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Prière de St Ignace

 « Seigneur Jésus,
apprenez-nous à être généreux,
à vous servir comme vous le méritez,
à donner sans compter,
à combattre sans souci des blessures,
à travailler sans chercher le repos,
à nous dépenser sans attendre d’autre récompense
que celle de savoir que nous faisons votre Sainte volonté. »

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N° 44 – Décembre 08/Janvier 09

Jérusalem – Église de la Dormition

Table des matières

Editorial : Miracle obscur qu’on oublie…... 2

L’église du Siège de Marie. 3

Le grand rabbin Meïr Lau nommé à la tête du Yad Vashem.. 4

La « Sale affaire ». 4

Les licenciements se multiplient7

On parle russe en Israël8

Le kibboutz retrouve une nouvelle jeunesse. 12

Ils ont dit : Apartheid ?. 14

Baisse du nombre de conversions au judaïsme et à l’islam.. 16

Beit Hayeshoua, un centre de réhabilitation pour les drogués. 17

La valeur du demi-shéqel18

Le chant du mois. 20

Humour au final20

Infos pratiques. 21

 

 

Editorial : Miracle obscur qu’on oublie…

 

Du 22 au 29 décembre, on allumera les bougies de Hanouca dans tous les pays. « Ces lumières publient un miracle. Quel est ce miracle ? », écrit Lévinas en janvier 1961. « S’agit-il des hauts faits militaires que Juda Maccabée accomplit au deuxième siècle avant la destruction du Temple ? S’agit-il de la victoire sur Antiochus Epiphane, envahisseur de la Judée et persécuteur de la religion, profanateur du Temple ? ». Non, dit-il, et de citer le Talmud qui donne le sens de Hanouca. : «  Quand la maison des Hasmonéens a eu le dessus, on n’a trouvé au Temple qu’un seul petit flacon d’huile pur, portant le sceau du grand prêtre. L’huile n’aurait dû suffire au maintien de la lumière (permanente au Temple) que pendant un jour. Mais un miracle se produisit : l’huile du flacon suffit pour huit jours. L’année suivante, on institua la célébration de ces jours par des chants de louanges et de grâces. »

 

Cette flamme, c’est « le prodige quotidien de l’esprit : le génie qui invente l’inouï bien que tout soit dit ; l’amour qui s’enflamme sans que l’être aimé soit parfait ; la volonté qui entreprend malgré les obstacles qui la paralysent ; l’espoir qui éclaire une vie en l’absence des raisons d’espérer ; la patience qui supporte ce qui peut la tuer. »

 

 Avant le miracle de la lumière, il y eut un autre miracle, poursuit Lévinas. « Miracle obscur qu’on oublie... Mais, si dans le Temple ravagé et profané par les infidèles, on n’avait pas trouvé un petit flacon d’huile pure, scellé par le grand prêtre et qui, ignoré de tous, mais inaltéré, subsista au cours des années où le chandelier restait vide, il n’y aurait pas eu de miracle de Hanouca. Il fallait que se conserve quelque part une huile transparente et intacte. »

 

Et, dans ces mêmes jours de Hanouca, les chrétiens fêteront Noël, la naissance de Jésus, de nuit, dans un lieu obscur, une étable. Les premiers avertis de la bonne nouvelle : « Il vous est né aujourd’hui, dans la ville de David, un Sauveur qui est le Christ Seigneur », ce sont les bergers  qui passaient dans les champs les veilles de la nuit pour garder leurs troupeaux.  «  Et voici le signe qui vous est donné », dit l’ange : « vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. »

Quoi de plus faible qu’un nouveau-né qui, dans sa faiblesse, suscite crainte et espérance !

 

Qu’en ces jours de fête, nous puissions tous découvrir et reconnaître les signes d’espérance souvent si cachés.

Bonnes fêtes à tous nos lecteurs !

     S. M.



 

 


Connaissance du pays

L’église du Siège de Marie

Jean-Marie Allafort

 


En cette période de Noël, de nombreux visiteurs et pèlerins emprunteront la traditionnelle route d’Hébron pour se rendre à Bethléem. Beaucoup ne connaissent sans doute pas l’existence d’un site archéologique non loin du monastère de Mar Elias, à la sortie de Jérusalem : l’église du Siège de Marie ou Kathisme.

 

En 1992, lors des travaux d’élargissement de l’artère reliant Jérusalem à Bethléem, un bulldozer heurta un sol pavé de mosaïques. Les archéologues dépêchés sur place mirent au jour des vestiges d’une église byzantine. Les mosaïques, très belles, étaient particulièrement bien conservées. Ils en conclurent que les restes de cet édifice n’étaient rien d’autre que l’église du Kathisme, connue des sources de l’époque byzantine. Auparavant, en 1934, non loin de là, on découvrit une autre église à Ramat Rahel. A l’époque, les archéologues avaient conclu qu’il s’agissait de l’église du Siège de Marie. A la lumière de la nouvelle découverte, le jugement fut révisé.

 

La première campagne de fouilles fut effectuée entre octobre 1992 et février 1993. A cette occasion, la partie occidentale de l’église octogonale fut mise au jour. Les fouilles reprirent en 1997 et permirent la découverte d’un grand édifice construit au 5ème siècle et restauré au 6ème. Après l’arrivée des musulmans en Terre Sainte, l’église fut convertie en mosquée. Au centre de l’édifice se trouve un rocher encadré de deux vestibules octogonaux.  S’agit-il du siège de Marie qui était vénéré par les fidèles à la période byzantine ? Presque toutes les salles de l’église étaient pavées de mosaïques multicolores avec des motifs floraux et géométriques très divers.

 

Le nouveau site découvert est sur un terrain appartenant au patriarcat grec orthodoxe de Jérusalem. Sur ce même terrain, non loin de là, on peut voir une citerne à ciel ouvert connue sous le nom arabe de Bir Kadismou (Bir : citerne ou réservoir ; Kadismou vient du grec Kathisma signifiant siège). Il n’y avait pas de doute, l’église découverte était bien celle du Siège de Marie.

 

Quelle est cette église ? On la connaît par une courte notice de la Vie de Théodose le Cénobiarque datant du 6ème siècle disant que Ikélia, « épouse du gouverneur, devenue ensuite diaconesse du Christ », fonda vers 455 une église au « Vieux Kathisme ».  Ce lieu est situé environ au troisième mille de la route de Jérusalem à Bethléem. Cette riche dame de l’aristocratie vivait à l’époque de Juvénal, qui fut évêque de Jérusalem de 450 à 458. Selon le récit de la Vie de Théodose, cette église fut construite à l’endroit où Marie se reposa sur la route menant de Jérusalem à Bethléem.

Selon l’ancien lectionnaire arménien de Jérusalem datant du 5ème siècle, les chrétiens de la Ville sainte se rendaient en pèlerinage sur ce lieu, au « troisième mille », le 15 août. Dans le lectionnaire géorgien, le pèlerinage sera déplacé au tombeau de la Vierge au pied du mont des Oliviers à la suite du développement des traditions mariales relatives à sa dormition. La dédicace de l’église du Kathisme, situé « au troisième mille » était célébrée le 13 août.  Le « troisième mille » de Jérusalem à Bethléem est connu dans le Protévangile de Jacques. C'est un point d'eau où Marie enceinte descend de l'âne pour se reposer. Voici le texte :

 

« Et ils s’approchèrent (Joseph et Marie) du troisième mille, et Joseph se retourna et vit Marie triste. Il disait : “Peut-être ce qui est en elle la fait-il souffrir.” Et de nouveau, il se retourna et la vit qui riait et il dit : “Marie, qu’en est-il donc, que je vois ton visage tantôt riant et tantôt attristé ?” Et elle lui dit : “Joseph, c’est que je vois devant mes yeux deux peuples, l’un qui pleure et se lamente et l’autre qui se réjouit et exulte.” Ils étaient arrivés à mi-chemin quand Marie lui dit : “Joseph, descends-moi de l’âne car ce qui est en moi me presse pour sortir.” Et là, il la fit descendre… »

 

Cet apocryphe, nous le savons, aura une très grande influence dans les traditions chrétiennes. Les fêtes de la Nativité de Marie ou encore de la Présentation de Marie au Temple trouvent ici leurs sources. Il n’est pas donc pas surprenant que la communauté chrétienne de Jérusalem ait voulu faire mémoire de la station « du troisième mille ». Dans le Protévangile de Jacques, il n’est pas question de siège. Il semble que cette tradition ce soit développée ultérieurement. De plus, les traditions du puits auprès duquel Marie se serait arrêtée sur la route de Bethléem sont nombreuses. On en trouve une trace par exemple à Ein Karem avec la fameuse « fontaine de la Vierge » jouxtant la mosquée.

 

Le site, actuellement recouvert, n’est pas ouvert au public. Ni l’Etat d’Israël, ni l’Eglise orthodoxe ne voient un intérêt archéologique et historique suffisant pour le développer. Dommage, d’autant qu’on avait fait un battage médiatique autour de ce site en 1997, en promettant qu’il serait ouvert pour l’an 2000, où on attendait 4 millions de visiteurs.


 


 

Nouvelles

Le grand rabbin Meïr Lau nommé à la tête du Yad Vashem

Rédaction

 

Hasard du calendrier ? Ce dimanche 9 novembre, 70 ans après l’effroyable nuit de Cristal, le gouvernement d’Israël vient de nommer le grand rabbin Meïr Lau, rescapé de la Shoa, président du Yad Vashem.

L’actuel grand rabbin de Tel Aviv et ancien grand rabbin d’Israël, Israël Meïr Lau, remplace à ce poste Tommy Lapid décédé en juin dernier.
Meïr Lau avait reçu il y a trois ans le prix d’Israël pour sa contribution particulière à la société israélienne. Certains avaient même avancé sa candidature pour la présidence de l’Etat d’Israël pour succéder à Moshé Katsav. Offre qu’il déclina finalement.

Né en Pologne, la très grande majorité des membres de sa famille trouva la mort au camp de Treblinka. A la libération du camp de concentration de Buchenwald où il fut enfermé, il n’avait que 8 ans.

 

Histoire

La « Sale affaire »

Cécile Pilverdier

 


L’affaire Lavon, la « sale affaire » ou « l’affaire », est le surnom donné à l’affaire d’espionnage et de sabotage de Tsahal en Egypte durant l’année 1954.
Fin 1954 un accord fut signé entre les Britanniques et l’Egypte, selon lequel les Anglais quitteraient la région du Canal de Suez. Cet accord supprimait le précédent signé en 1936, selon lequel les Anglais pouvaient maintenir des troupes dans la région du Canal, et celles-ci étaient ex-territorialisées. En juin les Britanniques retirèrent leur armée
.

Israël voyait dans ces forces britanniques une protection contre l’invasion de sa frontière sud par l’Egypte, aussi cet accord de 1954 éveilla-t-il sa méfiance, d’autant plus que l’armée britannique cédait ses 11 aéroports à l’armée égyptienne. Au même moment une équipe d’espions israéliens travaillait en Egypte avec à sa tête un officier des renseignements militaires, Abraham Dori, surnommé « John Derling », sur l’initiative de la section des renseignements de l’unité 131 de Tsahal, avec comme chef Mordekhaï Ben Tsur. Cette unité 131 avait été créée pour la lutte psychologique dans les pays ennemis, dépendant au début des renseignements de l’armée pour des actions spéciales. Les membres de ce groupe étaient des Juifs égyptiens, certains de religion karaïte, qui après avoir été formés en Israël, rentrèrent en Egypte.

