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Prière de St Ignace

 « Seigneur Jésus,
apprenez-nous à être généreux,
à vous servir comme vous le méritez,
à donner sans compter,
à combattre sans souci des blessures,
à travailler sans chercher le repos,
à nous dépenser sans attendre d’autre récompense
que celle de savoir que nous faisons votre Sainte volonté. »

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N° 43 – Septembre-Novembre 08

Ain-Karim – Église Russe et Église de la Visitation

Sommaire :

-       Editorial 

-       Histoire : la première immigration des Juifs du Yémen

-       Eté 2008 : 75 000 Français en Israël

-       Jérusalem, ville trois fois sainte (3ème partie)

-       Roch Hashana 2008 : Israël compte 7, 3 millions d’habitants

-       Connaissance du pays : Beersheva

-       Fuite des cerveaux en Israël

-       Découverte d’une inscription faisant référence au grand prêtre

-       Le YMCA de Jérusalem, ses origines, sa vision, son histoire

-       Vers l’Olivier de la réconciliation 

-       Un poème liturgique de Roch Hashana chargé de mémoires

-       Kippour 2008 : 63% des Juifs d’Israël ont l’intention de jeûner

-       Deux frères : Jacob et Esaü

-       La parole de Dieu et ses traductions

-       Chant du mois et l’humour en final

 

Editorial : deux scrutins nationaux en trois mois

            Un écho d’Israël change de format. Nous vous proposons à compter de maintenant une nouvelle formule que nous espérons être plus agréable avec des articles de fond et des papiers plus brefs. Nous nous excusons pour le retard dans la publication de ce numéro. 

Israël est à nouveau en période électorale. Moins de trois ans après l’entrée en fonction de la présente Knesset, les turbulences politiques de ces derniers mois ont fini par avoir raison de l’actuel gouvernement. Tsipi Livni a échoué dans la formation d’une coalition viable et stable permettant de tenir jusqu’aux échéances électorales prévues en 2010. Cet échec est dû en grande partie aux refus des religieux séfarades du Shass de se joindre à un gouvernement de la nouvelle leader de Kadima. Le Shass ne prend guère de risques en choisissant les élections. Leurs électeurs sont fidèles et ne passeront pas à un autre camp. De plus, ils espèrent que Netanyahu gagnera le scrutin, valeur plus sûr que Livni surtout sur le plan des conceptions politiques. La campagne électorale qui s’ouvre risque d’être particulièrement mouvementée. Le combat entre Livni et Netanyahu s’annonce dur.

Les Palestiniens sont eux aussi appelés aux urnes en janvier prochain pour élire un nouveau président de l’Autorité Palestinienne. Les enjeux sont énormes. Est-ce que le Hamas s’est encore renforcé ces derniers mois ou est-ce que le Fatah a réussi à se regagner la confiance du peuple Palestinien ?

Une chose est sûre, durant ces prochains mois, aucune avancée significative des négociations israélo-palestiniennes ne sera possible. Mahmoud Abbas ne peut se présenter devant les Palestiniens comme ayant fait des compromis, au risque de donner la victoire au Hamas. Ehud Olmert est Premier ministre d’un gouvernement de transition et n’a pas de légitimité pour signer un quelconque accord. S’il s’y risquait, il nuirait grandement à Tsipi Livni.

Jean-Marie Allafort 

 

Histoire : la première Immigration des Juifs du Yémen

La première immigration des Juifs yéménites vers la terre d’Israël eut lieu dans les années 1881-1914. Durant cette période 5 000 Juifs du Yémen montèrent vers la Terre de la Promesse. Cette immigration reçut le nom de « Eile Ba Tamar » (« Je monterai au palmier ») expression tirée du Cantique des Cantiques.7, 9 car le mot Ba Tamar inclut les mêmes lettres que celles correspondant à l’année 1882 (tav resh mem bet), année où le premier groupe d’immigrants arriva.

Cette immigration commença en 1881 et se poursuivit sans interruption jusqu’à la Première Guerre Mondiale. Elle comprit deux vagues : une première de 1881 à 1906 et une seconde de 1907 à 1914. Deux raisons essentielles à cette immigration : la lourde pression économique et les décrets édités contre les Juifs yéménites sous l’autorité de l’Empire ottoman. Mais il y avait aussi des raisons religieuses, et la principale était la volonté de mettre en pratique le commandement de s’établir en terre d’Israël. Mais derrière cette immigration, il y avait peut être aussi la rumeur selon laquelle le Baron de Rothschild distribuait des terres aux Juifs du pays. Des envoyés venant d’Israël aidèrent à l’organisation de cette immigration, certains agissant en tant que délégués des Organisations sionistes.

A la fin de 1881, quinze familles « montèrent » en terre d’Israël, de Sanaa vers Jérusalem. Au début de 1882, un nouveau groupe de 150 personnes partit du Yémen : la moitié décéda pendant le trajet, de maladie et de faim. Au milieu de l’année 1882, à Jérusalem, 2000 Juifs yéménites étaient déjà présents. A cette époque, la plupart des habitants de l’ancienne population juive subsistait grâce à des dons récoltés auprès des Juifs de la Diaspora et partagés selon une décision communautaire.

Les immigrants yéménites ne profitèrent pas au début de cette distribution ; aussi vécurent-ils surtout de mendicité et de travaux occasionnels. Leurs conditions de vie furent donc très difficiles : la plupart n’avaient pas même un toit où dormir, et certains furent obligés d’habiter dans des grottes de la région de Siloé. Les rapports entre ces nouveaux immigrants et les habitants juifs déjà présents en Israël ne furent pas spécialement bons. Ces derniers, en effet, ne les considéraient pas comme de vrais Juifs, parce qu’ils se distinguaient par leur langue, leur culture, leurs coutumes liturgiques différentes et leur habillement ; toutefois, au bout d’un certain temps, quelques responsables de la communauté juive vinrent à leur aide et les soutinrent dans leur recherche de travail et de logements.

Le groupe suivant arriva par bateau au port de Jaffa et s’y fixa. Les années suivantes un nouveau groupe arriva. En 1911, Shemouel Yavnieli, l’un des leaders du mouvement ouvrier, partit pour le Yémen, délégué par son parti (Hapoël Hatsaïr) et les responsables juifs de Palestine, pour encourager les Juifs yéménites à immigrer. Sa mission dura plusieurs mois et, à la suite de cela, 2 000 Juifs yéménites arrivèrent en terre d’Israël, et ce jusqu’en 1914.

La majorité des immigrants fut installée, sur l’initiative des autorités sionistes, dans les localités suivantes : Yavniel, Metula, Zikhron Yaakov, Hedera, Ben Shemen et Petah Tikva. Ils y travaillèrent comme agriculteurs.

Dès la première immigration, le principal problème d’intégration se pose pour les Juifs orientaux. Leur sionisme est plus religieux que politique, leur conception d’Israël, terre sainte, se heurte à celle du Yishouv, laïque et socialiste (La Histadrout est fondée en 1880). Leur mode de vie plus traditionnel se retrouve confronté à des Européens qui ont bénéficié de la modernité. Lorsqu’ils s’installent en terre d’Israël, les orientaux voient leur structure familiale remise en question : l’autorité du père diminue, l’égalité de l’homme et de la femme ne correspond pas à leur vision habituelle. Les enfants sont envoyés dans des écoles laïques qui font totalement abstraction de leurs traditions sociales et religieuses.

Mais le plus grand choc, non encore éclairci à ce jour, qui fut un vrai traumatisme, est l’affaire dite des « enfants du Yémen ». Un nombre indéterminé (peut être 3 500), disparut dès leur arrivée. Très affaiblis par le trajet, envoyés dans les hôpitaux, ils ne réapparurent pas. Trois commissions d’enquête n’ont jamais donné de conclusion. La désorganisation, le mauvais enregistrement entourant leur arrivée, n’ont pu entamer les rumeurs persistantes au sein de la communauté yéménite, évoquant le fait que ces enfants avaient été donnés à des familles Ashkénazes. Seuls quinze cas ont pu être établis.

Cécile Pilverdier

75 000 Français cet été en Israël

Depuis quelques années, le nombre de Français passant leurs vacances d’été en Israël est en constante augmentation. Selon le ministère israélien du Tourisme, la majorité des touristes européens qui visitent la Terre Sainte sont des Français.

Par rapport à l’été dernier, on constate une augmentation de 10% du nombre de vacanciers en provenance de l’Hexagone. Depuis le début du mois juillet ce sont un peu plus de 75 000 touristes français (très majoritairement des Juifs) qui ont séjourné en Israël. Depuis janvier 2008, ils sont près de 150 000 à s’être rendus en Israël.

Les destinations préférées des vacanciers français sont d’abord la ville de Tel Aviv (très largement en tête) puis Jérusalem, Netanya et enfin la cité balnéaire d’Eilat.

Rédaction

 

Jérusalem, ville trois fois sainte ! (3ème partie)

 L’islam et Jérusalem (al-Quds al-Sharif)

            Dernière des trois religions monothéistes, l’islam s’implante au Proche-Orient et en Eretz Israël avec la venue des armées arabes sous le commandement d’Omar Ibn al-Khattab, en 637 de notre ère.

Á l’avènement de l'islam, les musulmans appellent d’abord Jérusalem Beit al-Maqdis (Maison du Temple), Beit al-Quds (Maison Sainte) et Ilyâ', nom dérivé d’Aélia Capitolina de l’époque romaine. Elle eut aussi d’autres appellations dont  al-Madina, al-Moqaddasa (la Ville Sainte) ou, comme la nommait les écrivains et les voyageurs arabes du Moyen-Âge, al-Quds al-Sharif (la Sainte et la Noble).

            Comment, dans la conscience et dans la pensée musulmanes, Jérusalem est-elle devenue le troisième lieu saint de la religion mahométane ?

       Nous pouvons noter que la présence des communautés juives et chrétiennes dans les pays d’Arabie a sans nul doute influencé le prophète Mahomet. De ces communautés monothéistes il puisa une partie importante de son message. Certaines traditions juives et chrétiennes, y compris les traditions bibliques, se retrouvent dans le Coran, ce qui nous fait penser que plusieurs des grandes idées du Prophète furent inspirées par le legs, tant juif que chrétien, comme la notion du monothéisme, le jugement dernier…

       Pour les musulmans, la sainteté de Jérusalem est intégrante à cet héritage juif et chrétien et, de fait, la première direction vers laquelle le Prophète se tournait pour la prière (qibla), n’était pas La Mecque mais Jérusalem : « Les insensés parmi les hommes demanderont : Pourquoi change-t-il la qibla ? Réponds-leur : L’Orient et l’Occident appartiennent au Seigneur ; il conduit ceux qu’il veut dans le droit chemin » (Coran, sourate 2. 136). Cependant, vu le refus des Juifs à collaborer avec Mahomet et à recevoir ses révélations, le Prophète se détourna de Jérusalem et fit de la Kaaba de La Mecque l’unique lieu d’adoration d’Allah. Un hadith (recueil des actes et des paroles du Prophète) interprète cette démarche de Mahomet : « Le Prophète a eu le choix de se tourner dans la direction qu’il désirait. Il choisit la Maison Sainte à Jérusalem pour satisfaire le peuple du Livre. C’était sa qibla pour 16 mois [...] jusqu’à ce qu’Allah le fasse se retourner vers la Maison (c’est à dire la Kaaba à La Mecque). » (Tabari, Commentaire, 923, Hadith.)

Si les noms Médine et La Mecque sont couramment mentionnés dans le Coran, le nom  Jérusalem n’apparaît dans aucune sourate. En revanche cette ville est mentionnée plus de mille fois dans la Bible ! Ceux qui possèdent une version française du Coran peuvent noter que le mot arabe « al-Aqsa » (l’Éloignée) est traduit ou interprété par « Jérusalem ». Mahomet ne fit aucun cas de Jérusalem après avoir choisi La Mecque et aucune preuve historique n’atteste sa présence à Jérusalem.

