sont nés ici, leur sang vient cl' ici. Certains sont même plus religieux que leurs parents. Agriculteurs ou bergers, étudiants ou jeunes en quête existentielle ou mystique, ils vivent dans des zones déser­tiques, vides, inhabitées. Ils plantent des arbres, cultivent la terre, font ve­nir l'eau, les vivres, l'électricité. Pour la prière du shabbat il faut un minyan, le quorum nécessaire de dix hommes: cela suffit pour créer un avant-poste. L'armée israélienne intervient parce que ces petites implantations sont «illégales». Les avant-postes nuisent à la sécurité du pays, ou plutôt les « jeunes des collines» se mettent eux­-mêmes dans l'insécurité, et ce, avec ténacité. Ramat Migron par exem­ple, avant-poste en contrebas de la « Route 60 » a déjà été détruit quatre fois par l'armée, mais renaît toujours de ses cendres. «Si les soldats revien­nent, on prendra des coups, parce que nous ne sommes pas assez nombreux pour résister. Ce n'est pas grave, on reconstruira» disait un jeune colon, interviewé il y a quelques mois par Le Monde. Ces adolescents, qui n'hé­sitent pas à employer des moyens violents contre les forces de l'ordre, sont aussi parfois des jeunes révoltés, sans point de repères ou même délin­quants.

A l' entrée de Ramat Migron, un barra­ge de pacotille est dressé symbolique­ment contre les bulldozers de l'année israélienne. Une dizaine de garçons et de filles campent là, sans eau ni élec­tricité, à quelques centaines de mètres de la colonie de Migron où vivent 54 familles, sur un terrain entouré de bar­belés revendiqué par les Palestiniens. Ces familles ont passé un accord avec le Conseil des Implantations de Judée-Samarie pour évacuer les lieux et être relogés dans l'implantation d'Adam, plus au sud. Ulcérés par ce qu'ils considèrent comme une «capi­tulation», les «jeunes des collines» ont créé en réaction Ramat Migron. Là, ce n'est pas le drapeau israélien qui flotte mais le drapeau jaune à l'effigie de Meir Kahana, rabbin extrémiste as­sassiné à New York qui prônait l'ex­pulsion des Palestiniens d'Israël. Pro­fondément et radicalement idéalistes, les «jeunes des collines » sont aussi révoltés contre le gouvernement. Et lorsqu'ils refusent de quitter les lieux. que l'intervention répétée de la police et de Tsahal n'a pas suffi à les décourager, on se heurte à un autre problème: les «jeunes» ne reconnaissent pas la juridiction de la Cour Suprême qu'ils considèrent comme une institution ne respectant pas la loi divine.

Ces jeunes, ne sont pas seulement à la marge de la société israélienne, ils ne trouvent pas non plus leur place dans les organisations érigées par les habitants des implantations de Judée­-Samarie.

« Nous aussi nous étions esclaves» : la première Aggada éthiopienne

SuzanneMillet

« Nous aussi nous étions esclaves» :

La première Aggada éthiopienne

« J'ai écrit beaucoup de livres sur le judaïsme éthiopien» dit le rabbin Menahem Waldmann, historien des Juifs d'Ethiopie, « mais c'est la première fois que nous mettons l'histoire de la communauté juive éthiopienne sur la table du Seder de Pessah. » Cette nouvelle aggadah est très attrayante, c' est un livre d' histoires : Aggada veut dire histoire.

On y raconte la sortie dEgypte selon la Aggada traditionnelle du Seder de Pessah. Souvent les Aggadot sont illustrées : ici ce sont des peintures éthiopiennes qui illustrent la sortie d'Égypte : peintures naïves, très colorées et parlantes, où les yeux grand ouverts des personnages fixent le lecteur. Mais on y raconte aussi la sortie d'Ethiopie et du Soudan avec des témoignages de la marche dans le désert du Soudan où des milliers sont morts sans sépulture. Beaucoup de photos sur les camps au Soudan, dans le désert, sur les Ethiopiens faisant leur aliya (immigration vers Israël), transportés en camions, puis dans le «ventre» d'un bateau ou d'un avion. Des lettres d'Éthiopie, l'une datée de 1862, demandant au « grand prêtre» de Jérusalem si le temps est venu de monter à Jérusalem, nous montrent cette attente passionnée du retour au « pays ».

On y trouve aussi les coutumes éthiopiennes traditionnelles et les prières, traduites de l'amharique en hébreu, liées à la fête de Pessah. Par exemple une longue prière « de Moïse contre Pharaon », des prières sous forme de litanies, une prière du sacrifice. En effet les Ethiopiens choisissaient un agneau ou un chevreau sans tache le premier du mois de Nissan, qu'ils fêtaient comme le premier de l'an selon la Bible. Ils le gardaient jusqu'au soir de Pessah, l'égorgeaient et le mangeaient grillé, debout, les hommes le bâton à la main, les femmes, le bébé dans le dos, comme prêts au départ. Des photos prises en Ethiopie en 1950 montrent le sacrifice de l'agneau ainsi que les préparations des matzot (pains azymes) par les femmes.

Cette Aggada, avec ses commentaires, ses peintures, ses photos. est vraiment un livre d'Histoire et d'histoires. Permettra-t-elle aux Israéliens de connaître la communauté juive éthiopienne et sa riche tradition, de l'intégrer ? Et permettra-t-elle aux Juifs éthiopiens et à leurs descendants de ne pas perdre leur héritage et de se rappeler le temps où leurs ancêtres en Ethiopie, voyant passer les cigognes qui, lors de leur migration, avaient survolé Jérusalem, leur disaient : «Cigognes, cigognes, comment va notre pays, Jérusalem? »

Le jardin de Vie

Agnès Staes

Le 4 mars dernier, un événement bien peu ordinaire s'est déroulé près de l'abbaye de Latrun, située entre Tel-Aviv et Jérusalem. C'était l'inauguration, la dédicace d' « un Jardin de Vie » (Ganei Chaim), jardin cnsacré aux enfants non-nés (avortements et fausses couches).

Tony Spérendeo qui a été le chef d'orchestre de cette cérémonie est l'un des fondateurs de l'une des associations Pro-Vie qui existent en Israël. Bead Chaim dont je vous parlerai ensuite.

Cette cérémonie a débuté dans une salle. Tony lui-même a ouvert la cérémonie en remerciant les pères René et Paul, trappistes de l'abbaye, pour le terrain accordé. Puis ce fut un temps de louange et d'actions de grâces avec de très beaux chants au Prince de la Vie et en particulier un très bel hymne composé à partir du psaume 139 et chanté par David Loden, l'un des fondateurs de Pro-Vie en Israël.

Mais pourquoi ce jardin '? C'est à la mémoire des enfants non-nés. « Nous voulons nous souvenir, dit Tony, de tous ces bébés non-nés. Nous voulons chercher le pardon de Dieu et nous tenir du côté de la vic. Ce jardin sera un lieu de restauration, de guérison et de pardon ».

Sandi Shoshani, coordinatrice de ce mouvement, ajoute « Cc jardin a plusieurs buts : faire mémoire des bébés non-nés, mais aussi offrir la possibilité de sortir de la honte en entrant dans la guérison de la mémoire et cela pas seulement pour les mamans mais aussi pour les hommes, les frères et sœurs, les grands-parents, les amis... »,

« Celles qui ont avorté sont en captivité, mais le Seigneur veut les libérer» ajoute Sandy.

Puis nous écoutons le témoignage poignant d'une femme ayant fait un avortement avant son mariage et qui a vécu tout un chemin de guérison avec son mari. Elle affirme: « Tout enfant qui est dans le sein d’une femme a une belle destinée ».

Dans ce jardin, chacun pourra planter un arbre pour les enfants non-nés: c'est-à-dire avortés ou morts suite à une fausse couche. Il sera possible de donner un nom aux enfants. « Chacun, en vivant cette démarche, pourra vivre un temps spécial avec le Seigneur: louer, pleurer si vous en avez besoin, mettre n message dans la terre avant d'enfoncer les racines de votre arbre ... Que chacun soit libre de vivre quelque chose avec le Seigneur » invite Tony.