Le but de cette organisation était de faire du sabotage en Egypte en temps de guerre si elle éclatait. Mais lorsque l’accord sur le retrait des Britanniques fut connu, l’ordre fut donné à cette unité, et particulièrement à l’officier des renseignements Avri Elad surnommé « Paul Frank », d’agir contre les organismes britanniques et américains. On espérait ainsi que l’accord serait annulé.

La question : « Qui a donné l’ordre ? », le ministre de la Défense, Pinhas Lavon ? Le chef des renseignements de Tsahal, Binyamin Gibli ? Si oui, ce dernier aurait-il agi de sa propre initiative, le chef des Armées Moshé Dayan étant alors à l’étranger et le chef du Gouvernement n’étant pas au courant jusqu’à ce que l’affaire éclate ? Ces questions allaient retentir encore de nombreuses années et n’ont toujours pas de réponses faisant l’unanimité des historiens jusqu’à ce jour.

Une chose est sûre, le chef de l’unité 131, Mordekhaï Ben Tsur, transmit à son groupe, d’après l’ordre de Gibli, le code prévu (Action Shoshana), à la radio israélienne le 18 juillet 1954.

Les membres de l’unité exécutèrent plusieurs actions à Alexandrie et au Caire, posant des explosifs assez primitifs. L’un des membres fut arrêté alors qu’il était en train d’agir, et très vite, presque toute l’unité fut emprisonnée et jugée. Deux des membres, Shmuel Azar et le docteur Moshé Marzouk furent condamnés à mort et pendus le 31 janvier 1955. Deux furent libérés, et les autres condamnés à une longue peine de prison. Le démantèlement de ce réseau d’espionnage amena évidemment à la découverte et à l’arrestation d’un autre espion israélien, Meïr Binet, dit « Max », qui travaillait aussi en Egypte. La veille du jour où il devait témoigner au tribunal, il se suicida dans sa cellule.

Contrairement aux discussions sur : « Qui a donné l’ordre ? », tout le monde fut d’accord pour dire que la façon dont avait été annoncée l’action était irresponsable. A partir de ce moment-là, Gamal Abel Nasser devint plus dur vis-à-vis des Juifs d’Egypte, et seules quelques familles très anciennes purent garder leur nationalité égyptienne, les autres durent quitter le pays. La réputation internationale d’Israël fut très touchée.

En Israël une boite de Pandore politico-militaire s’ouvrit, et cette affaire devint « La sale affaire ».
La censure interdit la publication des détails de cette affaire, mais on ne pouvait pas fermer les yeux sur le procès du Caire suivi en Israël et dans le monde entier. En Israël, seules des bribes passaient aux nouvelles et pendant des années le public reçut des informations décousues donnant des noms comme : « la troisième personne », « l’officier supérieur », et bien sûr : « la sale affaire ». Les institutions israéliennes furent très secouées. Les rapports furent tendus entre le ministre de la Défense, Pinhas Lavon, et les autorités supérieures de Tsahal. Une dure confrontation eut lieu entre Lavon, ceux qui le soutenaient, et les officiers supérieurs. Dans tout cela la question : « Qui a donné l’ordre ? » demeurait. Gibli a-t-il reçu l’ordre de Lavon, ou a-t-il agi de lui-même ?

Lavon s’adressa au chef du Gouvernement Moshé Sharett et demanda une commission d’enquête indépendante pour répondre à cette question. Le président du tribunal de grande instance, Itzhak Olshan, ainsi que le tout premier chef d’état major Yaakov Dori, furent nommés à la tête de la commission. Elle commença son travail le 2 janvier 1955 et après dix jours publia cette réponse : « Nous regrettons, il n’est pas en notre pouvoir de répondre aux questions qui nous ont été posées ». La commission ne fut pas convaincue que le chef des renseignements militaires (Aman) n’avait pas reçu l’ordre du ministre de la Défense, et n’était pas sûre que le ministre de la Défense eût donné l’ordre.

Pas besoin de dire que cette commission Olshan-Dori ne calma pas l’ouragan, bien au contraire. Les chefs du parti Mapaï, alors au pouvoir, commencèrent à douter des résultats des élections qui devaient avoir lieu fin 1955. Le 1er février, Moshé Sharett, Lévi Eshkol, Golda Meïr et Zalman Shazar descendirent à Sede Boker pour consulter « le vieux », David Ben Gourion, qui avait quitté le gouvernement un peu plus d’un an auparavant.

Le lendemain, Lavon démissionna, disant que ses partisans ne le croyaient pas. En échange, il exigeait de mettre hors de cause les chefs de la Sécurité, fidèles à Ben Gourion (et à leur tête Shimon Pérès) comme étant hors de cette « sale affaire ». Le 22 février Sharett reçut la démission de Lavon, et nomma immédiatement Ben Gourion ministre de la Défense de son gouvernement. En compensation, peu de temps après, Lavon fut nommé président de la centrale syndicale la Histadrout, institution très importante à l’époque.

L’ouragan politique diminua en surface, mais les autorités supérieures de Tsahal durent donner leur avis sur tous les bruits qui couraient sur l’affaire, sur les faux documents et sur ceux qui avaient été détruits, sur les faux témoignages et sur le départ de personnes à l’étranger pour les réduire au silence. De plus, on commença à douter du chef de l’unité 131, Avri Elad (le troisième homme). Etait-il un agent double au service de l’Egypte ? Il fut jugé en juillet 1959, et après un an de procès, il fut mis en prison pour une longue période. Le jugement d’Elad, en somme, ouvrait le début d’une seconde affaire Lavon.

Le Mapaï se releva de la « sale affaire », après la démission de Lavon, et aux élections de 1959, ce fut la plus grande victoire de son histoire avec 47 mandats. Mais en même temps, Ben Gourion commença à mettre des personnalités plus jeunes à la direction du parti, comme Dayan et Pérès, et éveilla un grand mécontentement chez les anciens qui sentaient que « le vieux » essayait de les exclure. Lavon, qui attendait patiemment toutes ces années, comprit que son heure était enfin venue.
A ce moment là, Ben Gourion arriva à la conclusion qu’il était temps de vérifier les bruits qui couraient sur les faux témoignages, sur les destructions de certains documents touchant à « la sale affaire », et il nomma une commission d’enquête avec à sa tête le juge Haïm Cohen, assisté de deux officiers supérieurs. La commission confirma qu’il y avait bien eu des faux documents, mais ne fut pas convaincue que ceux-ci concernaient « la sale affaire ». Ainsi la seconde investigation judiciaire sur l’affaire ne donna pas de conclusion décisive. Là-dessus, Binyamin Gibli fut renvoyé de Tsahal.

Alors Lavon dut agir. Il se présenta devant la commission parlementaire des Affaires étrangères et de la Défense de la Knesset pendant 4 sessions consécutives en octobre 1960, et accusa les responsables du système sécuritaire. Mais surtout, Lavon prétendit que « la sale affaire » et ses prolongements étaient le résultat de clans qui s’étaient formés contre sa personne, et aujourd’hui il exigeait la réhabilitation de son nom. Des détails de la discussion passèrent aux mains de la presse et les batailles dans les medias furent pires que jamais. Lavon donna aux chefs du Mapaï les munitions dont ils avaient besoin pour combattre Ben Gourion – façon de faire incompréhensible jusqu’alors.

Il était clair que les accusations de Lavon exigeaient un examen plus approfondi que ceux des commissions Olshan-Dori et Cohen, mais alors une âpre discussion s’éleva : sur quoi porterait cette commission ? Ben Gourion décida que la vérification des faits était l’affaire d’une commission juridique, alors que les chefs du Mapaï et les ministres qui n’étaient pas du Mapaï préférèrent une commission nationale. Pour son malheur, Ben Gourion ne savait pas que la loi était pour lui en tant que Premier ministre, pour créer une commission d’enquête gouvernementale. Le 31 octobre 1960, le gouvernement décida, sans que Ben Gourion soit au courant, de créer une commission ministérielle avec à sa tête le ministre de la Justice Pinhas Rosen (chef du parti progressiste) ainsi que six autres ministres dont deux seulement étaient du Mapaï.

Cette commission des sept donna ses résultats le 21 décembre 1960, et quelques jours après, le gouvernement l’approuva, avec quelques modifications. La conclusion la plus importante était : « Nous affirmons que Lavon n’a pas donné l’ordre sur lequel s’est appuyé l’officier supérieur (Gibli) » et précisa : « ‘la sale affaire’ a eu lieu sans qu’il soit au courant ». Ben Gourion qui, dès le début, pensait qu’une commission gouvernementale ne pouvait juger une affaire judiciaire, menaça de démissionner, mais il en repoussa l’idée car à ce moment là les rapports d’Israël avec les USA étaient tendus à cause de la centrale atomique de Dimona. Finalement il prit un congé prolongé. Golda Meïr prit alors la tête des « anciens du Mapaï » qui étaient contre Ben Gourion et menaça de démissionner si ce dernier n’acceptait pas les conclusions de la commission des sept.

Le 31 janvier 1961, après que la tension avec les USA se fut dissipée, Ben Gourion démissionna. La crise au Mapaï était à son comble et Lévi Eshkol arriva à la conclusion que le parti ne pouvait plus être sauvé, sauf si on renvoyait Lavon de son poste de président de la Histadrout. Ce serait, pensait-il, la seule façon d’obtenir la réconciliation au sein des responsables du parti. Lavon fut éloigné définitivement du système politique et Ben Gourion revint à la tête du gouvernement, mais son autorité en souffrit beaucoup. Ce fut le début de son déclin qui amena sa démission finale de la tête du gouvernement deux ans plus tard, et de son départ du Mapaï.

Alors que tout cela se passait en Israël, la plupart des membres de l’unité 131 étaient en prison en Egypte. De nombreuses personnes prétendirent que plusieurs occasions de les faire libérer n’avaient pas été saisies (principalement après la guerre du Sinaï en 1957). C’est seulement en 1968 que la plupart furent relâchés par l’Egypte lors d’un échange de prisonniers. Les condamnés du Caire, Marcel Ninio, Robert Dassa, Meïr Zaafran, Victor Levy (décédé), Philippe Natanzon (décédé) Méïr Max Binet (décédé) Meïr Miouhas (décédé), furent les victimes.

C’est seulement 50 ans après la montée à l’échafaud du docteur Moshé Marzak et de l’ingénieur Shmuel Azar, qu’eut lieu, dans la résidence des présidents d’Israël en mars 2005, une cérémonie de reconnaissance envers ces condamnés du Caire et leurs familles, en présence des chefs de Tsahal et de la Défense. Le président Moshe Katsav et le chef d’Etat Major Moshe Ayalon leur décernèrent la médaille du mérite au nom de l’Etat.