       Un événement important dans l’histoire de l’islam fut la prise de Jérusalem - ville sainte par excellence de l’Empire byzantin - par le calife Omar. Avant les conquêtes de l’islam, quand le prophète Mahomet gouvernait depuis Médine, Jérusalem étant en dehors de l’orbite musulmane, n’avait pour cette nouvelle religion aucune importance politique ou religieuse. Mais, dès sa conquête par Omar, elle entra dans le dar al-Islam (territoire de l’islam) : « Depuis la conquête de Jérusalem par le calife Umar (qu'Allah l'agrée), elle a acquis un caractère purement islamique. La terre foncière est devenue la terre d'investigation charitable islamique et de confiance (Waqf) le long des générations musulmanes, et elle ne peut pas être cédée, vendue ou hypothéquée. Al-Mawardi a rapporté : ‘’Une terre que les musulmans conquièrent par la force devient Dar Islam (territoire islamique) et ce, si des musulmans vivent sur cette terre ou des polythéistes qui ont eu la permission d'y retourner, parce qu'elle est la propriété des musulmans. Elle ne peut pas être cédée aux infidèles; ainsi elle ne peut pas redevenir encore Dar Harb (une demeure de guerre)’’. » (par Dr Abd al-fattah El Awaisi ; « Les moyens pour garder le statut de Jérusalem », Journal of Islamic Jerusalem Studies, VI N°2, 1981 ;

voir www. Angelfire.com/Journal/Sunnah/Dossier/garder_jerusalem.html)

Á ce moment là les lieux saints chrétiens de Jérusalem apparurent comme un défi aux yeux des musulmans. Les Juifs quant à eux reçurent le droit d’habiter dans la cité (droit refusé depuis la prise de la ville par l’empereur Hadrien).

       Après sa victoire sur les chrétiens de Jérusalem il semble que le calife ait érigé une maison de prières près du rocher sacré « Sakhra » sur l’emplacement de l’ancien Temple juif que les chrétiens avaient délibérément abandonné et souillé. Cinquante ans plus tard, en 691, le calife Omeyyade Abd el-Malik Ibn Marwan construisit le sanctuaire appelé le Dôme du Rocher et Jérusalem prit le nom de Beit al-Maqdis, dérivé du terme juif désignant le Temple (Beit ha-Miqdash). Walid, son fils, construisit à l’extrémité sud de l’esplanade du Temple (Haram), la mosquée dénommée al-Aqsa.

C’est apparemment à cette période de l’histoire que le premier verset de la sourate 17 (intitulée : Le Voyage nocturne), fut interprété par les musulmans et les historiens comme faisant référence à la montée de Mahomet à Jérusalem : « Louange à celui qui a transporté, pendant la nuit, son serviteur du temple sacré (al masjid al-Haram) au temple éloigné (al masjid al-Aqsa), dont nous avons béni l’enceinte pour lui faire voir nos merveilles. Allah entend et voit tout ». Dès cette période, l’identification du mont du Temple de Jérusalem avec « le temple éloigné » de la sourate 17 devint totale et définitive. Les Omeyyades voulurent donner rétroactivement une importance à Jérusalem dans la vie de Mahomet et faire de cette ville un élément central de l’islam.

        Selon l’interprétation arabe de la première époque islamique, le prophète Mahomet avait été transporté miraculeusement de La Mecque à Jérusalem au cours de son ascension céleste, le « mi’radj ». Il y est fait allusion dans les sourates 81. 23 et 53. 13 : « Il l’avait déjà vu (l’ange Gabriel) dans une autre descente ». Les circonstances de ce voyage nocturne « l’isra » ont été par la suite embellies de tout un florilège de légendes, d’imaginations, d’interprétations, dont la miraculeuse monture blanche et ailée du Prophète, al-Buraq, et de nombreux autres détails plus mythiques que réels. Le sens de cette histoire ou légende est qu’il n’y a pas de vol direct La Mecque-Ciel ; il faut prendre la correspondance à Jérusalem ! Par cette interprétation et par cette fusion de l’isra et du mi’radj, l’islam s’est rattaché à la tradition juive et chrétienne de la sainteté de Jérusalem. Dans le courant orthodoxe de la tradition islamique, la légende de l’ascension céleste de Mahomet, y compris la translation nocturne vers Jérusalem, doit être interprétée littéralement (cf. l’article de Zwi R. J. Werblowsky : Jérusalem dans la conscience juive, chrétienne et musulmane).

Par ailleurs, il semble que ce verset se réfère à une ascension extatique, c’est-à-dire une vision, vers un sanctuaire céleste. La notion de sanctuaire céleste, répandue dans la tradition juive et chrétienne, est parfois associée à la Jérusalem céleste et cette sourate 17 pourrait y faire référence.

«Quelques temps avant l’Hégire, le 27ème jour de Rajab, en 620, le Prophète Mouhammad vécut ce que l’on devait appeler par la suite Le Voyage Nocturne ( Al Isra ) et l’Ascension ( Al Mi’radj ). Le début de la sourate 17 (Al Isra, Le Voyage Nocturne ou Bani Israïl , les Enfants d’Israël ) fait référence à cet événement en ces termes : Selon feu Cheikh Hamza Boubaker, «  il s’agit du voyage céleste du Prophète, sur lequel la concision coranique contraste avec la proxilité de la tradition, de la théologie et de la mystique. Voyage qui soulève un ensemble complexe de problèmes délicats, malgré l’abondante littérature élaborée par les musulmans d’hier et les orientalistes occidentaux de nos jours. » (voir : www.oumma.net/Dimanche-14 octobre-Le-Voyage; par Moussa Allem, 12-10-2001)

Une autre interprétation des experts en politique, était que la dynastie des Omeyyades de Damas cherchait à contrebalancer l’influence du calife rebelle de La Mecque, Ibn Zubayr. Des études plus récentes des chercheurs de l’Université Hébraïque de Jérusalem, ont abandonné cette interprétation. La tendance actuelle est d’admettre la version des anciennes sources musulmanes selon lesquelles les motifs réels étaient essentiellement d’ordre religieux (S. D. Goitein, Studies in Islamic History and Institutions, Leiden, 1966, pp. 135-148). Jérusalem avait commencé à prendre une place de plus en plus importante dans la dévotion musulmane. S’il existait un élément de compétition, ce n’était pas tant avec Ibn Zubayr et La Mecque qu’avec les églises chrétiennes de Jérusalem et surtout l’imposant dôme de la Résurrection, « l’Anastasis » du Saint-Sépulcre. Ceci est la version de l’illustre historien et géographe arabe du Xe siècle, al-Mukaddasi. Il n’y a pas de raison légitime, pensent les historiens modernes, de rejeter le témoignage de cet habitant de Jérusalem, proche du conflit des différentes religions qui la revendiquent.

       Des hadith louant la sainteté de Jérusalem établirent des liens entre l’islam et le caractère sacré de Jérusalem. La sainteté de la ville commença à fasciner les masses musulmanes et un nombre croissant de croyances cosmologiques, eschatologiques et légendaires ainsi que des pratiques rituelles se sont rattachées à son nom : « Le sanctuaire de marbre de Jérusalem est la troisième maison d’Allah, et les docteurs de la religion agréent qu’une prière offerte à Jérusalem équivaut à 25 000 prières offertes nulle part ailleurs ; comme à Médine, une prière équivaut à   50 000, cependant une prière offerte à La Mecque équivaut à 100 000 prières. » (Nasir I, Khursau, Voyageur ; 1047)

            Sous les Abbassides de Bagdad, les Fatimides  égyptiens, les Seldjoukides turcs  (entre 750-1099) et jusqu’à la venue des croisés, Jérusalem régressa tant dans son importance politique que religieuse. La ville est rarement mentionnée dans les sources arabes et al-Mukaddasi se plaint du manque de théologiens et de penseurs musulmans. Le Perse Al-Ghazali (théologien, penseur, philosophe et mystique musulman) y fit un court séjour vers 1096, vivant en ermite.

Après la conquête de la ville par les croisés, en 1099, une nouvelle littérature arabe fait son apparition, les Fadha’ji al-Quds, qui louent Jérusalem et ses vertus. Ce genre littéraire n’est pas une simple propagande musulmane en vue de la reconquête de Jérusalem, mais une marque de piété religieuse. Les chercheurs ont même prouvé que ces Fadha’ji sont antérieures aux Croisades. (E. Sivan, « The Beginnigs of the Fadha’ji Al-Quds Literature », in Israel Oriental Studies, 1, 1971, pp. 263-271).

Voici quelques dictons arabes sur Jérusalem : « La ville fait partie d’une des quatre villes du Paradis, les autres trois étant La Mecque, Médine, et Damas » ; « Le bonheur est comme de manger une banane à l’ombre du Dôme du Rocher » (Ibn Asakir, historien, citant un hadith du XIIe siècle) ; « Celui qui vient à Jérusalem est pardonné de tous ses péchés par Allah, et quand il la quitte il est propre et pur comme un nouveau né » ; « Celui qui jeûne un jour à Jérusalem est délivré du feu de l’enfer » ; « Allah a établi son trône de jugement à Jérusalem et là il commencera la résurrection des morts et le jugement dernier ». (Hadith de plusieurs périodes citées dans le livre de M. Avi-Yonah, A History of the Holy Land ; 1969)

La ville reprise par Saladin (1187), passe ensuite aux mains des Mamelouks égyptiens, puis elle est relevée par le sultan Soliman II le Magnifique. La ville connaît un lent déclin et perd toute importance politique et religieuse pour l’islam. Á noter qu’elle ne fut jamais capitale d’un royaume ou d’un État musulman ou arabe !

            Depuis la fin du XIXe siècle, avec la montée du sionisme moderne nous assistons à un intérêt renouvelé pour la ville de la part des dirigeants arabes. C’est le grand mufti de Jérusalem (1920-30), le hadjdj Amin al-Husseini (instigateur des révoltes arabes de 1929, 36-39), qui proclama le premier que le Mur des Lamentations (Mur Occidental) est saint pour l’islam, Mahomet y ayant attaché sa jument ailée al-Buraq ! Suite à la Guerre des Six jours (1967) et la réunification de Jérusalem par l’État hébreu, la ville est au cœur de la propagande politique et religieuse du monde arabe. Arafat déclara : « Jusqu’ici, aucune des fouilles qui ont été menées n’a pu prouver où se trouvait le Temple […]. Soyons clairs : le Mur des Lamentations n’est pas un lieu saint pour les Juifs, c’est une partie intégrale de la mosquée al-Aqsa. Nous l’appelons al-Buraq, le nom du cheval avec lequel Mahomet est monté au ciel en partant de Jérusalem. »

Le grand mufti actuel de Jérusalem, cheikh Ikrima Sabri, a, dans une interview accordée à Die Welt (17-01-2001), refusé de reconnaître aux Juifs tout lien avec les lieux saints de Jérusalem (extraits) :

- Question : « la mosquée al-Aqsa a donné son nom à la nouvelle Intifada. Selon une déclaration du Grand rabbinat faite le 4 janvier, la loi judaïque interdit « de céder la souveraineté sur le Mont du Temple, directement ou indirectement, à des étrangers », et cela parce que ce lieu est le plus saint pour le peuple juif. Quatre jours plus tard, vous avez, une fois encore déclaré que l’endroit est absolument musulman. Une contradiction insoluble ? »

- Le cheikh Sabri : « Il n’y a pas le moindre signe d’une précédente existence du Temple juif à cet endroit. Il n’y a dans toute la ville, aucune pierre qui rappelle l’histoire juive. Par contre, notre droit est évident. Ce lieu nous appartient depuis 1500 ans […]. Quant aux Juifs, ils ne savent même pas où le Temple se trouvait exactement. C’est pourquoi nous ne leur reconnaissons aucun droit, ni sous la terre ni au-dessus. »

            - Question : «[…] le Mur des Lamentations fait partie du Temple juif [...]. »

- Le cheikh Sabri : « Vous ne pouvez pas nous piéger de cette manière. Il n’y a pas une seule pierre dans le Mur des Lamentations qui ait un quelconque lien avec l’histoire juive. Ni du point de vue religieux ni sous l’angle historique, les Juifs n’ont aucune revendication justifiée à faire valoir quant à ce mur […]. »

     Le cheikh Ibrahim Madhi a, quant à lui, fait la déclaration suivante dans un prêche diffusé en direct, depuis la mosquée Idjlin de Gaza, sur la télévision palestinienne le 18 janvier 2002 : « […] Nous ne nous contenterons pas d’un État palestinien avec Jérusalem pour capitale. La cité sainte deviendra la capitale du califat islamique que nous aurons proclamé. » (en fait le califat islamique a été aboli en 1924 par Moustafa Kemal Atatürk)

