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 « Seigneur Jésus,
apprenez-nous à être généreux,
à vous servir comme vous le méritez,
à donner sans compter,
à combattre sans souci des blessures,
à travailler sans chercher le repos,
à nous dépenser sans attendre d’autre récompense
que celle de savoir que nous faisons votre Sainte volonté. »

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N° 27 – Janvier/Février 2006

Jérusalem – Via dolorosa

Sommaire :

-   Editorial

-   Histoire : le difficile positionnement du sionisme

-   Solidarité et lucidité

-   Le tourisme chez les Bédouins du désert

-   Connaissance d'Israël : Césarée maritime (3eme partie)

-   Une exposition sur les réfugiés juifs en Autriche

-   Chrétiens de Terre Sainte, otages de toutes les propagandes

-   Connaissance du judaïsme : de l'hébreu sous le grec

-   Les oliviers et la paix

-   Au fil des mois

-   Chant du mois et humour en final

 

Editorial

Les articles de ce numéro 27 et les réactions récentes de certains lecteurs sont une occasion de faire le point une fois de plus, et de préciser de nouveau ce qu'est notre ligne et ce qu'on appelle objectivité.

Il est bien difficile de donner une image complète et parfaitement équilibrée. Cette question nous travaille, car on n'est jamais totalement satisfait de ce qu'on écrit. Nous redécouvrons toujours après coup un détail, une nouvelle qui change un peu l'image que nous avions en tête, l'image que nous vous avons livrée. Tom Séguèv, journaliste et historien, disait à celui qui l'interrogeait dans une interview : « Suis-je objectif? Personne ne l'est totalement. Le seul livre objectif, c'est l'Annuaire du téléphone ! » Mais enfin on peut s'efforcer de l'être.

Il y a un danger chez celui qui écrit, mais aussi chez celui qui lit. Le danger de généraliser. Chacun s'esclaffe en entendant l'histoire du Français (pardon, j'ai oublié que l'histoire, c'est à la fin du numéro...) qui, débarquant en Angleterre, voit une Anglaise rousse, et écrit à sa famille : « Toutes les Anglaises sont rousses. » Mais, nous faisons la même chose constamment. Après deux cas rencontrés, on généralise. En politique, n'en parlons pas! Les Juifs,... les Palestiniens,... Apartheid, antisémitisme et autres accusations graves, sans nuance, sans distinction. Voyez à ce sujet l'article « Solidarité et lucidité » de M.Remaud, lui-même bien lucide et concret sur ce problème, d'où il ressort que choisir un milieu et l'aimer ne veut pas dire être contre qui que ce soit. Et critiquer, à regret et dans un certain esprit, n'est pas cesser d'aimer.

Alors, cette fois, quoi d'autre au menu? visite chez des Bédouins, grec et hébreu et mnémotechnie, actions violentes de certains colons, culture et vie quotidienne, histoire et géographie, judaïsme, Bethléem vu "de l'intérieur", etc.

Mais voilà que l'appétit vient en cuisinant, et nous envisageons d'ouvrir des rubriques sur d'autres aspects de la vie israélienne, qui recèlent des choses inattendues :

- la radio et la TV, présentation des genres, des tendances, et des programmes

- la littérature, le cinéma; des personnalités dans ces différents domaines

- les hôpitaux au quotidien (certains d'entre nous les ont pratiqués abondamment)

- les 38 communautés catholiques françaises (et protestantes, et messianiques, à l'occasion)

Ce serait bien, pour compléter le tableau, mais n'est-ce pas viser trop haut? On peut toujours rêver...

Yohanan Elihai

Histoire :

LE DIFFICILE POSITIONNEMENT DU SIONISME,

ENTRE ABANDON DE L'ÉLITISME RELIGIEUX ET DÉFIANCE A L'ÉGARD DES LUMIÈRES

La mise à distance de la religion

Le "peuple sans terre", dispersé dans tout le bassin méditerranéen et en Asie centrale depuis la conquête romaine, n'a jamais cessé d'être le peuple que Dieu s'est choisi, le Peuple Elu, le Peuple dont le devoir en ce monde est de "demeurer fidèle à l'Alliance" ( Ahad HA'AM). Dès lors, le rituel qui faisait dire chaque année au moment de la Pâque juive: "l'an prochain à Jérusalem" n'a jamais été pensé autrement que sur le mode religieux de l'attente du Messie. Et le retour des Juifs en terre de Canaan ne se concevait pas en dehors du strict cadre défini par la Tradition.

Il faut bien comprendre que, par conséquent, le choix d'une solution politique à la " question juive " se révélait, du point de vue de la foi, un acte d'impiété monstrueux, après dix-huit siècles d'exil. Ce qui se joue donc, à la fin du XIXème siècle, dans le sionisme, est bien le reflet d'un mouvement beaucoup plus vaste de contestation de la religion, de distinction entre le fait religieux et le fait politique, en somme de sécularisation.

"Que les sionistes aient les "mains sales" ne devrait pas surprendre puisqu'à l'attente messianique qui aurait donné aux Juifs toute la terre, toute la Loi et rassemblé tout le peuple, ils ont préféré l'action et admis l'impur, le partiel, l'imparfait.", écrit Charbit, p.XI.

Et en effet, cette contestation de la religion, cette relégation de la foi dans le domaine de la seule vie spirituelle est" l'un des thèmes récurrents du discours sioniste des origines, et qui perdurera dans l'idéologie socialiste des pères fondateurs de l'Etat d'Israël.

Ainsi, grande est la conscience de la mystification et de la vanité du mythe de l'élection du peuple juif chez les auteurs très marqués par l'athéisme socialiste comme BRENNER ou le Français Bernard LAZARE. Mais les autres auteurs reconnaissent la même nécessité de mettre de côté la foi. Or qui dit sécularisation, dit aussi renoncement à jouer un rôle de guide pour l'humanité. On comprend que le sionisme procède à cet égard d'une tendance vers la normalisation du peuple juif. Ainsi les auteurs sionistes sont-ils assez largement habités par cet idéal, et c'est l'un des anachronismes que l'on peut commettre en ne les lisant pas que de les créditer d'une volonté de tenir compte d'une singularité mystique des Juifs dans la concrétisation de leur projet. Car il s'agit au contraire de sortir de l'exceptionnalité et d'entrer dans le cercle des nations modernes.

Ainsi Ahad HA'AM écrit-il, p. 119:

"Le Juif moderne, qui a fait alliance avec la culture universelle, ne peut plus se penser comme une créature supérieure, "une espèce distincte des autres hommes", "un élément à part" ( Kouzari )", Trois Paliers, 1898.

Et voici ce que disait déjà Léo PINSKER, p.44:

"nous devons renoncer à l'illusion que notre dispersion dans le monde nous impose quelque mission providentielle[...]" L'auto-émancipation, 1882

En somme, il s'agit d'inscrire dans le siècle la nation juive. NORDAU enfin, mentionne ceux qui "cherchent leur( salut dans le sionisme, qui n'est pas pour eux l'accomplissement d'une promesse mystique contenue dans les Saintes Ecritures, mais le chemin d'une existence où le Juif retrouvera enfin ces conditions de vie toute simples, toutes primitives, si naturelles aux non-Juifs des deux continents." (p.25, Discours..., 1897).

Se méfier des Lumières

Mais le sionisme suppose un autre renoncement qui s'ajoute à la perte de la foi en l'attente messianique, et qui dans une certaine mesure en contredit l'inspiration rationaliste: c'est la conviction que l'idéologie des Lumières et les vertus de l'émancipation qu'elle a permises en France, en Angleterre, en Allemagne, et le prolongement de cette idéologie dans le socialisme ne suffiront pas à libérer le monde de la haine des Juifs. Ici se rejoignent sionisme et antisémitisme sur la croyance que les Juifs demeureront étrangers en Europe. Ici l'héritage des Lumières trouve une de ses limites puisque s'il a pu déterminer l'abandon par les sionistes du messianisme traditionnel, il fait l'objet de la plus grande défiance de la part de ces derniers quant à son aptitude à faire accéder les Juifs à une vie paisible.

On trouve chez NORDAU (p.57, ibid) cette attitude de défiance à l'égard de l'universalisme des Lumières dans la reprise assez évocatrice du credo humaniste de Térence:

"Le Juif dit naïvement: "Je suis un homme et j'estime que rien de ce qui est humain ne m'est étranger." Et on lui fait cette réponse: "Doucement, de ton sens de l'humain il ne faut se servir qu'avec précaution [...]"".

De manière plus intéressante, encore, Ber BOROKHOV (6) résume cette contradiction dans l'article intitulé De la doctrine sioniste, en 1905, puisqu'il a ces deux propositions, à quelques lignes de distance:

"Nous avons goûté à la civilisation, perdu la vieille foi au monde futur et en la venue du Messie, la foi en notre élection divine." (p.73)

"Notre pensée profonde est que le peuple juif n'a pas de salut possible dans l'exil. Nous n'accordons pas foi dans le progrès." (p.74)

Or, le corollaire de cette défiance à l'égard de l'idéal humaniste des Lumières, fondé sur le constat de la misère matérielle et spirituelle de la majorité des Juifs, c'est l'appel à la réappropriation de la force. LILIENBLUM, par exemple, dénonce la faiblesse de la réaction juive face aux pogroms de 1881-1882 imputable selon lui à une tradition de survie qui se contente d'accommodements coupables:

"Notre patrie est la terre étrangère, la dispersion est notre unité et la persécution universelle fait notre solidarité; l'humilité est notre arme et la fuite notre défense; notre originalité réside dans l'adaptation; le jour qui vient est notre avenir... Rôle méprisable, en vérité, pour le peuple qui eut un jour ses Maccabées." (p.28)

Lesquels Maccabées, comme les zélotes de la révolte de Massada, se trouvent être les archétypes du nouvel homme juif à fonder. Une mystique quasi-guerrière apparaît alors, influencée par une pensée dix-neuvièmiste de l'énergie et de l'action qui associe une vocation éthique, une morale de la supériorité au refus catégorique du mythe du Peuple Elu. On le voit notamment chez Israël ZANGWILL (p. 130):

"C'est contre cette politique du "courbe le dos et ne dis rien" qu'arrivé à grand bruit le sionisme avec son: "relève la tête et dis tout". L'avènement du sionisme signifie la fin de l'époque des marranes et la renaissance de celle des Maccabées."

Ainsi la relation du sionisme aux Lumières est-elle pour le moins placée sous le signe de l'ambiguïté. Les Lumières ont engendré le sionisme séculier; elle n'ont pas su procurer une véritable émancipation à la majorité des Juifs, vivant pour la plupart en Europe centrale et orientale. Ce qu'il reste à élucider à présent, c'est le cheminement par lequel le sionisme va pouvoir condamner également l'attitude assimilationniste, non seulement comme posture se rattachant à une forme de marranisme, mais encore comme une entrave essentielle pour pouvoir se revendiquer pleinement des principes des Lumières, à commencer par la liberté de penser et le respect de l'homme.

Ahad Ha'am: la remise en cause de la Mission divine mais la renaissance d'un judaïsme libre

C'est dans le refus de l'assimilation -nous l'avons vu- que s'affirme la volonté de conservation d'une identité juive, contre la perte de la foi consécutive à la sécularisation. Et c'est dans cette contradiction que se fait jour une importante division au sein du mouvement sioniste entre les politiques et les tenants d'un sionisme d'abord culturel, attachés à une œuvre d'éducation et de renaissance du judaïsme autant que soucieux de trouver un havre de paix à l'abri des persécutions.