Le président israélien s’adressa aux condamnés du Caire et aux familles en ces termes : « Nous savons que vous gardez en vous la colère pour le mauvais règlement de cette affaire, pour les divisions entre le gouvernement et les chefs de la Défense, et malgré cela vous êtes restés des hommes responsables vis-à-vis du gouvernement, fidèles à la souveraineté juive, et jamais vous n’avez injurié l’Etat ». Il a ajouté : « Nous payons aujourd’hui une partie de la dette à ceux qui sont restés avec nous et à ceux qui ont disparu. Je me réjouis de vous décerner, après tant d’années, au nom de l’Etat d’Israël – à vous et à vos proches qui ne sont pas avec nous aujourd’hui – la médaille du mérite et les remerciements pour avoir agi fidèlement envers le peuple et l’Etat dans le pays ennemi, qui a été le premier à signer un traité de paix avec Israël ».

Le président reconnut officiellement le fait que « les membres de l’unité avaient été envoyés pour une mission militaire secrète, sur l’ordre du gouvernement d’Israël. Certains payèrent de leur vie et d’autres de leur liberté pendant de longues années, après avoir subi des tortures », et il avoua que l’accident survenu au cours de l’opération avait déployé un lourd nuage dans le ciel de l’Etat d’Israël et fait naître autour de lui une grande confusion. L’Etat d’Israël a été entraîné dans une des plus importantes crises de son histoire.

Dernier rebondissement : Dayan a-t-il donné l’ordre ?

L’affaire a rebondi récemment, lorsque deux mois après le décès de Binyamin Gibli, le quotidien Maariv a publié un long article après la parution d’un livre autobiographique de Gibli. « Je suis furieux contre Dayan, je ne peux pas lui pardonner de m’avoir enfoncé. Il m’a trahi et je l’ai couvert ! »

Après 51 ans de silence et de secret, l’autobiographie ressort avec les mêmes accusations de Gibli : Dayan savait, et non seulement il savait mais il avait participé à l’ordre d’envoyer les jeunes exécuter les actions en Egypte; il s’est esquivé en faussant les dates. Dans la première autobiographie écrite par Arié Krishak, 10 ans auparavant, Gibli avait déjà écrit la même chose.

Le chef d’état-major Moshé Dayan avait alors prétendu ne rien savoir, car il était à l’étranger.
Depuis, on a essayé plusieurs fois de lier Dayan à l’affaire. On a dit que Dayan avait fait cela pour faire tomber le gouvernement de Moshé Sharett et faire revenir David Ben Gourion à Jérusalem. C’est de fait ce qui s’est produit. Mais ces essais ont échoué, surtout à cause du silence de Gibli, le chef des renseignements militaires. Gibli couvrait Dayan, et Dayan, en réponse, a conseillé à Ben Gourion de le renvoyer de l’armée.

En 1992, à la suite du livre de Shabtaï Tevet « Kablan » (Une peau de banane), qui accusait Gibli d’avoir donné l’ordre et de s’être disculpé, Gibli décida d’écrire un livre. Il s’adressa à plusieurs auteurs et choisit Arié Krishak. Celui-ci raconte : « Je lui ai dit, qu’avec un tel livre il fallait tout dévoiler ». Gibli m’a répondu : « J’y suis prêt moralement, je baigne dedans depuis un bon moment ». Mais finalement le livre n’a pas paru. « Il y avait des choses » dit Krishak, « qui n’ont pas passé la censure de la famille Gibli ».

En 2002, l’idée d’écrire un livre a de nouveau réapparu, et cette fois le biographe était Boaz Appelbaum, l’ancien chef de bureau de Shimon Pérès. Selon Boaz, Gibli s’est tourné vers lui et lui a dit en parlant de Dayan : « Il m’a vraiment trahi. Et moi, je l’ai couvert ! ».


 

Economie

Les licenciements se multiplient

Rédaction

 

Depuis plusieurs jours, la presse israélienne se fait l’écho de licenciements, de fermetures de petites et moyennes entreprises et de suppressions de postes dans certains secteurs. La crise financière mondiale est l’une des causes avancée par les médias mais elle n’est pas la seule.

 

Les sociétés de travail intérimaire sont les plus touchées ainsi que les start-up. Dans le secteur du high-tech, la situation n’est pas franchement meilleure. Selon le journal économique The Marker, 1200 salariés des sociétés du high-tech ont été licenciés depuis le mois d’août dernier.
L’une des grandes sociétés d’intérim, « Mishmar », a licencié 700 personnes. Dans ce cas précis, la crise économique semble avoir bon dos. Le plan de restructuration était nécessaire depuis longtemps. Déjà en août 2008, « Mishmar » avait licencié 800 employés.
La société Kodak (à Petah Tikva) a annoncé le licenciement de 150 personnes et « Netafim » le licenciement également de 150 employés.

Le journal Maariv donne une carte géographique plus ou moins exhaustive des zones les plus touchées par les licenciements. La région centre (Tel Aviv), où il y a le plus de sociétés High-tech, est la plus frappée, puis en second c’est la région de Beershéva.

L’Union des Industriels Israéliens estime qu’au moins un quart des industries et des sociétés qui produisent pour l’étranger sera touché. La diminution des exportations se fait déjà sentir. Au bas mot, on devrait compter près de 40 000 nouveaux chômeurs l’an prochain.

 


Dossier

On parle russe en Israël

Antoinette Brémond

 


Plus d’un million d’Israéliens parlent russe, soit 20% de la population. Une immigration d’une ampleur jamais connue jusque là. On les reconnaît à leur langue, le russe, qui s’est implantée dans le pays, parlée par une minorité de la population. Minorité que les Israéliens appellent les Russes et qui fait des autres, en quelque sorte, des illettrés, ne pouvant lire ni leur presse, ni les enseignes des magasins et ne comprenant rien à leurs émissions télévisées. D’où l’ouverture d’Oulpans pour apprendre le russe !

 

Remonter une partie de la rue Agrippas près du marché Mahané Yehouda à Jérusalem, c’est découvrir un service internet russe, une librairie russe, deux bibliothèques de livres russes, un photographe, un cordonnier, deux self-services où tous les produits portent des étiquettes en russe, une grande surface non casher avec un étalage impressionnant de bouteilles, un magasin de vaisselles… Partout on parle russe, même si les Israéliens (c’est ainsi que les Russes nous désignent) peuvent entrer et acheter en hébreu. Il faudrait encore parler des employés de la pharmacie du marché et du kiosque de journaux où la presse russe occupe une place importante.

Téléphoner à la mairie pour avoir des renseignements et devoir préciser en quelle langue on désire converser : en hébreu, en russe ou en anglais. Découvrir dans tous les services administratifs des fonctionnaires parlant cet hébreu chantant, ce « parlé russe » permettant aux Russes ne sachant pas ou peu l’hébreu de pouvoir partout trouver un frère, une sœur qui les comprendra. Dans les hôpitaux, dans les autobus, dans les rues, sur la plage, partout, (sans compter les hôtels et leurs touristes russes de plus en plus nombreux) et ce n’est pas rare de se faire accoster : « Tu parles russe ? » ! On parle d’une petite Russie en Israël.

 

Les fondateurs d’Israël sont des Russes   

 

 Ne les prenons pas pour des envahisseurs ou pour des usurpateurs. Ils sont chez eux. Rappelons-nous que les Juifs russes comptent de nombreux fondateurs de ce pays ! Fondateurs aussi de l’hébreu moderne, avec Eliézer Ben Yehouda arrivé de Lituanie en  1881 et interdisant à sa femme de parler russe à son premier-né… seulement l’hébreu.

A la suite des pogroms de Russie de 1881à 1882, près de 25 000 Juifs de Russie, de Roumanie,  arrivent en Israël. C’est la première immigration (alya). Puis, entre 1904 et 1914, à la suite du pogrom de la Russie tsariste et antisémite, 35 000 Juifs de Russie et de Pologne. C’est la deuxième alya… Enfin, de 1914 à 1923, quelques 35 000 Juifs de Russie et de Pologne immigrent en Israël. La troisième alya.

 

Il faudrait parler ici de David Ben Gourion, né en Russie tsariste (Pologne), venu en Palestine en 1906. Et de tant de ces « Amants de Sion » qui, d’Ukraine, de Biélorussie, de Galicie, sont venus en pionniers. Certains ont fondé des kibboutz, comme Joseph Baratz, né en Ukraine, le Kibboutz Degania. D’autres rejoignent le mouvement ouvrier créant la Histadrout, la Hagana, comme Dov Hoz. C’est encore eux qui vont créer les structures du nouvel Etat, les banques, les caisses maladies, les dispensaires, les premiers collèges hébraïques, le Technion, au début du siècle. Citons Katznelson Berl, de Biélorussie, qui va jouer un rôle important dans la création de ces instituts, en particulier de la banque Hapoalim et du quotidien Davar. Mais il faudrait aussi parler d’écrivains comme Bialik Haïm Nahman (1924), des poètes comme Haméri Avigdor, ou Rahel, qui composera très vite en hébreu (1909), de Ahazonovich Yosef, écrivain (1900), de peintres et de musiciens. C’est aussi un Russe, Imber Naftali Hetz, qui a composé l’hymne national, la Hatikva, On ne peut pas ne pas mentionner le théoricien du sionisme culturel, Ahad Haam (1922), et Eliezer Kaplan, de Russie (1920) trésorier de l’Agence juive, puis ministre des Finances 1948-1950. Sans oublier Golda Meir, venue en 1912 d’Ukraine, Premier ministre de 1969 à1974.

 

Ces premiers immigrants arrivant en Palestine sont porteurs du rêve sioniste. Ils arrivent avec leur culture et mentalité russes, leurs livres russes, leurs jurons russes. L’écrivain Meir Shalev en parle dans son  Roman russe : « La tradition russe a laissé des traces visibles sur la culture israélienne. Les racines de la littérature israélienne plongent dans la littérature russe… même si, plus tard, la littérature israélienne et la littérature russe ont divergé… à cause de l’absence de traducteurs ! ». Beaucoup de chants folkloriques sont empreints de mélodies russes.

 

Une immigration massive

 

L’URSS avait fermé ses portes à l’émigration. En 1970, une semi ouverture permet à 170 000 Juifs d’immigrer en Israël, laissant derrière eux les Refuzniks, ceux à qui l’on refusait tout visa de sortie et même jusqu’au droit d’apprendre l’hébreu. De ces « prisonniers de Sion », les Israéliens connaissaient Natan Sharansky et Ida Nudel.

 

En 1986, une enseignante d’oulpan nous annonça une bonne nouvelle : 1000 Juifs russes allaient pouvoir immigrer ! (fin du régime de Gorbatchev). « Mais comment Israël pouvait-il intégrer un nombre si élevé d’immigrants » pensions-nous. Or, dès l’ouverture du rideau de fer, c’est par centaines de milliers que les Juifs de l’ex-Union Soviétique arriveront en Israël.

De 1989 à 2005, ils sont environ 1 200 000 à avoir immigré de Russie, d’Ukraine et des Républiques de l’ex-URSS. Du jamais vu de par son nombre et sa qualité. En 1980 : 12 000 ; en 1990 : 185 000 ; en 1991 : 150 000. Puis, de 1992 à 1995 : 65 000 par an. Entre 1996 et 1997 : 60 000 par an. Ces chiffres continueront à diminuer. En 2005, on ne compte plus que 12 000 nouveaux immigrants russes et en 2007 il n'y en aura que 6700. Notons l’activité incessante menée par l’Agence juive et Nativ dans ces pays russophones dès 1990 pour encourager et organiser l’immigration vers Israël.