       « L’islam nous fournit ainsi l’exemple le plus frappant de la manière dont une ville sainte peut acquérir son caractère sacré sur la base de ce qui n’est, pour un observateur de l’extérieur tout du moins, qu’une légende superposée sur une tradition antérieure de la sainteté du lieu. Alors que dans la tradition chrétienne, des faits historiques (la vie et la mort de Jésus) ont crée des faits religieux (la résurrection et l’ascension) et que les deux catégories se sont conjuguées pour attribuer à des lieux le caractère de ‘’lieu saint’’. Le cas de l’islam est systématiquement opposé : les croyances et la dévotion populaire ont crée des faits religieux, et ceux-ci, à leur tour, ont crée des faits historiques […]. En tout cas, pour l’islam, qui ne distingue pas le religieux du séculier à la manière chrétienne, les implications des faits religieux font légitimement partie intégrante de la sphère politique. Ceci reste vrai même quand la dimension religieuse est manipulée abusivement au bénéfice d’intérêts purement politiques. » (Werblowsky, Z. ; op. cit. p. 6)

« Ibrahim Hooper, du Conseil des relations américano-islamiques (Council on American-Islamic Relations, CAIR) basé à Washington, explique un anachronisme : ‘’L'attachement des musulmans à Jérusalem ne débute pas avec le prophète Mahomet, il commence avec les prophètes Abraham, David, Salomon et Jésus, qui furent tous des prophètes de l'islam.’’ En d'autres termes, les principaux personnages du judaïsme et du christianisme étaient en réalité des proto-musulmans. Cette théorie est à l'origine des déclarations de l'homme de la rue palestinien, pour qui ‘’Jérusalem était arabe dès le jour de la création’’. » (« Les revendications des Musulmans sur Jérusalem » ; Daniel Pipes Middle East Quarterly ; septembre 2001 ; adaptation française : Alain Jean-Mairet)

Jérusalem serait-elle la pierre d’achoppement des nations comme l’avait annoncé le prophète Zacharie ? : « Voici, je ferai de Jérusalem une coupe d’étourdissement pour tous les peuples d’alentour, et aussi pour Juda dans le siège de Jérusalem. En ce jour-là, je ferai de Jérusalem une pierre pesante pour tous les peuples; et tous ceux qui la soulèveront seront meurtris; et toutes les nations de la terre s’assembleront contre elle [...]. » (Za 12. 2-9)

      Le Méhauté Loïc

 

Rosh Hashana 2008 : Israël, pays jeune, compte 7, 3 millions d’habitants

Comme chaque année à l’occasion du nouvel an juif (Rosh Hashana), le bureau israélien des statistiques publie diverses données sur la population israélienne. A l’aube de l’an 5769, selon le calendrier hébraïque, Israël compte 7 337 000 habitants, dont 5 540 000 de Juifs (75, 5% de la population), 1 440 000 d’Arabes (soit 19, 6% de la population) et 318 000 de non Juifs et de non Arabes (4, 3%). De plus, on estime que 200 000 travailleurs étrangers vivent aujourd’hui en Israël.

On vient à Tel-Aviv et on quitte Jérusalem

Tel-Aviv est la ville où la densité de la population est la plus importante soit 7 530 habitants au Km2. Elle est aussi la ville la plus attractive puisque sa population ne cesse de croître. Par contre, Jérusalem connaît depuis plusieurs années une baisse de sa population juive. En un an, 6400 personnes ont quitté la ville sainte pour s’installer ailleurs. La moitié de la population vit dans le centre du pays : 20,7% dans la région de Tel-Aviv et 27,8% dans la région Centre. Moins de 10% des Juifs vivent dans le nord du pays. Au contraire, les Arabes vivent plus au Nord (45%) ainsi que dans le sud du pays (11%).

Population jeune

Selon le bureau des statistiques, Israël est le pays où la population est la plus jeune parmi les Etats occidentaux. 28, 4% de la population a moins de 14 ans (alors que la moyenne des pays occidentaux est de 17% seulement) et 9, 8% est âgée de plus de 65 ans (contre 15% en moyenne dans les pays d’occident). L’âge moyen de l’Israélien est de 28 ans. Les femmes israéliennes ont en moyenne 2, 9 enfants. 151 679 enfants sont nés en Israël en 2007, 2,4% de plus qu’en 2006. Enfin, l’espérance de vie pour les enfants nés en 2007 est de 78,8 ans pour les hommes et 82,5 ans pour les femmes.

Israël : le rassemblement des exilés

34, 6% des Israéliens juifs sont nés dans le pays, soit un peu plus d’un tiers de l’ensemble de la population. 38, 5% sont issus des pays occidentaux (Europe et Amériques). 15% sont originaires des pays d’Afrique (essentiellement du Maghreb) et 11, 9% viennent des pays d’Asie.

Les femmes étudient plus que les hommes

59% des diplômes universitaires sont conférés à des femmes. Pour la dernière année universitaire, 39 261 étudiants ont terminé une licence ; 13 234 un master ; 1 288 un doctorat.

Population juive en augmentation dans le monde

Selon un rapport de l’Agence juive publié à l’occasion de Rosh Hashana, la population juive est en augmentation avec 13, 3 millions de personnes dans le monde. Elle a grandi de 70 000 membres en 2007. La plus grande concentration juive se trouve en Israël, avec 5 millions et demi de personnes. Viennent ensuite les Etats-Unis, avec un chiffre à peine inférieur, soit 5 millions 300 000.

Jean-Marie Allafort  

 

Connaissance du pays : Beersheva 

( Béer =Puits        Sheva = Serment  et  Sept)

Les fouilles archéologiques faites en plusieurs endroits proches de la ville actuelle nous livrent que le site a été occupé par l'homme depuis le sixième millénaire avant J.C., à l'époque chalcolithique. Ces fouilles sont situées sur les rives des oueds Beersheva, Beer Matar, Beer Tsafad, la ruine Beter et Névé Noï. On y a découvert des caves creusées dans le loess, de nombreuses poteries, des objets tels que des statuettes en ivoire, des objets en cuivre et en basalte;

Beersheva est due à son emplacement. et non à l’agriculture. En effet elle est située au croisement de routes très anciennes: la "route de la mer", la "route des Pères", la route du centre du pays vers le Golfe d'Aqaba, des routes qui se sont développées en frontière du désert, et non de l'agriculture. Ces premiers habitants communiquaient avec l'Afrique au sud, Haran au nord (Turquie), la Mésopotamie (Iraq) à l'est et l'Egypte à l'ouest.

Dans la Bible, Beersheva est nommée la première fois, alors qu'elle est habitée par les Philistins et que leur roi Abimelek concède à Abraham la jouissance d'un puits après un serment qu'Abraham conclut en donnant 7 brebis à Abimelek.( Ge.21,22-31).

Le Tell Sheva, situé à 5 kms de la ville actuelle, entre l’oued Hébron et l’oued Beersheva date de l'époque du fer. On y voit les restes d'une ville planifiée et fortifiée qui sera détruite à la fin du 8ème siècle avant J.C.et reconstruite à l'époque perse (539-331).

Beersheva est mentionnée plusieurs fois dans la Bible. Pour le partage des territoires aux tribus, (Ge.22,19;26,23-33;46,1-5;Jos.15,28;19,2). Le premier livre de Samuel mentionne que Beersheva est la limite sud du pays. ( I Sam.3,20).  Aux derniers jours du royaume, elle est mentionnée avec Dan, Bethel et Gilgal parmi les centres de cultes rivaux de Jérusalem qui sont l'objet de reproches en raison de leur idolâtrie.( Amos 5,5;8,14; II Rois 23)..

 Après le retour de l'Exil, la ville est repeuplée par les fils d’Israël,( Né.11,27).

A l'époque romaine, un fort militaire domine le tell, mais la ville se développe là où est le centre actuel. Sous le souk bédouin, des fouilles ont mis à jour des restes de puits de l'époque romaine et encore plus profond, des restes de l'époque du Fer B., époque des rois d'Israël. A l'époque romaine, Beersheva est située sur la ligne frontière des Limes de Palestine. Du temps des Byzantins, Beersheva a un évêché et est incluse dans la Palaestina Tertia. Les croisés y construisent un fort, puis la ville est abandonnée.

L'afflux des tribus bédouines venues de Transjordanie incite les Turcs à construire en 1890 un poste de police avec l'aide des Allemands, et en 1900 ils fondent la nouvelle ville grâce aux nombreux puits de la région. Celle-ci deviendra vite un centre régional et administratif de tout le Néguev où vivent les Bédouins

Pendant la Première guerre mondiale, Beersheva sert de refuge sur la frontière sud des Turcs. Celle-ci est conquise par les Anglais le 31 octobre 1917. Ce sont les Australiens de la 4ème brigade de cavalerie commandée par le général William Grant qui mènent la charge et prennent possession des puits. Le cimetière du Commonwealth, hébergeant les tombes des soldats britanniques et australiens est situé près de la vieille ville. La Plan de partage de la Palestine en 1947 incluait Beersheva dans l’Etat arabe, la grande majorité des habitants étant Arabes. En mai 1948 la ville est prise par les Egyptiens qui en font une base importante, mais le 21 octobre, au cours de l’opération  « Yoav », Tsahal prend la ville et, le 20 novembre, Leonard Bernstein avec l’orchestre philharmonique d’Israël y joue pour les soldats.

Au départ des Anglais la ville compte environ 3500 habitants.

Le climat présente les caractéristiques d’un climat désertique, les précipitations étant de l’ordre de 200 à 300 millimètres par an au nord de Beersheva. Aussi dès 1953 Israël commencera son grand projet « Conduite Nationale d’Eau » qui sera terminé en 1964 et apportera l’eau du lac de Tibériade jusqu’au nord du Néguev.

Très vite la ville accueille de nombreux immigrants venant de tous les pays. L’hôpital Soroka s’ouvre en 1960, l’université du Néguev en 1970, en 1973 c’est le théâtre de Beersheva et en 1978 la ville compte 115 000 habitants. En 1979, la ville reçoit officiellement la visite du Président égyptien Anouar el-Sadate.

Au cours des années 90, de nombreux immigrants venus de l’ex-Union Soviétique et d’Ethiopie viennent grossir la population qui aujourd’hui atteint les 200 000 habitants.

Aujourd’hui

On peut visiter le sud de la ville qui conserve quelques exemplaires architecturaux de l’Empire ottoman avec le Musée du Néguev fondé en 1953 et installé dans l’ancienne mosquée où l’on peut découvrir la culture bédouine, et quelques vestiges de toutes les époques jusqu’à la période byzantine. Au loin, se déploient les tentes des Bédouins qui convergent encore vers le marché pour y vendre le produit de leur artisanat : bijoux, tapis, robes traditionnelles et vaisselle de cuivre martelé. La visite est gratuite le shabbat.

Le Puits d’Abraham, puits ancien reconstitué, au carrefour des rues d’Hébron et du Keren Kayemet. La tradition bédouine y voit le puits creusé par Abraham, mais en réalité il date de l’époque byzantine. On peut le visiter, moyennant paiement, tous les jours de l’année.

Le cimetière militaire anglais de la Première guerre mondiale, grand et bien entretenu, où reposent 1239 soldats anglais et australiens avec gravé sur chaque tombe la citation du Psaume 72,17, « Que son nom soit béni à jamais », et sur la tombe d’un soldat juif australien ces mots : « Si loin de la maison et si près de la maison ».

A côté, l’ancienne gare turque, bâtiment de deux étages de style allemand et qui sert aujourd’hui de centre d’étude pour les « Amis de la nature ».

Le Tell Sheva fera lui une étude à part.

 

La ville avec ses 200 000 habitants s’étend sur 5 400 hectares et gère l’administration de tout le Néguev qui compte 600 000 habitants. Les gens travaillent dans ces services administratifs, dans différentes industries du Néguev : phosphate, usines de la Mer Morte, briqueteries, céramiques, carrières de pierres, industrie aérienne, et Haute technologie. A 12 kilomètres à l’est, l’usine de Ramat Hovav traite tous les produits dangereux. Au nord de la ville, l’Université Ben Gourion, l’hôpital Soroka qui répond aux besoins de la population du sud du pays.