Douze pasteurs locaux, messianiques ou non, ont prié en hébreu, arabe et russe, pour ce jardin et pour ce qui en sortira, puis vint le tour de personnes engagées dans le mouvement Pro-Vie au niveau international (Etats-Unis, Ukraine...), qui élevèrent leurs prières vers Dieu.

Sur une table, un livre souvenir est ouvert où chacun peut laisser un message, une prière, une action de grâces ...

Puis dans une marche joyeuse, nous partons à pied vers le jardin. Plusieurs responsables d'associations Pro-Vie coupent le ruban et nous entrons.

A l'entrée du site, les organisateurs ont tenu à ce qu'il y ait un cèdre venu du Liban: cet arbre servait à construire le Temple. Nous sommes tous invités à l'arroser pour signifier notre engagement pour ce jardin. Un écriteau planté au pied de l'arbre tiré du Ps 92,13 : «Le Juste poussera comme un palmier, il grandira comme un cèdre du Liban ».

Puis un temps libre est offert pour ceux qui veulent planter leur arbre. C'est un moment émouvant : les visages expriment douleur ou libération.

A la fin de la cérémonie, on revient avec beaucoup de paix et de joie.

L'avortement en Israël

Quelques chiffres:

Estimation du nombre de morts par semaine en moyenne:

- 9 personnes par accident de la route.

- 900 bébés par avortement (environ 150 par jour)

Les statistiques gouvernementales estiment qu'il y a 20.000 avortements légaux par an.

Les statistiques non officielles (qui comprennent les avortements privés) indiquent que ce chiffre doit être doublé.

Depuis la création de l'État d'Israël (1948), on estime qu'il y a cu en Israël plus de 2 millions de bébés avortés. La population d'Israël d'aujourd'hui est un peu plus de 7 millions.

En hébreu, le mot employé pour l'avortement et la fausse couche est le même. Cela provoque une ambiguïté qui se transporte aussi au niveau des pensées.

Dans la plupart des pays il existe des publiques sur des aspects éthiques ou juridiques de l'avortement entre ceux qui s'y opposent (Pro-Vie) et ceux qui l'admettent (Pro-choix).

La loi en Israël

Selon le code pénal de 1977, l’avortement est illégal sauf si :

- la femme a en dessous de 18 ans ou plus de 40 ans.

- le bébé est conçu hors mariage.

- le bébé à une déficience physique ou mentale.

- poursuivre la grossesse constitue pour la femme un danger physique ou mental.

Dans ces cas, le comité peut donner son accord pour que la femme mette fin à sa grossesse.

98 % des demandes présentées à ce comité sont acceptées.

En 2008, les statistiques de ce bureau (les avortements officiels) indiquent:

- 42 % des femmes sont non mariées.

- 14 % ont en dessous de 18 ans (donc mineures).

- 30 % sont des femmes qui ont déjà vécu un avortement.

La moitié des demandes est présentée suite à une conception hors mariage (viol, inceste, ou hors mariage dont les mères célibataires).

Le groupe ethnique qui a le plus grand nombre d'avortements par habitant est celui des Éthiopiens, suivi par les Russes.

Dans l'armée. Une jeune femme qui fait 2 ans d'année a le droit à 2 avortements sans qu'on ne lui pose aucune question.

En Israël, il y a près d'un avortement pour quatre bébés qui naissent.

Il est bon de noter qu'aucune de ces estimations ne prend en compte l'avortement chimique qui se fait avec « la pilule du lendemain ».. Cette pilule est disponible dans toutes les pharmacies sans ordonnance médicale.

Un paradoxe : Une mineure qui veut avorter n'a pas besoin du consentement de ses parents. Par contre pour qu'un docteur lui prescrive une pilule contraceptive, elle aura besoin de leur accord.

Quand le code pénal a été écrit, il comportait également une clause sociale permettant l'avortement pour des raisons sociales comme par exemple une détresse économique. Cela a été supprimé en 1980, par les partis orthodoxes (Shas, le Judaïsme Unifié de la Tora, Parti Religieux National). Mais en 2004, Reshef Hen du parti Shinoui a posé un amendement pour remettre cette clause car pour lui, cela oblige les femmes ayant des problèmes financiers à mentir pour présenter leur demande d'avortement au comité.

En Israël, de façon générale, l'avortement oppose les religieux et les laïques. Les Juifs, les musulmans et les chrétiens pratiquants sont plus susceptibles de s'opposer à l'avortement tandis que les membres laïques de toutes ces confessions vont le couvrir ou même l'encourager.

Be'ad Hayim

Be' ad Hayim est l'une des organisations parmi d'autres à agir contre l' avortement. L'organisation, fondée en 1985 par un groupe de croyants messianiques, est reconnue par le gouvernement d'Israël en 1988. C'est une organisation sans but lucratif destinée à la protection des mères et des enfants à naître.

Ses deux axes principaux:

- Encourager les femmes enceintes qui envisagent l'avortement à garder leur bébé, donc à choisir la vie. L'association les aide matériellement, psychologiquement et même affectivement.

- Eduquer le public en rappelant le caractère sacré de la vie, en expliquant le développement du bébé, les conséquences et les risques cie l'a vertement sur la mère, sur l'enfant et sur l'ensemble cie la famille.

Cette association possède sept centres dans différentes villes Jérusalem, Beersheva, Tibériade, Keriyot, Nazareth, Ashkelon, Netanya. Be' ad Hayim ne fait aucune distinction de nationalité ou de croyance religieuse pour aider une femme qui le demande. Lorsqu'elle arrive dans un centre, elle peut rencontrer des conseillers, avoir un test de grossesse gratuit, et recevoir conseils ct assistance pour l’accouchement. Plusieurs services sont organisés : l'éducation, le conseil, et l'aide pratique.

L'éducation

L'accent est mis sur les jeunes et sur les femmes. L'éducation aborde les questions de santé, de grossesse ct d'avortement, le domaine de la vie, le sexe en dehors du mariage. L'association agit en distribuant des brochures, des livres et publie même une revue féminine Beineinu (entre nous) qui parait trois ou quatre fois par an en hébreu et en russe. Cette revue composée d’articles et de témoignages aborde des thèmes comme celui des valeurs familiales saines, des questions sur la famille, l'éducation des enfants, les relations conjugales, le temps passé avec Dieu etc .. Il y a aussi des distributions de DVD, un site Internet où l'on peut trouver des informations. Enfin elle distribue des tracts dans la rue.

Elle organise aussi des conférences annuelles pour la jeunesse. une pour les garçons et une pour les filles sur différents thèmes comme celui des dangers du sexe gratuit en dehors du mariage. Elle met en place des séminaires pour former les conseillers de tout le pays pour les aider à accueillir les femmes qui désirent avorter et accompagner celles qui souffrent du syndrome post-avortement ayant déjà subi un IVG. En général elles souffrent de dépression, de sentiment de culpabilité, de troubles du sommeil, de perte d'estime de soi, ... On estime que 50% des femmes se reconnaissent atteintes et que 25 % cherchent de l'aide de professionnels,

Un DVD et un questionnaire ont été spécialement conçus pour donner des informations dans les écoles. Ils correspondent exactement au programme de biologie de la 8ème année. (12-13 ans).

Le conseil

Il est fait pour les femmes enceintes et s'oriente aussi vers celles qui ont subi un avortement. Il est gratuit et confidentiel Il existe aussi un service d'écoute 24/24 en différentes langues (hébreu, arabe, russe, anglais).

Tous les conseillers se sont formés pour répondre aux questions (grossesse, avortement, contraception, finance, etc.) mais aussi ils sont prêts à soutenir les mères pendant la durée de leur grossesse et au-delà en les accompagnant chez le médecin, leur donnant un soutien affectif (visites, etc.) et les guidant pour qu'elles obtiennent des aides pratiques.

Les aides pratiques

Elles sont de plusieurs formes. -l'opération Moïse. Cette aide fournit à la maman tout ce qu'il faut pour le bébé pendant la première année (poussette, berceau, commode, baignoire, nourriture pour bébé, couches fournies chaque mois par un chèque mensuel). Un panier cadeau qui comprend des savons et de la crème sera offert à la mère ainsi qu'un bon manteau en hiver. Celles qui reçoivent tout cela sont souvent débordantes de reconnaissance.