Ahad HA'AM voit dans l'assimilationnisme des Juifs français un reniement de leur appartenance à la nation juive. On touche là à la complexité d'un mouvement politique dont la réalisation suppose par essence un détachement vis-à-vis de la religion , mais qui est aussi un nationalisme dans lequel la religion et la culture religieuse se révèlent fondamentaux et un libéralisme, au sens vieilli du mot. Ahad HA'AM, héraut du sionisme culturel, est en effet le premier à dénoncer toute idée de mission du peuple juif et de "cause finale" au nom de l'athéisme scientifique de Darwin. Bien plus, il voit dans cette "doctrine qui exige de croire à une finalité dans le destin des peuples" un artifice pour résoudre la contradiction des Juifs assimilés, pris entre la nécessaire réduction de leur judaïsme à une pratique strictement religieuse et la tentation d'exprimer de quelque manière la rémanence d'une appartenance plus large. 1 "La vérité est que, si nos frères d'Occident n'étaient pas asservis à leurs droits, il ne leur serait pas venu à l'esprit de "consacrer" leur peuple à une mission ou une fin spirituelle, tant qu'il n'aurait pas accompli sa mission matérielle, naturelle, celle de toute créature [...] ".

On retrouve bien ici l'idée de normalisation du peuple juif.

Il y va même de la vocation philosophique du sionisme dans la mesure où ce qui est enjeu, ici, est bien le souci de sortir d'un état de servitude intellectuelle dont est victime le Juif assimilé à qui le droit d'être pleinement lui-même n'est pas accordé. Il y va de l'aptitude de l'homme du XIXème siècle à pouvoir saisir son temps sans risquer d'être enfermé dans une pensée obscurantiste. Contre la fiction élitiste, Ahad HA'AM écrit:

"Je ne suis pas, moi, forcé d'élever mon peuple aux cieux et le donner pour plus grand que tous les autres peuples, afin de lui procurer un "permis d'exister". Je sais, moi, "pour quoi rester juif; ou plutôt, je ne comprends absolument pas le sens que cette question pourrait avoir; non plus que je ne saurais comprendre pourquoi je reste le fils de mon père. Je puis, moi, librement, dire mon avis sur les croyances et les idées que m'ont léguées mes aïeux, sans crainte de rompre, ce faisant, le lien qui m'unit à mon peuple. Je puis même, moi, professer cet " athéisme scientifique qui se réclame de Darwin "sans pour autant mettre ma "judéïté" en danger. En résumé: je m'appartiens."

Voilà la vocation du sionisme, dont l'enjeu n'est rien moins que de pouvoir réunir les conditions de possibilité de l'esprit critique. A cet égard, le sionisme est bien l'avènement du rationalisme dans l'appréhension des Juifs par eux-mêmes.

Notes 1: Moshé Lev Lilienblum (1843-1910). fondateur du mouvement des Amants de Sion, attiré par la Haskala puis rallié au sionisme politique après les pogroms de 1881.

2: Max Nordau (1843-1923), médecin, partisan du "judaïsme des muscles" contre ce qu'il considère comme une dégénérescence -titre de l'un de ses ouvrages- de la culture européenne.

3: Sholem Aleikhem (1859-1916), conteur, écrivain de fiction et pamphlétaire new-yorkais -né en Ukraine-, proche des Amants de Sion puis du herzlisme.

4: Israël Zangwill (1864-1926), écrivain britannique, partisan d'une solution diplomatique, qui refusa de considérer le choix de la Palestine comme un impératif et fut à l'origine d'un mouvement dissident de l'Organisation sioniste, l'Organisation territorialiste. Il revint au sionisme après la déclaration Balfour.

5: Yossef Haïm Brenner Né en 1881. Proche du courant socialiste, mais faisant preuve à l'égard des partis d'une grande volonté d'indépendance, il est l'un des fondateurs de la Histadrout, le syndicat juif créé en Palestine en 1920 . Il meurt assassiné à Jaffa lors des émeutes antijuives de 1921.

6: Ber Borokhov (1881-1917), représentant du courant sioniste-socialiste

Emmanuel Szurek

Solidarité et lucidité

Les articles publiés sur notre site ou dans le bulletin provoquent des réactions contrastées. Certains nous accusent de partialité pro-israélienne, d'autres au contraire s'étonnent ou même s'indignent de nous voir manifester des positions critiques par rapport au pays où nous vivons, à ses dirigeants et à son administration. Peut-être n'est-il pas inutile de préciser le sens et la nature de la solidarité que certains chrétiens peuvent être amenés à vivre avec le peuple d'Israël.

Venir s'établir en Israël quand on est chrétien, c'est faire un choix que d'aucuns trouveront partial. Quand on est' moyennement doué, on ne peut guère, arrivé à l'âge adulte, parvenir à maîtriser simultanément l'hébreu et l'arabe. Le pourrait-on qu'on ne parviendrait pas pour autant à être immergé dans deux sociétés en même temps ; tout au plus pourrait-on choisir de s'établir sur un point d'observation neutre avec la prétention de n'être ni d'un côté ni de l'autre. On fait donc en général le choix d'une langue, de moyens d'information, d'un réseau de solidarités, on se rend perméable à certaines argumentations ou sensibilités — ce qui ne signifie pas, bien entendu, que l'on ne fasse pas aussi un effort pour essayer de comprendre ceux qui vivent dans une situation différente.

Etre plongé dans une société ne signifie pas que l'on pourra jamais s'y assimiler totalement, et la réalité peut se rappeler plus ou moins brutalement à notre souvenir si nous étions tentés de l'oublier, surtout en une période où les impératifs de la sécurité sont plus exigeants qu'en d'autres temps. Il y a une dizaine d'années, lorsqu'on allait prendre l'avion, il suffisait de prononcer quelques mots d'hébreu pour passer sans problème. Il m'est arrivé de passer l'interrogatoire en quelques minutes pendant que l'agent de sécurité collait déjà ses étiquettes sans même prêter attention à mes réponses à ses questions de routine. Aujourd'hui, les choses sont différentes.

Tu parles hébreu ? -     Oui.

Tu as un passeport israélien ?

Non.                                                                                                                                            

Pourquoi ?

Parce que je ne suis pas israélien.

Pourquoi ?

Parce que je ne suis pas juif.

La première partie de l'interrogatoire s'arrête généralement là. L'agent de sécurité vous fait sortir de la file et, billet et passeport en mains, va chuchoter quelque chose dans l'oreille d'un autre agent, d'un grade apparemment plus élevé, qui reprend l'interrogatoire à zéro, repart en demandant d'attendre là, revient... Ça peut prendre entre un quart d'heure et une demi-heure, voire davantage. En général, cela se termine par des excuses : « Tu comprends pourquoi nous sommes obligés d'être prudents ? », etc.

Les choses ne se passent pas toujours aussi bien, et l'on se demande parfois où est le rapport entre certains comportements et les exigences de la sécurité. Exemple d'interrogatoire stupide par la sécurité israélienne à Roissy:

Qu'es-tu venu faire en France ?

Donner des conférences.

Sur quoi ?                                                                                                                                  

Sur la Bible.

Sur quelle partie de la Bible ?

Exode 3 et 4.

Pourquoi ces chapitres-là plutôt que d'autres ?                                                                       

Parce que j'avais fait les chapitres 1 et 2 l'an dernier.

Pourquoi ? (sic, et j'abrège).

 

Après quoi, j'ai dû montrer les notes de mes conférences, puis on a emporté, pour des raisons de sécurité, un paquet de biscuits dont je m'étais muni pour le voyage et dont l'examen a pris encore une demi-heure. En général, je prends mon mal en patience, sachant bien que l'avion partira de toutes façons et que je serai dedans quand il décollera. Mais il est difficile de réprimer un sentiment de ras-le-bol, voire de colère, et de s'interdire de penser que certains Israéliens font tout pour décourager les chrétiens qui cherchent à les aider.

Nous avons tous de multiples occasions d'exprimer ou de réprimer de tels sentiments. Tout récemment, le ministère de l'Intérieur vient de décider de ne plus accorder de visas de deux ans aux religieux chrétiens en résidence dans le pays. Les visas devront désormais être renouvelés chaque année ; mais les taxes à payer lors du renouvellement, loin d'être divisées par deux, sont au contraire le double de ce qu'elles étaient il y a encore deux ans. Autre exemple : quand l'Institut Decourtray a été fondé, sa direction a reçu par la poste plusieurs kilos de papier à en-tête et de dépliants imprimés en France. Arrivé en Israël, le carton avait été déchiré et son contenu déversé sans ménagements dans un autre carton deux fois plus grand, portant des inscriptions attestant que cet emballage avait contenu précédemment des produits pharmaceutiques. Le carton d'origine portant l'adresse avait été attaché sommairement sur ce deuxième emballage. Une bonne partie du contenu, déchirée ou chiffonnée, était inutilisable et a dû être jetée.

Pour autant, je m'interdirai de dire que « les Israéliens » sont comme ci ou comme ça. D'abord, parce qu'ils ne sont pas tous comme ça. Il m'est arrivé qu'après un interrogatoire plus long que d'habitude par un jeune stagiaire qui apprenait son métier sous l'œil d'un ancien qui m'avait présenté ses excuses à l'avance, les deux agents de sécurité sont allés eux-mêmes déposer ma valise sur le tapis du comptoir d'enregistrement et réserver ma place après m'avoir demandé si j'avais une préférence. Ensuite et surtout, parce que la population israélienne ne se réduit pas à son administration. Nos amis israéliens sont généralement très étonnés, et souvent choqués, lorsque nous leur confions nos ennuis. D'autres nous racontent leurs propres démêlés avec l'administration, nous disent que tout le monde est logé à la même enseigne et que les chrétiens ont tort de faire un complexe de persécution. En tous cas, je n'ai aucune peine à comprendre ceux qui, vivant dans ce pays sans en entendre la langue, ne connaissent d'Israël que sa face administrative.

Surgissent alors les inévitables questions : pourquoi venir vivre dans ce pays, et pourquoi choisir « ce côté-là » ?

Pour beaucoup d'entre nous, la réponse est d'ordre théologique : pour vivre et manifester la relation unique en son genre que l'Église entretient avec le peuple juif, pour connaître le peuple d'Israël de l'intérieur, au-delà des préjugés et des lieux communs, pour essayer de comprendre et de faire comprendre ce que vivent et ressentent ceux qui y appartiennent, pour y vivre une solidarité désintéressée, libre de toute arrière-pensée de conversion ; et, accessoirement, pour percevoir l'image que donne l'Église à ceux qui lui sont extérieurs.

Un tel choix n'est pas compris de beaucoup de chrétiens, pour qui le devoir de solidarité avec les pauvres et les opprimés, qui doit caractériser le christianisme — au moins en théorie — occulte plus ou moins une autre solidarité, de nature théologique, celle qui unit l'Église au peuple dont elle est née. Malgré la déclaration du dernier concile et les efforts déployés par Jean-Paul II et Benoît XVI, la majorité des catholiques ne voit guère le sens et l'importance de la relation qui lie l'Église au peuple juif. Sans en être certain, je pense qu'il en va de même chez les Réformés. Pour beaucoup, il va de soi qu'un chrétien ne peut être que pro-palestinien et « donc » anti-israélien. Mais ce choix exige aussi de celui qui le fait, tout à la fois, fidélité et lucidité. Fidélité, parce qu'une telle option se fonde sur la fidélité même de Dieu au peuple qu'il s'est choisi, et qui est irréversible. Elle engage l'Église vis-à-vis d'un peuple composé d'êtres humains en chair et en os, et non pas seulement d'une tradition et d'un héritage littéraire. Lucidité, parce qu'indéfectible ne veut pas dire aveugle, et que l'attachement au peuple juif n'est pas à confondre avec l'approbation de toutes les décisions des gouvernements israéliens, et encore moins des comportements de ses fonctionnaires — dont certains sont d'ailleurs très aimables. Il y aurait ici matière à de longues digressions. Bien souvent, le chrétien qui a choisi de venir vivre en Israël après avoir idéalisé les Juifs et le judaïsme supporte mal le choc de la réalité. Les réactions peuvent aller de la volte-face, et l'on en voit de brutales et spectaculaires, à une apologétique inconditionnelle confinant parfois à la mauvaise foi — sans parler d'un repli sur une position purement « spirituelle » qui fait l'impasse sur une bonne partie de la réalité.

