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Prière de St Ignace

 « Seigneur Jésus,
apprenez-nous à être généreux,
à vous servir comme vous le méritez,
à donner sans compter,
à combattre sans souci des blessures,
à travailler sans chercher le repos,
à nous dépenser sans attendre d’autre récompense
que celle de savoir que nous faisons votre Sainte volonté. »

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N° 15 - Mai 2004

Sommaire :

  • Editorial
  • Le dossier du mois : peut-on rester neutre ?
  • Histoire : Entre deux guerres, 1967-1973 (suite)
  • Chrétiens d’Israël – pensée unique ?
  • Exode des chrétiens de Terre Sainte ?
  • L’impossible réveillon
  • Les chrétiens de Tel Aviv
  • Une communauté messianique à Jérusalem
  • A propos du mur de l’apartheid
  • Comédie musicale
  • Flashes d’espoir
  • Le chant du mois
  • Humour en finale

 

Editorial

La sirène a sonné trois fois, le jour de la Shoah lundi 14 avril et le jour du souvenir pour les soldats tués et les victimes de la terreur. Nous sommes restés debout en silence deux minutes chaque fois.  « Debout ou courbés » comme l’écrivait le poète Yehouda Amihaï,  « tendus comme une tente ou écrasés par le deuil, la tête baissée comme un coupable ou la tête haute manifestant contre la mort, ou les yeux fermés », priant et portant dans le cœur et les yeux les 960 photos des victimes de la seconde Intifada (depuis octobre 2 000).

Et la fête de l’Indépendance ? –  Non, ici on dit, le jour de l’Indépendance, qui en fait commence à la fin du jour du Souvenir. Il m’a semblé d’après les photos et titres des journaux annonçant ce jour, que le ton était plus grave que d’habitude ; exemple : « Fierté et deuil » sur la première page de Yediot aharonot . Rien de triomphant . Le souvenir des morts, la situation présente pesaient .

Un étudiant franco-israélien blessé dans l’attentat de la cafétéria à l’université en juillet 2002, quelques mois après son arrivée, résume assez bien le sentiment national de fierté et de deuil : « J’ai voulu vivre ici par volonté de participer à un projet collectif de construire l’Etat juif, projet sioniste pour un Etat et une terre . Je suis prêt aussi à reconnaître qu’il se trouve un autre peuple qui a droit lui aussi à une terre ; la situation actuelle ne nous empêche pas de vivre et de croire dans ce pays aujourd’hui et pour l’avenir ; je vis le rêve plus le cauchemar de ce pays ».

Comme vous le verrez ce numéro est un peu différent des précédents. Plusieurs lecteurs nous ayant demandé une information sur la communauté chrétienne vivant en Israël, nous avons pensé y consacrer ce numéro.

                                                                                                              Suzanne Millet

Dossier du mois

Peut-on rester neutre ?

Un religieux catholique s’interroge

Une religieuse m’a posé cette question : « Quelle doit être notre relation avec Israël compte tenu de la situation actuelle ? Quelle position adopter, peut-on rester neutre ? Peut-on demeurer sur le plan spirituel ? Cela me semble une attitude difficile, voire impossible… »

Le conflit israélo-arabe est très passionnel et très médiatisé. Au début de l’Intifada, il y avait autant de journalistes à Jérusalem que dans tout le continent africain ! Je vois au moins trois raisons à cette focalisation des esprits sur cette petite portion de territoire grande comme la Normandie ou la Suisse :

–   Jérusalem est l’origine de notre foi chrétienne, la ville « où tout homme est né » comme dit le psaume : tout ce qui s’y passe nous touche à un niveau profond.

–   l’islam constitue une force politique mondiale de plus en plus importante, qui effraye par son refus massif de la modernité.

–   le Proche-Orient est une des principales régions qui approvisionnent le monde en pétrole, ce qui nous rend économiquement dépendant de sa stabilité politique.

Cette guerre plus ou moins larvée est un problème complexe qui touche plusieurs domaines très liés les uns aux autres, de sorte qu’il n’est pas vraiment possible de s’en tenir à une analyse purement spirituelle par exemple. Quant à la neutralité, elle n’est pas non plus souhaitable dans la mesure où elle ne serait que de l’indifférence coupable, ou une manière de ne pas se poser de questions en renvoyant les belligérants dos à dos.

La première chose à faire est un effort sur soi pour s’affranchir des passions qui nous habitent.

1) Distinguer les niveaux de lecture

S’il n’est pas possible de séparer les différents domaines où se joue le conflit, il est toujours possible de distinguer les niveaux d’analyse :

–   niveau politique

–   niveau relevant de la science des religions

–   niveau théologique

Au plan de la simple politique, les choix de Sharon ou d’Arafat sont sujets à critique de la même façon que ceux de Chirac, Schröder, Berlusconi, Bush ou n’importe quel homme au pouvoir.

Au plan des religions, on entend parfois des personnes généreuses estimer que la source des problèmes est dans l’attachement irrationnel des Juifs à leur terre. L’honnêteté oblige à reconnaître que c’est de fait un aspect fondamental du judaïsme. Le judaïsme ne peut se comprendre seulement comme une simple religion : le judaïsme est religion et nation ; il se constitue autour de 3 pôles : peuple, terre et Loi. On ne peut nier cela, ou alors on prétend dire aux Juifs qui ils sont ! Le sionisme politique est né au XIXème, mais le judaïsme est sioniste depuis la Bible ! Toute l’histoire de l’Alliance entre Dieu et son peuple est centrée sur Jérusalem. Le livre de prière juif est rempli de phrases reliant le peuple juif à sa terre.

Sur ce point, il faut savoir que le monde musulman dans sa majorité partage une pensée de type négationniste : on nie explicitement l’existence historique du Temple de Jérusalem à la place où se trouve aujourd’hui le Dôme du Rocher. J’ai personnellement l’habitude lorsque j’emmène des pèlerins sur l’esplanade de sortir en cachette un plan du Temple de Jérusalem, car il y a des personnes chargées de surveiller ce que disent les guides. Il est aussi interdit de sortir la Bible ! Cette question est importante : les négociations de Camp David en l’an 2000 ont achoppé dessus. La délégation israélienne avait fait des concessions énormes sur Jérusalem, mais elle voulait au minimum entendre de la part des Palestiniens que leur attachement au Mont du Temple était légitime, ce que Yasser Arafat a refusé de dire jusqu’à ce qu’il s’exclame : « Est-ce que vous voulez faire de moi un traître pour les musulmans ? Est-ce que vous voulez ma mort ? »

Si l’on passe au niveau de la théologie, la question est : quel est le rapport entre le retour des Juifs en Palestine d’alors et le dessein de Dieu ? Les Juifs et les chrétiens ont chacun des réponses à cela, qui dépendent de leurs traditions respectives :

–  Dans le judaïsme, il faut rappeler que les religieux se sont d’abord fortement opposés à l’Etat ; c’est par la suite qu’on a donné à l’événement de 1948 une interprétation positive. A partir de 1967, il y a eu un revirement brutal de pensée, c’est l’époque où naît le mouvement Goush Emounim (bloc de la foi) et la mystique du Grand Israël. Aujourd’hui, une position religieuse est de dire : le retour d’une souveraineté juive à Jérusalem est reshit tsemihat gueoulatenou = « le début de la germination de la rédemption » ; cela signifie que c’est un des éléments nécessaires pour que viennent les temps messianiques.

–  Dans la pensée catholique, il n’y a pas de déclaration officielle par rapport à cette question. Le Magistère de l’Eglise catholique est particulièrement prudent à l’égard de toute interprétation concernant la terre d’Israël. La sagesse invite au minimum à établir une distinction entre l’Israël de la Bible et l’Etat d’Israël : ce sont 2 réalités non superposables, de sorte qu’on ne peut pas simplement dire par exemple : la déclaration d’indépendance d’Israël est l’accomplissement de la prophétie d’Ezéchiel 37, 12. L’Etat aurait d’ailleurs pu s’appeler autrement ! L’événement du retour des Juifs sur la terre de leurs ancêtres n’est cependant pas anodin.  Il pose question aussi aux chrétiens, d’autant plus que les Pères de l’Eglise avaient donné une interprétation de la dispersion des Juifs, comme punition infligée par Dieu au peuple qui a refusé le Christ. Officiellement, cette interprétation n’a plus cours depuis le Concile, mais le vide qu’elle laisse n’a jamais été comblé.