- une aide sur la nutrition, les différents stades de la grossesse, le développement fœtal.

- l'association peut pourvoir à un logement de remplacement pendant la durée la grossesse si cela s'avère nécessaire.

Elle donne aussi un soutien pendant l'accouchement, et visite les femmes à l'hôpital.

Un autre aspect du travail est celui de faciliter la guérison et la libération des femmes qui souffrent du syndrome post-avortement pour qu'elles reçoivent pardon et soulagement. L'équipe de conseillers s'engage dans la prière, aide ainsi la femme à s'ouvrir à l'amour de Dieu pour recevoir de lui la guérison.

Son site Internet: http://www.beadchaim.org.il

Il existe d'autres associations comme par exemple Arahit vetikva ou a Future and A Hope (un avenir et une espérance) qui travaillent et éduquent aussi sur les maladies sexuellement transmissibles, Efrat tenue par des Juifs religieux (voir l'article sauver les enfants, no 23, mai 2005), let them live, et d'autres encore.

Pour toutes ces associations, lutter contre l'avortement est un choix de vie conforme à l'Ecriture où Dieu créateur nous façonne pour la vie et ne désire la mort de personne.

Prix annuel 2010 de l’Amitié judéo-chrétienne à Michel Remaud

Après Armand Abécassis en 2009, le 8 mars 2010, le Comité Directeur de l'Amitié judéo-chrétienne de France a élu lauréat du Prix de l' AJCF pour 2010 le Père Michel Remaud. Le Prix de l'AJCF lui sera remis en octobre prochain, à une date qu'il reste encore à déterminer, en présence de nombreuses personnalités juives et chrétiennes.

Depuis 1988,1' AJCF décerne un Prix à une personnalité, juive ou chrétienne, qui a œuvré pour le dialogue judéo-chrétien.

Michel Remaud est né en 1940 en Vendée. Membre de la Congrégation des Fils de Marie Immaculée (FMI), il est ordonné prêtre le 16 juillet 1966. Après diverses responsabilités en France, il est depuis 1985 en Israël.

Enseignant à l'Institut Pontifical Ratisbonne à Jérusalem de 1985 jusqu'à sa fermeture en 2001, il a créé depuis l'Institut Français Albert-Decourtray d'Études Juives à Jérusalem, aujourd'hui l'Institut Chrétien d'Études Juives et de Littérature Hébraïque dont il est le directeur.

Faut-il être sourd pour s’entendre ?

Antoinette Bremond

Une école de sourds unique en son genre, l'école Hattie Friedland, à Jérusalem, où une centaine d'enfants sourds, juifs et ara bes, s'entendent. C'est ce qui se vit dans le quotidien de l'école publique pour malentendants dans le quartier de Kyriat Yovel à Jérusalem. Fondée en 1931 par l'Alliance Israélite Universelle,

(appelée actuellement Koi Israel Haverim-alliance) cette école est destinée aux enfants juifs. A la création de l'Etat d'Israël (1948) elle est prise en charge par la municipalité de Jérusalem et le ministère de l'Education nationale. En 1978, le maire de Jérusalem, Teddy Kolek l'ouvre aux enfants sourds arabes israéliens et palestiniens de Jérusalem et des villages avoisinants. En 1979 il y a déjà 69 enfants arabes.

Cette année, sur les 82 élèves de 6 à 21 ans, 1/4 d'entre eux sont juifs religieux ou laïques, et 3/4 sont arabes. Cela s'explique par le fait que la société juive possède toute une prise en charge spécialisée permettant aux mal-entendants d'être intégrés dans le système scolaire normal. Donc seuls les enfants ayant, en plus de leur surdité, un autre handicap, retard mental, autisme, désordre dans la communication, perte de vue, sont dirigés vers cette école. Par contre la société arabe n'est pas encore équipée pour recevoir des enfants mal-entendants.

La directrice Guila Tatar Itzhak, JUIve, née en Israël et son adjointe Maha Abu Ktesh, arabe israélienne musulmane, dirigent actuellement cette école. Dans leur bureau, deux tableaux mettent tout de suite les visiteurs dans le contexte : sur l'un, le langage des signes avec sa traduction en hébreu, sur l'autre, les mêmes signes avec la traduction en arabe. Donc un seul langage pour ces enfants du « monde du silence » venant de cultures différentes. La barrière de la langue est supprimée. Leur réalité les rend solidaires, ensemble ils sont sourds, même si à la maison ils vivent la situation quotidienne du conflit israélo-palestinien.

Dans l'école, on ne parle jamais de politique, pourtant l'actualité est présente. Par exemple, lors de l'élection de Barak Obama, chacun donnait son avis.

Mais comment depuis 30 ans, dans cette « petite terre », un bâtiment de trois étages (construit grâce aux dons de Hattie Friedland) et une cour de récréation, les enseignants ont-ils pu arriver à « régler» le conflit, ce que la politique ne peut obtenir?

L'éducation

Dans les classes groupant de 8 à 10 élèves, arabes ou juifs, l'éducation est personnalisée au maximum. Les enseignants venant des deux cultures, dont quelques uns sont également malentendants, possèdent parfaitement le langage gestuel et peuvent s' adresser aux enfants en arabe et en hébreu. Chaque élève est reçu et suivi pour ce qu'il est, son présent, son histoire, son contexte. Les parents sont en contact presque journellement avec les directrices ct les enseignants, se tenant ainsi au courant des progrès, des difficultés ou des événements de la journée. Ils participent régulièrement à des réunions de parents, soit arabes et juifs ensemble, soit séparés. Peu à peu ce « lieu de paix », cette grande famille que forment les enfants et leurs parents, s' inf ltre ainsi dans la société.

« Le but », insiste la directrice, « est de convertir cet handicap en force, conduisant ces jeunes à devenir des membres actifs de la société, de faire de ces handicapés et de leurs familles un pont entre les deux cultures. »

Ce qui n'empêche pas, bien sûr, que pendant les récréations, comme partout, il y ait des querelles et que la directrice doive intervenir, luttant contre la violence, d'où qu'elle vienne.

Formation professionnelle

Pour permettre à ces jeunes de sortir de cette école avec un diplôme ct la possibilité d'une vie indépendante, une formation professionnelle au choix leur est donnée par des gens de métier. Certains deviendront cuisiniers, coiffeurs, menuisiers, jardiniers, esthéticiennes ou travailleront dans l’hôtellerie, la cosmétique, l'informatique et dans les services médicaux. Le « suivi» est assuré par le service social qui, très présent en Israël, est souvent absent du côté arabe.

Divers ateliers sont aussi intégrés au programme d'éducation : ateliers de journalisme, d'informatique, de sport, de cinématographie, de photographie. Ces activités parascolaires ont souvent lieu dans la salle communale du quartier, mieux équipée.

En plus du personnel enseignant et professionnel, des assistants sociaux, des psychologues, des médecins vien­nent régulièrement suivre ces jeunes, collaborant à leur développement. Di­verses thérapies sont également prati­quées, ergothérapie, orthophonie, mu­sicothérapie, théâtre, physiothérapie.

Loisirs et fêtes

Les fêtes des différentes communautés se célèbrent ensemble. Un spectacle est organisé chaque fin d'année, avec théâtre, danses etc. Sur le podium, un système de vibrations installé sous le plancher donne le rythme aux danseurs.

Pendant les vacances. des voyages, des colonies de vacances sont organisés. Encore un temps fort partagé par les enfants et les enseignants des deux cultures.

Ali, Arabe palestinien et Orel, Juif israélien

Ali, jeune palestinien, vit dans sa famille à El Azaria, un village palestinien proche de Jérusalem. Il est dans cette éeole depuis l'âge de 6 ans. N'ayant qu'une carte d'identité palestinienne, il n'avait pas le droit de s'inscrire dans une école israélienne. Mais cette éeole de sourds étant unique, il a pu y entrer pour des raisons humanitaires. Il espère beaucoup acquérir à 18 ans la cane bleue israélienne qui lui permettra d'entrer et de sortir sans problèmes. Pour aller à l'école il doit prendre un taxi jusqu'au mur de sécurité. De l'autre côté, la navette scolaire pour les enfants de cette région l'attend. Les jours où les contrôles sont plus sévères, il rate la navette et doit retourner chez lui. Il y a aussi des jours où les territoires sont fermés. Par exemple, le vendredi avant Pessah, comme il y avait cu des manifestations violentes en Vieille Ville, les classes arabes étaient à moitié vides. Ali raconte d'une façon très expressive que tout était facile avant la construction du mur. Son grand problème, il est en train de perdre la vue. A 21 ans, après l'école, quel sera son avenir? La société arabe n'a pas encore de structures pour les sourds adultes. Mais il est décidé à s'en sortir.