Vivre dans ce pays sans faire d'impasses est particulièrement difficile, et l'on comprend sans peine que certains — autant d'un côté que de l'autre, il faut le souligner—choisissent de ne pas voir une partie de la situation pour se donner bonne conscience. Le pèlerin qui aura pris en photo le mur de béton qui sépare Israël des territoires pourra facilement soulever l'indignation de ses auditeurs une fois rentré chez lui, et l'on peut déjà être sûr que le nouveau dispositif de sécurité mis en place entre Jérusalem et Bethléem, passée la période de Noël où les mesures de contrôle sont allégées, aura un effet désastreux sur l'image d'Israël dans l'opinion mondiale. Celui qui vit sur place sait aussi bien que le pèlerin que ce mur, qui est une horreur sur le plan esthétique, est aussi et surtout la cause de situations inhumaines. Mais s'il a pu se rendre sur les lieux d'un attentat quelques minutes après l'explosion, s'il a vu les volontaires de Zaka juchés sur des échelles pour décrocher dans les branches des arbres des lambeaux de corps humains, s'il connaît personnellement des victimes et des parents de victimes, il comprendra aussi que si Israël cherche à se protéger du terrorisme, ce n'est pas pour le simple plaisir de rendre invivable l'existence des Palestiniens. La méthode choisie n'est pas idéale, on le concédera volontiers. Mais y a-t-il une manière idéale de vivre paisiblement en se protégeant du terrorisme ?

Nul n'est parfait, pas plus les Juifs que les chrétiens, et pas plus nous que ceux qui nous lisent. Tout le mystère de l'Alliance est fondé sur une décision du Créateur s'engageant irrévocablement envers des gens qui sont ce qu'ils sont, avec leurs qualités, souvent méconnues, et leurs défauts, qu'il n'y a pas lieu de masquer. Vérité d'ordre théologique qui est aussi la clef de toute vie en société : on peut être fidèle à ses amis même s'ils sont imparfaits. C'est d'ailleurs pourquoi le Créateur peut s'engager vis-à-vis de chacun de nous malgré nos défauts et que nous pouvons compter sur lui. Ce qui est plutôt réconfortant.

Michel Remaud

Le tourisme chez les Bédouins du Néguev

En 1971, bien que pratiquant un autre métier, j'ai suivi le cours de guides en Israël. Cela me permet chaque année de pouvoir faire des journées de perfectionnement que je choisis sur la liste de celles qui nous sont proposées. J'avais donc choisi de faire en décembre, « le tourisme chez les Bédouins du Néguev ».

Notre bus bien rempli, accompagnés par le « spécialiste de la question », nous avons ainsi passé la journée entre deux villages bédouins.

Le premier, Laquiya, est un grand village à belles maisons de pierre, où nous montons à son sommet pour observer la vue. Là est la villa de Taleb es Sana, avocat bédouin qui a été un moment député à la Knesset. Tout autour, des villages en tôle, villages « non reconnus » qui témoignent du passage du nomadisme à la sédentarisation (mais là c'est un sujet à lui seul).

Notre premier arrêt est pour le « centre de broderie ». Une femme de la famille de Taleb es Sana nous accueille sous la grande tente montée devant le centre et après thé et café, elle nous explique : « La vie des femmes bédouines est très dure, toujours soumises au mari. Nous avons commencé ce centre entre femmes, pour nous réunir et commencer à sortir de nos maisons. Le travail de broderie permet d'améliorer nos ressources mais c'est aussi un centre où nous avons ouvert un «jardin d'enfants pour adultes » où les femmes apprennent à signer leur nom. Pour d'autres c'est d'apprendre à lire et écrire l'arabe, à parler l'hébreu, à compter et même à se servir de l'ordinateur. Deux femmes ont une bourse pour l'université et un bibliobus circule entre certains villages. C'est un lieu où nous apprenons la démocratie. Actuellement, 160 femmes font partie de ce projet. L'année dernière nous avons organisé une journée de promenade en Galilée, entre femmes bien sûr, la veille deux d'entre nous ont été menacées, mais nous encourageant mutuellement nous sommes parties, autrement tout le projet s'écroulait. Quand nous sommes revenues le soir, le centre avait été incendié. Mais nous avons tenu bon et avec de l'aide nous avons réaménagé notre centre Depuis les femmes sont de plus en plus nombreuses à venir ».

Nous faisons le tour des broderies qu'elles vendent elles-mêmes, organisent, et tout est enregistré dans l'ordinateur. Notre guide nous arrache « car, dit il, elle pourrait vous parler jusqu'au soir avec le même enthousiasme ». Nous roulons quelques minutes et arrivons à un autre centre, une fabrique de tapis cette fois.

Là aussi une grande tente nous accueille où thé et café nous sont offerts. L'idée est un peu différente. La plupart des femmes travaillent chez elles car tous les maris ne permettent pas de quitter la « maison ». La plupart viennent des villages en tôle qui ont encore tous l'enclos à moutons à côté. Mais l'organisation semble parfaite. Il s'agit de la reprise de ce travail traditionnel qui autrefois servait à confectionner la tente en laine de moutons et poils de chèvres, tissé très serré. Aujourd'hui chez elles, ces tapis sont sur le sol, au mur, servent de coussins ou de décoration. Au centre il y a aussi des sacs et des ceintures pour la vente. Une femme nous explique tout le processus : « Ce sont les hommes qui tondent leurs moutons, puis la laine passe entre de multiples mains de femmes. Certaines la lavent, la sèchent, puis d'autres la filent, la mettent en écheveaux . Ramassée elle est amenée au centre où d'autres la teignent avec les couleurs traditionnelles, la poudre de teinture venant d'Angleterre. De nouveau séchée elle est alors mise en pelotes à double fils avant d'être redistribuée aux femmes qui chez elles tissent à la manière traditionnelle ». Sous la tente du centre un métier est installé. Rien de plus simple et de plus astucieux ; de longs fils sont fixés sur deux planches elles-mêmes fixées au sol, une autre au milieu sépare les fils en deux. Pour tasser les fils, en guise de peigne, une corne de chèvre très crantée ! Le résultat est superbe, les couleurs chaudes. Une femme fait le finissage, accroche des étiquettes, car la vente se fait surtout à l'étranger, le produit étant cher après tout ce travail à la main. Un magasin est installé à Jérusalem. L'Union Européenne participe à ce projet.

Le troisième arrêt est très différent. Un autre village où se mêlent maisons en dur, en tôle et de nombreux enclos de moutons à côté des maisons.

Accueillis par un homme cette fois, nous arrivons près d'un « taboun », four à pain et une femme nous distribue le pain tout chaud cuit directement sur la braise, des enfants nous servent le thé. Cet homme a construit sa maison au dessus d'une grande pièce où il peut accueillir des groupes, car il a lui-même suivi le cours de guide ainsi que deux autres hommes du village. Son idée, au cours des visites du pays, c'est d'y insérer l'histoire de ce village qui est en fait celle de sa propre famille. Il raconte : «Vous voyez ces trois vieilles grottes, ce sont les maisons de mon grand père qui avec deux de ses frères ont quitté leurs grottes de la montagne d'Hébron et ont acheté à des Bédouins ce terrain. Il y a une grande pièce creusée à même le roc puis tapissée (autrefois) de boue, à côté une autre cavité où logeaient les moutons, mais nous, nous étions et sommes des cultivateurs. Puis le fils de mon grand père a lui construit cette pièce que vous voyez à côté, faite d'énormes pierres peu équarries et qui est plus ou moins en ruine, et maintenant, moi, j'ai ma maison moderne ». Puis il nous parle de leurs difficultés avec le gouvernement auprès duquel ils se plaignaient tout le temps sans succès et ajoute : « Alors nous avons fait comme dans les kibboutz, parmi les 350 familles un homme a été élu, puis 15 parmi eux, et on a décidé de ne plus se plaindre, et de faire tout par nous-mêmes. La seule chose que nous demandons, c'est que le village soit reconnu. Cela a pris 15 ans mais depuis un an et 10 mois, nous l'avons obtenu. Dans notre village, il y a un jardin d'enfants, un service médical, trois guides diplômés, quinze enseignants et deux avocats. Mais il y a encore à faire, l'eau, nous devons remplir nos puits avec les réservoirs juchés sur nos tracteurs et pour l'électricité, nous avons des générateurs ».

Nous terminons la journée au milieu d'un carrefour de routes anciennes, où deux puits de 30 mètres de profondeur témoignent de l'importance de ces voies anciennes : la route du sel, les routes Nabatéennes d'Edom à Gaza, de Rome à Jérusalem où passaient de nombreuses caravanes. Pour mieux identifier ces routes, nous nous penchons sur la carte et la « toile d'araignée » apparaît clairement au milieu du désert.

Une fois remontés dans le bus, notre guide juif nous dit: «ce qu'il ne nous dira pas, c'est qu'il sont très vraisemblablement descendants des Juifs du temps d'Hadrien au deuxième siècle, qui, n'ayant pas le droit de vivre à Jérusalem, se réfugièrent dans les Monts d'Hébron. Avec la venue de l'Islam ils continuèrent leurs traditions juives tout en étant musulmans, mais à une certaine époque ils ont dû choisir, et sont passés à l'Islam.

Cécile  Pilverdier

 

Connaissance d'Israël : Césarée Maritime (fin)

Chef-d'œuvre d'Hérode le Grand

 

Au premier siècle de notre ère, Césarée était une ville cosmopolite dont les communautés comprenaient : les Grecs, les Samaritains, les Juifs et de nombreux soldats romains. Parmi les non juifs il y avait des sympathisants, attirés par les valeurs religieuses et morales que représentait pour eux le judaïsme. On les appelle « les craignant Dieu ». C'étaient des païens qui tout en s'étant approché du judaïsme ne s'étaient pas convertis mais honoraient le Dieu unique des Juifs. Dans le livre des Actes des apôtres nous avons un tel exemple : « II y avait à Césarée un homme du nom de Corneille, centenier de la cohorte appelée italienne. Il était pieux et avec toute sa maison il craignait Dieu; il faisait beaucoup d'aumônes au peuple et priait Dieu constamment. » (Ac. 10 : 1, 2). L'apôtre Pierre après la vision qu'il eut à Joppé (Jaffa) comprit qu'il devait se rendre chez les païens pour leur prêcher la Bonne Nouvelle du royaume de Dieu. S'étant rendu chez Corneille il prononça ces paroles : « Vous savez qu'il est interdit à un Juif de se lier avec un étranger ou d'entrer chez lui ; mais Dieu m'a montré qu 'il ne fallait dire d'aucun homme qu'il est souillé ou impur... En vérité, je le comprends, pour Dieu il n 'y a pas de considération de personnes, mais en toute nation celui qui le craint et qui pratique la justice lui est agréable. Il a envoyé la parole aux fils d'Israël, en leur annonçant la bonne nouvelle de la paix en Jésus-Christ ; c'est lui, le Seigneur de tous... » (Ac. 10 : 28-34). Pendant qu'il parlait encore, le Saint-Esprit descendit sur tous ceux réunis dans la maison de Corneille. Césarée est donc considérée par le monde chrétien comme le lieu de la Pentecôte des païens (l'effusion de l'Esprit Saint). Le baptême de Corneille est un événement central dans le développement de la foi chrétienne.L'apôtre Philippe vint habiter à Césarée où il développa peut-être une communauté judéo-chrétienne, et c'est chez lui que Paul résida au retour de son troisième et dernier voyage d'évangélisation. De là Paul monta à Jérusalem pour revenir quelques jours plus tard dans les fers, sous escorte romaine. Il y resta deux ans emprisonné dans le prétoire d'Hérode avant de naviguer vers Rome, ayant fait « appel à César » (Ac. 21-27).

Aux premiers siècles du Christianisme Césarée était encore une ville mixte à caractère païen. Cette métropole comportait un temple dédié à la déesse Isis, la protectrice des marins. Sérapis, un autre dieu gréco-égyptien, tenant à la fois de Zeus et d'Osiris y était vénéré ainsi que Déméter la déesse grecque de la fertilité. Toutes ces divinités avaient des temples dédiés à leur nom. De plus un intérêt croissant pour les divinités orientales (Mithra) et leurs mystères se faisait sentir dans l'Empire romain. C'est dans cette ambiance païenne qu'évoluèrent à Césarée la communauté juive qui s'y était réinstallée au milieu du IIe siècle, la communauté naissante de judéo-chrétiens et des païens convertis au christianisme.