2) Prendre connaissance du poids de l’histoire

S’il s’agit de prendre position par rapport au conflit, l’honnêteté intellectuelle exigerait de prendre connaissance des faits historiques, en remontant au minimum au début du sionisme politique, c'est-à-dire le Congrès de Bâle en 1897. Les premiers conflits importants entre Juifs et Arabes n’ont pas commencé dès les premières immigrations juives, mais dans les années 1920-1930.

Impossible de tout raconter en quelques lignes, mais au moins deux faits ont été déterminants à l’origine de la situation :

–  La politique des Anglais, à qui la SDN avait confié le mandat sur la Palestine, Transjordanie comprise; les nécessités du conflit contre les Nazis leur a fait choisir le camp des Arabes contre les Juifs ; en effet, il n’y avait aucun danger que les Juifs soient tentés de rallier le camp des Allemands, mais ce n’était pas le cas pour les Arabes. Ils ont ainsi été amenés à faire des promesses aux Arabes qui entraient en contradiction avec celles qu’ils avaient faites aux Juifs.

–  La Shoa a laissé des milliers de Juifs sans patrie, et a poussé nombre de pays occidentaux culpabilisés à voter à l’ONU pour un Etat juif en novembre 1947.

Il y a donc derrière le conflit qui existe aujourd’hui des responsabilités lointaines qui s’enracinent jusqu’en Europe. Lorsque Théodore Herzl fonde le projet sioniste, c’est après avoir interprété le déchaînement des passions antisémites contre Dreyfus en France comme l’impossibilité pour les Juifs d’échapper à l’antisémitisme des Européens. Bien sûr, il y a d’autres éléments : le développement des nationalismes arabes et la décolonisation, la guerre froide, le réveil de l’islamisme. L’histoire montre la complexité des origines du problème et dissuade de chercher un coupable unique.

3) Poser un regard critique sur nos propres réflexes humains

La manière dont nous réagissons à un événement n’est pas seulement liée à nos opinions ou sympathies personnelles ou à la grille de lecture que nous adoptons. Nous sommes d’autant plus dépendants de nos passions que nous ne prenons pas conscience d’en avoir. Celles-ci s’appuient sur des postulats de base souvent non conscientisés, qu’il est utile de mettre au jour :

–  1er postulat : « David a raison contre Goliath ». Ce principe est simple, il affirme que le plus faible est a priori la victime, la raison et la justice sont de son côté. C’est ainsi que l’opinion publique occidentale a changé de camp après 1967. Au seuil de la guerre des 6 jours, on tremblait pour le pauvre Etat juif victime de la haine et de la lâcheté de tous ses puissants voisins arabes, mais la victoire éclatante de Tsahal en quelques jours a ancré dans la mentalité de tous que, finalement, c’est Israël le plus fort. Et du coup, c’était Israël qui avait toujours tort lorsqu’il y avait un nouveau conflit, comme s’il était coupable d’avoir été victorieux. Ce réflexe pèche par deux erreurs : d’abord il relève d’un simplisme de type manichéiste (les méchants d’un côté et les bons de l’autre), mais surtout, il court-circuite l’usage de l’intelligence. Il arrive que le plus faible soit celui qui a tort ! (Lorsqu’un bandit défie la justice de son pays, il est en général « moins fort » que l’ensemble des forces de police, mais cela ne lui donne pas raison.)

–  2ème postulat : « Israël est dans la situation du colonisateur qui impose sa domination à un peuple colonisé ». C’est l’application d’un schéma venant d’ailleurs pour rendre compte de la réalité. L’examen de la situation montre les différences : la France ou l’Angleterre sont venues occuper telle ou telle région de l’Afrique ou de l’Asie, en absence de tout conflit avec les tribus locales, ce qui n’est pas le cas d’Israël et des Palestiniens ; Israël n’a pas un pays où il peut se retirer, comme la France est revenue chez elle en quittant l’Algérie, etc. Ce schéma plaqué de l’extérieur est probablement le signe que nous avons des comptes à régler avec notre propre passé.

–  3ème postulat : « Israël n’a pas le droit à l’erreur. » Je suis souvent surpris des exigences faites à Israël au nom de la morale ou de la justice : elles sont souvent fondées, mais personne ne s’étonne que les mêmes exigences ne soient pas imposées aux Etats arabes voisins. Ainsi, les opérations armées israéliennes dans les territoires il y a un an et demi étaient surveillées de près, et l’entrée dans Jénine a été accompagnée de rumeurs de massacres sauvages, démenties ultérieurement. La réalité est que d’autres dirigeants ont réglé leurs problèmes d’opposition de manière bien plus radicale, bien plus même que ce qu’affirmait la rumeur mensongère, sans que personne ne réagisse : en 1970, Hussein de Jordanie avait solutionné de manière sanglante  le problème palestinien chez lui par le massacre de « Septembre noir » ; Hafez el-Assad était responsable de 10 000 morts en 1982 à Hama…

Il y a une évidente appréciation selon deux poids et deux mesures. Tout se passe comme si Israël n’avait pas le droit à l’erreur, on attend de lui un comportement impeccable. Pourquoi ? La réponse est peut-être dans cette petite phrase de Romain Gary : « les Juifs sont des gens comme tout le monde, mais il ne faut pas leur en vouloir » ! Les Juifs sont assez différents de nous pour qu’on les regarde de l’extérieur, mais assez proches pour voir en eux notre propre image : cette perfection impossible qu’on attend d’Israël, n’est-ce pas celle qu’on n’arrive pas à atteindre nous-mêmes ? Israël est la seule démocratie du Proche-Orient, cela reste vrai, même si certains principes de la démocratie ne sont pas observés, au nom des nécessités de la guerre. Les chrétiens subissent une vraie persécution en Egypte dont personne ne parle.

3) Poser sur les médias un regard critique

Les médias en Europe sont d’ordinaire plutôt pro-palestiniens. Ils sont le reflet à la fois des prises de position des gouvernements (et des intérêts nationaux) et de l’opinion publique, l’un étant dépendant de l’autre ! La plupart des médias préfèrent éviter de trop choquer leur public.

–  vérifier le vocabulaire utilisé : emploi des termes « terroriste », « colon », « tuer » ou « assassiner », etc. Au début de l’intifada, un article du Monde parlait de la mort de « deux jeunes colons » près de Bethléem, tués par des Arabes. Il s’agissait en réalité de deux adolescents de 14 ans de Teqoa, qui ont été capturés et lapidés par des Arabes alors qu’ils marchaient dans un wadi.

–  vérifier les images et leur rapport au texte, à l’événement. Exemple typique : il y a eu un attentat à Tel Aviv faisant 15 morts, et la photo montre la maman du terroriste arabe qui pleure devant sa maison détruite en guise de représailles par l’armée israélienne. Que retiendra-t-on de cela ? Evidemment plutôt la photo que l’attentat. Pourtant si l’on s’en tient à l’objectivité de la gravité de chacun des actes, ce n’est pas Israël qui est le plus grand coupable.

–  critiquer les parallèles faciles qui sont mensongers : les dessins de Plantu dans le Monde ou l’Express en font une grande consommation. On met par exemple le Hamas à gauche et le parti des colons à droite, c’est facile, ils sont religieux, ils ont des barbes et partagent la même intolérance. Cela contribue à faire croire qu’ils sont également responsables par le même extrémisme de la situation. Pourtant, si l’on veut être objectif, il me semble qu’il faut distinguer : d’un côté l’emploi délibéré de la violence contre les civils, et de l’autre l’occupation immorale de terres appartenant au peuple voisin. Les deux actes ne portent pas le même poids de gravité.

4) Un paragraphe particulier sur la notion de terrorisme

Celle-ci est traitée de manière floue. Qualifier de terrorisme tous les actes de guerre venant des deux parties, c’est du pacifisme inconscient. Qualifier tous les actes de guerre de l’autre camp comme relevant du terrorisme, est une attitude bien commode, que les hommes politiques et les médias israéliens adoptent, mais qui porte préjudice à la notion même de terrorisme que pourtant tout le monde a intérêt à clarifier.

Il faut donc bien établir une distinction, et il me semble que celle-ci est à chercher du côté de la cible visée : il n’est jamais légitime de viser délibérément des civils. De ce point de vue, les actes d’Israël rapportés par les médias ne relèvent pas d’une politique terroriste, car ils visent des combattants. Il y a cependant parfois (souvent ?) des victimes civiles lorsque par exemple la voiture de la personne-cible est détruite par un tir d’hélicoptère, mais les civils ne sont pas visés pour eux-mêmes. Il reste la question plus ou moins complexe des risques que prend l’Etat-major de l’armée en décidant d’une opération militaire de ce type. Il y a eu des cas terribles où l’armée israélienne a évidemment pris une décision meurtrière coupable, comme le bombardement à Gaza d’un immeuble où était réfugié un chef du Hamas.