Yaakov Turner est le maire actuel de Beersheva. Depuis 2005, sa principale préoccupation a concerné le développement des parcs et des infrastructures. D’anciens quartiers ont été réhabilités. Il faut noter qu’une part importante de la jeune population ne séjourne à Beersheva que pour une courte période : ce sont les étudiants de l’université Ben Gourion, de l’hôpital universitaire Soroka, et les militaires des nombreuses bases proches.

La ville compte 81 établissements d’éducation avec 34 000 étudiants, 60 écoles élémentaires avec 17 500 élèves et 39 écoles secondaires avec 16 500 élèves. Dans les quartiers religieux, il y a plusieurs écoles privées et yéshivot qui sont regroupées.

Trois écoles supérieures sont également à Beersheva : la « Kaye Academic College of Education », le « Sami-Shamoon Academic College of Engineering » et le « Practical Engineering College of Beersheva ».

Le sport le plus populaire est le football avec le club Hapoël Beersheva créé en 1949. Mais il y a aussi 8 courts de tennis, un aéroport de vol à voile, un club de lutte, un de rugby et surtout, Beersheva est le principal centre national du jeu d’échecs avec 8 grands maîtres.

Sur le plan culturel, Beersheva possède : un théâtre, un conservatoire, une bibliothèque, un centre d’art pour jeunes , un jardin zoologique, des groupes de danse comme Bat-Dor, de chants avec la Synphonietta de Beersheva pour les jeunes et pour les adultes, un centre scientifique, et une école d’acteurs qui attire des étudiants de tout le pays…

La ville a une équipe d’ingénieurs des « Ponts et chaussées » qui étudie et réalise les projets pour le développement de la ville appelée à être la « Capitale du Neguev ». Parmi les projets essentiels : augmenter la population de 50% jusqu’en 2020, en la renforçant économiquement et sociologiquement, développer les infrastructures, les services, augmenter le potentiel touristique, commercial etc.

Ce sont ces dernières années qu’ont été créés le centre des jeunes, l’école de théâtre, l’axe routier Smilanski-Trumpeldor, la station d’épuration des eaux usées, le nouveau stade, de nouveaux centres communautaires à Neve Zeev et Ramot, le parc de la science, le centre pour la Haute Technologie et le parc autour de l’oued Beersheva.

Beersheva possède un des rares cimetières du pays pour le repos de ceux qui n’ont pas de religion déclarée.

Symbole de la ville

L’ancien symbole a été dessiné en 1950 par Abraham Halili avec : le tamaris, la conduite d’eau et des cheminées d’usines.

En 1972 le dessin de Hazi Mor, professeur de graphisme a remplacé l’ancien avec les mêmes symboles :le feuillu du tamaris représente les différents quartiers de la ville, les 12 traits sous l’arbre sont les 12 tribus d’Israël, la tour, ce sont les mains qui soutiennent l’arbre.

Beersheva est jumelée avec plusieurs villes du monde entier :Addis Abeba (Ethiopie), Adana (Turquie), Cluj-Napoca (Roumanie), Lyon (France), Nis (Serbie), Oin (Georgie), Parramatta (Australie), et La Plata (Argentine).

Cécile Pilverdier

Fuite des cerveaux en Israël

Israël excelle dans de nombreux domaines : télécommunications, armement, médecine, biotechnologie, électronique. En un demi-siècle, Israël s’est lancé dans une course technologique effrénée et apparaît à la 17ième position, avant le Japon, l’Irlande et la France, dans le classement 2008 du Forum Economique Mondial des nouvelles technologies mondiales de l’information et des communications. Les universités, l’Institut Weizman, le Technion de Haïfa sont à la pointe de découvertes cruciales et travaillent avec le monde de l’industrie, ce qui permet une mise en application des découvertes.

Tout cela est connu et on l’a rappelé pour le soixantième anniversaire d’Israël. Mais, ce qui est aussi connu, c’est la fuite de cerveaux à l’étranger. Autant Israël est riche en prix Nobel et créateurs de Start-Up, autant apparaît le danger de cette émigration : 1 universitaire sur 4 émigre aux Etat Unis, fuyant les bas salaires et les budgets de recherche limités. Israël fait face à un exode 6 fois supérieur à celui des Etats européens. L’Etat d’Israël a pour principale richesse sa matière grise, mais déjà en 2007, 25 000 employés de Haute-Technologie ont quitté le pays, et cela ne fait qu’augmenter.

Le professeur Aaron Ciechanover, prix Nobel de chimie 2004, professeur au Technion de Haïfa, compare cet exil à celui des scientifiques allemands avant la Shoa, qui ne sont pas revenus. Ces départs sont principalement vers l’ Amérique où les salaires sont 8 fois plus élevés. Même s’ils recevaient un bon salaire comme professeurs d’université en Israël, ils ne pourraient, faute de moyens et de temps, s’adonner à la recherche.

33% des professeurs israéliens en informatique enseignent dans les 40 meilleures universités américaines. « Nous sommes très bons !» dit le professeur Dan Ben David, professeur de sciences économiques et politiques à l’Université de Tel Aviv. « Si nous réussissons à tel point à intégrer les meilleurs établissements du monde, cela veut dire que nos universités ont un niveau d’exigence international. » Mais, en même temps, cela prouve que le système éducatif israélien marche très mal puisque, dit-il « nous ne pouvons garder nos étudiants. »

Le gouvernement commence à s’inquiéter sérieusement et a mis en place un projet intitulé : « Rentrer à la maison ». Ce projet comprend une exemption d’impôts sur les revenus à l’étranger pendant 10 ans, des emplois assurés, des prêts pour monter une entreprise. Ce projet concerne 650 000 Israéliens à l’étranger, dont 450 000 en Amérique.

Cette fuite de cerveaux est une perte pour la science et son application dans le domaine de la sécurité nationale entre autres, et dans tous les autres secteurs. Pour les universités où l’âge moyen des professeurs est de 55 ans et plus, la relève des jeunes est problématique.

Suzanne Millet

Découverte d’une inscription faisant référence au Grand Prêtre

A moins de 48h avant le début des célébrations de Yom Kippour, le département des Antiquités d’Israël a annoncé la découverte d’une inscription en hébreu faisant mention du grand prêtre. C’est sur un fragment de sarcophage remontant à la fin de la période du second Temple que la découverte a été faite, non loin d’un site archéologique mis au jour par les Israéliens à proximité de la tombe du prophète Samuel au nord de Jérusalem. C’est sur un fragment d’une longueur de 60 cm sur une largeur de 48 cm que les mots ‘fils du grand prêtre’ ont été gravés.

Selon les deux archéologues chargés de mener les fouilles, le fragment provient sans aucun doute d’un sarcophage qui avait contenu le corps d’un fils du grand prêtre de Jérusalem. Il a été daté de 70 avant notre ère, donc de quelques dizaines d’années avant la destruction du Temple.

Il y a une quinzaine d’années, un autre fragment similaire sur lequel était écrit : « Neveu du grand prêtre Theophilus » (il s’agit de Yedidya Ben Hanan) avait été découvert et après étude attentive, il avait été daté lui aussi de la fin de période du second Temple.

Le rôle du grand prêtre était fondamental à l’époque biblique, et ce, jusqu’à la destruction du Temple particulièrement pour Yom Kippour (jour des Expiations) puisqu’il était celui qui présidait les cérémonies. Le moment le plus solennel était son entrée dans le Saint des Saints où il prononçait le nom ineffable de Dieu et demandait le pardon des péchés d’Israël.

Les fouilles archéologiques menées près de la tombe du prophète Samuel ont été réalisées à la faveur de la construction de la barrière de sécurité. Sur ce site, d’autres vestiges ont été découverts, dont des bâtiments publics, des installations agricoles, des bassins et des citernes datant également de la fin de l’époque du second Temple.

Jean-Marie Allafort

Le YMCA de Jérusalem, ses origines, sa vision, son histoire

Qui sait encore que le YMCA est d’origine chrétienne : Young Men Christian Association ? En France, UCJG, Union chrétienne de Jeunes Gens, un mouvement protestant de jeunesse, et UCJF, Union Chrétienne de Jeunes Filles.

 

Entrer rue King David à Jérusalem dans ce centre culturel caractérisé par sa tour de 46 mètres de haut, un belvédère permettant une vue plongeante sur la ville, s’arrêter à l’entrée devant une plaque en trois langues, c’est comprendre très vite l’orientation particulière du YMCA international de Jérusalem : « Un endroit dont l’atmosphère est paix. Où les jalousies politiques et religieuses peuvent être oubliées et l’unité entre les nations encouragée et développée. » (Parole de Edmond Allenby lors de l’inauguration du bâtiment le 18 avril 1933.)  Trois inscriptions juste en haut de la façade reflètent la présence de la foi juive, chrétienne et musulmane :

« - Le Seigneur notre Dieu, le Seigneur est UN » en hébreu.

« - Je suis le Chemin » en araméen.

« - Il n’y a pas de Dieu, hormis Dieu » en arabe.

Un centre culturel et sportif, un hôtel et un restaurant, où se fréquentent journellement des Juifs, des chrétiens et des musulmans, et dont le staff lui-même reflète bien la diversité de la population de Jérusalem.

A regarder de plus près cette architecture néo-byzantine, œuvre de l’architecte de l’Empire State Building, Arthur Loomis Harmon, on a l’impression d’un sermon en pierres. L’imposant bâtiment à trois façades  qui apparaît dans cet ensemble architectural représente bien les trois buts que s’est donné le YMCA : être un centre pluriel, sportif, social et intellectuel, dédié à l’épanouissement de l’esprit, de l’intelligence et du corps. Trois chapelles au sommet de la tour (spirituel), un auditorium, centre d’un programme culturel et artistique (intellect) et un centre sportif avec piscines, salles de gymnastique et de fitness (corps).

Mais ce trio représente aussi les trois religions monothéistes. Douze cyprès dans le jardin, par exemple, rappellent aussi bien les 12 tribus d’Israël que les 12 apôtres de Jésus et les 12 disciples de Mahomet. A l’intérieur de l’auditorium, 12 fenêtres et 12 arches s’élevant sur les balcons. Les 40 colonnes dans la cour symbolisent les 40 ans dans le désert du peuple d’Israël et les 40 jours de tentation de Jésus. Le tout décoré de fleurs, d’animaux et de personnages du pays. A l’entrée du bâtiment principal, deux colonnes, l’une surmontée d’une tête de femme portant une cruche, l’autre d’un agneau, sur lesquelles est gravé le verset du prophète Isaïe : « On l’appellera Admirable, Conseiller, Dieu tout puissant, Père éternel, Prince de la paix. »

Mais comment tout cela a-t-il commencé ?

Le but que s’étaient fixé Georges Williams et ses 11 collaborateurs en créant le premier centre YMCA en 1844 à Londres, était de prendre en charge et d’améliorer la vie des jeunes gens venant de partout chercher du travail dans la capitale anglaise. Souci social et évangélique avant tout. C’est cette même vision qui est à l’origine du YMCA international de Jérusalem, ouvrant ses portes en 1878 à des jeunes gens de toutes religions et nationalités.

Durant les dix premières années, ses activités se tenaient dans une librairie chrétienne de la rue Jaffa. Comme les jeunes gens venaient du monde entier, les activités avaient lieu en anglais, hébreu, arabe, mais aussi en allemand et en d’autres langues. Après quelques années de vagabondage où les activités étaient organisées dans d’autres centres prêtés au YMCA, celui-ci s’installe en 1909 dans un bâtiment en face de la porte de Damas. Les jeunes qui y viennent sont de plus en plus nombreux, passant de 40 à 200. Les locaux deviennent trop petits.

En 1914, à la Première guerre mondiale, l’autorité turque oblige le YMCA à fermer ses portes, cette organisation lui semblant dangereuse. Mais lorsqu’en 1917 les Britanniques prennent le contrôle de la Palestine, il reprend ses activités, les adaptant à la nouvelle situation : dresser des tentes, construire des cabanes près du quartier russe pour accueillir soldats et visiteurs étrangers. En 1920, sous la direction du Docteurr Archibald Clinton Harte, le YMCA précise son but : être cheville ouvrière pour permettre à chacun de développer son esprit, son intelligence et son corps. Pour cela il fallait décidemment plus de place.