Différents empereurs romains participèrent au développement de la ville. A l'époque de Vespasien elle fut élevée au rang de colonie romaine au nom de Colonia Prima Flavia Augusta Caesarensis. Titus multiplia les droits de la ville et sous la dynastie des Sévères (193-235) de nouveaux titres et droits lui furent accordés. A l'époque d'Hadrien un nouvel aqueduc d'une longueur de 10 kilomètres, doublant la capacité du premier, acheminait vers la ville l'eau des sources du mont Carmel.

Du IIe au Ve siècle la communauté juive était très florissante, et les relations des Juifs avec les autorités romaines s'étaient améliorées déjà sous Septième Sévère (193-211). Beaucoup de Juifs s'y installèrent, attirés par la possibilité d'obtenir la citoyenneté romaine et pour les avantages économiques que la ville procurait. Plusieurs académies juives qui virent le jour dans la cité aux IIIe-IVe siècles attirèrent des rabbins de grande renommée comme les Rabbis Hoshaya, Abbahu, Hanina ben Pappai et le Rabbi YitzhakNapara, Yohanan... Ces rabbis mentionnés dans le Talmud jouèrent un grand rôle dans l'interprétation de la Loi juive. Le traité masseketh Nezikin (dommages) du Talmud fut compilé à Césarée.

A cette période le christianisme s'était développé et répandu dans tout le pays et dans le bassin méditerranéen. A la fin du Ile siècle, Césarée avait un évêque et un concile y fut tenu en 195. Origène (v. 183/186-v. 252/254), exégète et théologien, un des Pères de l'Eglise, y enseigna et fonda une école dotée d'une bibliothèque de 30 000 manuscrits. C'est à Césarée qu'il compléta ses Hexaples, ouvrage qui juxtapose sur six colonnes le texte hébreu de la Bible et celui des versions grecques. Il rédigea également son ouvrage théologique De Principiis. Au début du IVe siècle Eusèbe (v. 265-340), évêque de Césarée rédigea sa monumentale Historia Ecclesiastica sur les débuts du christianisme, ainsi que Onomasticon, une étude historico-géographique détaillée de la Terre sainte.

La population s'accrut considérablement à la période byzantine (325-640), la ville étant la capitale d'une province florissante et port de transit pour les nombreux pèlerins visitant la Terre sainte ce qui favorisait l'activité d'un commerce intense.

Au Ve siècle des querelles contre les Juifs s'intensifièrent. Les autorités impériales et l'Eglise devinrent moins tolérantes envers les autres groupes religieux, spécialement envers les Juifs et les Samaritains. Les Juifs subirent des exactions accompagnées d'interdictions : pas le droit de construire de nouvelles synagogues, de tenir des postes dans les bureaux gouvernementaux... Il leur était également interdit d'utiliser des Bibles écrites en hébreu. Les Samaritains, quant à eux, ne pouvant garder leurs synagogues, mirent le feu aux églises de la ville (en 555). Des milliers furent fait prisonniers par les soldats de Justinien.

C'est à l'invasion des Perses dirigée par Chosroes II (en 614) que l'Empire byzantin subit son premier échec en Eretz Israël. Aidés par les Juifs pour la conquête de la Galilée, qui voyaient dans l'avance perse un espoir messianique, les Perses, après la conquête de Césarée, s'emparèrent de Jérusalem. Ils furent cependant vaincus en 628 par l'empereur Héraclius qui rétablit l'autorité du christianisme. Mais en 637, la longue domination romaine-byzantine, prit fin à la conquête du pays par les Arabes à la bataille du Yarmouk. Jérusalem se rendit en 637-38, après que le patriarche Sophronios ouvrit les portes de Jérusalem au calife Omar. Césarée tomba en 640 après un siège de plusieurs années. Son déclin se fit sentir bien qu'elle restât un centre international de commerce et de communications maritimes sous la domination arabe, qui dura près de cinq siècles. Sa contrée était toujours entourée de palmeraies et d'orangeraies, et les voyageurs et géographes arabes la décrivirent comme un paradis terrestre. Mais cette région byzantine de la Palestina Prima qui avait Césarée pour capitale devint la Jund Filastin, (District Palestinien) ayant Lydda pour centre administratif.

Du quartier juif l'on revient sur nos pas et c'est par une rue pavée de marbre blanc et d'autres belles pierres provenant des constructions antérieures que nous sortons de la ville croisée en empruntant la plus belle des trois portes de la muraille, celle orientée vers l'est. Un peu avant d'entrer l'on aperçoit sur notre droite les fondations d'une muraille construite peut-être par les Arabes aux Xe-Xle siècles. Ce qui surprend ici encore c'est la réutilisation de colonnes, bases, chapiteaux et frises provenant des époques romaine et byzantine. Le porche d'entrée débouche sur une grande salle oblongue qui était couverte de voûtes entrecroisées supportées par des pilastres et des consoles (trouvées in situ). Les clés de voûte et les voussoirs gisaient sur le sol. Cette salle fut donc bien reconstituée grâce aux matériaux qui y furent découverts. En sortant l'on peut voir les rainures qui étaient prévues pour la herse et les supports pour les gonds des portes. Ceux qui voulaient rentrer dans la ville par cette porte devaient tourner à gauche après avoir franchi le pont. Ceci forçait l'assaillant à exposer son flanc gauche non armé. Le pont jeté sur la douve reposait sur des piliers. La moitié orientale du pont, proche de la contrescarpe, était en bois pour être facilement démonté en cas d'attaque. L'autre partie était en pierre et protégée par une tour de la muraille d'enceinte.

De là nous nous rendons à une autre section des fouilles archéologiques où furent mis au jour des rues byzantines. C'est fortuitement qu'en 1951, un tracteur qui nettoyait un champ à l'est de la ville croisée, exhuma une grande statue de porphyre rouge. Lorsque quelques jours plus tard une seconde statue, en marbre blanc fut découverte on entreprit des fouilles pour le compte du Département des antiquités de l'Etat d'Israël. Les recherches mirent au jour une rue byzantine pavée de grandes dalles de marbre provenant de monuments romains. Les statues flanquaient une triple entrée de cette rue qui au nord était revêtue d'une mosaïque.

Quelques fragments d'une muraille de la ville byzantine furent dégagés par les archéologues. Cette muraille longue de 2 600 m comportait quelques portes et des tours carrées. La porte sud fut découverte dans le kibboutz Sdot Yam.

Plus loin parmi les bananeraies, l'on devine l'emplacement de l'hippodrome (circus) romain du IIe siècle. Long de 450 m et large de 90 m. il pouvait contenir jusqu'à 30 000 spectateurs. Des colonnes, placées sur le mur du milieu (spina) qui courait le long de l'hippodrome, furent exhumées ainsi qu'un obélisque en porphyre de 27 m de haut. Des courses de chars se perpétuèrent jusqu'au VIe siècle. C'est la Joint Expédition qui entreprit partiellement des fouilles en 1973 et 1974.

En s'approchant de la côte au nord de Césarée, nous laissons sur notre droite le nouveau village résidentiel. Plus loin sur notre gauche, un monticule non excavé garde les secrets de l'amphithéâtre romain construit probablement au IIe siècle. De forme ovale il servait aux jeux violents et mortels des gladiateurs et des animaux sauvages. Nombreux sont les Juifs et peut-être les Chrétiens qui y furent massacrés !

Près de la mer se dessinent les ruines des différents aqueducs construits aux époques romaine et byzantine. Vu que Césarée n'est pas traversée par une rivière et qu'elle ne comporte aucune source, l'eau potable y était tout d'abord acheminée par des aqueducs depuis la source Shuni puis plus tard de la rivière des Crocodiles. L'aqueduc supérieur, le plus proche de la mer, se comporte de deux canalisations adossées l'une à l'autre. Il est composé sur une partie de sa longueur, par un canal, creusé dans les roches de kurkar, l'autre section, traversant des régions basses, est supportée par des arches (arcadia). C'est à 8 m au-dessus du niveau de la mer que cet aqueduc atteint Césarée, ayant un gradient de 20 cm par km. D'après les inscriptions qui y furent retrouvées, une des deux parties de cet aqueduc fut construite par les soldats de la Xe Légion romaine, la Fretensis, stationnée dans la ville.

A l'époque byzantine un autre aqueduc, transportait l'eau d'un réservoir artificiel formé par des barrages pour contenir les eaux de la rivière des Crocodiles. Long de 5 km, il atteignait la ville à 5,5 m au-dessus du niveau de la mer.

Avant de quitter cet endroit du bord de mer, un bain dans la Grande Bleue s'impose, mais attention aux courants marins... Ainsi s'achève notre visite de Césarée Maritime, ville chargée d'histoire tant sur le plan juif que chrétien. Au plaisir de se revoir sur un autre site historique d'Israël.

Loïc Le Méhauté

Une exposition sur les réfugiés juifs en Autriche

Mi-octobre apparut dans la Vieille Ville de Jérusalem une affiche qui étonna : Une photo de réfugiés juifs des camps de D.P. (displaced persons) et l'annonce d'une exposition « Exode à travers l'Autriche », qui aurait lieu du 23 octobre au 15 décembre 2005 à l'Hospice autrichien Via Dolorosa n° 37. Un article sur cette exposition dans le Jérusalem Post du 11 novembre m'intrigua. Je suis donc allée voir.

D'abord l'Hospice autrichien ! Pour ceux qui l'ignorent, il se trouve dans le quartier musulman de la Vieille Ville, oasis autrichienne, catholique, permettant à des pèlerins essentiellement autrichiens de venir en Terre Sainte dans un hôtel autrichien tenu par des Autrichiens. L'histoire de cet hospice s'inscrit dans la profondeur de l'histoire de Jérusalem.

C'est le plus ancien hospice de pèlerins. L'empereur d'Autriche Franz Joseph ayant acheté un terrain, fit construire en 1856 un hospice, ouvert en 1863 pour les pèlerins autrichiens. En 1939 les Anglais le confisquent et le transforment en camp d'internement pour les prêtres et religieux autrichiens, allemands et italiens. En 1948, au départ des Anglais, l'ancien hospice devient un hôpital jordanien, d'abord pour son armée, puis pour son gouvernement. Après la guerre des Six jours en 1967 cet hôpital s'ouvre à toute la population arabe de la Vieille Ville tout en gardant une présence religieuse. En juillet 1985 l'hôpital est fermé pour des raisons d'hygiène. Rendu à l'Église catholique autrichienne en décembre de la même année, il est, après rénovation, rouvert en janvier 1988 comme hospice (hostel), avec 36 chambres permettant d'accueillir 100 hôtes.

En 2005, son nouveau recteur Stephen Bugnyar, réalisant le caractère uniquement autrichien de cet hospice, décide d'y organiser trois expositions, qui donneraient un éclairage sur la réalité historique et actuelle du monde juif et du monde arabe.

1    - Les réfugiés juifs en Autriche dans les années 1945-48

2   - Les Musulmans vivant en Autriche

(Oeuvre d'un Juif né en Serbie et vivant à Vienne)

3    - Des thèmes religieux peints par un artiste de Bethléem.

« Ces expositions n'ont aucun but politique », explique le père Bugnyar « mais, vivant sur la Via Dolorosa, en milieu musulman, et étant sur le chemin qui mène au Mur Occidental (Kotel) et au Mont du Temple, nous désirons être un carrefour où ces différentes cultures et histoires se rencontrent. »

La première exposition : « Exode à travers l'Autriche », « Les réfugiés juifs (Displaced Persons) après la Shoah » (23 oct- 15 dec. 05) avait pour but de permettre aux visiteurs de découvrir le drame des rescapés de la Shoah entre les années 1945-48, et en particulier le rôle de l'Autriche occupée par les Alliés dans cette période.