D’un point de vue moral, le terrorisme n’est jamais acceptable, quelque soit l’objectif visé, car c’est tuer délibérément des innocents.

                                                                                                                     Frère Moïse

Histoire

Entre deux guerres, 1967-1973 (suite)

En Israël, la vie continue.

Pour la fête de Shavouot, fête des pèlerinages, le 15 juin, près de 250.000 personnes montent à Jérusalem jusqu’au « mur », interdit aux Juifs depuis 1947 malgré les accords d’armistice qui leur en permettaient l’accès.

Un sondage d’opinion montre que 80% des Israéliens sont favorables au retrait des territoires. C’est alors que le 19 juin, Israël propose de rendre tous les territoires contre des accords de paix.

Le jour de l’Indépendance 1968, pour la première fois le défilé est retransmis à la télévision après beaucoup de travail et l’aide d’un spécialiste irlandais qui ne comprenait pas la langue. Cette année là, naissent les fanfares militaires, très nombreuses, qui sillonnent le pays, et les meilleurs compositeurs du pays travaillent pour elles .

Le 15 octobre l’équipe nationale de foot atteint les quarts de finale aux jeux olympiques de Mexico. Pour ce petit pays c’est un exploit.

Le 5 décembre, première transplantation cardiaque un an après celle du Pr. Christian Barnard.

Le 23 décembre, la télévision qui jusqu’alors ne diffusait que trois fois par semaine, a des émissions régulières.

En juillet 1969 à Ramat-Gan s’ouvrent les huitièmes Maccabiades qui rassemblent 1.500 athlètes Juifs de vingt-cinq  pays.

Début décembre, 15.000 personnes manifestent à Tel-Aviv pour la libération des Juifs emprisonnés en URSS. L’appel unanime est lancé au gouvernement russe  « Relâchez mon peuple ! ».

Le 26 décembre Israël est une des seize équipes finalistes de la coupe du monde de football.

En 1970  le théâtre n’est pas en reste ; la satire politique se développe, l’auteur satirique israélien est  toujours quelqu’un d’impliqué. La pièce  « la baignoire de la reine » sera même interdite, divisant les spectateurs en deux camps. Nommons encore :  « Le dernier des laïcs, Hartsufim, Zehu zeh ». Le 28 mars, meurt le poète Nathan Alterman, nommé « la conscience du peuple ». Le 2 avril le théâtre de Tel-aviv Habima, rénové est inauguré. C’est aussi le décès de la poétesse Léa Goldberg.

En novembre les enseignants commencent une grève de quarante jours pour obtenir l’alignement de leurs salaires sur celui des ingénieurs.

Le 14 décembre l’équipe de foot est en coupe du Monde à Mexico.

le 3 mars 1971, une manifestation est organisée par les « Panthères noires ». C’est le premier mouvement social important en Israël. Descendants des immigrés venus du Maroc et des pays arabes dans les années 50, ils étaient dans les quartiers pauvres de Jérusalem ; ils se sentaient défavorisés par « l’establishement » et protestaient  contre les privations que l’immigration en provenance de l’URSS provoquait. Leur mouvement créait une division dans la société israélienne, mais il a permis que les questions sociales soient désormais prises en compte.

En 1971, 40 ;000 immigrants arrivent en Israël dont 13.000 d’URSS ;

Le 19 avril, inauguration du musée de Tel-aviv.

Le 2 juin, acquisition du premier avion Jumbo.

Le 20 août, importante dévaluation de la livre israélienne ; le prix du pain, du lait, des œufs et de l’huile augmente.

Le 17 octobre, inauguration de la première ligne régulière de bus :Tel Aviv–Charm el Sheikh, et inauguration du théâtre de Jérusalem.

Mais la corruption n’épargne pas le pays : c’est l’affaire de  « Netivei-Neft » et d’ « Autocar », avec détournement de fonds.

1972 voit deux mois de grève dans les usines « Elite » chocolateries, qui demandent une augmentation de salaires et l’alignement de celui des femmes sur celui des hommes.

En juin le film d’Ephraïm Kishon « Azulaï le policier » reçoit un prix des critiques de cinéma américains.

En juillet une station au sol pour les communication par satellite est inaugurée dans la vallée Ha-Ela.

En septembre, vingt deux athlètes israéliens participent aux jeux Olympiques de Munich, 11 seront assassinés !.

1972 voit arriver 30.000 Juifs soviétiques en Israël grâce à la pression exercée sur le gouvernement d’URSS.

1973. Le 11 mars sort le film « Casablan » avec Yoram Gaon, qui décrit les écarts entre les couches de la population dans la société israélienne. Le 7 avril Israël participe pour la première fois à l’Eurovision au Luxembourg et c’est la première émission récréative diffusée par satellite en direct en Israël. Le 7 mai, vingt cinquième anniversaire de l’Etat d’Israël. Le 18 mai, Abie Nathan émet par radio de son bateau « la voix de la paix » tout le long des côtes d’Israël.

Pendant ces cinq années ; les échanges sont très importants entre les Arabes des territoires et les Israéliens ; ces premiers obtenant facilement des permis pour visiter villes et villages ou étudier.

Le nombre des travailleurs arabes venant de Judée et de Samarie passe de 9000 en 1969 à 24000 en 1970 et 35000 en 1972. En  1970 ; 60% des exportations des territoires sont pour Israël et 85% de leurs importations viennent d’Israël.

La guerre aura-t-elle lieu ?

Des manœuvres importantes sont observées en Egypte. David Elazar chef d’état-major israélien est inquiet. .Le chef des renseignements, lui, rassure G.Méir et son gouvernement. M.Dayan et Elazar tout de même inquiets se rassurent vite.

Le 13 septembre on observe du mouvement en Syrie et un combat aérien a lieu au dessus du Golan où 1 Mirage israélien et 13 Migs syriens sont abattus. Ariel Sharon quitte l’armée pour une carrière politique aux côtés de Menahem Bégin. Le 20 septembre il écrit dans  Haaretz : « Il n’y a pas d’objectif entre Bagdad et Khartoum, y compris la Libye, que notre armée soit incapable d’atteindre… »Il ne croit pas à la guerre pour l’instant. Mais de Syrie M.Dayan reçoit des informations alarmantes. Les renseignements israéliens eux ne croient pas à une attaque imminente. Le 25 septembre, confirmation de mouvements de troupe en Egypte et en Syrie. Le roi Hussein atterrit la nuit avec son hélicoptère à Massada et rencontre G.Méir :  « Nous savons de bonne source que toutes les unités de l’armée syrienne sont en alerte, prêtes à passer à l’action ». A la question :  « Qu’est-ce que cela signifie ? » il répond : « Je ne sais pas si cela signifie quelque chose ou non. J’ai certains soupçons mais je ne suis pas sûr. Je ne pense pas que la Syrie agira seule. Je suppose que l’Egypte rejoindra la Syrie en cas de guerre. »

(Moshé Jacques, Hussein ossé Shalom, Bar Illan,Tel Aviv, 1996,p.103)

Le chef d’Etat major israélien déclare à son équipe ; « Selon une information provenant d’une source sérieuse, l’armée syrienne est prête à ouvrir le feu à tout instant. Nous ne savons pas si cela est coordonné avec les Egyptiens. » Mais au siège de l’Etat major à Tel-Aviv le terrorisme occupe tous les esprits ; des Juifs russes sont pris en otage dans le train Moscou-Vienne pour faire arrêter le transit des immigrants russes vers Israël qui est alors très important. G.Méir qui va voir B.Kreisky à Vienne a un accueil glacial. La CIA prévient Israël de l’attaque prochaine des Syriens. Des postes israéliens des bords du Canal, un jeune lieutenant du renseignement rapporte : « Les manœuvres égyptiennes cachent les préparatifs d’une offensive. La guerre est imminente ». Ses supérieurs n’en tiendront pas compte. Zéira, des services de renseignements minimise les risques auprès de M.Dayan. Le 3 octobre G.Méir réunit son cabinet ; Y. Allon, M. Dayan et I.Galili et rend compte de sa visite à B. Kreisky. Arié Shalev numéro deux des renseignements et D. Elazar en parlant des frontières notent :  « La probabilité d’une guerre est faible. les grandes manœuvres égyptiennes se poursuivent ; En Syrie l’alerte est maintenue ». Mais l’inquiétude n’est pas de mise. Un jour plus tard, la nouvelle du départ des conseillers russes d’Egypte et de Syrie inquiète., surtout M.Dayan et D. Elazar . Seul B.Kreisky en Europe a été prévenu par les Egyptiens de l’attaque imminente. En Israël, toutes les permissions des militaires sont annulées ; G.Méir est nerveuse. Le jeûne de Yom Kippour va commencer  : plus de circulation, plus de radio, l’aéroport est fermé. La population tranquille, les membres du gouvernement sont dans leurs familles.