Orel, 12 ans, vit à Jérusalem près de l'école. A 4 ans, après plusieurs séjours dans les hôpitaux, on dépiste chez lui, en plus de sa surdité, un retard mental ct des troubles cardiaques. L'enfant vit replié sur lui-même, comme en sursis. Sa mère arrête de travailler. Accepté dans cette école, il est pris en charge, comme s'il était le seul enfant! Petit à petit il s'intègre et communique. Actuellement il veut tout le temps aider les autres ... presque trop! Toute sa famille a appris le langage gestuel. « La vie à la maison avec ses frères ct sœurs est presque normale» dit la maman. Après l'école il repart avec une navette dans son monde, comme chacun. Les uns du côté israélien Guilo, Bet Shemesh, Modiin, Jérusalem; les autres avec Ali, du côté arabe, palestinien. On peut comprendre que les réunions des parents d'élèves, vivant des deux côtés, sont un vrai défi.

Les finances

Le ministère de l'Education finance l'essentiel du budget de cette école, incluant les salaires. L'école dispose également d'un budget annuel complémentaire de 219 000 dollars assuré par Kol Israël Haverim ­Alliance, la Fondation de Jérusalem et d'autres associations israéliennes. Mais pour pouvoir assumer l'ensemble des nouvelles méthodes pédagogiques, il faut qu'elle trouve chaque année, 86.000 dollars supplémentaires, grâce à des dons venant d'Israël ou de l'étranger.

Le canari dans la mine

Ce livre, publié en 2006 par Primo Europe et l’édition Yago, raconte le drame de la torture et de la mort du jeune Juif Ilan Halimi à Paris en février 2006. Les éditeurs et la famille décident de dédier les bénéfices de la vente de ce livre à une association œuvrant pour la paix et le rapprochement. Ce fut l'école des sourds de Jérusalem qui fut choisie. En mai 2007, 12.000 euros sont envoyés à cette école permettant d'élargir les programmes scolaires établis en liaison avec les recherches pédagogiques du ministère de l'Education.

Tout crédit pour la guêpe Bombus terrestris

Cécile Pilverdier

A 85 ans il entre fièrement dans son potager au volant de son tracteur rouge. Au pied du Mont Guilboa dans son kibboutz de Sedé Eliahou, Mario Lévy, le fondateur et le «grand prêtre» de l'Association des agriculteurs Biologiques en Israël, est en pleine forme et enthousiaste pour répandre sa «Tora». Une minute après être descendu de son véhicule bruyant, revêtu des vêtements de travail et une calotte verte sur la tête, il s'assied à une table branlante sous un arbre dans le champ et déclare: «Je ne veux pas noircir d'encre un journal, je n'ai pas d'histoires à raconter. L'agriculture organique c'est quelque chose de sérieux que l'on ne peut traiter à la légère».

Lévy raconte comment il a commencé à penser à autre chose pour la terre «]' en suis arrivé là, après des années de travail. Il y a 41 ans je suis arrivé au kibboutz, 2 ans auparavant. Alors que j'avais 16 ans, j'ai immigré d'Italie. Avec le temps, pas tout de suite, je me suis demandé: si l'agriculture est si bonne que ça, pourquoi à partir d'un seul arrosage insecticide sur certaines cultures, nous en sommes à 40 arrosages') J'ai commencé à réfléchir. Comment changer la situation? Sur le plan économique, nous réussissions dans l'agriculture et il fallait quelque chose de très important pour changer les habitudes des gens. Ce n'était pas simple. Lorsque la première fois j'ai mis ensemble les deux mots: agriculture et organique, on a pensé que j'étais fou. L'agriculture organique est essentielle pour notre existence, pour l'humanité dans son ensemble et pour le peuple en particulier» dit-il, «pas moins que ça. Je veux que les gens comprennent que c'est très important. Il n' y a que quelques personnes qui l’ont saisi, mais la majorité du peuple, y compris les scientifiques, ne savent pas de quoi l'on parle. Nous sommes presque dans une situation catastrophique pour la santé ct l'écologie. L'agriculture moderne utilise le sol comme un terrain d'engrais chimique, on a oublié que le sol est plein de vie, qu'il est un corps vivant. Il y a déjà 150 ans qu'on a commencé à utiliser les engrais chimiques synthétiques. A première vue, c'est la parfaite réussite et le monde agricole a continué à employer des quantités impressionnantes d'engrais chimiques, de désherbants et d'hormones. Cette erreur nous l'avons commise il y a longtemps et nous devons chercher une autre voie».

Une usine sous terre

Son kibboutz, Sedé Eliahou, fête ses 70 ans. Il y a des années que ce kibboutz religieux, de 120 familles, lutte à contre-courant et porte avec l'humilité propre à ses membres, depuis les années 80, le drapeau de la révolution organique et écologique. Les membres du kibboutz qui adhèrent à l'idée communautaire ont été très influencés par la génération des fondateurs qui a dédaigné les engrais intensifs dans les champs et qui a développé un modèle agricole basé sur la culture organique et l'utilisation d'insectes comme insecticides biologiques pour l'agriculture.

Sedé Eliahou, l’un des villages «Clôture et tour» des années 40, a été créé par des immigrants d'Allemagne. Le kibboutz porte le nom du rabbin Eliahou Gutmacher, l'un des pionniers du sionisme religieux. Aujourd'hui, 170 hectares organiques comprennent des vignes, des palmiers dattiers, des grenadiers, du blé, de la luzerne, du maïs, des épices et des légumes. Les membres du kibboutz ont élargi la loi de Lévy à d'autres composants, comme la création d'une industrie «Bio-Bec» pour les insecticides biologiques. Dans l'usine il y a trois sections: la production

-d’insectes utiles à l'agri­culture,

-de mouches stériles pour empêcher le développe­ment de la mouche médi­terranéenne

-et la guêpe Bombus pour la pollinisation.

Sarah Goldmith, directrice de Bio-Tour, la branche touristique du kibboutz, dit en riant: «C'est le mélange de population du kibboutz qui a donné ce résultat:

-les «Yekes» fondateurs du vinage avec leur conservatisme, précision et conscience profes­sionnelle,

- les groupes de chercheurs qui se sont joints à eux, les Italiens,

- les Français et les jeunes du mouve­ment Bnei Akiva d'Israël qui ont ap­porté l'élément créatif un peu moins «carré». Il y a de la personnalité chez les gens d'ici avec ce mélange hu­main. Quand on a réuni ces personnes autour d'une idéologie, « l’agriculture et la croyance» le résultat est étonnant, tout en étant très complexe, il est mar­qué par la simplicité des travailleurs de la terre».

Yacov Nakash, fils de l'immigration française du kibboutz, est 1 'homme qui a réalisé le rêve de I' engrais biologique. Nakash, 70 ans, est arrivé au kibboutz en janvier 1959. «Très vite au kibboutz, je suis entré dans la folie des insectes» raconte-t-il. «Je travaillais dans l'oliveraie et au potager. Mario Lévy était alors inquiet de ce que nous utilisions trop d'engrais chimique. Je me rappelle, chaque fois que nous mettions I' engrais aux grenadiers nous écrivions sur le tableau d’annonces aux membres du kibboutz, de fermer leurs fenêtres. Lorsque nous travaillions au coton, nous passions 22 fois, c'était fou! A partir de là, j'ai commencé à penser à l'engrais naturel qui, peut-être, nous aiderait à diminuer l'engrais chimique. Un jour, alors que je travaillais dans l’oliveraie, j ' ai vu comment une petite guêpe détruisait un insecte nuisible, l'ennemi principal des pommiers, des poiriers et des oliviers, qui avec sa chenille pénètre par la racine, la mange par l'intérieur et tue l'arbre». Nakash a commencé ses expériences en attrapant quelques frelons puis les a développés dans un des abris du kibboutz, pour chercher comment les multiplier. En 1968 il a fait venir du Chili des mites rouges dévoreuses qui s'attaquent aux légumes et aux fruits, et il a continué à importer différents insectes utiles. Au début des années 80, après avoir occupé 6 abris du kibboutz avec des millions d'insectes, il a décidé de les élever dans le ventre de la terre. «J'ai pensé: pourquoi les élever dans des abris ?). Allez, on va en faire un business. J'ai vu de telles réalisations chez les non-Juifs en France, et j'ai pensé qu'on pouvait faire de même ici. Au début on m'a dit que j'étais coucou, que d'élever des insectes était idiot, mais avec le temps on a vu qu'il y avait là une base économique assez bonne. Nous avons demandé au docteur Akiva Pelek et au professeur Dan Gling de l'université de Tel Aviv de nous aider. La compagnie Cooper de Hollande, la plus grande compagnie mondiale d'engrais biologiques nous a pris sous sa protection et nous a aidés. Cette union avec une grande compagnie a tracé la route de notre compagnie Bio Bee».