 

Ils sont trop nombreux pour suivre la filière habituelle d’intégration qui consistait à recevoir les nouveaux venus dans des centres d’absorption où, pendant six mois, ils étaient totalement pris en charge par le gouvernement, et se familiarisaient avec la réalité israélienne et la langue. L’Etat va donc leur donner un « panier d’intégration », une certaine somme d’argent leur permettant de trouver un logement, de couvrir leurs dépenses, de suivre des cours d’hébreu, de trouver un travail et des écoles adaptées pour leurs enfants. La majorité d’entre eux va s’installer dans les villes et les quartiers où vivent déjà des Russes. Là, ils trouveront de nombreuses associations russes pour les aider. Ils resteront donc en dehors de toute pression de la société israélienne pour les intégrer dans le pays à tous les niveaux.

 

Ces Russes vont donc s’installer en priorité dans les villes. De 1992 à 1995, cette population a doublé à Ashdod, et a augmenté de 70% à Beersheva. Dans certaines petites localités comme Mitzpe Ramon, ils représentent la moitié de la population. C’est intéressant de noter que ceux de Moscou et de St Pétersbourg sont nombreux à Jérusalem, ceux d’Asie Centrale, à Tel Aviv, ceux de Khurkov à Haïfa. Plusieurs municipalités ont des maires russes.  A Ashdod, si le maire est d’origine marocaine, son adjoint est russe. Dans ses quartiers marocains, l’ambiance est méditerranéenne, dans les quartiers russes, c’est l’Europe des petites familles.

 

Ce repli communautaire a été parfois favorisé par la réaction des Israéliens : l’enthousiasme du début a peu à peu disparu pour faire place à un « ras-le-bol », trop, c’est trop ! « Ils vont prendre notre travail, nos appartements, le chômage va augmenter, ils sont partout. » On commence aussi à parler de la mafia russe, de la prostitution comme étant le résultat de cette immigration. En 1994, 25% des Israéliens ne souhaitent pas un voisinage direct avec les Russes, ces gens différents en tout. Et certains de ces Russes de dire :   «  En Russie, on nous traitait de Juifs, ici on nous traite de Russes, on a l’impression d’être des citoyens de seconde zone ». C’est parfois lorsqu’un de leurs soldats a été tué qu’ils se sentent faisant vraiment partie de la population israélienne, à part entière, et reconnus comme tels. « Depuis que mon fils David Gordokal, nouvel immigrant d’Ukraine, a été tué à Ramallah en septembre 2004, je sens qu’Israël est vraiment devenu mon pays », dit Olga, habitante de Nazareth Illit.

 

Mais qui sont ils ?

 

La majorité de ces nouveaux immigrants ne sont pas, comme les fondateurs, animés d’un idéal sioniste. Ils sont laïques, leur judaïté n’étant pas pour eux une religion, mais une ethnie. Tous ont pu bénéficier de la «  Loi du Retour » devenant ainsi citoyens d’Israël, pour autant qu’ils pouvaient prouver avoir un grand parent juif. Mais pour le rabbinat, un quart de ces Russes ne sont pas juifs selon la halakha, puisque leur mère n’est pas juive. D’année en année, la proportion de ceux qui sont considérés comme  non juifs a augmenté, atteignant en 2005, les 55% de la population russe. Pour se mettre en règle, plusieurs milliers de ces non juifs passent par la conversion. Cimentée par une même langue, une même culture, cette communauté n’a pas vraiment de problèmes avec ses « non juifs ». En effet, elle se définit, en général, comme non religieuse, mangeant comme en Russie,   ne fêtant que les fêtes nationales et familiales, Noël et Pâques selon la coutume des chrétiens orthodoxes, et Pessah.

 

Pourtant, si dans un premier temps, ces nouveaux immigrants sont apparus plus russes que juifs, peu à peu, au fil des ans, et suivant la trajectoire de chacun, certains vont retrouver leur judaïté. Citons à ce propos cette conférence organisée en octobre 2008 à Ashkelon par le Limoud FSU (organisme d’étude pour les citoyens de l’Ex URSS) à l’intention des nouveaux immigrants russophones. 1600 Russes étaient là, étudiant pendant deux jours les textes sacrés, la culture et l’histoire juives. Cette communauté désire en savoir maintenant un peu plus sur son identité et le pourquoi de sa venue en Israël. Installés, ils veulent savoir qui ils sont. Ces dernières années, des groupes d’étude de textes juifs se font de plus en plus nombreux au sein de cette communauté russe. Il est curieux de constater que cette ouverture vers leur judaïté vient essentiellement de la Russie elle-même où les Juifs y vivant librement sont désireux de retrouver leurs racines, leur religion, leur histoire.

 

Leur place dans le pays

 

Cette communauté très talentueuse, liée par sa langue et sa culture, ne s’est pas assimilée à la société israélienne suivant le schéma préconisé par les premières immigrations. Elle n’a pas renoncé à son identité d’origine véhiculée par sa langue et sa culture. Elle n’a pas non plus voulu se marginaliser, ni se séparer de la société qui l’accueillait. Les Russes veulent s’intégrer, en tant que tels dans leur nouveau pays, mettre leur ethnie, leur identité, leurs aspirations propres au service du pays qui les accueille, l’influencer de l’intérieur, désirant que ce pays tienne compte d’eux, tels qu’ils sont.

La puissance de la langue russe, ciment de leur identité, a freiné pendant les premières années l’apprentissage de l’hébreu. Dans certaines épreuves de diplômes d’Etat, l’utilisation du russe a été acceptée. Il y a certains cours en russe, un cours de guide par exemple. Cette langue était au début comme une planche de salut pour ces déracinés, leur permettant de tenir. Actuellement, les jeunes préfèrent l’hébreu au russe… être comme les autres. Signalons qu’actuellement, il existe des oulpans pour apprendre le russe.

 

Une communauté de haut niveau

 

En 1998 on comptait 78 000 ingénieurs, scientifiques et architectes, 16 000 médecins et dentistes, 18 000 infirmières, 36 000 enseignants, 16 000 artistes, musiciens, écrivains, poètes. La moitié des adultes arrivés avait fait des études supérieures, contre 28% en Israël. D’où une grande exigence au niveau intellectuel. Mais les professions de ces nouveaux immigrants ne répondaient pas toujours aux besoins du marché du travail israélien. Par exemple, les médecins israéliens étaient déjà 12 000 et semblaient répondre à la demande. Il leur a fallu  souvent changer de profession. On cite le cas du professeur d’université devenu plongeur dans un restaurant, du médecin trouvant sa place comme dessinateur humoristique, d’un musicien  et d’un comédien se retrouvant travailler dans un supermarché. En 2000, 35% des universitaires travaillaient dans leur profession. Le niveau des chômeurs chez les Russes atteignait 13% alors que la moyenne israélienne était de 9%.

Malgré cela, cette communauté s’est intégrée relativement rapidement, trouvant sa place dans le monde du travail, de la culture et de la politique, même s’ils sont encore souvent moins payés que les autres. Actuellement plus de la moitié des Russes sont propriétaires de leur logement.

 

Leur rôle dans la technologie

 

Que faire avec ces scientifiques très spécialisés qui, étant habitués au système hiérarchisé, ont souvent de la peine à créer de façon autonome ? Sur les 12 000 chercheurs, les trois quarts ont pu trouver leur place dans le domaine de la Recherche ou de l’Enseignement. Mis à la disposition des universités et des centres de recherche pendant une période de trois ans, ils reçoivent un  salaire assez bas, payé en partie par l’Etat.

Un système de pépinières technologiques a été mis en place en 1990 pour ces « cerveaux russes », sociétés financées à 80% par l’Etat, permettant de transformer une idée abstraite n’existant que sur le papier en un produit commercialisable et exportable, les Russes scientifiques n’ayant pas toujours ce don de commercialiser leurs découvertes. Ceux-ci représentent , en particulier en mathématique fondamentale et appliquée, en physique théorique, en géologie et électronique, un apport considérable aussi bien au niveau de l’enseignement universitaire que de la réalisation de certains projets. Un apport à bon prix, puisqu’ils sont arrivés en Israël « tout formés » et que leur salaire reste léger. Grâce à ce système de pépinières où la majorité des recherches est menée par des Russes, Israël est aujourd’hui l’un des pays à avoir le plus grand nombre de projets en haute technologie.

 

La culture et le sport

 

La culture avait déjà en URSS une place très importante. Dans ce régime soviétique étouffant, elle n’était pas un luxe, mais de l’oxygène vital : les livres, la musique, l’art, les amis.

Il faudrait pouvoir parler de la musique russe et des très nombreux orchestres qui se sont créés en Israël. Mais aussi du théâtre où la spécificité russe s’harmonise avec la réalité du quotidien israélien. La troupe Gesher, fondée en 1991, en est un bon exemple. Dés le début les acteurs parlaient en hébreu, langue qui leur était encore étrangère. La troupe Gesher, très renommée aujourd’hui, porte bien son nom, le pont : « Être un pont entre notre nouveau et notre ancien pays. » Darmidov, 43 ans, l’un de ses acteurs, est clair : « Israël nous a changés, mais nous avons changé Israël. Le pays est devenu plus européen et moins religieux. »

Les bibliothèques se multiplient, les activités culturelles, les magazines, les instituts. Ces activités culturelles sont souvent en russe, des artistes viennent de Russie en tournée en Israël. Les écrivains continuent à écrire en russe, même si la plupart sont bilingues. Peu à peu ces nouveaux citoyens impriment leur marque dans la vie culturelle du pays. En Israël, les Russes désirent préserver leur culture qu’ils estiment supérieure à celle de leur pays d’accueil et la transmettre à leurs enfants. Des écoles russes privées de haut niveau, des cours du soir, sont organisés pour les jeunes. Nombreux sont les étudiants russes dans les universités du pays.

« Cette immigration va-t-elle donner naissance aux élites israéliennes de demain ? » se demande Danielle Storpez Pereg, sociologue.

Le sport est une autre valeur russe et soviétique permettant aux nouveaux immigrants russes de s’imposer dans plusieurs disciplines : natation, patinage, tennis, basket-ball, football, hand-ball. Ils sont à l’origine de cet essor populaire du sport en Israël de ces dix dernières années. Les salles de gym et les piscines se multiplient. Dans les compétitions sportives, les immigrants d’ex-Union soviétiques se sont particulièrement distingués dans l’athlétisme. Citons le perchiste, Konstantin Sermyhov, record israélien de saut, 5,76m et dans les sports nautiques, Anna Gostameisky, médaille d’or en nage libre (100m).