Mais Tsvi Zamir, le chef du Mossad, moins confiant, reçoit de ses agents implantés : « C’est certain  , la guerre est imminente. » Il est  quatre heures du matin quand l’Etat major est alerté. A  six heures les chefs se réunissent autour de G.Méir qui ordonne la mobilisation , à l’encontre de l’avis de M.Dayan ,et prévient les USA qu‘en aucune manière Israël n’attaquera le premier. Kissinger transmet à l’Egypte et à l’URSS par leurs ambassadeurs que G.Méir ne veut pas qu’Israël soit considéré comme l’agresseur. La radio appelle les réservistes , les voitures militaires circulent, ce Yom Kippour n’est pas comme les autres.

M.Dayan annonce que les Arabes attaqueront à 18 heures. Mais à 14h. 07 les sirènes retentissent, cette fois les Egyptiens et les Syriens ont surpris Israël.

G.Méir explique ce jour-là au ministère de la défense à Tel-Aviv :  « En 1967,je croyais qu’il était clair pour tous que nous étions agressés, mais nous avons ouvert le feu les premiers. De nombreux chefs d’Etat m’ont dit que nous avions commencé la guerre. Cette fois, j’ai décidé que ce ne serait pas le cas. L’identité de l’agresseur doit être connue de tous afin que nous ne soyons pas obligés de faire le tour du monde pour persuader les gens de notre bon droit. »

(Eytan Haber,Ha yom tifrotzt milhama,Idanim,Tel-Aviv,1987,p.31.)

Cécile Pilverdier

Chrétiens d’Israël : pensée unique ?

A la question que posent certains lecteurs : « quelle est ici la position des chrétiens dans la situation actuelle, par rapport au monde juif, au monde musulman, à l’Etat d’Israël et à sa politique ? » il faudrait tout d’abord préciser : il n’y a pas une position d’ensemble. Même en posant la question de façon plus précise : quelle est la position catholique, ou protestante, orthodoxe, évangélique, messianique ; vouloir répondre serait une généralisation à laquelle nous nous refusons ; « les chrétiens, les catholiques pensent… » cette habitude que nous avons tous d’utiliser l’adjectif comme un nom, enferme chacun dans son propre groupe. Alors que, et le « Dictionnaire des Justes de France » [Fayard, Paris 2003] en est un parfait témoin : c’est « l’homme » qui est chrétien, et qui est, en temps que tel, responsable de ses opinions et de ses actions, par delà l’attitude de son groupe, ici de son Eglise.

Bien sûr qu’il y a diverses tendances,  en particulier dans la manière de lire et d’interpréter les Ecritures par rapport au peuple juif, à l’élection, aux promesses faites aux Pères, aux prophéties annonçant le retour des Juifs sur la terre de leurs ancêtres. Une lecture plus ou moins littérale, sioniste, une diversité de lecture, d’interprétation, mettant l’accent sur tel ou tel verset ou chapitre plutôt que sur tel autre nous oblige à rester humble, sachant que nous n’avons pas encore tout compris du Plan de Dieu pour le salut des hommes, du Mystère d’Israël, du Mystère de l’Eglise.

–  nous oblige à une lecture plus approfondie des Ecritures, une lecture globale, sans choisir les passages qui nous plaisent et supprimer les autres.

–  nous oblige à tendre l’oreille pour écouter le Dieu d’Israël parler à son peuple et à attendre avec lui le Messie pour qu’Il nous ouvre pleinement l’intelligence.

Antoinette Brémond

 

Exode des chrétiens de terre sainte ?

Les chrétiens de terre sainte, victimes de la violence qui règne dans leur pays, vivent en permanence sous couvre-feu et dans des conditions inhumaines. Beaucoup d’entre eux quittent le pays, et ceux qui restent n’aspirent qu’à imiter ceux qui sont déjà partis. Si l’hémorragie n’est pas rapidement enrayée, la terre natale du christianisme va bientôt se trouver vide de toute présence chrétienne.

Telle est l’image qu’un paroissien fréquentant une église de France à l’occasion des célébrations pascales a pu se faire de la situation lorsqu’on recommandait à sa prière ses frères et sœurs du pays de Jésus, en l’invitant à se montrer généreux lors de la collecte organisée à leur intention.

On trouve la même affirmation sous la plume du jésuite américain Drew Christiansen, pour qui la présence chrétienne « diminue de plus en plus en Terre sainte » (cité par Henri Tincq dans Le Monde du 24 avril 2004).

Comme souvent lorsqu’il est question d’Israël et de la Palestine, le tableau est exact dans ce qu’il décrit, mais gravement incomplet et peut-être tendancieux dans le choix des omissions. Les « chrétiens de terre sainte », en effet, sont loin de constituer une catégorie homogène. Indépendamment de la grande diversité des rites et des appartenances confessionnelles, on peut les répartir sommairement en cinq grands groupes, dont chacun devrait faire l’objet de subdivisions si l’on voulait raffiner l’analyse.

1 — Les chrétiens arabes de nationalité israélienne, vivant principalement en Galilée.

2 — Les chrétiens arabes de Jérusalem, dont la plupart ne sont pas citoyens israéliens, mais sont soumis au droit israélien avec le statut de résidents permanents.

3 — Les chrétiens israéliens de langue hébraïque. Groupe aux contours indéfinis, mais beaucoup plus large que celui qui fréquente régulièrement les centres de la communauté catholique hébréophone ; en raison, notamment, du nombre important de non-Juifs venus des pays de l’ancienne Union soviétique.

4 — Les chrétiens arabes vivant dans les territoires relevant de l’Autorité palestinienne.

5 — Des  chrétiens venus de l’étranger pour un temps ou définitivement, et plus ou moins solidaires d’une des catégories ci-dessus énumérées. Parmi ces chrétiens d’origine étrangère, les membres des communautés religieuses et les représentants d’institutions chrétiennes occupent numériquement la première place. Compte tenu du fait que le nombre des non-Juifs arrivés d’Europe centrale et orientale est impossible à évaluer avec précision, on compte en terre sainte au moins 200 000 chrétiens, dont environ 170 000 arabes[1]. Parmi ces chrétiens, seuls ceux qui vivent dans les territoires relevant de l’Autorité palestinienne, et qui ne sont plus que 50 000 environ, correspondent à la description sommaire donnée ci-dessus. Pour dramatique que soit cette situation, elle est donc loin de refléter l’état général de l’Église du pays.

Il est exact que le nombre des chrétiens vivant en territoire palestinien fond comme neige au soleil. La cause de cet exode n’est pas simplement la situation violente que subit la population palestinienne, mais aussi, et peut-être surtout, la pression étouffante exercée par les musulmans sur les chrétiens. Particulièrement révélateur est le livre de Jean Rolin, Chrétiens (P.O.L., 2003), décrivant les brimades dont les chrétiens palestiniens sont victimes de la part des musulmans. [voir ci-après L’impossible réveillon, extrait de ce livre].

Avant de revenir aux chrétiens des territoires palestiniens, précisons que les chrétiens arabes de nationalité israélienne ne fuient pas le pays. La stabilité de leur nombre, voire sa légère augmentation due à l’évolution démographique, jointe à d’autres facteurs, dont l’immigration en provenance d’Europe centrale et orientale, fait qu’Israël (à l’intérieur des limites de 1967) est le seul pays du Proche-Orient où le nombre global des chrétiens soit en augmentation — alors qu’il diminue dans tous les pays musulmans. Phénomène peu connu, bien qu’il ait déjà été signalé : on assiste à une sorte de migration interne des chrétiens arabes israéliens, qui tendent à s’éloigner des agglomérations peuplées de musulmans et à se rapprocher de la population juive. À Nazareth par exemple, des familles chrétiennes quittent la ville ancienne pour aller s’établir à Nazareth Illit [quartier à majorité juive].

Quant aux représentants des instituts religieux, leur nombre est menacé de diminution à cause des tracasseries de l’administration israélienne à l’occasion de l’octroi ou du renouvellement des visas.