Sept jours par semaine ...

Tout en marchant sur les sentiers verts du kibboutz vers le premier abri où il avait commencé à élever sa mite parasite cie l'oliveraie, Nakash révèle que, au début, la demande d'insectes était très faible. «Pour la réussite de l'entreprise, il fallait que les agriculteurs du Sharon qui cultivent les fraises, acceptent l'engrais biologique. Ce n’était pas facile» dit-il. «Il y avait un blocage. Ce qui l'a fait sauter, ce sont les abeilles Bombus. Je les ai connues lorsqu'elles sont passées du Liban en Haute Galilée en 1969. Lorsque j'ai dit: Elevons-les, on ne m'a guère écouté. Au début des années 90, lorsque Cooper et de plus grandes marques que nous ont commencé à les commercialiser pour le pollen, on a vu que ridée était bonne».

«Avant de commercialiser les abeilles Bornbus, les cultivateurs pulvérisaient les fleurs avec un appareil appelé Devoranit (abeilles)» dit Shaul Bashi. 36 ans, président de la compagnie Bio Bee et fils de Yonathan Bashi .. Le commerce de l'abeille Bombus en 1991 était la plus grande réussite économique de l'usine. Jusqu'alors on tâtonnait, on faisait des expériences: les abeilles Bombus ont ouvert le commerce à 100% et apporté une augmentation de 25% clans l'agriculture. L'abeille fertilise 7 jours par semaine, même si elle vient d'un kibboutz religieux! Elle n'oublie aucune fleur. L'augmentation de la récolte a été plus importante que son coût, et ainsi tous les agriculteurs se sont procuré ces abeilles».

Dans la grande pièce de reproduction, l'abeille Bombus affiche fièrement ses résultats agricoles. C'est un insecte volant avec un gros corps noir, et sur sa partie inférieure, une ligne jaune et blanche. «Cette abeille est responsable de quelque chose de plus important», insiste Bashi. « Si tu répands des Bombus dans une serre de tomates ou de poivrons ou dans un champs de fraises, tu ne peux pas répandre d'engrais chimique qui la tuerait. Cela nous a aidés à convaincre les agriculteurs de se servir d'engrais biologiques que nous avons développés».

On raconte déjà depuis six ans l'histoire de cette usine qui s'est déjà beaucoup développée. Aujourd'hui le kibboutz de Sedé Eliahou est fier de ses 3 hectares de serres de développement d'insectes» La majorité des agriculteurs qui travaillent avec nous ne sont pas des agriculteurs organiques, mais conventionnels, qui ont décidé de diminuer l'emploi d'engrais et de passer à l'engrais mélangé, chimique et biologique» dit Bashi. «L'engrais biologique, ces 8 dernières années, a surtout augmenté pour les fraises du Sharon et les poivrons du sud. Aujourd'hui 40% de la culture de poivrons d'hiver pour l'exportation sont traités biologiquement. Nous sommes encore une infinité par rapport à l'engrais chimique, mais chaque année nous agrandissons, et notre usine est un appoint important pour l'économie du kibboutz.

Dans l'usine il y a 150 ouvriers, dont 60 sont du kibboutz, et la moitié de la production va à l'exportation. «Nous sommes producteurs pour Cooper» dit fièrement Bashi; «Nous avons en Israël un grand avantage par rapport à l'Europe: les longues journées ensoleillées, qui accélère le développement. Nous sommes les plus grands producteurs dans le monde de la mite Persimillis, et de la guêpe Aphidius. II y a deux ans nous avons aussi créé une sous-société au Chili et un membre du kibboutz la dirige à Santiago. Dernièrement j'ai lu un article sur les dix kibboutz qui réussissent le mieux en Israël: Sassa, Maagan Mikaël, Hatsérirn et Yavné etc ... mais nous ne sommes pas sur la liste et pourtant il faut se rappeler que tout a commencé dans le kibboutz Sedé Eliahou».

«Je continue la voie des anciens, qui ont eu le courage de rêver. Ils ont tenu la route même quand tout était très difficile et compliqué. Quand Mario a commencé, les gens ne l'ont pas pris au sérieux, et ont pensé que même s'il réussissait sur le plan technique, ce n'était pas rentable. Bio Bee est une compagnie qui pendant les 15 premières années n'a pas percé. C'était une mini-compagnie de recherche et de développement, avec des revenus très bas. Je pense que ce qui fait la grandeur du kibboutz Secle Eliahou, c'est la patience de ceux qui ont écouté ces gens, et la persévérance. Bio Bee est la preuve que lorsque certaines personnes font des choses folles, ont peut les transformer en affaires rentables. Le rêve d'une personne travaillant dans des abris, s' est concrétisé en une Société internationale. Grâce à eux nous cueillons aujourd'hui les fruits, c'est-à-dire des insectes !».

L'afforestation acide.

Aujourd'hui dans les palmeraies de Sedé Eliahou se promènent des ânes qui mangent les herbes, qu'autrefois on détruisait par la pulvérisation. L'exemple le plus frappant de la pensée verte des membres de la ferme, c'est l'idée de détruire les rongeurs avec les hiboux. «Depuis toujours l'agriculture a dû lutter contre les rongeurs qui nuisent aux céréales» dit Omer Aviel, du centre du projet hiboux, au kibboutz. Aviel est connu de son kibboutz comme ornithologue endurci, (sa femme trouve encore et encore dans son congélateur des oiseaux morts à empailler !). Il raconte aussi que des terrains massivement traités chimiquement n'ont pas résolu le problème des rongeurs. «La situation difficile et la guerre perdue face à eux, l'ont amené à réfléchir à une autre solution. A Sedé Eliahou on a toujours cherché d'autres solutions».

En 1983 les membres du kibboutz ont envoyé dans les champs de luzerne 14 couples de hiboux importés du centre zoologique de l'université de Tel Aviv. «Dans les plaines du sud les cultivateurs sèment de la luzerne, qui produit plusieurs années, elle est fauchée toutes les 3 semaines et repousse» dit Aviel. «Le mulot et le campagnol sont les rongeurs qui se reproduisent le plus vite. Ils préfèrent la verdure à toute autre nourriture et aiment particulièrement la luzerne. Pour protéger les champs, les agriculteurs devaient beaucoup traiter, ce qui empoisonnait les sols et même la nourriture donnée aux bêtes. On pense que des populations de rapaces ont été ainsi décimées dans la vallée du Houlé en mangeant les rongeurs empoisonnés».

L'idée d'utiliser les hiboux contre les rats a pris forme grâce au docteur Yossi Lashern, qui dirigeait alors le centre de données sur les rapaces des «Amis de la Nature». Lashem conseilla à Aviel de faire l'expérience, et celui-ci accepta, bien qu'un an auparavant cette même expérience avait échoué au kibboutz Yad Mordehaï, les hiboux étaient morts du poison répandu contre les mulots. «On a pensé que puisqu' il y avait déjà chez nous des terrains organiques, la chance de réussite était plus grande», dit Aviel.