« On entend souvent parler du drame que fut la Shoah, de la libération des camps et de la création de l'État d'Israël. Mais qu'est-il arrivé aux Juifs rescapés entre 1945-48 ? C'est à cette question que notre première exposition a voulu répondre, » précise Bugnyar.

Parmi les 7 à 9 millions de gens déportés loin de leur pays pendant la guerre, 5 millions furent rapatriés par les Alliés dans leur pays d'origine. Certains refusèrent de rentrer chez eux et des camps de D.P. furent créés pour eux par les Alliés.

Mais pour les 1 200 000 réfugiés juifs la question du « retour chez eux » ne se posait souvent même pas : la plupart n'avait plus de chez eux, leurs communautés ayant été anéanties, et l'antisémitisme continuant à sévir dans certains pays. La création de camps de passages ou de camps de refuge et la migration des réfugiés à travers l'Europe et l'Autriche en particulier fut l'un des thèmes principaux de cette exposition.

Avec ses 24 panneaux, nous entrons dans l'Autriche antisémite de la fin des années 1930, avec le pogrom de Vienne en novembre 38, et sa plus grande synagogue en feu. Plusieurs panneaux témoignent de la libération des camps de concentration en Autriche, Monthausen construit en 1938 et libéré le 4 mai 45 et Ebensee construit en novembre 43 et libéré par les Américains le 6 mai 45.

Le pogrom de Kielce en 1946 en Pologne confirmant le danger pour les Juifs de retourner dans leur ancienne patrie, des camps de D.P. sont crées en Autriche, en Allemagne et en Italie. Ce sont soit des camps de transit permettant aux Juifs rescapés de Russie, et de Tchécoslovaquie, de séjourner sur leur chemin vers un pays qui les accueillera ou vers la Palestine, soit des camps de refuge où s'installent ceux qui n'ont pas la possibilité d'aller ailleurs.

De 1945 à 1954 l'Autriche est le pays de transit de 200 000 Juifs. A Vienne, treize camps sont installés et utilisés de 1945 à 56.

Ces camps sont soutenus par l'organisation souterraine Beriha (la fuite) créée en 1945 à Lublin et composée de rescapés de la Shoah et de Juifs de Palestine. Son but : organiser ces camps et ramener peu à peu les réfugiés d'Europe en Palestine. Elle prend en charge l'installation des réfugiés, leur nourriture, les soins médicaux, les papiers. Un panneau nous montre comme exemple de cet exode massif 100 000 Juifs de Pologne, en marche vers Vienne, de là vers l'Allemagne, ou à pied par les Alpes vers l'Italie où des bateaux les attendaient. Dejeunes Juifs de Palestine leur servaient de guides. Malgré la fermeture des frontières par les autorités britanniques en février 1947, le flot des immigrants continue.

Si la Beriha a un rôle moteur dans cet exode, deux autres organisations vont également porter de l'aide aux D.P., L'UNRRA (United Nations Relief and Rehabilitation Administration) fondée en 1943 et l'American Jewish Joint Distribution Committe appelée communément «Joint». Cette dernière, fondée en 1914 par la communauté juive américaine, fournit aux réfugiés des camps, en plus du nécessaire vital, des livres et des châles de prière, des dais nuptiaux (houppot) et des rouleaux de la Torah.

Un panneau représentant la carte de l'Autriche sous les Alliés permet d'y compter 63 camps de D.P. dont 14 subsisteront après le 1er novembre 48.

Un autre panneau est consacré à l'hôpital Rothschild de Vienne, construit en 1873, par la branche viennoise de la famille Rothschild pour les Juifs de la ville. En 1942 cet hôpital passe sous l'autorité des SS et il devient un hôpital militaire. En 1945 le Comité International pour les Juifs rescapés des camps de concentration y accueille 8 000 réfugiés. La Beriha en fera son quartier général.

Deux autres panneaux sont consacrés l'un à des objets retrouvés dans ces camps (un jeu d'échec, une poussette) et aux activités des réfugiés pendant leur séjour ; l'autre à des coupures de journaux imprimés à Linz, écrits en allemand, en yiddish ou en yiddish avec une écriture latine, et une photo de la communauté juive à Vienne après la Shoah.

Si l'Autriche des Alliés fut un lieu privilégié d'accueil pour les réfugiés juifs, l'exposition montre également que la population locale de cette époque n'était pas toujours coopérante : « On s'occupe d'eux plus que de nous ! ».

Bien sûr, un panneau fut consacré aux nombreux bateaux transportant des Juifs, souvent illégalement, en Palestine, et particulièrement au drame de l'Exodus. Ce bateau quitta le port de Sète en France le 11 juillet 1947 avec 4 500 immigrants clandestins à son bord. Arraisonné par des destroyers de la marine anglaise et conduit à Haïfa il fut renvoyé vers l'Europe vers les camps de D.P. en Allemagne.

En apogée, un panneau sur la création de l'Etat d'Israël, avec ses deux dates historiques : le 29 novembre 1947, le vote de l'ONU ; et le 14 mai 1948, la création de l'État.

Pour la cérémonie d'ouverture de cette exposition, le recteur avait prévu d'inviter très largement Israéliens et Palestiniens. Des Juifs originaires d'Autriche dont certains avaient vécu dans des camps de D.P. y eurent une place d'honneur. «C'était important qu'ils soient là, une manière de reconnaître ce qu'ils avaient vécu et souffert.» Beaucoup de Juifs ont répondu à l'invitation, en revanche, peu de Palestiniens sont venus. Pour ces derniers, l'exposition avait une orientation politique pour Israël, contre les Palestiniens. Pourtant son but était simplement de relater une « page d'histoire » touchant l'Autriche et le peuple juif. « Nous sommes conscients de notre histoire, de notre responsabilité dans cette histoire. La Shoah ne fait pas seulement partie de l'identité d'Israël. Elle nous atteint aussi profondément, et surtout nous, les gens de langue allemande, les Allemands et les Autrichiens », conclut Markus Steven Bugnyar.

Antoinette Brémond

 

Chrétiens de Terre Sainte, otages de toutes les propagandes

Pour la presse de toutes les tendances politiques et religieuses, la période de Noël est toujours un moment propice à consacrer des articles sur la situation des chrétiens de Terre Sainte. Cette année, plus de que coutume, les médias ont multiplié papiers et reportages sur ce sujet. Les chrétiens palestiniens sont l'objet de deux propagandes contradictoires dont chacune met en relief une part de la vérité.

La presse étrangère, dans sa grande majorité, est fortement influencée par les déclarations des prélats des différentes Eglises et des représentants de l'Autorité Palestinienne. Les chrétiens sont présentés comme des victimes de la politique brutale des Israéliens, depuis les humiliations aux check-points en passant par les interdictions de circuler librement dans les Territoires et jusqu'aux conséquences dramatiques sur le plan économique et psychologique que ces situations entraînent.

Minoritaires, en voie de disparition à cause d'une situation créée par les Israéliens, ils suscitent plus facilement la compassion. Les raccourcis sont saisissants : Israël devient le seul responsable et le seul accusé.

Les journalistes qui décrivent ces faits ont bien souvent raison. Les analyses des causes sont souvent plus problématiques.

Les musulmans souffrent des mêmes problèmes et tout autant que les chrétiens, si ce n'est plus. Mais il n'y a pas de doute que le chrétien se vend beaucoup mieux à l'étranger.

Depuis quelques années, la messe de minuit est, elle aussi, utilisée à des fins politiques. Après le fauteuil vide d'Arafat, nous avons droit au mur qui enferme Bethléem. La grande nouvelle annoncée par la presse cette année ne fut pas qu'un enfant était né mais qu'un mur avait été élevé. La réalité est dure. Ce mur de béton qui se dresse entre la ville de la Nativité et Jérusalem est le symbole d'un échec que personne ne peut accepter. Ce mur est insupportable pour ceux qui se trouvent derrière. Les contrôles effectués par les Israéliens à l'entrée de la ville sont usants et bien souvent humiliants.

Dans la presse israélienne et les publications juives, la réalité des chrétiens palestiniens est présentée sous un tout autre jour. On insiste, avec raison d'ailleurs, sur la persécution plus ou moins larvée que les chrétiens subissent de la part des mouvements islamiques et sur leurs difficultés à pouvoir exprimer pleinement leur identité. Les cas d'injustices envers les chrétiens se multiplient et la pression des islamistes est un facteur non négligeable de l'exode des chrétiens. La presse juive a été claire sur ce sujet en dénonçant des faits passés sous silence par les médias occidentaux. La montée de l'islamisme est l'un des plus grands problèmes du Proche-Orient. Mais entre informer ou dénoncer et instrumentaliser, il n'y a qu'un pas. Utiliser les chrétiens à des fins de propagande anti-palestinienne est facile mais les aider dans leurs problèmes et essayer de proposer des solutions concrètes est autre chose.

La compassion de certains Israéliens pour la cause chrétienne est parfois suspecte. Commençons par regarder la situation des chrétiens en Israël, qui n'est pas toujours idéale. Les chrétiens israéliens arabes, comme les autres arabes israéliens, se considèrent, non sans raison, comme des citoyens de deuxième catégorie, et ils ressentent en même temps la pression de l'Islam, même si cette pression est sans commune mesure avec celle qu'ils subiraient s'ils étaient palestiniens. Quant à ceux qui ne sont pas arabes, ils se sentent de moins en moins accueillis et les difficultés administratives se multiplient. Les témoignages de religieux en habit qui se font cracher dessus à Jérusalem sont de plus en plus nombreux, sans parler des interrogatoires de sécurité particulièrement corsés pour le personnel ecclésiastique à l'aéroport Ben Gourion. Si la situation des chrétiens en Israël n'est en rien comparable à celle des chrétiens des Territoires, il n'en reste pas moins que le sentiment dominant chez beaucoup chrétiens est celui d'un rejet par les Israéliens.

Informer avec lucidité et sans concessions est nécessaire. Instrumentaliser est préjudiciable à la cause que l'on veut servir.

Jean-Marie Allafort

 

Connaissance du judaïsme : De l'hébreu sous le grec

Vouloir expliquer le Nouveau Testament par un éventuel substrat hébreu est un exercice qui est souvent risqué, et les hypothèses dans ce domaine doivent être avancées avec beaucoup de prudence. Ce n'est pas donc sans hésitation que l'on aborde ici cette question en l'illustrant par un exemple, au risque d'enflammer l'imagination de quelques imprudents chercheurs de trésors philologiques. Il existe pourtant des cas où le recours à l'hébreu peut ouvrir des perspectives inattendues à la lecture du texte. C'est le cas, semble-t-il, pour un passage de l'Evangile de Luc, tiré du Cantique de Zacharie, le Benedictus :

II a montré sa miséricorde envers nos pères

et s'est souvenu de son alliance sainte

du serment qu'il avait fait à Abraham notre père (Le 1,72-73).

Retraduits en hébreu, les trois mots qui sont ici mis en évidence correspondent aux noms des trois personnages principaux de cet épisode : Jean, Zacharie et Elisabeth.

Jean, en hébreu Yo hanan, signifie : « Le Seigneur a fait miséricorde », et Zacharie (Zakhar Yah) veut dire: « le Seigneur s'est souvenu ». Enfin, Elisabeth correspond à l'hébreu Elishéva ; la première partie du nom (Eli) signifiant «Mon Dieu », tandis que la seconde peut s'expliquer par la racine shv', qui exprime l'idée de serment (que l'on retrouve par exemple, dans Béer-Shéva, qui peut être interprété comme "le puits du serment"). Les noms des trois personnages principaux du récit se trouvent donc en quelque sorte cachés dans ces deux versets.

On peut compléter cette remarque d'ordre linguistique en risquant un commentaire. Zacharie et Elisabeth, si leurs noms signifient respectivement le Seigneur se souvient et mon Dieu a juré, sont les symboles vivants de la fidélité de Dieu à sa parole. Puisque Dieu a fait serment, il se souviendra certainement de sa promesse. Le nouveau-né devra donc s'appeler Zacharie, comme son père (1,59), pour transmettre à la génération qui vient la mémoire de l'engagement divin, jusqu'à ce que cet engagement s'accomplisse.