Dans cet ensemble, la situation qui est de loin la plus dramatique est celle des chrétiens des territoires palestiniens. Ils ont besoin, assurément, de l’aide de leurs frères d’Europe, d’Amérique et d’ailleurs, qui doivent les soutenir de leur prière, leur rendre visite à l’occasion des pèlerinages, les aider matériellement pour leur permettre de rester dans le pays. Les méthodes de l’occupation dont ils sont victimes comme les autres palestiniens doivent être dénoncées, notamment les entraves à la circulation à l’intérieur des territoires.

De là à faire porter sur Israël l’entière responsabilité de l’exode des chrétiens de Palestine, il y a un pas que beaucoup franchissent. Pour le jésuite Christiansen, déjà cité, la diminution de la présence chrétienne en Terre Sainte serait liée directement aux implantations en Cisjordanie. La réalité est plus complexe, et l’on touche ici à un sujet particulièrement explosif. Révéler le drame de l’oppression des chrétiens par les musulmans, n’est-ce pas mettre les chrétiens palestiniens en situation encore plus difficile, en jetant le doute, de l’extérieur, sur la sincérité de leur patriotisme ? La solidarité entre frères à l’intérieur d’une même Église n’exigerait-elle pas des chrétiens occidentaux qu’ils s’abstiennent d’attirer l’attention sur ce problème et qu’ils rejettent toute la responsabilité sur Israël ? Jean Rolin rapporte l’exemple d’un autre jésuite, vivant à Bethléem, qui cherchait à le dissuader d’écrire son livre en prétextant que faire une distinction entre Palestiniens selon leur religion n’aurait pas plus de sens que de les classer d’après leur groupe sanguin. Si l’on se réfère une fois de plus à ce livre, ce n’est pas qu’on serait dépendant d’une source unique, mais au contraire parce qu’il apporte une confirmation écrite à de multiples témoignages concordants : les chrétiens palestiniens ont tellement peur des musulmans qu’ils n’osent même pas avouer qu’ils en ont peur.

De la part des chrétiens occidentaux, faire une fois de plus d’Israël le bouc émissaire est une position sans risque. Malheureusement, une telle attitude ne fait qu’aggraver un problème, celui de l’antisémitisme, et laisse l’autre sans solution. S’interdire de charger Israël de tous les maux, refuser de passer sous silence le drame des chrétiens vivant en milieu islamique, ce n’est pas céder à un pro-sionisme inconditionnel qui l’emporterait sur la solidarité ecclésiale. C’est faire droit aux exigences de la justice et de la vérité.

                                                                                                         Michel Remaud

 

L’impossible réveillon

À propos du réveillon — nous étions, après tout, le 31 décembre [2002, n.d.l.r.] —, William nous avait prévenus : les soirées spéciales prévues de longue date dans quelques établissements de la ville [Ramallah, n.d.l.r.] étaient jusqu’à nouvel ordre annulées, ou suspendues, par suite des menaces émanant d’un groupe que nul ne pouvait ou ne voulait identifier, mais dont il paraissait tout de même avéré que c’était au nom de l’islam qu’il avait fulminé cette interdiction de se réjouir. Officieusement, le motif invoqué était l’exécution par un commando israélien, le jeudi 27 décembre, en plein jour et sur la place des Lions, de trois militants palestiniens d’un groupe radical. Mais, une fois de plus, ce deuil unilatéralement décrété tombait à point nommé pour interdire une célébration en vérité païenne — celle du nouvel an — mais susceptible d’être envisagée comme chrétienne, dans la mesure où elle se réfère au calendrier grégorien, et en tout état de cause non islamique. Une fois de plus, c’était donc au détriment des chrétiens, et plus généralement des mécréants, que s’exerçait le chantage patriotique : si vous ne renoncez pas, de vous-mêmes ou sous la contrainte, à la célébration de vos propres fêtes, c’est que vous êtes de mauvais Palestiniens, puisque la Palestine, comme par hasard, sera en deuil ce jour-là. Mais la Palestine n’est-elle pas en deuil tous les jours? S’en passe-t-il un seul sans que des combattants, identifiés comme des terroristes, soient abattus par les Israéliens? William faisait observer que le mois de Ramadan n’avait pas été moins endeuillé, de ce point de vue, et que cela n’avait pas empêché les musulmans de célébrer avec éclat, à Ramallah notamment, la fin de celui-ci.

[…] c’est de William que nous tenions le nom d’un restaurant, l’Eldorado, susceptible sinon d’enfreindre au moins de contourner l’interdiction de réveillonner.

Après avoir localisé l’Eldorado, nous y sommes passés une première fois, dans l’après-midi, afin de vérifier l’information […]. Le patron, ou le gérant, nous a reçus tout d’abord avec circonspection, insistant sur le fait qu’il n’avait pas prévu de réveillon mais un simple dîner, ayant décommandé toutes les fioritures musicales et festives initialement prévues afin de se conformer peu ou prou aux exigences de ce groupe innommé. Après tout, dans ce qui apparaissait désormais comme la capitale de l’Autorité, puisque son chef y était assigné à résidence, on ne pouvait tout de même pas interdire aux gens de bouffer. Puis l’homme nous a délivré deux billets sur lesquels était imprimé le menu du jour, mais en insistant pour que nous ne les montrions à personne, sous le prétexte invraisemblable qu’un concurrent peu scrupuleux pourrait s’emparer de ses idées (dont aucune n’était beaucoup plus originale, ou beaucoup plus fastueuse, que celle de conjuguer le poulet rôti avec des frites) : en vérité, il craignait manifestement de s’attirer les foudres des ayatollahs de pacotille si ce menu imprimé venait à tomber entre leurs mains. […]

En début de soirée, à l’heure qui est en temps normal celle du dîner, il s’est fait dans la rue un grand vacarme, peut-être ponctué de quelques détonations, auquel nous n’avons pas prêté d’attention particulière, une ville dans la situation de Ramallah étant inévitablement coutumière des tumultes. Un peu après 10 heures du soir, par des rues généralement sombres et à peu près désertes, où aucun signe de liesse ne risquait d’offusquer les yeux ou les oreilles des croyants, nous nous sommes dirigés vers l’Eldorado, qu’en arrivant nous avons trouvé plongé comme tout le reste dans l’obscurité. Notre inquiétude en fut d’autant plus vive que nous commencions à avoir faim, pour le coup. Après avoir longuement tambouriné contre la porte vitrée, nous vîmes sortir de l’ombre un jeune homme hésitant, pas rassuré, qui en fin de compte nous fit entrer, mais sans allumer la lumière et en refermant aussitôt la porte derrière nous : un peu plus tôt, à l’heure où nous avions entendu du vacarme dans la rue, un cortège de vociférateurs, armés de gourdins, avait effectivement fait le tour des quelques restaurants et autres lieux de  débauche  du  centre-ville pour leur enjoindre de fermer. Le jeune homme, qui était un employé de la maison, avait invité les braillards à vérifier par eux-mêmes qu’il ne se préparait à l’intérieur rien de plus attentatoire aux mœurs qu’un dîner, mais ils avaient décliné cette proposition et réitéré leurs exigences, et le patron du restaurant, plutôt que de voir ses vitres voler en éclats et son personnel molesté, avait obtempéré, quitte à perdre ce qui devait représenter près de la moitié de sa recette du mois dernier. « Désormais, commentait le jeune homme, nous sommes occupés de l’intérieur comme de l’extérieur. » Lui-même était musulman — ce qui faisait ressortir, une fois de plus, combien les musulmans non bigots s’avéraient plus déterminés que les chrétiens dans leur résistance aux islamistes—, et quelques mois auparavant l’un de ses frères avait été tué par les Israéliens lors de l’occupation du camp de Jénine, devenant de ce fait un martyr. Mais même cet argument avait été balayé par les combattants de la vertu qui, après l’Eldorado, s’étaient dirigés vers d’autres lieux afin d’y propager sous la menace le silence et l’ennui. Ainsi la ville était-elle effectivement privée de réjouissances par la volonté d’un petit groupe obscur et véhément que personne ne voulait nommer : mais le plus grave, somme toute, c’est que ni le lendemain ni dans les jours qui suivirent aucune dépêche d’agence, même de trente mots, ne vint rapporter ce fait divers, aucune condamnation de celui-ci ne tomba des lèvres du reclus de la Mouqata’a, alors que cet abus s’était produit sous son nez, et, plus étonnant encore, aucun communiqué n’émana de l’une ou l’autre de ces ONG pourtant particulièrement bien représentées à Ramallah, et habituellement si sourcilleuses sur le chapitre des droits de l’homme.