A Sede Eliahou la première expérience échoua également. «Après avoir libéré les hiboux de leurs caisses, ils disparurent «raconte Aviel. Après un an il fut étonné de constater que d'autres hiboux, sauvages ceux-ci, se trouvaient clans les caisses abandonnées. Malgré le retour encourageant des rapaces nocturnes, on décida de ne pas recommencer tout le processus et de se contenter de déposer 200 autres caisses clans les kibboutz environnants. En parallèle les agriculteurs et les chercheurs étudieraient l'expérience. Cela m'a pris 15 ans jusqu’ ' à ce que je comprenne à fond le sujet et j'ai eu l'impression d'une harmonie entre la nature et l'agriculture», dit Aviel. Suite à la réussite dans la vallée, Yossi Lashern décida de foncer et de montrer les résultats obtenus à d’autres régions.

Les hiboux ont-ils réussi à dominer les rongeurs?

«Nous avions alors de grosses pertes dans les palmeraies, le rat se logeait dans les grappes de dattes. Après quelques années d'activité des hiboux dans la palmeraie et ses environs, on a constaté une grande baisse dans les dégâts de la palmeraie et dans le verger de grenadiers. Puis nous avons appris comment travailler avec les hiboux dans des terrains non organiques. Mais le plus important selon moi, c'est que cela fait déjà 10 ans que l'on n'utilise plus les insecticides chimiques dans la vallée de Beit Shéan pour les champs de luzerne. Il faut se rappeler qu’un couple de hiboux chasse entre 1500 à 2000 rongeurs pendant la saison de couvaison».

Ne craignez-vous pas que les hiboux s'attaquent aux rongeurs non nocifs ?

«Il est très clair pour nous qu'il ne faut pas attaquer l'ensemble naturel des rongeurs. Nous veillons à n'appliquer le projet qu'aux terres agricoles. Les liquides stomacaux des hiboux sont peu acides, ils ne digèrent pas les os ni les fourrures, mais les rejettent en petits rouleaux dont l'examen nous montre que 90% de l'alimentation des hiboux est constituée de rongeurs nocifs».

Les hiboux sont-ils devenus partie de l'identité de votre kibboutz?

«Chez nous un enfant prononce le mot hibou après Maman et Papa. C'est son 3ème mot ! Mes petits enfants viennent avec moi au moment de la couvaison comme quelque chose d'évident. Avec le temps je me suis attaché à ces oiseaux. Il y en a un qui a logé Il ans chez nous».

Le docteur Lashem a décidé que si le projet réussissait dans la vallée de Beit Shéan, il faudrait l'étendre à tout le pays et s'associer au ministère de l'Agriculture, de l'Environnement et aux Amis de la Nature. «Actuelle­ment il y a 1700 caisses dans le pays», dit Aviel, «Dernièrement des faucons sont également entrés dans l'histoire. Des faucons qui couvent près du kib­boutz complètent le travail des hi­boux. Ils chassent durant le jour et les hiboux la nuit. Aujourd'hui, à certains endroits, des caisses sont éparpillées pour les chauves-souris mangeuses de mites dont les larves nuisent aux dat­tes et aux blés. Dans le kibboutz on en a installé quelques-unes pour qu'elles mangent les moustiques. C'est vrai­ment la fête !».

Veillons à la santé

«Ce n'est pas une révolution d'aujourd'hui» dit Levy avec son éternel sourire, lui qui se souvient comment, au début des années 80, il avait demandé au kibboutz de lui laisser 20 hectares pour faire l'expérience de culture de légumes biologiques. «Les instructeurs agricoles du ministère de l'Agriculture qui nous accompagnaient étaient effrayés quand ils voyaient que je ne mettais pas d'insecticide. Ils m’ont crié dessus m'ont dit que tous les produits seraient perdus à cause de mes bêtises. Cette idée était alors impensable. J’ai dit OK, mais malgré tout j'ai continué. D'abord parce que je suis allé étudier l'agriculture organique en Suisse, je savais qu'il ne s'agissait pas d'une utopie, que c'était une avancée, même sur le plan économique». Après 3 ans de travail, Lévy a réussi à montrer des résultats. «Malgré les problèmes, comme celui des mauvaises herbes, le projet a réussi, et déjà ces années-là nous avons commencé à exporter nos légumes en Suisse, Allemagne, Hollande et Grande Bretagne. Les gens du kibboutz se sont pris au jeu, ainsi nous avons pu avancer. Seul on ne peut rien. Ici il y avait une ouverture. Il se peut que je l'ai encouragée, mais il y avait beaucoup de gens qui ont soutenu le projet, et tout doucement nous avons développé une ferme organique».

La bonne nouvelle de Sede Eliahou s'est vite répandue hors du kibboutz, surtout grâce à Lévy qui, à 82 ans. a créé la 1 ère association des Agriculteurs Organiques en Israël.

«A cette époque j'ai voyagé 4 à 5 jours par semaine, de Dan à Eilat, dans chaque ferme, dans chaque village; ici une conférence, là une explication dans un champ, un kibboutz, en écrivant des articles. Je me suis assis avec des gens, j'ai réfléchi aux profits, j'ai été en rapport avec les acheteurs de l'étranger. Tout ceci pour développer et fonder l'agriculture organique en Israël».

Les résultats ont été reconnus par les autorités: «Quand ils ont vu que nous réussissions, ils m'ont appelé pour que j'enseigne aux autres agriculteurs» raconte Lévy. Il a répondu positivement, bien que cela développe des concurrents à son kibboutz. «Notre projet n'était pas de nous remplir le ventre de dollars, mais de fonder une autre agriculture, explique Lévy. «J’ai vu en cela quelque chose d'humain, de sain, que nous devions faire comme humain pour les humains et non comme hommes d'affaires». Lévy voit un lien très fort entre l'approche écologique du kibboutz et la foi religieuse de ses membres, sionistes religieux. Pour lui, l'agriculture biologique-organique est partie intégrale de sa vision qui voit la Création comme une unité. Chaque attaque importante contre la Nature heurte tout l'ensemble.

L'état de l'agriculture organique en Israël te satisfait?

«Nous n'en sommes qu'au début.

Aujourd'hui seulement 2 % des terrains agricoles travaillent à la purification par l'agriculture organique. Il est difficile de persuader les gens d'aller dans ce sens, car ils ne voient que les problèmes qui sont sous leur nez. On ne va pas chercher les vraies solutions. L'erreur de la plupart d'entre nous, c'est de voir seulement l'utilisation des insecticides chimiques en agriculture comme la pire des choses, mais il faut voir qu'il y a des dommages qui avec le temps changent l'équilibre des plantes. La destruction des herbes de toutes sortes et les différentes hormones ont une influence néfaste, peut être encore plus grande que l'engrais chimique, et elles influent sur le sol, sur les plantes, sur les animaux et sur l'homme. Les hommes souffrent de tout ce qu'ils mangent».

« Ecoutez donc, écoutez-moi, et mangez ce qui est bon; que vous trouviez votre jouissance dans des mets savoureux. » Isaïe 55,2.

Flashes d’espoir: un Palestinien décide de faire traduire un livre hébreu en arabe

Par Ethan Brenner inNew York Times

Il y a six ans, quand la violence était quotidienne, le fils d'Elias Khoury, âgé de 20 ans, fut tué dans une attaque terroriste palestinienne. Les Khoury sont palestiniens, et le fils George était sorti pour une tournée de jogging. Une auto passa près de lui et un coup de fusil le frappa dans le dos. Ce qui fut suivi d'une excuse des meurtriers: Pardon, nous avons cru que c'était un Juif.

Mr Khoury fut non seulement affligé mais surtout abasourdi. Lui, un avocat connu à Jérusalem, qui luttait fréquemment contre les confiscations de terres palestiniennes, considérait la violence comme un poison nocif pour son peuple.