 

Les médias

 

Dès leur arrivée, une presse russe importante est apparue. Dans les années 91-92, elle dépassait la presse israélienne avec des dizaines de journaux en russe et un tirage de un million d’exemplaires par semaine. Une chaîne de TV et des stations de radio émettent en russe. Il faut dire qu’en 1993, seuls 14% lisent en hébreu. (ces journaux ne sont pas traduits en hébreu contrairement au journal mensuel éthiopien). Aux quatre quotidiens, Nasha

 Strana(notre pays),travailliste ; Vrenia,(le temps) ; Vesti,(nouvelles) et Novasti Nodeli,(nouvelles de la semaine), Likoud s’ajoutent une dizaine d’hebdomadaires, et, dans certaines municipalités, des publications locales. Ils se veulent être des journaux israéliens en russe et vont jouer un rôle important dans l’intégration de cette communauté. Actuellement le tirage des journaux a beaucoup diminué ; de plus en plus de Russes lisent la presse en hébreu.

 

La politique

 

Le million de Russes va jouer fortement sur la carte politique du pays. Les deux grands partis vont tout faire pour les attirer. Aux élections législatives du 23 juin 1992, ils sont 260 000 votants, soit 7,5% de l’électorat. Si, au début, les voix russes se portent vers la droite israélienne qui leur a ouvert les portes (1991), le Likoud les déçoit, ne répondant pas à leurs besoins. La question politique de rendre ou de ne pas rendre les Territoires passe après leur intégration.

En 92, ils votent à 60% travaillistes. Ce parti semble avoir mieux compris leur préoccupation majeure : leur intégration économique et sociale. Pendant la campagne électorale, des émissions télévisées travaillistes sont sous titrées en russe. Shimon Pérès dit quelques mots en cette langue et Itzhak Rabin rappelle les origines russes de ses parents. La gauche rejoint le désir des Russes de séparer la religion de l’Etat. Sans le vouloir, les Russes ont souvent été les arbitres de la politique du pays. Par exemple leur soutien aux travaillistes a facilité les accords d’Oslo.

Quatre ans plus tard, les Russes décident de constituer leur propre parti. A ce moment là, avec 500 000 électeurs, ils représentent 12,5% de l’électorat. Le 29 mai 1996, ils créent Israël Ba-Alya, dirigé par Natan Sharansky, qui récolte 1/3 de l’électorat russe, soit 7 sièges et ce parti participera au gouvernement avec deux ministères. Israël Ba-Alya doit son succès à son leader, un ancien refuznik. Son parti est ethnique, un seul élu n’est pas russe, mais parle russe.  Il rassemble l’aile droite et l’aile gauche de l’électorat russe. Même si ce parti soutient Netanyahou, affirmant que le peuple juif possède un droit inaliénable sur la terre d’Israël, très peu de Russes se sont installés dans les Territoires : 7 000 dans les différentes implantations de Judée Samarie. Le parti Israël Ba-Alya disparaîtra en rejoignant le Likoud en 2003.

Il existe un autre parti politique créé par Avigdor Liberman en 1999 regroupant les ressortissants russes qui soutiennent une ligne dure dans la négociation avec l’Autorité palestinienne. En 2006 il obtient 11 sièges à la Knesset. Avigdor Liberman devient ministre des affaires stratégiques.

 Pour les élections du 28 mars 2006, la communauté russe représente de 18 à 20 sièges sur un total de 120 sièges. La tendance politique actuelle est beaucoup moins communautariste, les candidats russes se répartissant dans les divers partis. Par exemple, Kadima présentait six candidats russophones.

 

L’émigration russe

 

En 2006, il y a plus de Russes qui quittent Israël que d’immigrants. Ce qui pose un sérieux problème à l’Etat d’Israël. Après des années de vie difficile, de guerres et des bruits de guerre, il semble que le moral s’use, d’autant plus que la plupart n’ont pas d’idéal sioniste. « Ma  meilleure amie a perdu son copain à l’attentat du Delphinarium. » « Une roquette katioucha est tombée dans ma rue pendant la deuxième guerre du Liban. »

Ils sont actuellement des milliers à émigrer vers le Canada. Et ceux-ci y attirent leur famille restée en Israël. Le Canada… c’est comme une copie occidentale de la Russie, même climat, même niveau d’éducation. Le Canada les attend ! 20 journaux et magazines en russe, des chaînes de TV russes, locales ou nationales, et des écoles bilingues.

 Un russophone sur deux a passé par Israël avant d’émigrer au Canada. La communauté russe au Canada représente déjà plusieurs centaines de milliers d’habitants dont 200 000 à Toronto.

 

D’autres partent pour l’Allemagne où ils retrouvent une communauté juive russophone venue directement de la Russie et des Juifs israéliens ayant émigré en Allemagne. (4000 en 2006). La communauté juive en  Allemagne a triplé de volume ces dernières années. « Nous étions 1200 à Düsseldorf, nous sommes 15 000 actuellement. »

Enfin certains retournent en Russie. Il y a ceux qui, grâce aux nouvelles relations  entre Israël et la Russie, partagent leur activité professionnelle entre ces deux pays. Les compagnies d’aviation organisent des vols spéciaux pour la Russie.

Moscou accueille depuis quelques années des tournées de théâtre israélien, des groupes musicaux, des festivals de cinéma israélien. Les Russes découvrent la peinture et la photographie israéliennes. Des festivals culinaires et des conférences sur le judaïsme sont très suivis.

«  Les Russes nous reviennent avec les fruits dont les graines avaient été semées dans le sol russe mais qui ont mûri sur une autre terre. Ils nous reviennent enrichis de la culture du Proche Orient ». (Marianna Belmkaïa)

 

Ces départs ne sont-ils que négatifs ? L’avenir le dira, mais déjà ce mouvement ouvre Israël à des relations internationales de  grande envergure passant par ce réseau des Russes israéliens présents à l’étranger.


 

 

Dossier

Le kibboutz retrouve une nouvelle jeunesse

Suzanne Millet

 


En 2009 on fêtera le centenaire du mouvement des kibboutz. En effet, il y a 100 ans, un petit groupe d’émigrants d’Europe de l’Est (deuxième alya 1904-1914), dix jeunes hommes et deux jeunes femmes s’installent sur des terres au bord du lac de Tibériade, près du village arabe de Oum Jumi. Ils se lancent dans l’exploitation agricole et fondent le premier kvoutza  (groupe) communautaire qui deviendra bientôt le kibboutz de Degania. Il n’y a pas vraiment de grands desseins, ni d’idéalisme dans cette décision d’établir une communauté, cette manière de vivre est plutôt imposée aux jeunes pionniers par les circonstances : travail ardu et conditions difficiles.

L’idéologie du kibboutz sera formulée par les pionniers de la troisième alya (1919-1923). Animés d’idéaux révolutionnaires marxistes, ces émigrants de Russie considèrent que : « Chaque kibboutz fait partie d’un vaste mouvement de retour à la terre, destiné à favoriser l’accomplissement d’une révolution nationale à travers l’émigration sioniste et le peuplement de la Palestine mandataire ». Il est vrai que le kibboutz a joué un rôle important dans le renouveau de l’indépendance et du peuplement de la Palestine. Les principes éthiques du kibboutz se fondent sur les idéaux suivants : coopération, égalité, entraide, peuplement, travail et instauration d’une société libre, démocratique et laïque.

 

Les premières années qui suivent la création de l’Etat d’Israël se caractérisent par une croissance accélérée sur le plan démographique et sur le plan économique. Le niveau de vie des kibboutz s’améliore à un rythme qui dépasse  celui de la société israélienne. En 1980 la population des kibboutz atteint 120 000 à 130 000 membres. Dans les années 30 à 50 le kibboutz incarnait le modèle du nouveau Juif qui cultivait la terre et combattait l’ennemi, selon le sionisme socialiste. Un nombre impressionnant d’hommes politiques et de chefs militaires venait du mouvement des kibboutz, constituant l’élite du pays.

 

La crise des années 80-90, avec une inflation galopante jusqu’à 450% et des taux d’intérêts exorbitants, provoqua une récession quasi fatale pour les usines des kibboutz qui avaient emprunté au-dessus de leurs moyens pour créer des industries. Ce sont le gouvernement et ses banques, les fédérations du mouvement qui ont aidé à restructurer les kibboutz ou même à en annuler les dettes, les sauvant du naufrage. Le gouvernement ne pouvait laisser les usines des kibboutz faire faillite et abandonner leurs 130 000 membres. Mais les conséquences furent catastrophiques. Il fallut vendre des terres arables et couper dans les aides au budget de fonctionnement. Le pays se détournait du socialisme pour entrer de plein pied dans le capitalisme. Les kibboutz ne pouvaient plus attendre l’aide du gouvernement. Ils devaient réorganiser leur économie : baisse du secteur agricole et développement des industries ouvertes à l’exportation, du secteur de hautes technologies, du tourisme etc .

 

Parallèlement, des changements internes furent effectués. Il fallait abandonner les anciennes convictions idéologiques en ce qui concerne l’égalité entre les membres, et trois quarts des kibboutz sont passés au système de salaires différentiels selon le travail fourni par les membres. Ceux-ci  reconnaissent que, en fait, ce système est plus égalitaire que le précédent où la façade du pur égalitarisme cachait en fait des inégalités. La situation, disent-ils, est plus claire, il y a moins de jalousie et de suspicion. Cette mutation progressive vers le capitalisme a sauvé les kibboutz.

 

Actuellement, il y a plus de 273 kibboutz, ce qui correspond à 100 000 membres et 20 000 résidents. Le revenu moyen d’un ménage au kibboutz est de 11 000 shekels par mois (soit 2000 euros), ce qui correspond à la moyenne nationale. Et si, entre 1985 et 2005, le kibboutz a perdu entre 30 000 et 50 000 membres, actuellement il connaît une augmentation de ses effectifs, augmentation due aux naissances, au retour d’anciens membres et à l’arrivée de nouveaux. Ces anciens membres sont en fait des jeunes qui sont partis du kibboutz pour l’armée et le tour du monde…  ne pensant plus revenir et qui parfois reviennent avec femme et enfants. En 2007, 1500 personnes sont arrivées, c’est la première fois depuis plus d’une génération que le kibboutz a enregistré plus d’arrivants que de partants.

 

A Ein Geddi, de jeunes adultes qui avaient quitté en masse ces vingt dernières années, commencent à revenir en tant que locataires et non comme membres à part entière. De même, à  Degania, des jeunes reviennent grâce au système de fonctionnement libéral. Aujourd’hui le kibboutz est devenu une option possible pour eux et pour leur jeune famille. Actuellement l’atmosphère y est moins contraignante, on ne regarde pas si tu travailles suffisamment. Une jeune mère dit : « Je ne suis plus obligée de mettre mon enfant de trois mois à la crèche et d’aller travailler, je peux rester à la maison. » « On peut économiser de l’argent », dit un autre.