Jean Rolin, Chrétiens, p.130-137

 

Les chrétiens de Tel Aviv

Lorsqu’on parle des chrétiens de Terre Sainte, on pense immédiatement aux chrétiens de Bethléem ou de Jérusalem, aux religieux qui tiennent les Lieux Saints et qui sont visités chaque année par des centaines de milliers de pèlerins du monde entier. Il est commun de penser que les chrétiens sont regroupés soit en Galilée, soit autour de Jérusalem. Mais dans ce pays, les évidences méritent d’être examinées de près.

Il y a un peu moins d’un an, en préparant une série d’émissions radiophoniques sur les chrétiens de Terre Sainte, j’ai arpenté les trottoirs du sud de Tel Aviv où, m’avait-on dit, les travailleurs immigrés se réunissent pour prier le samedi après-midi. Plus par acquis de conscience que par conviction de trouver quelque chose d’intéressant, j’ai entrepris plusieurs tournées dans ces quartiers pauvres, pour ne pas dire misérables, où logeaient des milliers d’étrangers. L’ancienne gare routière peuplée de gens de toutes langues et de toutes races, me fit  croire un instant que j’avais quitté Tel Aviv pour Babylone.

Il y a quelques semaines, revenant sur les lieux, l’aspect des rues avait changé. Toujours aussi sales, elles étaient étrangement vides. De nombreux appartements étaient sans locataires, un silence lourd régnait dans ce qui était, il y a un an à peine, un quartier bruyant et plein de vie. La police de l’immigration était passée par là : en un an, près de 102 000 travailleurs immigrés étaient partis d’Israël : soit expulsés (32 000) soit invités à quitter le pays ‘de plein gré’ (60 000). Il n’en reste aujourd’hui que 120 000 selon les estimations de la police de l’immigration.

C’est à la faveur de la venue de ces étrangers en situation légale ou non, qu’une quarantaine d’Eglises et de communautés chrétiennes très diverses ont vu le jour et se côtoient encore aujourd’hui au sud de Tel Aviv et à Jaffa. Chaque week end, des milliers de chrétiens ou croyants en Jésus se réunissent dans des lieux de culte : simple appartement situé au 4ème étage d’un immeuble délabré, hangar, salle de sport, chapelle plus ou moins aménagée ou encore église avec un clocher comme à Jaffa. La majorité de ces communautés sont protestantes, évangéliques ou encore messianiques.

Par exemple, la communauté roumaine des Adventistes se réunit dans une salle d’un immeuble dans le quartier de Florentine. Le lieu est sobre et dépouillé. Il n’y a pas de croix, ni de statue pour respecter l’interdiction biblique : « tu ne te feras pas d’image… ». Les fidèles endimanchés, environ 80, chantent et écoutent le sermon du pasteur. En Israël, vivent près de 1500 adventistes divisés en plusieurs communautés de langue : les Roumains, les Russes, les Philippins, Ghanéens,  hispanophones, anglophones et francophones. Dernièrement, ils ont ouvert une imprimerie mais comme pour la plupart de ces communautés le départ des travailleurs étrangers est un coup dur. Seule la communauté des russes est composée d’une majorité d’Israéliens qui sont montés en Israël lors de la dernière vague d’immigration.

Beaucoup de ces nouvelles communautés chrétiennes sont des « Eglises du réveil » comme l’explique le pasteur Jacques Elbaz, responsable d’une communauté évangélique francophone à Tel Aviv. Son église qui porte le nom de ‘El Hay’ (Dieu vivant) est située dans le quartier de Kibboutz Galouyot où une centaine de fidèles se réunissent chaque semaine pour prier. Les jours de fêtes, l’assemblée peut atteindre 300 personnes. Il est également responsable de deux autres petites communautés à Jérusalem et à Ashdod. Le pasteur Elbaz est israélien et se présente comme un juif messianique c’est-à-dire, un juif qui a reconnu en Jésus le messie d’Israël. Ils célèbrent les fêtes juives : à Souccot, ils construisent une grande cabane et à Pessah font un repas pascal (seder) communautaire.

En Israël, les Eglises traditionnelles qui existaient à l’époque de l’empire ottoman  sont dispensées de payer les impôts locaux. La municipalité de Tel Aviv accorde la même faveur aux nouvelles communautés chrétiennes qui ont fleuri depuis une quinzaine d’année sur son territoire. « Israël nous a beaucoup aidés », insiste le pasteur Elbaz même s’il reconnaît que « les pasteurs ont des problèmes pour recevoir les visas. »

Dans l’ensemble, les relations avec les voisins sont plutôt bonnes bien que certains religieux de l’organisation Yad LeAhim (main vers les frères), luttant contre les missionnaires chrétiens, essaient d’intimider les fidèles, en les photographiant par exemple à la sortie du culte.

Beit Emmanuel est une communauté messianique florissante composée pour la très grande majorité d’Israéliens dont la moitié sont des nouveaux immigrants des pays de l’ex-Union soviétique. Chaque vendredi soir, ils sont entre 100 et 120 à se réunir pour un service qui dure près de deux heures et demie comprenant un long temps de louange et un enseignement qui peut durer une heure. La prière est en hébreu mais une traduction est assurée en russe, ukrainien et anglais. Les enfants sont pris en charge et des activités sont prévues par âge. Le vendredi soir, les bus ne circulent pas à Tel Aviv et la communauté organise un ramassage pour ceux qui n’ont pas de véhicules. A l’image de la première communauté chrétienne, ils donnent la dîme de leurs salaires. Récemment, ils ont ouvert une imprimerie pour diffuser des livres en russe et en hébreu.

En Israël, on estime les messianiques à près de 7000, divisés en plusieurs communautés différentes aussi bien au niveau de l’approche théologique que de la pratique religieuse. Chacune est indépendante même si les rencontres intercommunautaires les rassemblent au moins une fois par an. Certains messianiques refusent de porter le nom de chrétiens mais se définissent simplement comme Juifs croyant en Jésus.

A Jaffa, il y a également quelques milliers de chrétiens arabes : latins, grecs catholiques, orthodoxes et protestants. A ces communautés locales, se joignent pour les célébrations des étrangers essentiellement des travailleurs émigrés. Dans la région de Tel Aviv, on dénombre près de 12 000 Philippins dont la majorité est catholique. A la paroisse latine Saint Antoine, environ 60% sont des étrangers, ce qui ne va pas sans causer des tensions : les chrétiens arabes se sentent  ‘dépassés’ par ces nouveaux venus. Les expressions de la foi sont diverses suivant les groupes ethniques et les responsables sont confrontés à de nouvelles questions pastorales.

Si les chrétiens étrangers continuent à affluer pour les messes du samedi soir - la plupart des services ont lieu le samedi puisque le dimanche est un jour ouvrable en Israël – certains travailleurs illégaux ont peur de s’y rendre depuis que la police d’immigration avait l’habitude de les attendre à la sortie des églises. Les prêtres et les pasteurs ont vivement protesté contre ces méthodes et la police a cessé ces ‘descentes’ mais le mal est fait : beaucoup ont encore peur et n’osent plus se rendre à l’église. A Saint Antoine, l’an dernier près de 300 africains anglophones participaient à la messe, ils ne sont plus que 100 aujourd’hui. Cette baisse ne s’explique pas seulement par les départs d’une partie de la communauté africaine de Tel Aviv.

Malgré toutes ces difficultés, les Eglises chrétiennes et les communautés messianiques sont en pleines expansions et loin des lieux saints, des pèlerins et des médias, des chrétiens vivent leur foi dans la société israélienne et sont respectés pour ce qu’ils sont. Etre chrétien à Tel Aviv est devenu normal. 

Jean-Marie Allafort

 

Une communauté messianique à Jérusalem.

L’assemblée messianique ‘l’Agneau sur la montagne de Sion’ se réunit chaque samedi après midi à l’église anglicane Christ Church à la porte de Jaffa à Jérusalem. Fondée il y a 15 ans par Benjamin et Ruben Berger, elle est la seule assemblée messianique qui a son centre dans la vieille ville. Les frères Berger sont venus d’USA il y a une trentaine d’années. Une grande partie de leur famille allemande a péri dans la Shoah.

Cette assemblée compte actuellement 86 membres et 25 enfants. Parmi eux, 50 Juifs, 4 arabes israéliens et 32 chrétiens des nations. Ses membres se réunissent en semaine en petit groupe dans des maisons. Une fois par moi, le vendredi soir, tous mangent ensemble à l’église pour ‘entrer dans le shabbat’. Ce soir-là, le groupe de jeunes anime la louange. 2 fois par mois, lors du culte du samedi, ils célèbrent le ‘repas du Seigneur’ qui a ici le même sens que l’eucharistie. Le second sacrement, le baptême d’adultes uniquement, se pratique par immersion.