Alors en souvenir de son fils George, un sympathique musicien étudiant en droits, Mr Khoury fit une chose qui choqua bien des membres de sa communauté : il paya la traduction en arabe de l'autobiographie d'Amos Oz, l'auteur israélien le plus en vue, connu aussi comme une « colombe ». La version arabe Une histoire d 'amour et de ténèbres a été mise en vente le mois dernier à Beyrouth, et elle a reçu un accueil positif de la part d’Abdo Wazen, éditeur culturel du grand journal Al-Hayat, mais aussi bien sûr suscité quelques réactions furieuses. Expliquant sa décision Mr Khoury dit que la littérature est un pont et il expose son intention dans la préface : «Ce livre est le récit de la renaissance du peuple juif. Nous pouvons y apprendre comment le peuple juif, émergeant de la tragédie de l’Holocauste, fut capable de se réorganiser et de bâtir son pays en devenant un peuple indépendant. Si nous ne pouvons pas en tirer un enseignement pour nous-mêmes, nous ne pourrons rien faire pour notre propre indépendance. »

Mr Khoury ne peut guère être présenté comme un Sioniste. Les terres de sa famille près de Nazareth, environ 75 hectares, ont été confisquées par Israël pour des « raisons de sécurité », raconte-t-il, peu après la création de l'Etat, ce qui entraîna la ruine de sa famille.

Plus tard, en 1975, son père, Daoud, fut tué dans une attaque terroriste au centre de Jérusalem, par une bombe cachée dans un frigidaire, qui tua 13 personnes. Elias Khoury lui-même se trouvait alors à quelques mètres de l'endroit.

Ayant perdu sa terre par l'action d'Israël et son père et son fils dans ces actes de terrorisme palestinien, il était dans une position unique pour exiger des deux côtés une révision de leurs attitudes. Nationaliste palestinien, parlant couramment l’hébreu et l'anglais, Mr Khoury dit qu'il pensait que l'autobiographie d'Amos Oz, retraçant la vie des réfugiés juifs dans les années 30 et 40, pourrait être un moyen qui aide les Palestiniens et d'autres Arabes à voir les Juifs sous un nouveau jour.

Le livre d'Amos Oz est considéré comme une œuvre exceptionnelle de la littérature hébraïque contemporaine. Bien que ne touchant pas explicitement le problème de la coexistence, comme certaines autres de ses œuvres, il donne une image émouvante des réfugiés juifs d'Europe essayant de se frayer un chemin.

Mr Wazen, le critique libanais, parle des «  belles œuvres» de Mr Oz, du « monde unique» qu'elles décrivent, et il conclut que cet « ennemi » est vraiment digne d'être lu.

Sari Nousseibeh, un philosophe palestinien, qui a, dans une œuvre monumentale, donné sa propre autobiographie « Il était une fois un pays », remarque que c'est en lisant le livre d'Amos Oz qu'il avait été frappé par les existences parallèles des Juifs et des Palestiniens de l'époque. «Les deux peuples immergés dans leur propre tragédie, n'ont-ils pas été oublieux de - ou même hostiles à - la tragédie de l'autre? Cette incapacité d'imaginer la vie de 'l'autre' n'est-elle pas au cœur du conflit israélo-palestinien? » Mr Khoury pense que si.

«Si nous ne nous comprenons pas l'un l'autre, il y aura toujours suspicion et fossés infranchissables», dit-il.

Mr Oz qui a eu l'occasion de faire connaissance de la famille Khoury, Elias, sa femme et leurs deux autres fils, leur a dit combien cette initiative de traduire son livre l'a profondément ému.

« C'est le livre idéal pour entrer dans la langue arabe, parce qu'il transmet une image « non-héroïque » de la naissance d'Israël, et la description d'Israël comme un camp de réfugiés. » Et il poursuit: « Elias veut bâtir un pont ‘émotionel’ entre nos peuples, et pour ce faire, il faut lire le narratif de l'autre. »

Oz note dans son livre que son père se rappelait, jeune garçon en Europe, avoir vu les graffitis sur les murs : «Juifs. allez-vous-en en Palestine!» et quand il arriva ici quelques années plus tard les graffitis lui disaient : «Juifs, hors de Palestine! »

Oz ajoute: J’ai un grand désir que les Arabes lisant cela réalisent qu'Israël, comme la Palestine, est un grand camp de réfugiés. »

Hwaida Saad, de Beyrouth, Liban, a collaboré à la rédaction de cet article.

Traduction : Yohanan Elihaï

L’importance d’un mot et d’une lettre

I.C.

Le mot Holocauste figurait dans les documents relatifs à la fondation de Yad vashem, ensuite de quoi il devint, pendant un certain temps, le terme reçu pour désigner l'extermination des Juifs européens, décidée et mise en œuvre par l'Allemagne. Il provient d'un passage de la Tora concernant l'offrande perpétuelle [Héb. Ola], que l'on offrait, matin et soir, sur l'autel des sacrifices, au Temple de Jérusalem, La simple lecture du texte dans la traduction de la Vulgate montre pourquoi ce terme avait pu être choisi pour décrire le martyre du peuple juif durant la seconde Guerre mondiale: "Lex holocausti cremabitur in altari." (Lévitique 6,1).

Ce terme avait déjà été utilisé dans des contextes d'oppression raciale. La presse y avait recouru pour décrire le pogrom de Kichinev en 1903. De même le NeH' York Times pour signaler l'autodafé de livres à Berlin en 1933 et Winston Churchill pour décrire le «massacre administratif »des Arméniens en Turquie, au début du 20éme siècle.

A lusage, le mot Holocauste suscita des réserves en raison de ses connotations religieuses, aussi, se mit-on à parler plutôt de Shoa. Ce terme revêt, en hébreu biblique, une signification tout à fait différente, comme peuvent le montrer certains exemples: «Sur toi, arrivera soudain un saccage» (Isaïe 47, Il) : «Quand viendra la tempête» (Isaïe 10) : «La violence des méchants» (Proverbes 3,10). En dépit d'une variété de nuances, Shoa dénote l'idée de désolation, mais nullement de sacrifice. Maintenant, ce terme désigne le fleuve de cendres qui emporta dans ses remous six millions de victimes, à moins qu'il ne soit préférable de dire: «six millions de fois une victime.»

A propos de ce chiffre, un esprit perceptif a signalé les implications éventuelles d'une anomalie textuelle de la Tora au verset: « Vous retournerez, chacun dans son clan'» (Lévitique 25,10), En effet, la forme verbale en question, [Héb. Tachouvou], ne comporte pas la lettre vav qui, grammaticalement serait requise. De plus, il se fait que la valeur numérique de ce verbe est: 708 et que la proclamation de l'Etat d'Israël, effectuée en 1948, a eu lieu, selon le calendrier hébraïque, en 5708, ou tout simplement en 708, suivant le langage courant.

Qu'est-ce à dire? Sinon que l'absence, à cet endroit crucial, de la lettre val' dont la valeur numérique est six, semble symboliser un manque. Ne serait-ce pas pour nous rappeler qu'au moment du retour du peuple juif à Sion, six millions des siens allaient manquer à l'appel.

Un jour de commémoration de la Shoa au Yad Vashem

Agnès Staes

Le jour de la commémoration de la Shoa notre petit groupe, arrivé en avance au Yad Vashem par les navettes qui circulent gratuitement entre le haut du mont Herzl et le Yad Vashem (mémorial de la Shoa), nous avons eu le temps d'observer. Le dispositif de sécurité était maximum car le gouvernement allait être présent.

Des gens de la sécurité étaient partout, l'hélicoptère tournait au dessus de nos têtes. Des journalistes s'installaient avec leurs énormes caméras, certains commençaient des interviews. Sur les chaises des premiers rangs, des couronnes de fleurs soigneusement numérotées nous attendaient, avec des banderoles indiquant quelle organisation les offrait.

Soudain, j'ai vu un attroupement de gros appareils de photos autour d'un homme en fauteuil roulant: je me suis timidement approchée pour voir sur sa veste une étoile jaune « Jude» et un brassard autour du bras représentant le drapeau d'Israël. Je l'ai pris en photo et sa fille très fièrement m'a demandé si c'était pour un journal. J'ai dit «Oui, pour un site Internet francophone». Elle m'a dit « C'est mon père : Mordechai Fuchs survivant du camp de Treblinka. Cela fait 40 ans qu'il est présent à la cérémonie du jour de la Shoa. » Et Mordechai ajouta à un autre journaliste, « Nous avons une armée, j'ai des enfants et des petits enfants, c'est notre vraie victoire sur les nazis. »

Les soldats ont fait quelques manœuvres, le gouvernement est arrivé : le président Shimon Peres, le premier ministre Benjamin Netanyahu, le président de la Knesset, la présidente de la cour suprême, les chefs d'état major, le maire de Jérusalem. Il y avait aussi des représentants de certains gouvernements et des organisations d'Israël et du monde entier pour les survivants de la Shoa. A 10 heures, la cérémonie commença par deux minutes de sirène tellement solennelles et émouvantes, toute l'assemblée debout, dans un silence à couper le souffle. Nos pensées se tournent bien évidemment vers ces 6 millions de personnes anéanties à travers la Shoa.