 

Mais les kibboutz qui ont suivi le modèle capitaliste avec les salaires différentiels l’ont fait sous le mode scandinave. On paye chacun selon son travail et l’on exige plus d’impôts aux riches. Le salaire brut des membres est 15% plus élevé que le salaire moyen des Israéliens, mais, après le prélèvement des impôts, il revient au même. A Degania, par exemple, les membres qui sont avocats, professeurs, ingénieurs en haute technologie ont des salaires mensuels de 22 000 shekels, soit 15 000 shekels net. Ceux qui travaillent dans les champs et les usines du kibboutz touchent le salaire le plus bas : 6000 shekels, soit 5000 net. Un des membres dit : « Nous gagnons moins d’argent que les citadins mais notre niveau de vie est plus élevé ». Une jeune femme décrit l’environnement  paradisiaque de Degania. « De grandes étendues de pelouse, le lac de Tibériade tout près, la piscine, le terrain de basket, les activités culturelles, le zoo pour les enfants… » Il faut préciser qu’à part une trentaine de kibboutz au Néguev et en Galilée qui ont des difficultés financières, la grande majorité des kibboutz a un environnement rural appréciable et de bonnes structures : des écoles de haut niveau, des soins médicaux, des équipements sportifs, des activités culturelles ainsi que des soins pour les retraités et personnes âgées.

 

Près de 180 kibboutz, soit les deux tiers, sont passés au système des salaires différentiels. 90, parmi les plus riches, restent au système de salaires égaux, même s’ils sont capitalistes dans d’autres domaines. Il y a un slogan parmi les kibboutzniques qui dit : Plus vous avez de l’argent, plus vous pouvez vous permettre d’être socialistes. Ils ont transformé leurs membres en consommateurs avec des sommes égales pour la nourriture, les vêtements et les loisirs et  les individus gèrent leur propre budget, contrairement à l’ancien système. Ces kibboutz encouragent aussi leurs membres à travailler à l’extérieur dans des emplois plus lucratifs ou à créer de petites entreprises.

 

Le kibboutz de Shefayim au bord de la mer Méditerranée, au nord de Hertzlia, avec un millier de membres, est le symbole du nouveau kibboutz capitaliste avec des salaires égaux. Il se situe sur l’une des terres les plus coûteuses du pays. Il a un centre commercial très rentable, ouvert le shabbat, et il loue ses grands espaces à des magasins de grandes firmes. Il possède un parc aquatique, un hôtel avec 150 chambres qui affiche presque toujours complet. Ce kibboutz n’a plus rien d’un village, mais se présente plutôt comme un beau parc industriel avec un bon nombre de loisirs ouverts au public. Sous cette façade ultra capitaliste, Shefayim reste le fief du mouvement des kibboutz socialistes où tous les membres reçoivent le même salaire !   «  Mais, dit un ancien, on vit bien, chaque membre a sa voiture et part à l’étranger une fois par an ou tous les deux ans ». A l’époque des pionniers, les nouveaux mariés recevaient une maison de 27 m2, actuellement c’est une maison de 120m2 qui peut être agrandie jusqu’à 150 m2. Quand un membre se marie avec quelqu’un d’étranger, il s’installe systématiquement dans le kibboutz. Depuis 15 ans, dix nouveaux membres se sont mariés entre eux. La population de Shefayim est plus jeune, plus riche, plus matérialiste et voudrait prendre la direction des autres kibboutz à salaires différentiels. Les anciens, qui ont travaillé toute leur vie au kibboutz, s’y opposent, mais le changement est inévitable dans un proche avenir.

 

A Degania, comme dans d’autres kibboutz, la prochaine réforme envisagée est que les membres soient propriétaires de leur maison et qu’ils puissent même la léguer à leurs enfants.

A Ein Geddi, quelques membres vont jusqu’à dire que le kibboutz devrait devenir une implantation communautaire avec ses écoles de haut niveau, ses institutions, mais sans planification économique, ni impôts élevés. (Deux frères qui ont des postes très élevés et de bons salaires payent au kibboutz des charges fiscales de plus de 60% de leur salaire.)

 

S’il y a encore une trentaine de kibboutz qui ont de graves difficultés financières, l’ensemble des kibboutz vit bien. Daniel Davron, auteur du livre : Le kibboutz : réveil d’une utopie (2000), lui-même ancien d’un kibboutz, concluait son livre d’une façon pessimiste, écrivant : « Le kibboutz est terminé ». Actuellement, il reconnaît qu’il doit repenser sa conclusion. On peut parler aujourd’hui d’un retour au kibboutz.

 

Il ne s’agit plus d’être pionnier comme du temps de la création du pays, mais de choisir ce style de vie à contre courant de l’individualisme. Une pionnière du kibboutz Galon, au nord de Beersheva, exprime très bien la réussite du mouvement, indépendamment de l’idéologie : « Pour nous, les pionniers, le plus important n’était pas le travail en tant que tel, mais notre manière d’être, nos valeurs et le nouveau style de vie qui en émanait. Nous avons réussi d’une certaine manière à créer le « tout autre » auquel nous aspirions… et je pense que ceux qui viennent vivre au milieu de nous sont conscients que le style de vie à Galon, fruit de soixante ans de vie commune, est bien toujours vivant. »

 

 

Sources : - Le come-back du Kibboutz  Jérusalem Post éd. française 16-22 septembre 2008

- Le kibboutz Galon : une vie à contre courrant  Un Echo d’Israël 20 juin 2007

- Le kibboutz  Un Echo d’Israël mai-juin 2006 numéro 29

A consulter : - Il y a 5o ans, création du Kibboutz Ein Geddi  Un Echo d’Israël 3 juillet 2006

- Le Kibboutz Shefayim  Un Echo d’Israël 16 juillet 2008


 

 

Réaction

Ils ont dit : Apartheid ?

Yohanan Elihai

 


Clin d’œil

Entendu ce matin (25-11-2008) à la radio :

Dans une ville du bord de la mer, un photographe (il se dit « photographe de la mer ») a eu l’initiative de rassembler quelques volontaires pour nettoyer la plage. Il raconte qu’un jour l’un d’eux trouve une bouteille rejetée par les vagues, fermée, et contenant un message. On ouvre et l’équipe émue essaie de lire, mais c’est en arabe! Et, vous savez, beaucoup d’Israéliens ne savent pas encore bien l’arabe.

On fait traduire et le texte écrit à la main dit à peu près :

« Je t’aime et je ne t’oublierai jamais, quoi qu’il arrive, j’espère te retrouver, car tu es toute ma vie. » Et le photographe-nettoyeur ajoutait : « Dommage que je ne sache pas à qui il pensait, nous aurions pu lui faire parvenir le message… ». “Lui” signifiant  “à elle” dans cette phrase. En hébreu c’était clair.

 

L’apartheid en Israël ?

 

Une mise au point s’impose : De quoi parle-t-on?

Et d’abord, comme Israélien,  je commence par une confession : Oui, il y a beaucoup de choses honteuses dans notre pays. Oui, surtout dans les territoires occupés, la population souffre de bien des injustices et des violences non justifiées. Beaucoup d’Israéliens, et des meilleurs, le reconnaissent, le regrettent, parfois le combattent. Même en haut-lieu, on avoue que… Et parfois les autorités réagissent, punissent les responsables – dans combien d’États en guerre ferait-on cet effort – mais trop peu, très peu. Bien des cas sont camouflés, ou oubliés.  On fait une enquête et, six mois après, rien ne s’est passé. Ce n’est pas mon propos aujourd’hui. Du reste je sais que si je disais tout en vrac, bien de nos amis qui idéalisent Israël – qui n’a jamais tort, bien entendu, il y a toujours une justification, une explication – feraient à « Un Écho » des reproches. Or nous sommes censés ne dire que de belles choses. Et pourtant la vérité prime.

Mais la vérité réclame des nuances, et pas seulement la moitié des faits. Et c’est là que l’on devrait compléter le tableau : quand les journaux (européens ou arabes etc.) ne disent que le négatif, ce n’est plus la vérité. Or c’est très souvent le cas. Il faudrait une conscience solide et une patience rare pour toujours dire : oui, mais… Même les journalistes honnêtes n’ont pas le temps, jour après jour,  de rentrer dans ces précisions, et ils ne savent pas tout non plus. Cette mise au point sur la situation en Israël pour combattre les exagérations et les calomnies demanderait un long article (ou plusieurs), revenons donc pour cette fois à l’apartheid.

Ceux qui disent ce mot ont tout simplement oublié ce qu’il veut dire, ou ne l’ont jamais su. Et l’inexactitude dans le langage est mortelle. Comme tout mensonge : on jette du poison dans une rivière et on ne peut plus courir après pour en neutraliser les effets.

Il n’y a pas d’apartheid en Israël

L’apartheid, faut-il le rappeler, c’est séparation, isolement total; c’est dire : il y a deux poids et deux mesures dans toute la vie pour les blancs et pour les noirs – disons ici : pour les Juifs et pour les Arabes.

On ne peut s’asseoir sur le même banc, voyager dans les mêmes autobus, se rencontrer dans les magasins, habiter dans les mêmes quartiers, etc.

Toutefois, avant de faire un tableau positif, il faut reconnaître qu’il y a des inégalités entre Juifs et Arabes même en Israël, ici ou là, et les journaux ne manquent pas de le signaler. Je me rappelle la belle décision d’un député de droite qui disait : Si nous arrivons au pouvoir, il faudra qu’on fasse un grand ménage dans cette situation. Donc il en avait conscience.

Du reste n’y a-t-il pas aussi des inégalités dans la population juive? 

Et que dire des autres pays? Il y a pareil et parfois pire. Mais ce n’est pas une consolation, une justification. Amos Keinan, journaliste, auteur et sculpteur – à qui on disait : Mais regarde ailleurs, c’est pire! – répondait : Je ne suis pas responsable des autres pays : c’est ici que je dois combattre les injustices.

Enfin, avouons, oui, il y a des lieux d’apartheid dans les territoires palestiniens sous contrôle israélien.  Des cas localisés comme ces routes réservées aux habitants juifs des implantations dans les territoires palestiniens. Bien sûr, on répondra: C’est qu’il y avait des attentats, ou jets de pierre sur leurs autos quand la route était commune. Bon, mais est-ce une réponse? Et les conditions de circulation sont-elles égales pour tous? Les Palestiniens du coin doivent faire des détours par de mauvaises routes.

Et pourtant, ce cas dû à une situation de conflit (et à une attitude d’insensibilité au malheur de l’autre) n’est pas à généraliser. Revenons donc au territoire d’Israël, où l’on nous dit que règne l’apartheid.

 

J’habite un quartier en bordure du village de Sour Baher, que je vois de mon balcon. Et je me réjouis de voir les défilés de voitures pour les noces, décorées et klaxonnant en cadence, puis les feux d’artifice dans le village. Et les muezzins qui font entendre l’appel à la prière (ici c’est très beau, voix humaine et non disque trop fort), même le jour de Kippour. Dans notre autobus, qui passe au pied de leur colline, on est assis à côté de jeunes arabes qui rentrent au village, certains téléphonent à haute voix en arabe avec leur portable. Une fois, c’est un soldat qui se lève pour faire asseoir une femme arabe qui vient de monter. Une autre fois, c’est une arabe qui fait lever son gosse pour donner la place à une vieille juive; et alors une juive souriante appelle le gosse et le prend sur ses genoux. Rien de tel que les voyages en bus pour voir ces choses au jour le jour.

Dans les grands magasins du quartier juif de Jérusalem ouest, des femmes arabes élégantes font leurs emplettes, et la vendeuse les sert en souriant (bon, elle a intérêt, bien sûr), dans la rue on voit une femme juive sortir de sa voiture en compagnie d’une palestinienne amie, et elles bavardent en riant. On peut multiplier les exemples, et on doit aussi avouer que d’autres se conduisent moins bien, qui sans doutent bousculeraient autant leur femme ou leur voisin.