A Noël 1924, James Newbegin Jarvie de Montclair, venant de New Jersey, offre un million de dollars au YMCA de Jérusalem pour construire un bâtiment définitif. Les YMCA d’Angleterre et d’Amérique ayant également versé des fonds, la première pierre de l’édifice actuel est posée en 1928 sur un terrain acheté au patriarcat  grec-orthodoxe. Ce sera Field Marshal Edmond Lord Allenby, commandant des forces britanniques en Palestine, qui, inaugurant le 18 avril 1933 ce nouveau centre, en tracera le but : « Ici, à Jérusalem, cité sainte parmi toutes, au centre de la Palestine, terre qui fut de siècle en siècle ravagée par la guerre, se dresse un monument international de paix et de fraternité. Sous son ombre, les diverses communautés vont cesser de se disputer, les passions féroces vont s’apprivoiser et les esprits se calmer. » Les responsables des YMCA du monde entier étaient venus.

A partir de là, les divers programmes du centre se développèrent très vite : culture, expositions, concerts, théâtre, athlétisme, art, activités sociales et intellectuelles, dont des cours de langues, de musique, à un niveau international. Jusqu’en 1991, son stade de football sera le seul à Jérusalem.

« Mais, ces chrétiens venus s’implanter ici, n’ont-ils pas derrière tout ce beau programme un but missionnaire ? » s’inquiétèrent au début certains Juifs ou musulmans. Cette crainte non fondée disparut très vite ; preuve en est le nombre de Jérusalémites de toutes religions participant aux activités. Beaucoup de Juifs religieux en particulier utilisent la piscine grâce à l’horaire séparé pour les hommes et pour les femmes prévu par le centre.

Un lieu très utile en période de conflits

Existant avant la création de l’Etat d’Israël, ce bâtiment va être utilisé par les diverses missions internationales y trouvant un lieu « neutre », un lieu de paix.

En 1946, c’est le quartier général de la Commission d’Enquête anglo-américaine qui s’y installera, puis en 1947, le Comité de l’ONU pour la Palestine. En 1948, la ville étant divisée, le YMCA continue ses activités à l’ouest de la ville, au service principalement de la population juive. La nécessité de créer alors un centre YMCA à Jérusalem-est devint urgente.  Arabes musulmans et chrétiens s’y retrouvent.

Au printemps 1948, la Croix Rouge Internationale déclara le YMCA, l’hôtel King David et le collège Terra Sancta « lieu de Genève », des havres de paix pour les non combattants de cette zone. Des infirmières arrivèrent de Suisse et s’installèrent dans le YMCA. Les drapeaux de la Croix Rouge flottèrent sur ce bâtiment. 80 réfugiés y furent accueillis, dont des Arméniens, des Polonais et des Autrichiens.

En juin 1948 le YMCA loge le Comité de Médiation de l’ONU dirigé par Folke Bernadotte qui sera assassiné en septembre. Puis ce furent des dépendances du  consulat des USA. Des vice consuls de Turquie et d’Espagne y seront logés.

De 1949 à 1967, le YMCA reprend ses activités. En 1967, l’ONU y établit son quartier général pour deux mois.

Pendant toutes ces années, les activités du centre se développent, le nombre des adhérents augmente. En 1940, 1500 adhérents, dont la moitié de chrétiens, un quart de musulmans, et un quart de Juifs. En 2003 : 2600 adhérents dont 62,5% de Juifs, 19,5% de musulmans, et 18% de chrétiens.

Actuellement

L’hôtel est devenu un hôtel 4 étoiles, le snack bar s’est transformé en restaurant, « Les trois arches », et les activités se sont diversifiées, tout en gardant la même optique communautaire. Un jardin d’enfants et des camps d’été groupant des enfants juifs, musulmans et chrétiens. Un club de jeunes, un club de troisième âge. Ces programmes d’été s’adressent principalement à ceux qui peuvent payer : pour 15 jours, 1525 shekels par enfants (300 Euros) de 8h à 3h30.

Un grand chantier à l’arrière du YMCA prévoit la construction d’un immense complexe sportif partiellement souterrain.

Le personnel, lui-même formé de Juifs, de musulmans et de chrétiens, focalise tout son effort pour maintenir cette vision première d’un lieu de dialogue entre tous : créer un lieu «  pour toi, qui que tu sois » à Jérusalem.  Le YMCA reçoit en 1993 le prix Nobel de la Paix, et le prix Marta pour la Démocratie et la Tolérance, en 1996.

 

Le 75ème anniversaire

En mai 2008, le YMCA fêtait son 75ème anniversaire. Une série de soirées fut organisée à cette occasion avec des conférenciers très variés : architectes et professeurs. Ce fut l’occasion pour le directeur général actuel, Emeritus Rizek Aboushar, de raconter son parcours personnel.

En 1949, jeune arabe vivant à Mamilla, Aboushar, déjà impressionné par cette tour, la plus haute de la ville, n’y avait pourtant pas accès. En effet, sa famille était trop pauvre pour pouvoir l’inscrire aux activités du centre. Mais un camarade lui ayant parlé d’une « boîte avec une porte qui s’ouvrait quand on  pressait sur un bouton, puis se refermait et vous transportait en haut de la tour », Aboushar et quelques amis allèrent voir. Ils furent attrapés par le responsable de l’ascenseur et conduits dans le bureau du directeur… où ils durent rester quelques heures. « Ce bureau qui est devenu le mien aujourd’hui ». Peu de temps après, le directeur général James Sutton, ayant besoin de main-d’œuvre, demanda à l’école d’Aboushar d’envoyer des enfants volontaires pour nettoyer le terrain autour du bâtiment. Aboushar y alla avec d’autres camarades dès le lendemain. Après trois heures de dur travail sur le terrain, ils furent invités à un festin puis à la piscine, même si personne ne savait nager. Sutton leur proposa de revenir le mardi suivant. Bien sûr. Mais ce qu’ils ne savaient pas, c’est que le directeur avait également invité un groupe d’élèves juifs pour nettoyer le jardin et tailler les arbres. Ce mardi là, « nous nous sommes trouvés mélangés. Aucun de nous ne connaissait la langue de l’autre, mais, après un temps d’adaptation, tout se passa bien entre nous. »

Pour Aboushar, ce fut l’un des moments les plus forts de sa vie. Il décida de consacrer sa vie à ce travail de rapprochement. Peu après, il commença à travailler au YMCA comme ramasseur de balles sur le terrain de tennis. En 1955 il devint le responsable des jeunes, en particulier dans les camps d’été. Puis d’autres responsabilités lui furent confiées.

En 1967, Aboushar, sa femme Alice et leurs enfants se réfugient dans ce centre. « Nous étions là 36 réfugiés arabes et juifs dont 16 enfants, ayant dû fuir nos maisons pendant les 6 jours de guerre. Autant l’atmosphère était tendue à l’extérieur, autant, à l’intérieur, elle était paisible même lors des pannes d’électricité. Je racontais des histoires aux enfants pour calmer leur crainte. »

Et Aboushar de conclure : « le YMCA ne peut changer le monde, mais si vous changez une personne, vous changez le monde. »

 Le YMCA de Jérusalem-est. ( EJ - YMCA)

En I948, cinq jeunes arabes palestiniens ayant travaillé quelques années au YMCA de Jérusalem, dont Labib B. Nasir, son secrétaire principal, se retrouvent avec des centaines d’autres Arabes dans une situation de réfugiés, situation créée par le partage de la Palestine. Soutenus par la Croix Rouge internationale et désirant être au service des leurs, ils installent un camp dans la région de Jéricho. Ces tentes dressées permettent l’accueil  de milliers de réfugiés. Les cinq responsables, aidés par plusieurs organisations, réussissent tout d’abord à offrir aux réfugiés le nécessaire vital : logement, eau, nourriture, médicaments. Mais, pour ces hommes ayant acquis la vision du YMCA, il fallait faire plus. Ils commencent alors à organiser pour ces jeunes et ces familles un programme d’éducation et de loisir. Ils ouvrent une école dans l’une des tentes.

 En 1950, ils mettent en route une formation professionnelle : menuiserie, ferronnerie. Cette école, commencée sous une tente, va peu à peu devenir le Centre de formation professionnelle de Agabat Jaber Refugee Camp, près de Jéricho, l’une des branches des activités de EJ-YMCA. Il permet à des jeunes gens et jeunes filles d’y acquérir un métier rentable, dans la menuiserie, la forge, la peinture, la mécanique et la maçonnerie pour les jeunes gens. En 1996, un département électronique est créé permettant à des jeunes filles en particulier de s’initier à l’ordinateur, et de devenir des professionnelles du graphisme par exemple. Ce centre compte actuellement 48 classes dont 5 pour les jeunes femmes.

A Jérusalem- est

 En 1950, EJ-YMCA s’installe dans un petit bâtiment permettant de recevoir des pensionnaires et de donner des cours du soir : cours de langues, hébreu et anglais, cours de comptabilité. A l’arrière du bâtiment, des terrains de jeux et de sports. EJ-YMCA utilisera également les terrains de sport de l’école St Georges, juste en face.

En 1965, EJ-YMCA construit, 29 rue Nablus, un bâtiment comprenant un hôtel, un auditorium et un département de sport avec piscine, terrain de squash, de volley ball et d’autres jeux sportifs. Ce complexe sportif va se développer de plus en plus, offrant aux jeunes des cours, des entraînements, les conduisant dans les années 70 et 80 à participer à des compétitions internationales et même à en organiser.

Le 28 septembre 2000, la deuxième Intifada ayant très vite paralysé gravement le tourisme de la région, l’hôtel EJ-YMCA doit fermer. Il sera plus tard loué pour 10 ans à un gestionnaire. Les bâtiments actuels  de  EJ-YMCA ne comprennent plus que des bureaux et le complexe sportif.

A Beit Sahour

En 1989, EJ-YMCA crée à Beit Sahour un centre de réinsertion professionnelle nommé  « Rehabilitation Program » pour répondre, entre autre, aux drames humains causés par la première Intifada : aider les blessés et les handicapés à se réinsérer dans la société. Après le 28 septembre 2000, ce programme se révèle des plus utiles. Mettant sur pied un suivi psychologique, des services de réhabilitation professionnelle et une aide médicale, ce centre permet à chacun de poursuivre sa vie… malgré tout. Un département de formation professionnelle offre à ce centre un personnel qualifié.

EJ-YMCA organise également des camps d’été et des cours de formation de responsables de jeunesse au Champ des Bergers.

En 2001, en collaboration avec le YMCA des Etats-Unis,  EJ-YMCA  démarre un nouveau complexe sportif très moderne comprenant tous les sports fitness, avec des aménagements spéciaux pour handicapés.

A Ramallah

En 1969, EJ-YMCA loue un bâtiment pour y commencer des activités pour les jeunes et pour les enfants, après leurs heures de classes.

En 1992 s’ouvre un service aidant les jeunes à créer de nouveaux emplois et des microentreprises dans les territoires et dans la Bande de Gaza. C’est « Extension Servit Unit Program. » Des cours y sont proposés permettant à ces futurs créateurs d’entreprises de se former et de s’orienter. Divers secteurs sont envisagés : industriel, polytechnique etc.

Signalons encore l’existence de deux autres programmes lancés par EJ-YMCA :

- « Women Training Program », commencé en 1993 dans le but d’améliorer le statut de la femme dans la société palestinienne, l’aidant à prendre des initiatives et à s’impliquer dans le développement du pays.

- « Advocacy Desk », un bureau travaillant plus spécialement à promouvoir la paix et la justice, en créant des ponts et en collaborant avec les divers YMCA internationaux.

La vision

EJ-YMCA se définit comme une organisation chrétienne travaillant dans la société palestinienne au développement de l’esprit, de l’intelligence et du corps, parmi les jeunes en particulier, sans discrimination de sexe, âge, culture, religion, ethnie. La dignité humaine, la justice sociale et les droits de l’homme orientent toutes ses activités. Quelques hommes et femmes chrétiens palestiniens dirigent ce mouvement, en collaboration avec un personnel important, indifféremment musulman et chrétien.