Ruben et Benjamin Berger étant en rapports étroits avec d’autres communautés chrétiennes : catholiques, arabes évangéliques, protestantes, messianiques…en Israël et dans le monde, leur assemblée vit très fortement la réalité de l’Eglise universelle, sachant qu’elle y a une place importante d’autant plus qu’elle se réunit sur le Mont Sion. Consciente de vivre ‘les derniers temps’ annoncés par les prophètes, elle attache une grande importance aux ‘préparations de l’Epouse pour les noces de l’Agneau’ et désire être déjà, au milieu du peuple juif un signe du Royaume de Dieu. Pour cela, la vie communautaire de l’Eglise primitive y est souvent évoquée. Benjamin et Ruben Berger, avec deux jeunes israéliens vivent en communauté à Ein Karem.

S’il fallait caractériser en un seul mot cette assemblée, en tant que membre depuis 14 ans, je la dirais ‘prophétique’, aussi bien par ce qui y est vécu et annoncé que par le rayonnement de ses pasteurs en Europe et en Afrique.

A.B.

A propos du mur de l’apartheid *

A la suite de la parution dans le Figaro d’un article signé par le Cardinal Roger Etchegaray, Paul Thibaud, président de l’A.J. - C.F. [Amitié judéo-chrétienne de France] lui a adressé la lettre suivante :

4 décembre 2003

Mon Père,

Plusieurs personnes m’ont fait part de leurs protestations contre un article que vous avez publié dans le Figaro du 13 novembre, à votre retour de Jérusalem où vous aviez participé à l’ordination épiscopale de Jean-Baptiste Gourion.

Votre émotion et votre réprobation devant la construction de la « clôture » entre Jérusalem et Bethléem sont compréhensibles. Mais il me semble qu’en l’occurrence l’emploi du mot d’apartheid ne s’imposait pas du tout. L’objectif affiché est de protéger la population israélienne d’un terrorisme dont nous connaissons la violence et la persévérance, et non d’enfermer une population. Que le résultat soit, comme vous le dites à raison, de ‘lacérer un tissu humain’, cela est certain ; mais il ne s’agit pas de cantonner une population de sans droit. D’ailleurs, entre Israéliens et Palestiniens, ce qui se cherche, c’est le règlement d’une séparation, la construction de deux Etats, le tracé d’une frontière admise par les uns et les autres. Autrement dit, le terme d’apartheid, qui désigne une séparation matérielle sur des bases raciales entre deux éléments de la même société, ne convient pas pour désigner « les travaux » dont le spectacle vous a indigné.

Je me permets d’ajouter que lorsque nous entendons critiquer la politique du gouvernement israélien – politique critiquable en effet puisqu’elle ne mène à rien – , nous devons nous garder de tout vocabulaire disqualifiant, sans quoi ceux que nous voudrions faire réfléchir s’arrêteront au vocabulaire et concluront immédiatement que nous sommes inspirés par la malveillance et par les préjugés ambiants. Etant donné votre prestige auprès de beaucoup de Juifs, je regrette que vous ayez rendu inaudible à certains ce que vous aviez à leur dire.

Veuillez croire, mon Père, à ma profonde estime et à tout mon respect.

Paul Thibaud

* Avec l’aimable autorisation de la revue Sens, numéro 286, 2004, p. 204

 

Comédie musicale.

Pour la seconde année consécutive, la comédie musicale Ha Brith (l’Alliance) a parcouru le pays en ce mois de mars, attirant un public nombreux et varié.

De quoi s’agit-il ?

En 2 000, un couple norvégien chrétien, artiste, Robert et Elisabeth Muren décident de créer une comédie musicale pour redonner espoir aux Israéliens, au peuple juif, en lui rappelant son histoire et les promesses de Dieu. Comédie relatant les évènements importants de l’histoire des enfants d’Israël, d’Abraham à l’Etat d’israël. On y voit l’appel d’Abraham, l’esclavage en Egypte, Moïse, la traversée du désert, les espions, Ruth, Noémie et Boaz, David , Daniel, Jérémie, Jésus et la période romaine, les Juifs de la diaspora : en Angleterre (1 291) en Espagne (1 492) en Pologne (1 942), la Shoah, les ossements desséchés, l’immigration, la création de l’Etat d’Israël, les nouveaux immigrants rescapés de L’holocauste.

70 comédiens de diverses nationalités y jouent, tous volontaires. Robert et Elisabeth Muren montrent cette comédie au directeur artistique de l’ambassade chrétienne de Jérusalem. Très intéressé il présente cette comédie musicale en Anglais à Qumran, au cours de la séance d’ouverture de la fête des Tabernacles en 2 001 (fête organisée chaque année pendant la fête de Souccot à Jérusalem par l’ ambassade chrétienne).

Au printemps 2 002 Ha Brith fait partie du programme officiel du Festival de Jérusalem avec deux représentations au YMCA.

Plusieurs Israéliens demandent alors que cette comédie comprenant des chants et des lectures de la Torah soit traduite en Hébreu pour pouvoir atteindre plus de monde.

L’ambassade demande alors à Ehud Manor, compositeur israélien très apprécié, de traduire le texte en hébreu, et à Mati Barkan, comédien israélien également très connu, d’en être le narrateur. En mars 2 003 une tournée est donc organisée dans diverses villes et bases militaires du pays, atteignant des milliers de personnes.

En mars 2 004 une nouvelle tournée est prévue ; le ministère de l’éducation encourage les professeurs à y emmener leurs classes. A Jérusalem, une matinée regroupe 2 400 élèves, et en soirée les adultes. D’autres représentations dans le pays, à Raanana, Kfar Menahem, Haifa, Nazareth Illit, Lod, permettent à des milliers d’Israéliens de tous bords, soldats, religieux, non religieux de suivre ce spectacle. Environ 10 000 spectateurs en tout. Les billets coûtaient entre 50 et 70 shekels, avec beaucoup de billets gratuits et bien sûr des prix spéciaux pour les écoliers.

 Quelques remarques d’enfants :

 - les Juifs doivent être forts, croire en Dieu et Il les délivrera,

 - il y a des Chrétiens qui nous aiment et qui nous parlent,

 - on ne doit jamais oublier Dieu, c’est bien que des Chrétiens nous disent de croire en notre Dieu,

 - nous sommes un peuple ; il y a une terre promise et un Dieu à servir ; et dans les maisons, au retour quelques parents ont souvent repris le Tanakh pour expliquer ce qu’ils avaient vu et faire mieux connaître à leurs enfants les Ecritures.

Jésus y était-il représenté ? oui sans le nommer, et très discrètement , dans la période romaine, un homme ,un rabbi, faisant des miracles et rempli d’amour, provocant autour de lui diverses réactions et questionnements . Dans les médias israéliens on a parlé de Brith dans certains journaux et à la télévision. Cette comédie musicale a également été présentée en anglais en Amérique et en espagnol en Argentine. Cette année une vidéo en Hébreu est à la disposition du public, ainsi qu’un DVD en huit langues.

Personnellement j’ai assisté à l’une de ces représentations : très beau, très fort et le fait que ce sont des chrétiens qui offrent ce spectacle en Israël reflète le but premier de l’Ambassade chrétienne : consolez, consolez Mon peuple.

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PS. L’ambassade chrétienne de Jérusalem a été créée en 1 980 au moment où presque toutes les ambassades étrangères quittaient Jérusalem pour s’installer à Tel Aviv . Elle a un programme important d’aide aux nouveaux immigrants mais aussi à tous les nécessiteux sans distinction . Elle veut être témoin ici et à l’étranger, de la fidélité du Dieu d’Israël à son peuple et à ses promesses, selon les Ecritures .

Antoinette Brémond.

Flashes d’espoir

Juifs et Arabes d’accord sur la “clôture”… 

Oui, cela arrive, comme dans la région de Mevassérèt, un quartier excentrique de Jérusalem qui est proche de villages arabes. Des habitants Juifs et arabes estiment que la grille de séparation pourrait très bien passer plus près des habitations juives. Parmi ceux qui ont demandé à la Haute Cour de Justice la révision du tracé dans cette région, on rencontre un habitant juif de Mevassérèt qui est bien placé pour parler. Non seulement il parle de ce qui se passe sous ses fenêtres, mais il est arpenteur et, comme tel, chargé de voir sur place ce qu’il en est. Lui et son aide ont estimé le tracé fantaisiste et il ajoutait : “Cela a dû être décidé dans un bureau sans venir voir sur place.” Il est toujours encourageant de rencontrer des gens objectifs et soucieux du droit des autres.