Mais puisque Dieu s'est souvenu de sa promesse et que le temps de cet accomplissement est maintenant venu, l'enfant peut et doit s'appeler Jean, Yo-hanan, puisque c'est aujourd'hui que « le Seigneur fait grâce ».

Michel Remaud

 

Shéva' A propos du serment à Beer-Shéva, les commentaires disent « Beer-shéva, on peut traduire "puits du serment" ou "puits des sept" - » mais on ne nous dit pas tout à ce propos ; relisons Genèse 21, 28-33. Et résumons le texte à notre façon :

Abraham et Abimélèkh font un pacte reconnaissant que le puits est à Abraham. La chose se fait par un serment. Abraham amène sept agnelles (sept se dit en hébreu shéva' ) et il les donne à Abimélèkh, qui demande : « Pourquoi ces 7 agnelles? » Et Abraham : « Parce que nous avons fait serment reconnaissant que ce puits est à moi. » Or le serment se ditshevou'a- de cette même racine. S'il y a litige dans l'avenir, Abraham dira à son ami : « Combien je t'avais donné d'agnelles? » Abimélèkh « Sept, si je ne me trompe. » Abraham « Bon, et cela ne te rappelle rien? »

Les modernes appellent cela un moyen mnémotechnique.

Y.E.

Les oliviers et la paix

Depuis la colombe de Noé, chacun sait que le rameau d'olivier est le symbole de la paix. Cela dépend pour qui...

Ces derniers mois, c'est le drame des oliviers arrachés, coupés à la tronçonneuse, dans les oliveraies des Palestiniens. Que se passe-t-il au juste? Nous allons essayer de résumer quelques informations de la presse et la radio. Evidemment, cela dépend aussi du journal qui rapporte les choses et de sa tendance, et aussi des témoins qui rapportent les faits, chacun d'après son camp et ses intérêts. Alors peut-on se faire une opinion? A vous de le dire.

Déjà au cours des années passées, il y avait eu de ces cas de vandalisme, mais on ne s'y arrêtait pas, dans le tourbillon des autres nouvelles. Voici quelques extraits sommaires sur ces cas :

- Un membre du groupe Rabbins pour les Droits de l'Homme écrivait le 8 novembre 2004 :

« Jour difficile : notre délégation* et les gens de Faraata avons réussi à cueillir à peine trois arbres [ arrivée de colons réclamant des preuves de la propriété du village sur ces arbres. L'armée convoque les deux partie au bureau, cela traîne, finalement la journée est perdue]. La Haute Cour de Justice consultée avait décidé que les Palestiniens devaient être autorisés à cueillir toutes leurs olives. Le lendemain l'armée lève les interdictions, mais à notre arrivée nous trouvons 20 oliviers arrachés. [...] Il y a deux ans la récolte avait été pratiquement nulle, et l'année dernière on avait réussi à produire une tonne d'huile d'olives au lieu des 3 prévues normalement. [...] »

Ceci comme très bref tableau du passé avant de parler du présent. Car le problème est toujours d'actualité, comme il s'avère dans les articles suivants :

Ha'aretz27-ll-05

Dimanche, des Palestiniens ont affirmé que des colons avaient abattu plus de 200 oliviers dans le village de Salem, près de Naplouse. Ils ont dit à la police que les colons étaient arrivés de nuit et avaient abattu les oliviers à la tronçonneuse. La police cherche à mettre la main sur les colons responsables.

Cette destruction intervient un jour après que des volontaires du Mouvement kibboutzique, emmenés par Yoel Marshak, le chef de cette mission, eurent aidé les habitants de Salem à remettre en état leurs vergers détruits par des colons d'Elon Moreh voici un mois. Les agriculteurs palestiniens ne se rendaient plus dans leurs vergers depuis leur destruction, par crainte d'être attaqués par les colons.

Tout au long de cette mission, Yoel Marshak est resté en contact avec l'armée pour s'assurer que la remise en état se passerait sans heurts. "Le Mouvement kibboutzique assiste tout agriculteur en détresse, par solidarité. De la même façon que nous avons aidé les fermiers du Goush Katif pendant leur évacuation [de la bande de Gaza], nous aidons aujourd'hui les Palestiniens à préparer leur sol pour pouvoir planter les oliviers après leur destruction", a dit Yoel Marshak.

Marshak a également appelé les colons à arrêter de harceler les Palestiniens. [...]. Il a appelé l'armée à se montrer plus agressive face à toute future tentative de s'en prendre aux agriculteurs palestiniens.

Le 27 novembre au soir, la télévision israélienne nous a montré un homme atterré devant ses arbres déchiquetés, et le présentateur vétéran Haïm Yavin, concluait d'un ton convaincu : "Va-t-on enfin faire le nécessaire pour mettre un terme à ce vandalisme ?" Mais, programme oblige, il passait ensuite à la nouvelle suivante : un footballeur israélien connu a signé un contrat fort avantageux avec une équipe anglaise. Comme quiconque dans le monde regarde les nouvelles, on venait de soupirer :"C'est quand même regrettable..." et aussitôt après, on applaudissait avec fierté au beau succès d'un de nos footballeurs. Jusqu'à la prochaine fois.

Puis, Ha'aretz, dans son éditorial du 30-11-2005, demandait :

Qui va s'occuper des destructeurs d'oliviers ?

Les avant-postes illégaux, que le gouvernement s'est abstenu de démanteler, abritent des hors-la-loi qui, outre le fait de s'emparer de terres qui ne leur appartiennent pas, ont l'habitude de s'attaquer à leurs voisins palestiniens, à leurs plantations et à leurs biens. Ils partent du principe que le bras armé de la loi ne les atteindra pas.

Ces dernières années, la saison de la récolte des olives est devenue une période très agréable pour quelques-uns des habitants des avant-postes, et les destructions qu 'ils arrivent à infliger - sans interférence aucune - aux oliveraies palestiniennes laissent rêveur. Dans le seul village de Salem, quelque 180 oliviers ont été incendiés en mai, 250 sciés en juillet, et encore 200 en octobre. Lundi dernier, les habitants du village ont découvert un groupe d'Israéliens, qu 'ils ont identifiés comme habitants d'un avant-poste proche de la colonie d'Elon Moreh, occupés à scier à la tronçonneuse une dizaine d'arbres supplémentaires. Au total, quelque 900 oliviers ont été détruits à Salem depuis six mois.

Le 27 décembre, le journal Jérusalem Post, édition française, avait une autre vue des événements : pourquoi donc des Juifs feraient-ils de telles choses? ne serait-ce pas les Palestiniens eux-mêmes qui faisaient cela pour avoir des dédommagements? Voici le texte du journal (lu sur internet) :

La police de Judée-Samarie a ouvert une enquête lundi 26 décembre suite à des accusations soupçonnant les Palestiniens du village de Burin, dans la région de Naplouse, de saboter eux-mêmes leurs oliviers afin de recevoir des compensations de la part d'Israël.

Des dizaines d'incidents ont été rapportés ces cinq dernières années, mettant en cause des Israéliens qui auraient saboté des plantations d'oliviers palestiniennes dans la région de Naplouse.

"Il y a quelque chose de bizarre dans la façon dont ces arbres sont coupés", a déclaré Shlomi Sagi, porte-parole de la police de Judée-Samarie. Les enquêteurs s'interrogent sur les raisons qui motiveraient des habitants des implantations juives à s'aventurer jusqu'aux oliveraies pour saboter des arbres.

D'après certaines sources de la police, une des raisons qui pousseraient les agriculteurs palestiniens à abîmer leurs propres arbres est que "ceux dont la propriété est détruite par des habitants des implantations juives ont le droit à des compensations de la part de l'Etat".

Enfin, le 30 décembre, la radio nous communique que Shaoul Mofaz, ministre de la Défense, a décidé de réunir une commission d'enquête (police et armée) qui examine le problème. Il déclare que c'est un scandale et qu'il est impensable que l'État d'Israël admette de telles choses. Il s'est engagé à ce que l'État paie des compensations aux Palestiniens, s'il s'avère que ce sont bien des Israéliens qui ont perpétré ces actes. Cette déclaration est encourageante.

Mais le journal Ha'aretz répond le surlendemain, 1e' janvier 2006, dans un long éditorial (décidément, cela lui tient à cœur), dont voici quelques brefs passages :

Cette nomination d'une commission d'enquête n'est rien d'autre qu'une fuite de la responsabilité [...]. Ces choses se passent depuis presque un an dans une région qui est sous la responsabilité de Mofaz et de 2 'armée. La commission devrait examiner pourquoi lui-même n 'a rien fait face à cette suite d'actes de vandalisme, y compris les attaques de colons contre les gens des villages**. [...] Il se trouve aussi que de beaux oliviers arrachés avec leurs racines, sont vendus à des pépinières privées dans le centre du pays. [...] On signale un cas où la carte d'identité d'un colon d'Elon Moreh a été retrouvée près des arbres arrachés. La police l'a arrêté, et l'a relâché le lendemain. ***

Voilà où nous en sommes. Nous avons voulu donner un tableau des divers aspects de ce problème douloureux. Ce sont là les nouvelles que nous entendons jour après jour. Que chacun se fasse une opinion.

Yohanan Elihai

Mise à jour  (au moment de boucler ce numéro)

Malgré la concentration des médias sur la santé de Sharon, il y a du neuf presque chaque jour à ce sujet :

Ehud Olmert, le premier ministre par intérim, a tenu à parler des oliviers dès sa première réunion avec les ministres, disant bien sûr, son indignation et la nécessité de mesures contre les coupables. Le lendemain, dans un programme de radio hebdomadaire "Les faits et le droit", Moshé Negbi, juriste très connu pour sa compétence et son esprit critique, disait ses doutes sur le sérieux de telles déclarations qui restent souvent sans suite. Mais toutes les informations des jours suivants montraient au contraire que cette fois les actes suivraient. Très en bref d'après journaux, radio et TV :

-  débats et accusations réciproques, certains colons disent : « Les Arabes font cela pour nous accuser... » ou « C'est simplement leur habitude d'élaguer chaque année leurs arbres pour améliorer la production » (!!) - et on nous montre une photo de Palestiniens coupant tranquillement quelques branches. Mais il semble que personne ne se laisse prendre à ce genre de discours, quand on sait entre autres choses que des arbres centenaires ont été sciés à la base, et que d'autres ont été arrachés et passés en fraude en Israël pour y être replantés.

- aussi le Procureur général de l'Etat, reconnaissant qu'il s'agissait au total, depuis un an ou plus, de 2 400 arbres, a blâmé le retard à agir et les prétextes et excuses des autorités compétentes, et il a exigé le paiement de dédommagements aux paysans. Le ministre de la Défense a donc commencé à prendre des mesures sur place, pour évaluer les dommages et pour empêcher de tels actes criminels à l'avenir.

Gardons l'espoir, et attendons la suite.

-  Plusieurs groupes d'Israéliens se mobilisent régulièrement pour venir aider les Palestiniens à cueillir leurs olives ou réparer les dégâts, ou apporter des oliviers et les replanter (petite compensation plutôt symbolique pour des oliviers centenaires).

** Un cas parmi beaucoup d'autres signale que deux colons venus à proximité d'un village blessèrent des habitants, mais selon eux, c'était en se défendant contre l'attaque des villageois. L'enquête de la police a innocenté les gens du village.

*** De fait, on peut toujours dire qu'il s'était promené par là avec ses gosses quelques jours avant.

 

Au fil des mois...

Hospitalisation de Sharon

Dites une prière pour Ariel Sharon.

Les grands rabbins d'Israël et les leaders des partis religieux en Israël demandent aux fidèles de prier pour le Premier ministre Ariel Sharon. Voici par Bradley Burston, Haaretz 5 janvier 05, ce que le quotidien Haaretz vient de publier :

Dites une prière pour le Premier ministre.