Antoinette Brémond

 « Vers l’olivier de la réconciliation »

Cette petite association a vu le jour il y a presque 7 ans maintenant, en décembre 2001. Elle s’est constituée pour donner suite à une formation « Pour l’amour de Sion » qui a duré 3 mois au centre chrétien de Gagnières (dans le Gard, en France) de janvier à mars 2001. Cette formation avait comme but d’enseigner les chrétiens de différentes Eglises sur le lien que les chrétiens ont avec Israël, peuple choisi par Dieu.

L’association est interconfessionnelle : elle inclut des catholiques, des protestants et des évangéliques qui viennent de différentes régions de France et d’Israël. Elle collabore avec d’autres associations de buts analogues.

Pourquoi  ce nom ?

Dans la lettre aux Romains chapitre 11 du v 16-24, Paul demande aux chrétiens d’origine païenne de ne pas faire les fiers car c’est la racine Israël qui les porte. Il annonce un jour où tous, Juifs et païens, nous serons sur le même olivier, les païens étant greffés sur Israël.

Son but.

La vocation principale de l’association « Vers l’olivier de la réconciliation » est de se mettre au service de l’Eglise de Jésus Christ dans la découverte, ou la re-découverte de ses origines juives et l’épanouissement de ses relations avec le peuple juif. Elle s’adresse donc aux chrétiens s’appuyant non seulement sur les Ecritures mais aussi sur tous les textes récents de nos Eglises, souvent si méconnus. Nous croyons aussi que plus les Eglises retrouveront leurs racines, plus l’unité des chrétiens progressera.

Pour cela, l’association enseigne aux chrétiens qui le souhaitent les bases bibliques, historiques, théologiques et culturelles de la foi en Jésus Christ, sachant que la personne de Jésus de Nazareth et le Nouveau Testament sont inséparables d’Israël, Ecritures, pays et peuple.

D’autres buts sont aussi développés comme celui d’apporter une information aux chrétiens sur le peuple Juif : sa raison d’être, ses origines, son histoire, sa destinée ; favoriser la rencontre interculturelle et interreligieuse entre Juifs et chrétiens. Notre désir est encore d’ « être avec » le peuple juif aujourd’hui et demain, en respectant sa méfiance historique à l’égard du christianisme, dans l’attente de la venue en gloire du Messie.

Une autre orientation également très forte de l’association est de lutter contre toute forme de théologie de substitution, de la théologie de remplacement dans l’Eglise qui a perduré hélas beaucoup trop longtemps. L’Eglise a cru pendant des siècles qu’elle était le nouvel Israël et qu’Israël n’avait plus sa raison d’être. Aujourd’hui, l’Eglise demande pardon et reconnaît que les « dons et les appels de Dieu sont sans repentance ». Dieu a un projet avec Israël qui ne s’est pas arrêté quand il y a eu la naissance de l’Eglise ! Il y a donc une implication forte de l’association dans l’enseignement du projet de Dieu selon la Parole pour Israël et pour l’Eglise.

Ses activités.

« Vers l’olivier de la réconciliation » travaille par le moyen de conférences, de week-ends d’hébreu biblique, de séminaires longs ou brefs, un peu partout en France (en Alsace, au Sud et au Nord), en Belgique, en Suisse et même en Martinique !

Agnès Staes

Un poème liturgique de Rosh Hashana chargé de mémoires

La liturgie de Rosh Hashana comme celle de Yom Kippour est particulièrement riche en poèmes liturgiques composés au fil des siècles, en des lieux et lors de circonstances particulières.

Aux temps des croisades

L’un des poèmes les plus célèbres de Rosh Hashana est sans aucun doute « Untaneh Tokef » attribué à Rabbi Amnon de Mayence. Il est chanté, souvent solennellement, lors de la très belle prière supplémentaire (Moussaf) de la fête.
Selon la tradition, ce texte fut composé par Rabbi Amnon de Mayence, l’un des dirigeants de la communauté juive les plus influents de son époque, en des circonstances dramatiques au 11ème siècle. L’évêque de Mayence, conscient de l’influence du rabbin sur ses fidèles, lui aurait demandé à plusieurs reprises de se convertir au christianisme. Un jour, l’évêque pria à nouveau son interlocuteur de se convertir, et le rabbin lui demanda un délai de trois jours pour réfléchir. Rabbi Amnon de Mayence comprit tout de suite qu’il avait commis une erreur. Il décida de ne pas se présenter devant l’évêque le troisième jour. L’évêque le fit chercher et ordonna la torture comme punition à l’affront. On lui coupa les jambes et les doigts de la main.
Quelques jours plus tard, pour la prière de Rosh Hashana, le rabbin demanda d’être conduit à la synagogue et, avant la répétition de la prière supplémentaire, on le fit monter à la tribune où il entonna la célèbre prière.

Si les études linguistiques montrent, à l’évidence, que ce poème liturgique est antérieur à Rabbi Amnon de Mayence puisqu’il a été retrouvé dans la Geniza du Caire (et donc n’a pas pu être composé plus tard que le 10ème siècle), la tradition juive veut, quant à elle, faire mémoire des moments d’épreuve que les communautés ont vécus pour rester fidèles à leurs traditions et au Dieu d’Israël. Les persécutions contre les Juifs dans la vallée du Rhin lors de la première Croisade comme lors de la seconde sont demeurées profondément ancrées dans les mémoires et marquent encore aujourd’hui la prière de ce jour de fête.

Dans la mémoire israélienne

Ces dernières années, ce poème liturgique éveille dans le cœur du priant un autre souvenir : celui de la guerre du Kippour. Yaïr Rosenblum a mis en musique cet antique texte à la mémoire des 11 soldats du Kibboutz Beit Hashita, à quelques kilomètres de Beit Shéan, tués lors des combats de la guerre d’octobre 1973. Aujourd’hui dans certaines synagogues, le chantre et l’assemblée chantent cette nouvelle mélodie que nous vous proposons d’écouter aussi. A la mémoire des croisades du Moyen-âge s’ajoute celle des souffrances contemporaines d’une guerre qui traumatisa profondément la société israélienne. Dieu est celui qui « ouvre le livre des mémoires » et qui se souvient que « l’homme est périssable » et son « origine est poussière et sa fin est poussière. »

Texte du poème liturgique Untaneh Tokef

« Entretenons-nous de la sainteté de ce jour, car il est terrible et redoutable. Ta Royauté s’affermira et le trône de ta grâce sera consolidé en vérité. Vraiment tu es un juge et un accusateur, tu connais toute chose et tu es un témoin. Tu prends acte de nos actions, tu les enregistres, tu y apposes ton sceau et tu comptes. Tu te souviens des faits oubliés, tu ouvres le livre des mémoires où les événements sont écrits et où toute action est signée de la main de son auteur.

Le grand shofar (trompette) retentira, un sourd murmure se fera entendre, les anges se presseront, une terreur indicible s’empare d’eux et ils disent : « C’est le jour du jugement qui s’approche pour citer au tribunal de Dieu les armées célestes. »

« Au jour de Roch Hashana tu décides et au jour de Kippour tu arrêtes définitivement : combien pendant l’année disparaîtront du monde, et combien seront créés ; qui doit vivre et qui doit mourir ; qui doit atteindre le terme de sa vie et qui n’y arrivera pas. Qui périra par le feu, par l’eau, par le glaive, par une bête sauvage, par la faim, par la soif, par la tempête ou par une épidémie ; pour qui sera le repos, pour qui l’inquiétude, pour qui la joie, pour qui la douleur, qui sera élevé et qui sera abaissé ; qui jouira de la richesse et qui subira la misère.

La repentance, la prière et les actes de charité effacent l’arrêt fatal.

Car ta gloire est grande comme ton nom. Ta colère est lente à s’exprimer et prompte à s’adoucir car tu ne désires pas la mort du pécheur mais qu’il revienne de ses fautes et qu’il vive. Tu patientes jusqu’à la fin de ses jours et s’il se convertit tu l’accueilles. Tu es son Créateur et tu connais la force de ses passions et tu sais qu’il n’est que chair et sang. L’homme périssable, dont l’origine est poussière et dont la fin est poussière, consume sa vie à trouver son pain ; il ressemble à un vase d’argile, à l’herbe desséchée, à une fleur flétrie, à l’ombre fugitive  qui disparaît, au vent qui souffle ; il se dissipe comme la poussière et s’évanouit comme un songe.

Tu es Roi Dieu vivant et subsistant. »

Jean-Marie Allafort

Kippour 2008 : 63% des Juifs d’Israël ont l’intention de jeûner

Selon un sondage réalisé par Ynet et l’association Guesher, 63% des Juifs d’Israël déclarent respecter le jeûne de Kippour. Parmi les Juifs religieux et traditionnels 93% ont l’intention de jeûner alors que parmi les Juifs laïcs, ils ne seront que 56% à respecter le commandement.

La pratique de jeûne est populaire chez les 18-20 ans

Il est intéressant de noter que parmi les jeunes de 18 à 20 ans 89% déclarent jeûner alors que chez les plus de 51 ans, ils ne sont que 52% à respecter cette pratique.

Rédaction

Deux frères

Au cours d'une conversation téléphonique qui remonte à loin, le Professeur Yeshayahu Leibowitz s'évertuait à m'expliquer le motif de l'une de ses récentes déclarations où, s'inspirant de Voltaire, il affirmait : “Le Dieu des juifs est Dieu. Le Dieu des chrétiens est juif. Il est né juif, Il a vécu juif, Il est mort juif.” Comme l'entretien se prolongeait, il m'invita à le poursuivre chez lui.

Sachant qu'il avait rédigé l'article ‘Jésus’dans l'Encyclopédie Hébraïque dont il était aussi l'éditeur, je me permis de lui rappeler que nous avions en commun la foi en un Dieu créateur et rémunérateur. Ce à quoi il répondit : “Il n'en est rien ! Notre Dieu n'est pas un Dieu qui crée et rémunère mais un Dieu législateur. Il est Celui qui nous a donné la Toraen prescrivant les commandements. C'est pourquoi, le refus de la Torapar les chrétiens nous encourage à voir dans le christianisme une sorte d'antijudaïsme.” Avant d'en prendre congé, je ne pus m'empêcher de lui avouer : “Jusqu'à présent, je pensais que les juifs et les chrétiens pouvaient tout de même se réclamer d'un patrimoine commun, mais à t'entendre parler, il semblerait au contraire qu'un abîme nous sépare.” Peu porté à dorer la pilule, il se contenta d'ajouter : “C'est la pure vérité !”

Cet échange de vues m'est revenu à la mémoire en lisant son commentaire magistral de la Parashat hashavoua , autrement dit, des chapitres de la Toraqui sont lus à la synagogue au cours du Shabbat. Ses propos sur les écrits traditionnels concernant les rapports ambigus de Jacob et d'Esaü - qui préfigurent ceux d'Israël et des nations - jettent une lumière singulière sur ce qui m'avait rendu perplexe au cours de notre rencontre. Ils sont partiellement reproduits ci-dessous.

Le conflit des deux frères aide à comprendre l'espace vide qui semble persister entre la Première et la Nouvelle Alliance. Ce manque apparent, intrigant pour plus d'un, fut exprimé on ne peut mieux par Disraeli qui, issu d'une famille juive italienne, avait été reçu à treize ans dans l'Eglise anglicane. Comme la reine Victoria demandait à son premier ministre : Finalement, quelle est votre religion ?” il répondit : Entre l'Ancien Testament et le Nouveau Testament, il y a une page blanche. Je suis cette page !”

I.C.

Jacob et Esaü

L'antagonisme ressenti par les enfants d'Isaac remontait au temps où ils étaient dans le sein de leur mère et persista tout au long de leur existence. Leur rivalité est devenue, dans la conscience juive, le symbole du conflit permanent qui oppose Israël à ce qui n'est pas lui si bien que les péripéties vécues par ces deux figures bibliques ont souvent été interprétées à la lumière d'une situation ultérieure où Israël a dû faire face aux nations. Cette mémoire séculaire a entretenu une tension trans-historique qui, avec le temps, a pris les proportions d'un conflit cosmique.

Jacob marche devant Dieu

Au moment de la naissance des jumeaux Jacob et Esaü, le premier naquit en tenant la main agrippée au talon (Héb.: Eqèv) de son frère d'où son nom Yaaqov, ce qui suggère une prédisposition à la priorité qui sera donnée au puîné et non pas à l'autre. Plus tard, le stratagème qui lui conféra le droit d'aînesse (Héb.: Bekhora) fut suivi de la tromperie qui lui valut la bénédiction (Héb.: Berakha). Aussi, les commentateurs ne se sont-ils pas privés de souligner les roueries du père des douze tribus.