 

Mais surtout, il faut citer les hôpitaux israéliens. Tout le monde sait que là, c’est l’égalité parfaite, médecins, infirmiers, infirmières, malades sont juifs et arabes. L’accueil et les traitements se font sans la moindre discrimination. J’ai eu la chance d’être hospitalisé plusieurs fois, et parfois pour des longs séjours. Là on n’a rien à faire d’autre que de regarder autour de soi, en attendant que les heures passent.

On voit médecins et infirmières juifs et arabes travailler ensemble en souriant. Quand on a un problème de langue, on se met en quatre pour trouver un traducteur. (Je connais un éditeur qui est aussi prof d’arabe à Hadassa, le grand hôpital de Jérusalem, et après des années d’enseignement, il a publié un guide de conversation hébreu-arabe traitant de tous les sujets médicaux).

Un cas assez typique : un terroriste fait sauter des explosif parmi de civils, il est lui-même gravement blessé. Le médecin en charge a déclaré : « Bien sûr, c’est un terroriste, mais pour moi pour le moment, c’est un blessé que je dois sauver. »

Je me rappelle aussi ce vieux juif de 85 ans, grincheux et rouspétant, qui, une nuit, accusa un infirmier arabe de lui avoir volé des médicaments : “Je me plaindrai à la police!” Le lendemain matin sa fille vient le voir, et je les entends parler du cas. « Mais c’est moi qui te les ai pris, tes médicaments, pour éviter que tu en prennes trop! »  Et sachant ce qui s’était passé elle exigea qu’il vienne au bureau s’excuser auprès de l’infirmier arabe (qui, lui, avait été très gentil, même face aux accusations). Et le vieux s’en alla au bureau bredouiller ses excuses.

Il se trouve que ce matin-là, cet infirmier arabe était le responsable de la section, à la tête de l’équipe d’infirmières juives plus jeunes que lui.

Quelques autres faits pas banals : 

– il y a quelques années la reine de beauté en Israël était une jeune fille arabe chrétienne de Galilée (et elle le méritait bien J ).

– au grand hôpital de Nahariya on avait le choix, comme nouveau directeur, entre deux juifs et un arabe. On choisit l’arabe, parce que jugé plus compétent.

– ces jours-ci,  les journaux annoncent  la nomination d’une arabe de Galilée professeure et chercheuse en science du comportement au poste de professeur à la Faculté académique de Emek Izrael. C’est la première fois que la Commission pour les Hautes Études donne à une femme arabe le titre de professeur(e) [orthographe moderne discutée en France].

– et l’équipe de football du village arabe de Sakhnin a remporté la coupe nationale il y a quelques années.

 Il faudrait aussi mentionner tous les mouvements de collaboration entre des Juifs et des Arabes, surtout entre des femmes juives et arabes, soit une juive et une arabe écrivant un livre ensemble, soit deux groupes jumelés agissant ensemble pour un but humanitaire.

Eh bien, ce n’est pas encore l’apartheid dans notre pays.


 

 

 

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Baisse du nombre de conversions au judaïsme et à l’islam

Rédaction

 

 


Conversion au judaïsme

Selon les données publiées par les services israéliens de l’Immigration, le nombre de conversions au judaïsme orthodoxe est en forte diminution. Cette année, seulement 119 personnes ont embrassé la foi juive en Israël alors qu’en 2005, ils étaient 884, en 2006 : 457 et en 2007 : 273. La majorité des convertis sont des immigrants des pays de l’ex-Union Soviétique.

Cette baisse importante du nombre de conversions au judaïsme s’explique en grande partie par les nombreuses exigences des rabbins orthodoxes à l’encontre des candidats. De plus, les conversions effectuées dans le cadre mis en place par le gouvernement il y a quelques années sont dans une impasse. Les rabbins orthodoxes refusent de reconnaître les conversions du tribunal sous l’autorité du rabbin Haïm Druckman. Dans de nombreux cas, les soldats convertis lors de leur service militaire n’ont pas la possibilité de se marier au rabbinat.

La Knesset vient d’initier un projet de « tribunal pour la conversion des laïcs ». Yossi Beilin, l’architecte de ce texte, espère que par cette voie des milliers de non-juifs vivant en Israël se convertiront. Il ne sera pas demandé aux candidats de mener une vie pratiquante, condition indispensable aujourd’hui pour espérer être reçu au sein du peuple juif. Pour les députés et les organisations laïques qui soutiennent le projet, il s’agit de casser le monopole des ultra-orthodoxes dans ce domaine. Depuis 2002, la Cour Suprême a exigé que les conversions effectuées par les tribunaux des judaïsmes conservateurs et réformés soient reconnues par le ministère de l’Intérieur et que les nouveaux convertis soient inscrits comme Juifs. Dans la réalité ils sont des Juifs de seconde zone puisqu’ils ne peuvent pas recevoir la nationalité israélienne et encore moins se marier au rabbinat, voire être enterrés dans un cimetière juif.

 

Conversion à l’Islam

La conversion à l’Islam est également fortement en baisse. Ces dernières années, le nombre de candidats à la conversion à l’Islam s’élevait environ à 40 par an, il est descendu à 19 cette année. En 10 ans, un peu plus de 200 Juifs sont passés à l’Islam.
La majorité des convertis sont des femmes juives et chrétiennes qui déclarent leur nouvelle foi devant un tribunal coranique en vue d’épouser un musulman.
Le nombre d’hommes qui désirent embrasser la foi du prophète Mahomet est très faible.

Par le passé, le ministère de l’Intérieur exigeait avant de reconnaître la conversion à l’Islam que le candidat soit examiné par un psychiatre en vue vérifier qu’il n’a pas été endoctriné de force. Le nombre de musulmans qui se convertissent au judaïsme reste inchangé ces dernières années : en moyenne 5 par an.


 

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Beit Hayeshoua, un centre de réhabilitation pour les drogués

Agnès Staes

 


Rencontrer Roni, un homme souriant, m’a vraiment beaucoup intéressée. Il est un des co-fondateurs de la maison « Beit Hayeshoua », la maison du salut, ouverte en juillet 2003. 

Le pasteur Zvi voulait mettre ce projet en place: une maison de réhabilitation pour les drogués basée sur l’étude de la Bible, la prière et la puissance de Dieu. « Il m’en a parlé et j’ai tout de suite senti que c’était un appel de Dieu. Je sentais que j’étais à un changement dans ma vie et que le Seigneur m’appelait à devenir enseignant mais aussi père » me raconte Roni pour m’expliquer comment il est arrivé à s’impliquer dans ce projet. Avant il se consacrait surtout à l’annonce de la Parole.

 

Les jeunes acceptés dans ce centre viennent du pays tout entier, mais plus particulièrement de Haïfa, Tel Aviv, Ashdod et Ashkelon.

Ils arrivent au centre de façons différentes. Pour certains, c’est le bouche à oreille qui a fonctionné: soit par les jeunes eux mêmes qui en parlent à leurs copains, soit par les parents qui ont vu la transformation chez leurs enfants. Pour d’autres, c’est la rencontre dans les rues de Tel Aviv ou d’ailleurs avec des gens engagés qui vont régulièrement dans les rues pour rejoindre les drogués. « Quand les drogués prennent connaissance de cette maison,  parfois ils nous rejoignent tout de suite, parfois, on leur laisse une carte de visite avec le numéro de téléphone et eux-mêmes prennent contact avec nous quelques temps après ».

 

Lorsque les jeunes s’engagent à venir dans cette maison de réhabilitation, ils savent qu’ils entrent dans une maison, tenue par des messianiques, où la Parole de Dieu leur sera enseignée, et ils signent un genre de contrat. Ils savent qu’ils n’auront droit ni aux drogues bien sûr, ni à l’alcool ni aux cigarettes. « Il arrive que les jeunes fassent des crises de manque, environ 20 % d’entre eux, les autres n’en font pas du tout, grâce à la prière. En temps de crise, nous ne donnons pas de médicaments mais nous prions car nous croyons à la puissance de la prière » me dit Roni.

 

Ce centre accueille uniquement des garçons car d’une part la mixité est très difficile et d’autre part, les femmes  droguées, sont souvent victimes de la prostitution. Les animateurs sont donc tous des hommes. Les jeunes souffrent cruellement de l’absence du père. Souvent les animateurs jouent ce rôle de père spirituel et même parfois de père tout court !

 

Certains jeunes ont de la famille dans le pays (environ 60%), d’autres non. Ils viennent de Russie, d’Ukraine etc. Souvent ils ont cru qu’en arrivant en Israël, ils pourraient changer de vie, quitter la drogue… parce qu’ils arrivaient dans la Terre sainte, la terre de leurs pères. Certains pensaient même qu’en Israël, il n’y aurait pas de drogue ! Or dans les statistiques, on sait qu’Israël a un taux de drogués plus élevé même qu’aux Etats-Unis ! Le nombre de drogués est estimé à plus de 20 000 et les alcooliques sont encore plus nombreux. Roni ajoute « Si déjà on respectait la loi que Dieu a donnée, la vie serait déjà pas mal ! ».


Il existe d’autres centres de ce genre dans le pays : deux à Haïfa, un à Beersheva et un à Jaffa. Il n’existe qu’une maison pour les femmes à Tel Aviv mais il n’y a pas de programme, c’est une maison d’accueil où elles peuvent dormir, prendre un repas, une douche…puis elles repartent et retrouvent la même vie ! Bien sûr l’Etat d’Israël a aussi des maisons de réhabilitation qui sont subventionnées.

« Nous, nous n’avons aucune subvention, nous vivons uniquement par des dons d’Israéliens et d’amis du monde entier. Pour vivre un mois, il nous faut environ 10 000 dollars pour payer les loyers des deux appartements, les frais de la voiture (et nous en avons besoin )! les factures d’électricité d’eau… la nourriture pour tout ce monde, et cinq petits salaires. Mais le Seigneur est fidèle ! ».

Les services judiciaires connaissent notre maison car beaucoup d’accueillis ont eu affaire à la police pour diverses raisons avant de venir dans notre maison. Ils acceptent notre programme car ils en  voient le résultat ».

 

La maison « Beit Hayeshoua » comprend deux appartements côte à côte où se déroulent deux programmes différents : A et B. Chaque appartement peut recevoir 8 personnes, mais de façon générale, ils sont 12 pour les deux programmes. « Nous ne visons pas la quantité mais la qualité. Nous souhaitons qu’après, ces jeunes puissent servir le Seigneur d’une façon ou d’une autre » ajoute Roni.

 

« Depuis l’ouverture de cette maison, nous avons même pu accueillir quatre arabes, dont deux s’en sont sortis » m’explique Roni. « Ce qui est le plus difficile pour les gars, c’est quand un jeune quitte la maison n’en pouvant plus, ou quand il retombe dans la drogue ».