Dites une prière pour l'homme qui ne pouvait pas être cassé.

Dites une prière pour notre présent brisé. Dites une prière pour notre avenir commun brisé.

Priez pour l'homme qui ne pouvait pas se calmer. Priez pour l'homme qui ne pouvait pas vaciller.

Dites une prière pour un avenir qu'il était le seul à connaître.

Dites une prière pour le peuple qu'il laisse derrière lui. Le peuple juif, les gens qu'il aimait, parfois malgré lui, ou

malgré eux. Les gens qui ne pouvaient se résoudre à l'aimer.

Priez pour ceux d'entre nous qui un jour l'ont embrassé et qui l'ont ensuite maudit.

Priez pour ceux d'entre nous qui un jour l'ont maudit, et qui n'avons pu nous résoudre à lui pardonner.

Priez pour ceux qui se disent religieux et qui voient là-dedans la main de Dieu.

Priez pour ceux qui se disent non religieux et qui éprouvent maintenant le besoin prier.

Priez pour les dirigeants qui, incapables de le remplacer, ne lui succéderont pas.

Priez pour obtenir un miracle. Priez pour nous tous. Priez pour que nous sachions nous guérir les uns les autres. Priez pour cette terre. Quelle connaisse la paix qu'il ne connaîtra jamais.

Traduction : Michel Remaud, Un écho d'Israël.

 

de ariel à arik  par Shlomo Artsi   Yediot Aharonot, 6janvier 06.

Voici ce qu'écrit l'un des chanteurs et des compositeurs les plus populaires d'Israël sur Ariel Sharon.

Deux personnes m'ont dit plusieurs fois : « Dans le désert, sans gourde, avec des forces diminuées, je ne voudrais être qu'avec un seul homme, avec Arik Sharon. » C'est Dany Sadé qui m'a dit cela, un ancien combattant de la patrouille Shaked, qui était alors avec le général Sharon pendant la guerre de kippour, et Itsik Ben Akiva qui servait sous ses ordres dans l'unité 101. Quand j'étais jeune, dans les années cinquante, a été publié il me semble le premier texte sur le chef de cette mystérieuse unité de Tsahal dont tout le monde parlait, la 101. L'officier s'appelait Ariel Sharon. J'ai alors lu ce texte en grognant, et comme jeune homme qui avait grandi en lisant Hasamba, j'ai découvert dans son histoire la naissance de l'unité mystérieuse des jeunes qu'avait fondé Ygal Mosinzon. Déjà en ce temps A.Sharon était devenu un mythe, déjà alors dans sa vie et dans nos vies dejeunes.

Je ne raconterai pas ici l'histoire des débuts du Likoud, sa déception de ne pas avoir été accepté dans le rôle de chef d'état-major général et les jours qu'il a passés quand on a manifesté contre lui sur la place des rois d'Israël (aujourd'hui place Rabin), 400 mille contre un seul homme. Les années passent vite, vous savez, peut être trop vite. Le temps court et nous file entre les doigts. Et ainsi, petit à petit, avec le temps qui passe, avec les changements, Arik Sharon a réhabilité son image blessée. L'homme qui a été là à toutes les étapes qu'a traversées l'Etat, qu'on attaquait alors et que l'on disait grand tueur, est devenu l'homme fort, l'homme dont tout à coup nous avions besoin.

C'était un vendredi midi, j'avais fini de me reposer, et tout à coup la sonnerie a retenti. Arik Sharon s'est présenté simplement et a dit : « C'est Arik qui parle, je peux échanger quelques mots avec toi ? ». Deux jours plus tôt il était avec Lily, sa femme, à une représentation à Césarée, et maintenant il se donnait la peine de téléphoner et de me raconter ce qu'il avait ressenti : « Pendant le chant 'chaleur de juillet-août', j'ai pleuré » m'a dit l'homme qui n'était pas encore chef de gouvernement, l'homme dont tu ne pouvais pas penser qu'il pouvait verser une larme, l'homme dur autrement dit. En vérité j'ai été ému. C'était une conversation gênante dans laquelle tu dis merci pour ce que l'homme qui est en face de toi te confie et quand la conversation a cessé, j'ai respiré profondément à cause de la grande émotion. En une seconde l'homme Ariel Sharon m'a conquis et Ariel est devenu Arik. J'ai voulu être vrai avec lui, ne pas être soupçonné à mes propres yeux de flatterie envers lui, aussi je me suis efforcé de lui raconter que j'étais parmi les manifestants contre lui la nuit de Sabra et Chatila, mais il a pouffé de rire, confus, et est passé par dessus. Je l'ai remercié de la conversation, je lui ai souhaité un bon sabbat, puis les années ont passé.

La seconde conversation a eu lieu quand il était déjà Premier ministre. C'était le matin, quand tout le peuple d'Israël part travailler, et j'étais moi aussi dans mon studio d'enregistrement. « C'est Arik », a-t-il dit. « Quel Arik ? » ai-je demandé. « Arik Sharon » a-t-il dit en riant très fort « Oui, le Premier ministre » ai-je répondu, confus. « Tu as le temps, je ne te dérange pas ? » a-t-il demandé. « Bien sûr » ai-je répondu. Alors il m'a raconté son émotion devant les mots que j'avais dits sur lui à la radio de Tsahal, dans mon émission du vendredi. Il a donné des précisions, il pouvait citer exactement ce que j'avais dit, puis la conversation a tourné étonnamment sur sa solitude en tant que Chef du gouvernement. Il était si vrai et si sensible que pendant un instant j'ai cru que cette conversation n'avait pas vraiment lieu. Une phrase importante de cette conversation s'est gravée dans ma mémoire. Nous avons parlé des partis de gauche et de droite, et soudain il m'a surpris et a dit : « Tu découvriras plus tard, que je suis du centre. »

C'était il y a quatre ans. Seulement cette dernière année, lors du désengagement, j'ai compris ce que voulait dire cet homme réputé de droite, lui qui a édifié les implantations et qui un jour les a enlevées. Nous, les Israéliens, nous ne savons pas pardonner, mais Arik Sharon chez nous, a passé toutes les étapes du pardon et de l'indulgence. Nous les Israéliens, nous aimons dénigrer nos chefs, mais Arik Sharon a gagné au cours du temps un grand amour que n'a eu aucun politicien auparavant. Peu à peu nous avons commencé à voir en lui, non seulement le combattant et le politicien, mais aussi l'homme. Les blagues sur sa voix nasillarde et sur les tics de son nez se sont évanouies, et un beau jour, quand il s'est assis sur le fauteuil de Premier ministre pour la seconde fois et s'y est installé de façon stable, Arik Sharon n'était plus seulement un vrai chef, mais aussi un père.

Sa force, nous ne l'avons pas reconnue, mais les sondages ont montré la vérité : il a entraîné derrière lui la majorité du peuple qui a plébiscité ces dernières années un chef dont la parole est une parole, qui se tient dans le rythme de cette vie, dont les yeux ne voient pas le tumulte des médias, mais sont prêts à modifier un état statique en autre chose. Il sort de ses convictions dures, anciennes, il a tenu parole et a fait le retrait de la Bande de Gaza, il nous a donné l'assurance que là-bas dans le bureau du Chef du gouvernement, il y a un homme qui sait ce qu'il fait, qu'on peut se fier à lui, qui ne flatte personne.

L'homme solitaire, le veuf, entouré de ses deux fils, aimé de ses collègues, dénigré par les médias mais aimé par son peuplé, est demeuré le seul en qui nous pouvions mettre notre confiance. Il représente aux yeux de la majorité d'entre nous, le pari le plus sûr. « Il est corrompu » m'a dit quelqu'un. « Je ne sais pas » ai-je répondu ; je n'ai pas pu me joindre au concert des dénigreurs, il est devenu pour moi un ami éloigné, je l'aime, j'ai prévu de voter pour lui, pour Kadima.

Dans la nuit de mercredi à jeudi, mon cœur s'est arrêté. Voir le Premier ministre emmené en ambulance à l'hôpital. M'imaginer son impuissance et en même temps la nôtre, c'est ce qui nous domine dans ces vrais moments de détresse. Parfois je pense en deux temps : un premier temps en général, à mes proches, et un second temps à ceux qui sont loin. Le chef du gouvernement fait partie des éloignés, mais toi, tu as une position par rapport à lui, une sensibilité que tu as développée pendant des années, une fidélité, des mots pour le défendre, de l'affection que tu as envers lui jusqu'à ce qu'elle s'estompe. Le chef du gouvernement est celui qu'on apprend à aimer ou à haïr, à estimer ou à abominer, tout selon les coups des médias.

Au cours de ses années, comme Moïse, comme David, Ariel Sharon a réussi, lui que nous appelions Arik, à traverser la mer hostile des médias et il est devenu, peut être même malgré lui, l'homme le plus aimé en Israël. Mais le dernier combat, vous savez, il est toujours, toujours, contre Dieu. Dans ces combats, ses prédécesseurs, d'énormes bulldozers non moindres que lui, n'ont pas gagné. L'immense Ben Gourion, Bégin, Golda, Dayan et Eshkol, dans cette bataille, la main de Dieu abaisse la main toute-puissante du chef et la couche d'un seul coup sur la table. Face à la force de Dieu il ne nous reste plus, toujours, toujours, et cette fois aussi, qu'à prier.

Traduction, Cécile Pilverdier ; Un écho d'Israël.

Solidarité et stabilité en ces heures difficiles

L'hospitalisation d'Ariel Sharon révèle bien des aspects et des paradoxes de la société israélienne.                 ,

« Tout Israël se trouve dans la chambre de l'hôpital Hadassah Ein Karem où est soigné Sharon » déclare d'un ton assuré Dani Kouchmaro de la deuxième chaîne de télévision. Depuis l'annonce de l'hémorragie du Premier ministre, les Israéliens regardent deux fois plus la télévision que de coutume, ils sont collés à leur poste de radio et consultent sans arrêt les sites d'actualités sur Internet. Chaque bulletin de santé fait l'objet de commentaires et d'analyses. L'anxiété, la tristesse, l'espoir et l'incompréhension sont des sentiments qui sont partagés par tous. En Israël on a l'habitude de vivre ensemble les drames du pays. Les épreuves traversées par ce peuple sont difficilement imaginables. Sans remonter dans l'histoire du peuple juif depuis 20 siècles, ces dix dernières années, les Israéliens ontdu affronter l'assassinat de Rabin et un nombre impressionnant d'attentats. Les souffrances accumulées le rendent encore plus perméable à chaque nouveau drame et le besoin de vivre ensemble une nouvelle épreuve est une nécessité absolue. Cette solidarité est forte et vraie. Elle est difficilement perceptible des gens de l'extérieur et des envoyés spéciaux. Le drame ne se vit pas seulement dans une chambre de l'hôpital d'Hadassah mais dans les foyers Israéliens.

Des enfants ont spontanément faits des dessins pour Ariel Sharon et demandent de venir les porter au chevet du malade. Dans les écoles, collèges et lycées, on encourage les jeunes et les enfants à s'exprimer sur ce que vit le pays en ces heures difficiles.

Ce matin, mardi 10 janvier, le quotidien Maariv révèle que depuis l'hospitalisation du Premier ministre, le nombre d'infractions et de vols ont diminué de 50%. Même les voleurs sont en état de choc !