Si Abraham, reconnu de son vivant comme Prince de Dieu (Genèse 23.6), est considéré comme le père du Judaïsme, Jacob est devenu le père du peuple juif. Mais, à la différence d'Abraham dont on ne connaît que les éléments saillants de son existence et d'Isaac dont la personnalité reste élusive, les récits concernant Jacob nous rendent sa personnalité très accessible. Comme ses pères, Jacob “marche devant Dieu” mais ce cheminement est parsemé des épreuves communes à tout être humain fait de chair et de sang.

Il connaît tout ce qui informe un destin personnel et touche aux différents aspects de la condition humaine : les problèmes du couple et de l'éducation des enfants, les soucis d'un patrimoine, les dangers de la vie, la jalousie, la rivalité, l'angoisse, le deuil, l'échec sous toutes ses formes. Toutes ces situations, parsemées de rencontres fatidiques où les anges sont parfois présents, revêtent dans son cas une signification symbolique du fait de son rôle déterminant dans l'histoire du peuple élu.

L'histoire de Jacob nous révèle la courbe d'une existence dans toute son ampleur, avec ses hauts et ses bas, tant du point de vue matériel que spirituel, aussi a-t-on pu y voir la première biographie de la littérature universelle. Doué d'une personnalité fortement typée, Jacob sait, à l'occasion, se montrer obstiné. Déjà, dans l'attente de leur naissance, Rébecca constatait que les deux enfants “se heurtaient en son sein”.  La personnalité de Jacob est complexe au point de paraître compliquée. Présenté dès le début du récit biblique comme “un homme intègre qui demeurait sous les tentes” (Genèse 25.27), il ne tarde pas à laisser paraître son côté madré. Si courageux qu'il soit, cet homme d'action craint son frère et n'hésite pas à ramper devant lui. I1 a pourtant conquis Sichem, une ville d'Amorites “par l'épée et par l'arc”, une expression qui, dans le Targum araméen, deviendra “suite à ma prière et à ma demande”.

Sur le tard, Jacob avouera à Pharaon : “Ce fut un temps bref et mauvais que les années de ma vie” (Genèse 47.9). Un midrash ira même jusqu'à faire dire à Dieu : “Je n'ai jamais fait un miracle pour lui”. Rien de ce qui arrive à Jacob, le droit d'aînesse, la bénédiction, l'épouse désirée, la richesse, les propriétés, etc... ne lui arrive directement mais au terme de manœuvres et de machinations subtiles. Dieu lui apparaît trois fois : tout d'abord, durant le songe de l'échelle, à Béthel, sur le chemin de l'exil, puis au retour de l'étranger et enfin, au moment de quitter la terre promise pour l'Egypte où il retrouvera, après vingt-deux ans de séparation, Joseph, le fils dont la perte apparente l'avait rendu inconsolable. Cette saga de l'enfant préféré est intentionnellement insérée entre deux moments dont il est dit tout d'abord : “Jacob s'installa au pays où son père avait émigré” (Genèse 37.1)puis ensuite : “Israël se fixa au pays d'Egypte” (Genèse 47.27).

Cette vie mouvementée est manifestement dominée par un changement de nom. Celui qu'il porte au début, Yaaqov, semble symboliser le côté troublant de sa vie. Plus tard un prophète admettra sans fard : “dans le sein maternel il a supplanté son frère” (Osée 12.4). Un siècle et demi après le fils de Beéri, l'un des prophètes de l'exil fit encore une allusion au père des douze tribus, sans toutefois préciser son nom : “Méfiez-vous d'un frère car tout frère ne pense qu'à supplanter.” [Héb : Aqov Yaaqov] (Jérémie 9.3).Cette homophonie rappelle que, dans l'esprit du prophète d'Anatot, les procédés de Jacob n'étaient pas des plus recommandables. Il fut pourtant appelé à recevoir le nom d'Israël qui évoque une sainteté capable d'informer la vie.

Jacob reçoit la Bénédiction

Les commentaires abondent au sujet du transfert de la bénédiction. Parmi ceux-ci, Yalkout Haréouvéni et Midrash Hanéélam n'hésitent pas à en faire une lecture des plus critiques dans l'esprit de rabbi Eliézer pour qui “le comportement de l'homme est une affaire de droiture.” Sachant qu'Esaü est devenu le symbole de l'empire romain, l'auteur du midrash tend à voir dans l'assujettissement d'Israël à Rome, une conséquence lointaine du fait que Jacob ait détourné le droit d'aînesse d'Esaü par tromperie. Des sages de l'école des Tannaïm[1er & 2eme s.] reprochent aussi à Jacob d'avoir accaparé la bénédiction de façon abusive, à la suite de quoi, Esaü “poussa un grand cri au comble de l'amertume” (Genèse 27.34).Comme les auteurs sacrés ont bonne mémoire, il n'est pas étonnant que la même expression revienne plus tard sur les lèvres de Mardochée qui “poussa un grand cri amer” au moment où le peuple juif se trouva menacé de destruction en Babylonie.

Dans son commentaire, Baal Hatourim précise que le nom d'Esaü et le mot Shalomont la même valeur numérique : 376. Celui dont Isaac avait dit : “De ton épée tu vivras” (Genèse 27.40)porte donc un nom qui selon la guématrie est identifié au mot shalom. Cet auteur signale en outre la place centrale tenue par le mot shalomdans la Bénédiction des prêtres : “Que YHWH porte sur toi son regard et te donne le shalom!” (Nombres 6.26).La paix devant être souhaitée à tout être humain, cette bénédiction sacerdotale laisse entendre que le chemin de la paix offerte à Israël passe inévitablement par l'étape d'une réconciliation avec Esaü. En poursuivant la paix avec une inlassable patience, Israël est invité à se souvenir qu'il ne pourra l'atteindre tant que les familles de Jacob et d'Esaü resteront dans l'attente des retrouvailles.

Il est éclairant de comparer les différentes bénédictions octroyées par Isaac à ses fils. Tout d'abord, celle destinée à Esaü mais dont Jacob fut le bénéficiaire, puis celle qu'Esaü reçut de son père après avoir pleuré amèrement. Les points communs ne doivent pas occulter les dissimilitudes. Dans les deux cas, il est fait mention de “la rosée du ciel et des gras terroirs”. Mais à Jacob, Isaac souhaite : “Qu'Elohimte donne la rosée du ciel et les gras terroirs !” (Genèse 27.28)tandis qu'à Esaü, il se contente de dire : “Parmi les gras terroirs et sous la rosée qui tombe du ciel sera ton habitat !” (Genèse 27.39).

Etant donné que la mention du nom Elohimévoque l'idée de justice, la bénédiction de Jacob revêt une signification liée à cet attribut. Il reçoit certes une bénédiction enviable mais elle reste soumise au critère de justice. Autrement dit, Jacob doit être à la hauteur de ce qu'il a reçu. Par contre, la bénédiction d'Esaü est donnée sans condition, vu que le nom d'Elohimn'y figure pas. Même si cette forme de langage peut, à première vue, laisser entendre qu'Esaü reçoit un statut plus avantageux, il n'en est rien, tant s'en faut. Esaü est en effet dépourvu d'alliance, tandis que le peuple issu de Jacob peut, du fait de l'élection, compter sur Dieu qui lui a dit : “D'un amour éternel, je t'ai aimé” (Jérémie 31.3).

Selon cette interprétation, Esaü et par la suite Edom peuvent envisager la perspective de “gras terroirs et de la rosée qui tombe du ciel” mais certaines versions présentent cette déclaration sous un jour différent en ce sens que l'assurance donnée à Esaü aurait une signification non seulement distincte mais opposée à la promesse faite à Jacob. Suivant cette lecture, communément acceptée dans bien des milieux, il serait dit à Esaü : “Tu n'auras pas de gras terroirs ni la rosée du ciel !” Mais cette vue - pourtant adoptée par Buber et Rozensweig - n'est pas conforme à la façon dont la tradition juive envisage la bénédiction d'Esaü.

Rachi fait remarquer qu'Israël doit se montrer digne de ce qu'il reçoit à l'instar du Tsadiqqui, se sentant tenu de correspondre à la grâce d'Elohim, voit dans cette exigence son plus grand privilège. Au temps d'Osias, roi de Juda, un berger de Teqoa ne manqua pas de le rappeler aux descendants des patriarches : “Vous seuls, je vous ai connus entre toutes les familles de la terre. C'est pourquoi, je vous ferai rendre compte de toutes vos iniquités” (Amos 3.2). Evoquant cette invective, Rachi rappelle que la prérogative de Jacob et des siens s'accompagne d'une responsabilité en ce sens qu'ils ne peuvent jouir de la sollicitude divine sans contrepartie, tant il est vrai qu'en réponse à une élection sans repentance, Dieu attend davantage de ceux qu'il a choisi d'entre tous les autres.

JacobrencontreEsaü

Au moment de la rencontre avec son frère, Jacob se sent désemparé, alors que dans la solitude du combat de la nuit précédente il s'est montré invincible. En effet, il semble douter maintenant que son ancien comportement vis-à-vis d'Esaü fût vraiment justifié. On y a vu l'expression d'une conscience qui l'empêche de combattre un frère auquel il a causé du tort, si bien que ce qui pourrait sembler une faiblesse dénote en fait un sens moral affiné qui l'aide à ne pas s'accommoder d'une erreur du passé.

En guise de préliminaires à la rencontre, Jacob fait parvenir une offrande à Esaü. Le mot 'présent' [Héb : Minha] revient à cinq reprises au cours du récit. Après avoir demandé à son frère d'accepter son présent, Jacob lui dit : “Reçois ma bénédiction", comme si son subconscient le faisait revenir à résipiscence en repensant au moment où il avait acquis par ruse la bénédiction d'Isaac qui fut réduit à avouer : “Ton frère est venu en fraude et il a capté ta bénédiction” (Genèse 27.35).

Il est patent que selon le Peshat, autrement dit, le sens obvie du texte de la Tora, les défauts d'Esaü ne sont pas soulignés mais plutôt le tort qui lui est causé. Dans ce contexte, les sages reviennent volontiers sur le dicton : “Dieu protège le persécuté” (Qohélet 3.15).Ils rappellent avec insistance : “Dieu recherche le persécuté [i.e. cherche son bien]. Même si un juste se permet à l'occasion de poursuivre un mécréant Dieu protège toujours l'être en difficulté.

Vingt années ont pu s'écouler depuis l'affaire du droit d'aînesse et de la bénédiction, mais Jacob reste probablement plus affecté que son frère par ce souvenir amer car l'offensé tend habituellement à oublier une injure plus vite que l'offenseur. Son attitude au cours de la confrontation avec Esaü semble dénoter le désir de réformer sa conduite en délaissant ce qui était impliqué dans le nom de Jacob pour assumer ce qui est exprimé dans celui d'Israël. Aussi n'est-il pas fortuit que les récits du changement de nom et celui de la réconciliation avec Esaü soient tellement rapprochés l'un de l'autre.

En évoquant les deux noms de Jacob et d'Israël, l'écrivain Shaï Agnon notait que selon la guématrie, la valeur numérique de Jacob est : 182 et celle d'Israël : 541. La différence s'élevant à : 359 représente la valeur du mot ‘Satan’. Eu égard au fait que Jacob est le nom de faiblesse du père des douze tribus, tandis qu'Israël est celui de sa destinée, le simple rappel de ce qui les sépare est le meilleur moyen de refuser toute régression en s'attachant à un nom aussi prédestiné.

Extrait de Sept années d'entretiens sur la 'Parashat Hashavoua ' de Yeshayahu Leibowitz. Keter, Jérusalem. 2000.

Trad. de l'hébreu, I.C.

Une frilosité fraternelle

"Il arriva un jour que Jacob put s'asseoir tranquillement aux côtés d'Esaü"

Yalkout Shimeoni

La parabole figurait deux frères qui virent au crépuscule deux étoiles précipitées l'une vers l'autre, se rejoindre avant de disparaître dans le ciel. Et le scribe qui s'interrogeait comme eux sur le sens de cette conjonction céleste n'oubliait pas que l'art de la parabole consiste à établir des liens entre des êtres qui en étaient dépourvus.