Prix d’Israël

La distribution annuelle du Prix d’Israël a eu lieu – comme chaque année – le jour de l’Indépendance, ce 27 avril. Ce prix récompense des penseurs, des chercheurs, des artistes, des personnes dévouées au bien-être de la société, pour l’œuvre de toute une vie. Il y avait cette année des scientifiques, une femme professeur de Bible, un sculpteur enfant terrible par son franc-parler (la Ministre de la Culture a fait obstacle et a fini pas accepter sa candidature), un rabbin à barbe blanche qui tente de sauver des jeunes marginaux, un vieux chanteur, une artiste de théâtre et cinéma Gila (Guila) Almagor.

Ce fut elle qui, au nom des bénéficiaires du Prix d’Israël, remercia à la fin les personnalités qui le décernaient (Président de l’État, Premier Ministre, Ministre de l’Education et de la Culture, Président de la Haute Cour de justice, etc…). Elle insista sur l’importance de la liberté d’expression pour assurer à la population une vie saine et valable. Elle souligna la merveille que représente la résurrection et le développement de la langue hébraïque, si vivante aujourd’hui dans l’enseignement scientifique ou littéraire, la poésie, l’argot pittoresque. Et la culture qui s’exprime ainsi depuis 56 ans d’existence de l’État, et essaie de subsister malgré les guerres et les violences, malgré toutes les réductions récentes du budget nécessaire pour survivre (une critique non voilée en direction du gouvernement). Culture riche et variée, car elle est aussi le fruit de la rencontre de Juifs venus du monde entier. Voici quelques extraits de son discours :

« Il faut veiller surtout à l’éducation dès la petite enfance pour faire des hommes, pénétrés des valeurs morales qui permettent de vivre ensemble, coexistence entre membres d’une société divisée et avec le peuple voisin. Il faut apprendre à l’enfant à regarder autour de lui, et s’émerveiller de la création, écouter, entendre et questionner; il faut lui enseigner ce qu’est la patience, la tolérance, la sensibilité à l’autre, et qu’il y a d’autres enfants, et un autre peuple qui vit à côté de nous depuis des générations,et des étrangers qui vivent parmi nous. Et que l’on peut arriver à l’entente sans violence, sans humilier et blesser et faire la guerre. Alors peut-être ainsi pourra-t-on former la génération de demain. Sans oublier les enfants qui ont faim [30 % des enfants d’Israël, d’après les statistiques récentes], les vieux qui cherchent dans les poubelles. Une société se juge à sa capacité de compatir avec les plus pauvres. Et chacun doit se mobiliser et pouvoir se dire chaque soir : Aujourd’hui aussi j’ai pu faire quelque chose pour mon prochain, et pas seulement pour ma maison. »

« Et maintenant quelques mots plus personnels [et elle poursuit d’une voix tremblante] : Ma mère née en Pologne et mon père en Allemagne ont fui l’Europe en flammes, et se sont rencontrés ici. La grande famille du côté de ma mère, une tribu de 147 personnes, a été complètement supprimée  au cours de la Shoa. Du côté de mon père, je ne sais rien, rien ne m’a été raconté. Je n’ai pas connu mon père. Il a été tué, quatre mois avant ma naissance, par un franc-tireur arabe. Je n’ai jamais vu son visage, il ne m’a jamais tenu la main. Et je me suis développée seule, sans haine, sans désir de vengeance. Je me suis toujours dit qu’il était interdit que des enfants perdent leurs parents à cause de la haine et de la guerre. J’ai grandi dans une maison avec moins que le minimum, à l’ombre d’une mère à l’esprit dérangé (Gila a joué ce rôle dans un film…), j’ai appris à distinguer le bien du mal, à combattre, à échouer, et parfois à surmonter et réussir. Et l’événement d’aujourd’hui est comme une victoire. Et j’espère que mon père à présent, de là-haut, me voit et est fier de moi, et maman aussi peut reposer en paix, car elle disait toujours : “Il ne faut pas que se passe un jour sans que tu fasses quelque chose pour quelqu’un.” Nous avons ce devoir envers les autres, envers nous-mêmes. Mais ce n’est pas vraiment possible sans la lutte pour la paix, la paix entre les deux peuples qui vivent ici côte à côte, avec des frontières précises, sur cette terre torturée. Il est temps que la paix descende sur nos voisins, sur nous-mêmes. Et je veux finir par une citation d’un de nos auteurs [prix de littérature, décédé récemment] Yehouda Amihaï : “Ne jetez pas des pierres, n’ébranlez pas la terre. Ne la poussez pas dans la mer – la mer n’en veut pas. Jetez des coquillages, des mottes de terre fraîche, jetez du vent [ou de l’esprit – même mot en hébreu], jusqu’à ce que vos mains s’en fatiguent, et que la guerre se fatigue, que même la paix n’en puisse plus d’attendre – et qu’elle soit.” »

 

 

Le chant du mois

Cette fois ce sera Yehouda Poliker, né en 1950, de parents Juifs grecs rescapés de la Shoa (les Juifs de la région de Salonique avaient été touchés massivement). Cela se ressent dans plusieurs de ses chants. Pardon de revenir sur le sujet, c’est la réalité humaine que l’on touche du doigt chez beaucoup, même encore maintenant. Il ne s’agit pas de “l’usage politique du souvenir de la Shoa” que certains Européens reprochent. Sans doute y a-t-il eu quelques cas d’hommes politiques “jouant sur la corde”, mais ne généralisons pas.

Bref, Poliker a un style troubadour, parfois grec (pas étonnant), parfois fantaisiste, parfois triste…

Il a écrit entre autres le chant suivant  Mon ombre et moi, dont voici des extraits :

 

 

Mon ombre et moi

Nous sommes partis

Le soleil était à peu près là-bas,

Tantôt je marchais devant,

Tantôt mon ombre, sur le chemin.

Des nuages couvrirent le ciel,

Et des gouttes tombèrent,

Mon ombre se ramassa en moi,

Je continuais à marcher, moi seul

Le vent secouait, la peur filtrait,

Mon ombre en moi me tabassait

Plus effrayante que jamais.

Elle me demande : Où nous mènes-tu ?

Et moi je réponds 

Où t’enfuis-tu ?

 

Pourquoi toujours ces murs qui enferment

Une lumière au-dedans

Et dehors c’est la ténèbre ?...

Allons, volons ensemble au loin

Tu seras mes ailes

Vers une union imaginaire

Impossible jusqu’alors.

Sautons, envolons-nous

Vers la rencontre,  l’ombre et moi.

Assez de fuites vers l’oubli !

Viens, passons la frontière

Vers la liberté qui était enchaînée.

Seule la chanson nous rappelle que dehors

On peut vivre libéré de la peur

Quand l’ombre et moi nous marcherons

Côte à côte.

 

 

et l’humour en finale…

De quoi sourire un peu, malgré tout, et rester pensif.

Un homme rentre du travail, chaque soir, et se met les pieds sous la table.

Sa femme fidèle court à la cuisine et apporte le repas. L’homme mange, refait ses forces, et parfois rompt le silence pour grommeler une remarque :

– C’est trop salé…

Une autre fois : – C’est un peu brûlé – ou :  ça manque de sel. – ou : c’est moins cuit que d’habitude…

La pauvre femme ose un jour une question :

– Mais enfin, c’est jamais bon, ce que je te fais ?

– Si, bien sûr !... quand j’dis rien.

Yohanan Elihai

 

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Livres conseillés :

Jean Rolin, Chrétiens,  P.O.L, Collection : Blanche, 2003.

Jean Mouttapa, Un Arabe face à Auschwitz : le combat d’Emile Shoufani pour la mémoire et pour la paix, Albin Michel, 2004.

 

 

 

Même si nous avons une ligne commune dictée par notre présence en Israël, il semble bon de rappeler

le principe qui guide bien des publications et qui donne une certaine liberté à chacun :

 

La revue laisse aux auteurs des articles et comptes rendus l’entière responsabilité

des opinions et jugements qu’ils expriment.

 

 

avec notre fraternel Shalom de Jérusalem

 

 

 

 

[1] Chiffres de 2002. Selon les données du ministère de l’intérieur, les immigrants de l’ancienne Union soviétique qui se seraient déclarés chrétiens seraient au nombre de 27 000, mais les non-Juifs sont certainement beaucoup plus nombreux (certaines estimations donnent  le chiffre de 200 000), et beaucoup d’entre eux sont des chrétiens non déclarés.

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