«En ces heures, nous prions pour Ariel Sharon. » Ces paroles n'ont pas été prononcées par le Grand Rabbin d'Israël mais par Tomy Lapid, le chef de file du parti laïc Shinouï ouvertement anti-religieux. La prière n'est plus le privilège des pratiquants. Elle est un besoin pour tous. Une évidence. Ce vendredi soir, je me trouvais invité chez des amis à Arad, ville du Néguev. Nous étions une dizaine de personnes. Un homme d'une cinquantaine d'années, membre du parti travailliste, avoue, à la surprise générale, que depuis que Sharon est hospitalisé il récite chaque jour les psaumes que les rabbins ont demandé de dire. Il venait de dire quelques minutes avant que les choses iraient beaucoup mieux si Dieu existait ! J'ai alors pensé à cette réflexion entendue par un rescapé de la Shoah : « Comme veut-tu que je croie en Dieu après ce qu'il nous a fait ? »

Même dans les heures les plus dramatiques, les Israéliens ne peuvent s'empêcher de poser des questions et de remettre en cause sans arrêt tout ce qu'on leur raconte. Chacun a ses opinions et veut les exprimer. En Israël, la culture de la communication et du dialogue est fondamentale. Il suffit de lire le nombre de réactions aux articles publiés par les sites Internet pour s'en convaincre. Depuis le début de l'hospitalisation du Premier ministre, on s'interroge sur les erreurs commises par les médecins et sur les causes de cette hémorragie. Qui est responsable ? Le journaliste Shimon Schiffer, un intime de Sharon, accuse sans le moindre ménagement certains hommes politiques d'avoir provoqué l'attaque cérébrale. Selon l'un des proches du Premier ministre, la publication d'une nouvelle affaire de corruption 24h avant son opération au cœur l'aurait profondément affecté. Quelques heures avant l'attaque, la ministre de l'Education, Limor Livnat (Likoud) a tenu des propos très durs : « Le Premier ministre ne peut pas continuer à se défiler. Il ne s'agit pas seulement de soupçons flous mais de beaucoup plus grave. » Le Premier ministre aurait mal réagi à ces propos et en aurait été très affecté. La publication de cette 'nouvelle - ancienne affaire' n'a pas dû contribuer à la sérénité d'un homme de 78 ans qui, 15 jours avant, venait de subir une légère attaque cérébrale. Les réactions des personnalités politiques, comme Livnat mais aussi Tomy Lapid et Ofir Pinès étaient sans doute exagérées. En Israël, les politiciens comme les journalistes ne font jamais de concessions à qui que ce soit. Le jeu démocratique est dur. Schiffer utilise l'expression de « complicité de meurtre, au niveau métaphorique ».

Enfin l'hospitalisation de Sharon a mis en relief la stabilité des institutions israéliennes. Le gouvernement avec à sa tête un Premier ministre par intérim a immédiatement réagi et aucun vide institutionnel ne s'est fait sentir. Les affaires de l'Etat sont prises en main. Dans quelques jours, le conseiller juridique du gouvernement décidera de la marche à suivre. Il est clair que Ehud Olmert, Premier ministre par intérim, ne peut pas en même temps assurer 12 autres portefeuilles dont celui des Finances. Sharon, depuis la démission des ministres travaillistes, assurait des intérims ministériels. Il avait l'intention de nommer des ministres. La bonne marche d'un gouvernement, même s'il est transitoire, exige la nomination de nouveaux ministres. Dans cette crise, Israël se révèle comme une démocratie forte où les institutions garantissent la stabilité et la continuité

Jean-Marie Allafort

Autres nouvelles

Les Israéliens installés à l'étranger reviennent peu à peu au pays.

Plus de 11000 Israéliens qui vivent à l'étranger ont décidé de revenir s'installer en Israël en 2005, soit 10% de plus que l'an dernier. C'est un chiffre record qui ne s'est jamais vu depuis la création de l'Etat en 1948. Près de la moitié vivaient aux USA, l'autre moitié était installée en Europe, en Australie et enfin en Afrique. Ce phénomène s'explique par la baisse importante des attentats, par l'amélioration de la situation économique mais surtout par le fait que beaucoup d'entre eux ont la nostalgie du pays.

Malgré ce chiffre important de retour en Israël, ce n'est qu'une goutte d'eau par rapport au nombre d'Israéliens qui vivent à l'étranger : plus de 710000. La majorité vit aux USA, soit 535000 Israéliens (dont 250000 à Los Angeles et

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120000 à New York). En Europe sont installés près de 100000 Israéliens ( Un peu moins de 40000 en France, 20000 en Angleterre, 19000 en Russie et Ukraine, 2300 au Danemark et 2000 en Espagne). 61000 ont quitté Israël pour l'Afrique alors que 21000 ont préféré s'installer en Australie.         .Source : Maariv, 16,déc. 06.

Renée Neher nous a quittés - 30 décembre 05

Avec Madame Renée Neher, c'est une grande figure du judaïsme français, et du judaïsme francophone en Israël, qui vient de disparaître.

Renée Bernheim était venue d'Alsace. Avec André Neher, qu'elle avait épousé en 1947, elle fut un des membres les plus actifs de la communauté juive de Strasbourg, prenant en particulier une part importante dans l'accueil des Juifs sépharades exilés d'Algérie à partir de l'été 1962. À la suite de la guerre de 1967, André et Renée Neher prirent la décision de la alya et vinrent s'établir à Jérusalem.

Docteur en histoire, Renée Neher-Bernheim a consacré la plus grande partie de sa vie à l'histoire de son peuple. Elle laisse une œuvre écrite importante, en langue française, qu'il n'est pas possible de présenter ici, depuis Le judaïsme dans le monde romain jusqu'à La vie juive en terre sainte, consacré à la vie de la communauté juive en terre d'Israël sous la domination ottomane, en passant par l'Histoire biblique du peuple d'Israël, écrite collaboration avec son mari André Neher. Ceux qui ont eu la chance de pouvoir l'approcher et l'entendre appréciaient la manière dont' elle savait allier la rigueur de l'érudition à l'art de raconter, regrettant parfois que les contraintes de l'édition lui aient interdit d'émailler ses ouvrages d'anecdotes qu'elle aurait aimé rapporter.

Les étudiants du Centre Ratisbonne se souviendront de ses conférences sur l'histoire juive contemporaine, où le talent pédagogique était mis au service d'un amour de son peuple, de sa terre et de sa ville qui donnait sens à toute sa recherche. Son état de santé lui avait malheureusement interdit d'apporter sa collaboration à l'enseignement donné à l'Institut Albert-Decourtray, dont la fondation l'avait réjouie.

Jusqu'à ces derniers temps, Madame Neher était une lectrice attentive et assidue d'Un écho d'Israël. Ses appréciations et ses encouragements nous étaient précieux.

Elle s'est éteinte le 29 Décembre 2005, 28 Kislev 5766, au quatrième jour de Hanucca. Elle repose désormais sur le mont des Oliviers, auprès d'André Neher. Que sa mémoire soit en bénédiction.

Michel Remaud

Plus d'un million de musulmans en Israël

La veille de la fête du sacrifice, le bureau israélien des statistiques publie son rapport annuel sur la situation des musulmans qui vivent en Israël. La population musulmane israélienne s'élève à 1 million 142 000 personnes. Selon les pronostics, elle atteindra 2 millions d'âmes en 2025 soit 22% de l'ensemble de la population d'Israël.

Les musulmans constituent 16% de l'ensemble de la population d'Israël et 83% de l'ensemble des arabes israéliens. En 2005, la population musulmane en Israël a augmenté de 3, 1% alors que la population juive n'a augmenté que de 1, 3%.

La population musulmane est la plus jeune d'Israël. 43% des musulmans ont moins de 14 ans contre 26% chez les Juifs et les chrétiens et 36% chez les druzes. Les plus de 65 ans constituent moins de 3% de l'ensemble des musulmans du pays contre 12% dans le secteur juif.

53% de l'ensemble des musulmans habitent dans des villes ou des localités de plus de 20 000 personnes. La ville où le nombre de musulmans est le plus élevé est Jérusalem avec 225 000 âmes soit 21% de la population de la ville. A Nazareth vivent aujourd'hui 43 000 musulmans et constituent 68% de la population. La troisième grande ville musulmane d'Israël est Um-El-Fahem avec 40 000 personnes. Il n'y a pas de chrétiens ni de Juifs dans cette ville.

Enfin, le taux de croissance des musulmans israéliens est en légère baisse. En 2005, en moyenne une femme musulmane a 4, 36 enfants alors qu'en 2000 elle avait 4, 74. La natalité est particulièrement élevée chez les musulmans israéliens (et encore plus chez les Palestiniens) en comparaison avec d'autres pays du Proche-Orient. En moyenne en Syrie, une femme accouche de 3, 8 enfants, en Jordanie elle en a 3, 7 et en Iran une femme musulmane n'a que 2, 5 enfants.

Le nombre de Druzes, qui eux aussi célèbrent demain 10 janvier la fête du sacrifice, s'élève à 115 000 personnes. Les Druzes ne sont pas comptés comme musulmans et forment une population distincte

Rédaction

Chant du mois

Préparant un dossier sur les enfants en Israël, je regarde depuis plusieurs semaines la chaîne de télévision qui leur est réservée. Je regrette de ne pas l'avoir regardée avant tant les émissions me fascinent. Les chaînes des « grands » finissent par m'ennuyer. L'enfant a l'évidence de la question et son regard sur le monde est à la fois sérieux et amusé. Je suis frappé par la qualité des programmes proposés. On apprend aux bambins les valeurs du respect de l'autre, de la fraternité et de l'accueil de la différence. Les enfants juifs et arabes s'amusent ensemble sans que cela pose le moindre problème à personne. Les animateurs, de véritables stars aux yeux des enfants, sont d'abord et avant tout des éducateurs dont les réflexions ne contiennent jamais le moindre propos déplacé. On ne peut être qu'optimiste en fermant son poste de télévision.

Pour le chant du mois, nous proposons une hymne à l'enfant composé et chanté par David Daor et qui est fredonné par tous les Israéliens.

 


Toi, l'enfant, veille sur le monde

Toi, l'enfant, veille sur le monde

Il est des choses qu 'il ne faut pas voir

Toi, l'enfant, veille sur le monde

 Si tu les vois, tu cesseras d'être.

 Toi, l'enfant, héros du monde,

Avec le sourire des anges.

 Toi, l'enfant, veille sur le monde

 Car nous-mêmes nous n 'y parvenons plus.

Toi, l'enfant, veille sur le monde.

Que tes pensées ne débordent pas,

 Car plus tu en sauras

Et moins tu comprendras.

A une certaine heure, toutes les portes se ferment

Et l'amour s'épuise.

Toi seul continues de t'étonner.

Toi, l'enfant, veille sur le monde

II est des choses qu 'il ne faut pas voir

Toi, l'enfant, veille sur le monde

Si tu les vois, tu cesseras d'être.

Toi, l'enfant, héros du monde,

Avec le sourire des anges.

Toi, l'enfant, veille sur le monde

Car nous-mêmes nous n 'y parvenons plus.

Toi, l'enfant, héros du monde,

Avec le sourire des anges

Toi, l'enfant, veille sur le monde

Car nous-mêmes nous n 'y parvenons plus.


Jean-Marie Allafort

 

et l'humour en finale

Cette fois, une blague assez vieille, vers 1950, mais toujours utile :

Un enfant demande à son père : « Papa, pourquoi faut se serrer la ceinture? »   (Se rappeler qu 'alors on avait

encore des tickets de rationnement). Le père : «Je sais pas, va demander à Ben Gourion. »

Le gosse va au Ministère voulu, frappe à la porte. Ben Gourion ouvre : « Tu désires? »

« Ben, je voudrais savoir pourquoi faut se serrer la ceinture. ».

Ben Gourion l'emmène à la fenêtre : « Que vois-tu là-bas? » - « Un kibboutz. »

« On se serre la ceinture et l'an prochain, tu en verras cinq ! Et là-bas?» - « Je vois une usine. »

« On se serre la ceinture et l'an prochain, tu en verras dix! »

Le gosse ravi, rentre chez lui :

« Papa, j'ai compris, ouvre la fenêtre! Qu'est-ce que tu vois dehors? »

« Je vois un mendiant... » - « Papa, on se serre la ceinture et l'an prochain, tu en verras dix! »

Une histoire ancienne? Attendons l'an prochain.

Y.E.

 

 

Même si nous avons une ligne commune dictée par notre présence en Israël, il semble bon de rappeler le principe qui guide bien des publications et qui donne une certaine liberté à chacun :

 

La revue laisse aux auteurs des articles et comptes rendus l'entière responsabilité

  des opinions et jugements qu'ils expriment.