Puis c'est un défilé incessant de personnes, appelées par le maître de cérémonie, qui s'approchent du monument de la place de Varsovie en déposant leur couronne.

Nous y étions pour déposer la couronne de deux communautés catholiques : les Bénédictins d'Abu Gosh et les Béatitudes. Nous sommes passées après les sœurs de Darmstadt.

Il y a eu un événement qui nous a beaucoup touchés : une vieille dame très bien habillée, survivante de la Shoa, est arrivée vers nous accompagnée de deux jeunes qui nous ont demandé si elle pouvait porter la couronne avec nous. Elle n'avait pas su ou compris que cette possibilité s'offrait à ceux qui participaient à cette cérémonie et avait tellement envie d'avoir cette chance. Elle s'avançait au milieu de deux personnes en habits religieux ~ «Aucun nom ne doit être oublié»: tel est le sens et le nom de cette cérémonie.

L’antisémitisme en nette progression dans le monde

Jean-Marie Allafort

Comme chaque année, à l'occasion de lajournée de la commémoration de la Shoa en Israël, l'Institut de Recherche sur l'Antisémitisme et le Racisme a publié les données relatives aux actes anti-juifs dans le monde. Les chiffres sont des plus inquiétants puisqu'on enregistre une hausse de plus de 100 % des violences antisémites. Les pays en tête de ce triste palmarès sont 1 Angleterre, la France et le Canada. L'an dernier, on a constaté partout dans le monde une progression de l'antisémitisme en particulier à la suite de l'opération «plomb durci» dans la Bande de Gaza en décembre 2008 et janvier 2009. Une augmentation aussi aiguë des actes antisémites n'avait pas été enregistrée depuis 20 ans. Pour l 'annéepassée, 1129 actes de violence anti-juive ont été signalés dans le monde contre 559 en 2008. Le professeur Dina Porat, directrice du l'Institut de Recherche sur l'Antisémitisme et le Racisme, s'est exprimée lors de la conférence de presse présentant les résultats de l'enquête en déclarant «que, de tout évidence, le nombre d'actes antisémites était bien supérieur aux chiffres officiels puisque toutes les victimes ne portent pas plainte ct qu'il est parfois difficile d'établir un lien direct avec l’antisémitisme.» Selon ce rapport, l'Angleterre arrive au premier rang des pays où l'antisémitisme a le plus progressé avec pas moins de 374 actes de violences contre des Juifs ou des institutions juives. L' année précédente, on avait enregistré «seulement» 112 cas. En France, pas moins de 195 actes antisémites (contre 50 en 2008), ont été constatés. Le pays où l'augmentation de la violence anti­juive a été la plus significative est sans aucun doute le Canada avec pas moins de 136 cas officiels contre 13 l'année précédente. Les Etats-Unis, où vivent actuellement plus de 5 millions de Juifs, a également été le. théâtre de 116 cas de violences antisémites alors que 2008, on en avait signalé 98.

Par contre dans les pays de l'ex-Union Soviétique, on constate une baisse des incidents antisémites : en Russie 28 contre 40 l'an précédent et en Ukraine 20 contre 38.

Le rapport ne se contente pas de publier des chiffres mais avance quelques analyses sur cette progression de l'antisémitisme. Ces actes anti-juifs sont surtout le fait d'activistes de l'extrême gauche ainsi que des immigrés des pays musulmans influencés par des mouvements de l'islam radical. Cet antisémitisme qui se confond avec l'antisionisme s'épanouit dans de nombreuses universités occidentales et a désormais pignon sur rue au nom du droit de la liberté d'expression.

Pour autant, il ne faudrait pas croire que l'antisémitisme de l'extrême droite est en recul. Des groupes bien organisés sont toujours très actifs dans la propagande anti-juive particulièrement en Europe.

Le rapport précise que «la présentation de l'Etat d'Israël comme symbole du mal et l'origine des tous les maux de la terre entraîne comme conséquence chez de plus en plus de personnes la pensée que la disparition de l'Etat d'Israël comme Etat juif apportera la rédemption du monde.»

Signalons également que les actes et les déclarations antisémites se sont multipliés chez les adolescents et les jeunes souvent «par ignorance et parce qu'Israël est présenté comme le symbole du mal par excellence». L'émergence de nombreux sites internet anti-juifs ou la multiplication des groupes anti-Israël sur Facebook est symptomatique de cette évolution. Le professeur Porat fait remarquer que lorsqu'elle a commencé ses recherches sur l'antisémitisme dans le monde en 1989, elle n'avait relevé que 78 cas de violences ami-juives. Depuis lors, la haine du Juif ct d'Israël ne cesse de se propager sans que personne ne soit vraiment capable de la juguler.

Un évêque italien: «Après tout, historiquement parlant, les Juifs sont déicides».

Que dire du vieil antijudaïsme chrétien ? Il est loin d'avoir rendu l'âme. Pas plus tard que vendredi dernier, un évêque italien émérite du nom de Mgr Giacomo Babini a déclaré sur le site Pontifex Roma que les scandales de pédophilie dans l'Eglise catholique sont un complot fomenté par «les sionistes» :  « Je pense probable une attaque sioniste, étant donné sa puissance et son raffinement, ils ne veulent pas de l'Église, ils en sont des ennemis naturels. Après tout, historiquement parlant, les Juifs sont déicides». L'ancien évêque de Grosseto ajoute dans son interview que «les ennemis de toujours du Catholicisme, les Francs-Maçons et les Juifs, et l'entrelacement entre eux est parfois peu facile à comprendre». Le prélat ne se contente pas d'accuser les Juifs de complots et de déicide, il va jusqu'à affirmer qu'ils sont responsables de leur propre massacre : «Ne croyez pas que Hitler était fou. La vérité est que la fureur criminelle nazie a été déclenchée suite aux excès et à la mauvaise gestion économique des Juifs qui étranglaient l'économie allemande».

Chant du mois : Une espèce rare – Zan nadir

Yohanan Elihaï

Corine Alal est l'une des chanteuses rock les plus populaires d'Israël. La musique de la chanson Zan Nadir (une espèce rare) a été composée par Corine Al' al elle-même sur des paroles de Meïr Goldberg.

Nous avons peur de notre ombre

Nous nous collons contre les murs

Des maisons

Le plus souvent nous avons honte

De notre corps (ou : Dans notre corps ... )

Nous creusons des abris.

Nous fuyons la fête effrénée

Nous nous entassons dans des barques à rames,

Toute terre ferme est un bateau qui coule

Quand même nous creusons des abris.

Nous sommes une rare espèce,

Un oiseau bizarre,

On a des rêves dans les airs,

Et la tête en pleine terre.

Nous avons peur de notre ombre

Nous nous collons contre les murs

Des maisons

Le plus souvent nous avons honte

De notre corps

Nous creusons des abris.

Nous fuyons la fête effrénée

Nous nous entassons dans des barques à rames,

Toute terre ferme est un bateau qui coule

Quand même nous creusons des abris.

Nous sommes une rare espèce,

Un oiseau bizarre,

On a des rêves dans les airs,

Et la tête en pleine terre.

Nous trompons, mais surtout

Nous nous trompons nous-mêmes

Pas aveugles, mais nous n'ouvrons pas les yeux.

On ne sait trop ce que nous laisserons

Après nous, à part une masse de peurs.

Nous sommes une rare espèce,

Un oiseau bizarre,

On a des rêves dans les airs,

Et la tête en pleine terre.

Humour en finale

Yohanan Elihaï

Une fille à marier...

C'est une mère juive qui crie dans un bus:

– Y a-t-il un médecin par-là, SVP un médecin vite ! 

Une personne de 30 ans s'approche et dit:

– Oui, c'est bon,  je suis médecin!

Et la dame répond: - Voudrais-tu que je te présente ma fille ?