Le souvenir de vos rapports, rappelait le sage à l'un des deux intéressés, laisse un rétrospectif malaise car on ne peut oublier que la solitude d'un proche est plus qu'une autre solitaire. En effet, lui disait-il, tu n'arrives même plus à entrevoir les soucis de ton frère, du fait que vos existences n'ont jamais cessé de se séparer. Pour le moment, vos silences ressemblent à des mensonges et vous restez tous deux prisonniers de l'ambiguïté propre aux situations apparemment sans issue.

Tu frappes à une porte mais il en ouvre une autre. Tu l'appelles par son nom, il évite de prononcer le tien. Tu fais une remarque, elle le laisse indifférent. Tu cherches ce qu'il perd et apprécies la compagnie de gens qu'il méconnaît. Tu vas puiser de l'eau en aval, il le fait en amont. Tu observes les feux de l'aurore, il scrute la lune à son déclin. Tu apprends ce qu'il fait par ouï-dire et finis par t'égarer dans la ville où il se trouve.

Vos trous de mémoire ne sont pas les mêmes, d'où certains malentendus. Aussi, l'histoire de votre vie est-elle celle d'une blessure avant d'être la vôtre. Mais vu que la nuit n'est pas toujours aussi épaisse, vous avez également des souvenirs rassurants qui parfois font figure de signes prémonitoires. Tu as fait un rêve au chant du coq et, à midi, il a été saisi par la réalité d'une présence. Le vœu que tu as formulé un soir à la vue de l'étoile du berger, l'a comblé dès l'aurore.

Comme des liens peuvent unir en secret ceux que tout sépare en apparence, vous rêvez d'une croisée de chemins où vous vous attendez car malgré les feintes de l'oubli et les ruses de l'inconscient, vous aspirez encore à mettre au clair vos rapports de voisinage. Après avoir tellement voulu exorciser cette expérience, vous ne désespérez pas de la rendre habitable dans une amitié où l'on voit son frère avec ses yeux à lui, pour devenir éventuellement le gardien attentif de sa solitude.

Entre temps, vous manifestez des aptitudes dont vous ne vous rendiez pas compte. Elles vous aident à explorer les ténèbres d'une histoire où vous pouvez découvrir que la sagesse rend capable d'expliquer le mal et de s'en éloigner sans mot dire. Habitués malgré tout à un territoire intérieur qui vous renvoie aux mêmes souvenirs, vous devenez l'un pour l'autre l'ombre où l'on s'aperçoit que la lumière existe.

Même si les petites distances sont dans certains cas infranchissables, un jour viendra où vos silences finiront par s'entendre quand vous arriverez à prêter l'oreille sans occuper l'espace vide laissé dans l'esprit de l'autre. Libérés des préjugés qui contrarient la sérénité du regard et, cessant d'être sourds aux questions en suspens, vous découvrirez ce qui était perdu. Ayant enfin compris que l'on ne va pas au vrai par des chemins obliques, vous succomberez au désir de la réconciliation en découvrant le luxe d'exister aux yeux d'autrui. Et vous saurez qu'au désert, on voit parfois des fleurs poindre au milieu des pierres.

I.C.

La parole de Dieu et ses traductions

Le 14 octobre, dans son intervention au synode sur la parole de Dieu, le pape rappelait la nécessité d’interpréter le texte en tenant compte de l’unité de l’ensemble de l’Écriture. Cette règle d’interprétation est particulièrement importante dans l’exégèse juive classique, qui la met en œuvre d’une manière très caractéristique, dont la lecture chrétienne peut certainement tirer profit.

La lecture juive ancienne ne cesse d’établir des corrélations entre les textes bibliques à partir des similitudes d’expression et de vocabulaire. Une formule, une construction de phrase, un mot, voire un détail orthographique sont considérés comme renvoyant d’eux-mêmes à tous les passages de l’Écriture où se retrouvent les mêmes particularités. Les mises en relation nées de ces rapprochements ouvrent des possibilités d’interprétation d’une fécondité qui dépasse largement le sens littéral de chacun des passages considérés.

Un exemple fera mieux comprendre de quoi il est question. On lit en Genèse, 22,4: «Le troisième jour, Abraham, levant les yeux, vit le lieu de loin.» Une tradition ancienne rassemble, à propos de ce verset, les passages de l’Écriture où apparaît un «troisième jour»  c’est «le troisième jour» que la Tora est donnée à Israël (Ex 19,16), c’est «le troisième jour» qu’Ézéchias, atteint d’une maladie mortelle, est guéri et peut monter au temple (2R 20,5.8), c’est «le troisième jour» qu’Esther obtient d’Assuérus le salut de son peuple (Est 5,1), etc.[1] Le rapprochement de ces différents textes fait apparaître le troisième jour comme celui où la vie est donnée ou redonnée. Le commentaire peut alors conclure en citant Osée 6,2: «Il nous rendra la vie dans deux jours, et le troisième jour, il nous relèvera et nous vivrons en sa présence.» Cette citation d’Osée dit explicitement ce qui, selon notre commentaire, est suggéré dans toute l’Écriture: le troisième jour est celui de la résurrection des morts.

Évidents à la lecture du texte original, ces rapprochements ne sont pas toujours perceptibles dans les traductions, lorsqu’une même expression hébraïque est rendue par des formules différentes dans les divers passages où elle apparaît. Il peut même arriver que la recherche de la qualité littéraire de la traduction, en voulant mettre en valeur le texte traduit, rende impossible ou difficile, du même coup, la mise en relation avec d’autres passages.

Les traductions de deux des textes bibliques cités ci-dessus vont nous permettre d’illustrer ce problème. On lit en Exode 19,16: «Le troisième jour au matin, il y eut des tonnerres, des éclairs, une nuée épaisse sur la montagne…» La tradition juive a inclus ce «troisième jour» dans sa liste parce que la Tora, qui est donnée ce jour-là, est source de vie. Si la plupart des traductions françaises sont ici fidèles à l’hébreu, l’une d’entre elles, la Bible de Jérusalem, a traduit «le troisième jour» par «le surlendemain». Une formule qui, par comparaison avec les autres passages où se rencontre la même expression, constitue le point d’appui d’un développement théologique devient ici une banale indication chronologique, pour ne pas dire anecdotique.

Un autre de ces passages est celui ou Joseph, après avoir retenu ses frères en captivité en Égypte pendant trois jours, décide de les laisser repartir en Canaan pour en ramener leur père et leur jeune frère, tout en gardant l’un d’entre eux en otage. L’hébreu dit ici, littéralement: «Le troisième jour, Joseph leur dit: “Faites ceci et vivez”.» Ce  «Faites ceci et vivez» — en hébreu, trois mots: zot assu vehiu — devient dans la Bible de Jérusalem: «Voici ce que vous ferez pour avoir la vie sauve», et dans la T.O.B.: «Voici ce que vous allez faire pour rester en vie». Traductions évidemment fidèles à la ligne générale du récit, mais qui ferment en quelque sorte le texte sur lui-même, là où l’hébreu, dans sa brièveté, contient une dynamique qui incite à chercher, au-delà du sens littéral, une signification plus profonde et plus riche.

Pourquoi la tradition rassemble-t-elle ces passages sur le troisième jour autour du verset de la Genèse relatif à Abraham? Le «troisième jour» dont parle ce texte est celui où Isaac aurait dû être mis à mort. Levé «de bon matin» (Gn 22,3), Abraham est parti pour la montagne où il doit sacrifier son fils (Gn 22,2). «Le troisième jour», après avoir vu le lieu de loin (Gn 22,4), Abraham dit aux serviteurs: «Restez ici avec l’âne. Moi et le jeune homme, nous irons jusque là-haut, nous nous prosternerons et nous reviendrons.» (Gn 22,5). Comment Abraham, qui est décidé à sacrifier son fils, peut-il dire sans mentir: «Nous reviendrons»? Selon le commentaire du midrash sur la Genèse, Abraham annonça prophétiquement à Isaac qu’il reviendrait en paix. Pour souligner ce caractère prophétique de la prédiction, une source dit même: «La bouche d’Abraham annonça…» L’Épître aux Hébreux, dont l’auteur connaissait vraisemblablement cette tradition sous une forme ou sous une autre, le dit explicitement: «Ainsi celui qui avait reçu les promesses, et à qui il avait été dit: “C'est d'Isaac que naîtra ta postérité”, offrit ce fils unique, estimant que Dieu est assez puissant pour ressusciter même les morts.» (He 11,18-19). Dans la tradition juive, la deuxième des «Dix-huit bénédictions», qui rend grâces pour la résurrection des morts, est associée au personnage d’Isaac.

On le voit par ce dernier exemple: dans une perspective chrétienne, l’attention à l’unité de l’Écriture entraîne, par sa dynamique même, le passage de l’Ancien Testament au Nouveau; on serait tenté de dire: la libre circulation entre l’Ancien et le Nouveau.

Notre point de départ était la question des traductions. Le lecteur l’a évidemment compris: aucune traduction ne peut rendre parfaitement les virtualités du texte hébreu. Du reste, lorsqu’on parle du passage de l’Ancien au Nouveau, on rencontre inévitablement la question du passage de l’hébreu au grec, puisque c’est en grec que le Nouveau Testament est écrit. C’est là une question trop complexe pour être abordée ici.

La situation est-elle désespérée? Les mauvaises langues disent des traductions que celles qui sont belles ne sont pas fidèles, et que celles qui sont fidèles ne sont pas belles. Affirmation qui serait probablement à nuancer. S’il faut renoncer à rendre parfaitement l’original dans une traduction — et des tentatives comme celle d’André Chouraqui ne sont pas totalement convaincantes — il est permis d’accorder la préférence à des traductions qui font passer la fidélité au texte avant la recherche littéraire.

En attendant, on ne peut que recommander aux amoureux de la Parole d’entreprendre ou de poursuivre l’étude de l’hébreu. Une montagne dont l’ascension n’est pas si redoutable, et dont la conquête récompense de bien des efforts.

Michel Remaud

 

Chant du mois

Halvaï !  – Si seulement…


Si seulement l’arc-en-ciel jaillissait du nuage

Si seulement ce monde pouvait être réparé!

 

Pourvu que le jour surgisse de la tornade

Et que le don reçu ne se perde à jamais !

Pourvu que le désert se couvre d’un gazon

Et que nous puissions encore siéger à l’ombre du figuier.

 

Que cesse la douleur et que l’homme aime l’homme

Et que s’ouvrent à nouveau les portes du Ciel.

Que se rencontrent enfin l’orient et l’occident !

Si seulement revenaient les jours d’antan!

 

Qu’un peuple ne lève plus l’épée contre un autre,

Que nous n'abandonnions pas le chemin de l’espoir,

Que la miséricorde couvre l’homme jusqu’au soir,

Et qu’il subsiste encore une chance pour l’amour.

 

Si seulement…


(Halvaï = Ah si seulement… Puisse-t-il arriver que…)

Et l'humour en finale

Woody Alen, celui qui a dit “l'éternité, c'est long ! surtout vers la fin…  – a rapporté sa conversation avec une de ses petites amies:

“Elle retire les lunettes de sur mon nez et s'exclame: Tu sais, si tu retires tes lunettes tu es vraiment beau !

Alors moi: Tiens, c'est vrai, si je retire mes lunettes, toi aussi tu n'es pas mal…”

 

Et maintenant un peu d'étude biblique

Un rabbin, ou était-ce un prêtre, dit dans une classe d'élèves:

“N'oubliez pas, mes enfants, que Dieu a créé l'homme d'abord, la femme ensuite.”

Alors une petite fille ose élever la voix:

“Bah, évidemment, fallait bien qu'il fasse un brouillon !”

Le petit Isaac, 10 ans, a été très impressionné par le récit de la création de l'homme et de la femme. Un matin il se réveille avec une douleur dans la poitrine, et assez inquiet dit, en se tâtant les côtes:

“Oh, Maman… j'crois que j'vais avoir une femme !”

Yohanan Elihaï

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[1] On trouvera une présentation plus complète de cette tradition dans M. Remaud, Évangile et tradition rabbinique, Bruxelles, Lessius 2003, pp. 125-130.