 

En stage A, les jeunes ont un programme adapté à leur situation. On leur demande de retrouver une vie régulière avec des horaires : heure de lever, de repas,…Ils étudient la Bible trois fois par jour. Ce qu’ils ont étudié au bout d’un mois correspond à ce qu’en général on a fait en un an dans des écoles bibliques. Il y a aussi des temps de prière. Deux jours par semaine les jeunes travaillent à l’extérieur dans des jardins et dans une menuiserie. Ce qui donne un équilibre à leur vie. C’est un genre de vie communautaire qui se vit pendant ces 6 premiers mois, un peu comme dans une école de vie.

 

En stage B, les jeunes trouvent du travail à l’extérieur. « Depuis le début de la création de la maison, tout le monde a trouvé du travail » me dit Roni. Ils restent dans cet appartement pendant 6 ou 9 mois pour stabiliser leur guérison.


Après, ils prendront leur envol, leur indépendance. Ils s’installeront dans un appartement. Mais ils resteront en lien très proche avec le centre. Ils seront visités et reviendront régulièrement au centre. Depuis le début de ce programme deux des jeunes ont fondé une famille en se mariant avec une jeune femme qui n’avait pas connu le milieu de la drogue.

« Le personnel qui travaille dans la maison, compte deux anciens qui avaient suivi le programme de réhabilitation et qui s’en sont sortis. Depuis le début, une quarantaine de jeunes a fait ce programme et a retrouvé une vie ‘normale’ ».  (Site : www.beit-hayeshua.org)


 

 

 

Etude

La valeur du demi-shéqel

I.C.

La récente découverte d'une monnaie ancienne nous rappelle une coutume chère à la mémoire juive. On a en effet trouvé, au cours de fouilles effectuées cette année au pied des remparts de Jérusalem, une pièce d'argent d'un demi-shéqel, A l'époque du 2ème Temple, cette monnaie revêtait une importance dont on ne saurait minimiser les implications sociales et spirituelles.

La Parasha étant le chapitre de la Tora dont on fait lecture à la synagogue au cours du Shabbat, celle qui est intitulée : Ki-tissa [Héb : Quand tu enregistreras] traite de l'injonction faite à tous les enfants d'Israël de verser l'impôt annuel destiné à l'entretien du Temple. Il s'agit là d'une imposition unique qui ne tient pas compte du statut social. "Pour payer la contribution de YHWH en rançon de vos vies, le riche ne paiera pas plus et le pauvre pas moins d'un demi-shéqel" (Exode 30).

Apparemment rien n'est plus simple qu'un tel prélèvement d'impôt dépourvu de pression ou de pitié, et pourtant, cette prescription de la Tora semble inviter à saisir le côté caché et invisible des choses. "Quand tu enregistreras l'ensemble des fils d'Israël soumis au recensement, chacun donnera à YHWH la rançon de sa vie lors de son recensement. Ainsi, nul fléau ne les atteindra lors du recensement. Tout homme qui passera au recensement versera un demi-shéqel, selon le shéqel du sanctuaire de vingt guéras. Un demi-shéqel à titre de contribution pour YHWH" (Exode 30).

La Tora établit donc un lien entre l'impôt annuel et le dénombrement de la population en rappelant que le demi-shéqel est "une rançon de la vie", tandis qu'un calcul direct du nombre des habitants laisserait le peuple à la merci d'une calamité. Selon sa coutume, devenue pour lui une seconde nature, l'écrivain sacré mentionne cette démarche en rappelant simultanément son origine et son intentionnalité.

Au niveau historique, nous savons que cette injonction de la Tora fut observée par les juifs dès leur retour de l'exil de Babylone. Cette pratique s'inscrivait dans le cadre du renouveau prôné par Esdras et Néhémie [Sème s. av. è.com.] et resta en vigueur jusqu'à la destruction du Temple [70 è.com.]. Tant que le Temple subsistait, tous les juifs, y compris ceux de la diaspora qui allait se développer dans l'empire romain, se faisaient un devoir de participer à cette collecte du demi-shéqel qui était en quelque sorte une façon de réaffirmer leur affiliation au peuple de l'Alliance.

Codifiée après la destruction du Temple, la Mishna reste pourtant sensible à la présence insistante des siècles. Dans le traité intitulé Sheqalim, elle envisage l'impôt du demi-shéqel que devait verser chaque année tout homme de plus de vingt ans. En renvoyant implicitement à tout un code de lecture sous-entendu, le texte précise les dates et les modalités de cette redevance.

Dans le cadre d'une administration recrutée parmi des prêtres qui veillaient aux affaires du Temple, les questions fiscales relatives au sanctuaire étaient du ressort d'un comité de sept régisseurs, secondé par une section de treize trésoriers dont chacun détenait personnellement les clés du trésor. Comme le comportement des employés du Temple, dont on attendait une conduite irréprochable, était l'objet d'une attention particulière, ledit trésor ne pouvait être ouvert qu'en présence des treize agents précités.

L'idée d'une "rançon de la vie" liée au recensement n'est pas sans déranger nos conceptions rationnelles. Rashi explique que cette démarche doit se faire par le truchement d'une pièce de monnaie et non pas directement, par peur du "mauvais œil" qui pourrait compromettre cette entreprise, comme un roi d'Israël put le constater à ses dépens. Le rabbin de Troyes se réfère là à l'épisode où David prescrivit au chef de son armée Y oav ben Tsouria de recenser le peuple (II Samuel 24). Après avoir en vain tenté de détourner son maître d'un projet aussi risqué, le militaire ne put que constater les malheurs du peuple dont le roi avait voulu mesurer l'importance. En-deçà de ces hautes considérations, bien des commentateurs ont voulu interpréter de façon plus directe la "rançon de la vie" liée au demi-shéqel. Cette quête incessante d'un sens nouveau n'est pas sans rappeler les affinités électives qu'un peuple a toujours ressenti pour un texte auquel il répond avec ses propres perceptions.

Le rabbin italien Sforno [16ème s.] propose dans son commentaire de la Tora d'envisager la "rançon de la vie" du demi-shéqel sous un angle de morale personnelle. Comme l'apparition ou la perte d'une vie passagère souligne la précarité de l'existence chez celui qui naît ou meurt, le recensement annuel est, dans sa formulation, le rappel d'un lien mystérieux entre le péché et la mort. En s'acquittant de cet humble devoir, on cherche par le fait même à fournir "une rançon pour la vie" aussi longtemps qu'on peut en jouir. De plus, l'égalité même qui caractérise cette collecte permet, selon Sforno, de situer à sa juste place la valeur d'une existence dont le terme montre bien qu'il n'y a finalement aucune différence entre riches et pauvres. En s'attachant à cette pratique, la tradition juive a reconnu les implications insoupçonnées d'un geste où le symbolisme supplée à des ordres de compréhension au regard desquels le simple langage reste insuffisant.

Les motivations de cette démarche sont aussi diverses que complémentaires.

On a fait remarquer qu'un recensement rappelle inévitablement le pouvoir exercé par un être humain sur un autre au point que cette pratique puisse passer pour une sorte de servitude. Aussi, la Tora semble-t-elle atténuer cette impression en précisant que le dénombrement des citoyens du pays ne doit pas être le fait d'un dirigeant mais de la population elle-même. Au lieu qu'un fonctionnaire n'enregistre les gens en manifestant ainsi son autorité, ceux-ci présentent eux-mêmes la pièce de monnaie requise de tout un chacun dans une démarche où ils affirment leur appartenance à un peuple.

Cette perspective est en syntonie avec l'idée démocratique qui ne cessa d'affiner la conception du pouvoir en Israël. Loin de détenir des pouvoirs illimités, le roi était le premier à devoir se soumettre à la Tora, au point d'être tenu d'en faire la lecture chaque année. De plus, la tradition rapporte qu'ayant renoncé, à un moment donné, à porter la couronne royale sur leur tête, les rois d'Israël se plaçaient sous la couronne fixée au trône auquel ils accédaient par un escalier de sept marches. Sur chacune de celles-ci se tenait un membre de leur entourage chargé de leur rappeler non pas les prérogatives mais les obligations des héritiers du roi David.

Loin d'être limitatives, les interprétations proposées plus haut ne font que corroborer l'enseignement traditionnel concernant le "Shabbat des shéqels", Le motif pour lequel on "fait entendre les shéqels" durant le shabbat qui précède le premier jour d'Adar se justifie de deux façons différentes dans le Talmud. La première, selon le Peshat, où paraît le sens obvie et la seconde, selon le Derash, où l'on dégage un sens homilétique. Selon le Peshat, le versement des shéqels au mois d'Adar correspond à la recrudescence des activités du Temple au moment des Fêtes de printemps qui nécessitent tout naturellement un nouvel apport de liquidités. Mais, selon le Derash, la collecte des shéqels au mois d'Adar se réfère aussi à un autre contexte (Talmud B Megilla, 13).

Ici, l'argument n'est pas centré sur les besoins accrus du sanctuaire, à l'approche de Pâque au mois de Nisan, mais sur la proximité de la Fête de Pourim. L'histoire rapportée au Livre d'Esther dévoile la façon dont un grand vizir projeta de détruire le peuple d'Israël. Comme un mauvais génie semble parfois guider les événements, « Haman dit au roi Xercès : ‘Il y a un peuple particulier, dispersé et séparé au milieu des peuples dans toutes les provinces de ton royaume. Les lois de ces gens sont différentes de celles des autres peuples et ils n'exécutent pas les lois royales. Aussi n'est-il pas dans l'intérêt du roi de les laisser tranquilles. S'il plaît au roi, on passera un décret pour les anéantir. Je verserai alors à ses fonctionnaires dix mille pièces d'argent, au compte du trésor royal’ » (Esther 3). Contrairement à Mardochée - cousin d'Hadassa qui avait pris le nom babylonien d'Esther - Haman semble oublier dans son aveuglement qu'on ne peut appliquer à la condition juive des catégories élaborées dans un autre contexte et pour répondre à d'autres problèmes.

Le point névralgique visé par le ministre du roi de Perse et de Médie pour nuire à Israël a trait à la situation sociale d'un peuple "dispersé et séparé au milieu des nations." Cet état de fait lui fournit un prétexte pour planifier, à sa façon, une solution finale. Il essaie donc de convaincre le roi en faisant miroiter la somme de dix mille sonnantes et trébuchantes qu'il versera aux exécutants au profit de la caisse de l'Etat. Marqué durablement par ces menées subversives, Israël se soumet de tout cœur à l'imposition du demi-shéqel. Le souverain qui "régnait sur cent-vingt-sept provinces depuis l'Inde jusqu'à la Nubie" peut recevoir d'un ministre corrompu dix mille pièces d'argent. Mais, comme le vrai est d'une absolue discrétion, le roi d'Israël se contentera de percevoir de chacun de ses sujets, un demi-shéqel, à titre de "rançon pour la vie" en souvenir du refus de céder à un "oppresseur des juifs".

Tout lien véritable est habité par quelque chose de plus ancien que le moment où il se forme. Aussi, en apportant sa modeste contribution, le plus isolé des enfants d'Israël affirme par le fait même qu'il est partie prenante d'un projet qui le dépasse pour l'avoir précédé. Il ne dit rien, mais ce rien représente beaucoup car il ne saurait douter que ce geste, dans l'effusion de son silence, est plus éloquent que bien des voix. Doué d'un discernement issu de la sagesse biblique, il pressent que cette démarche est sa façon à lui, de répondre à la question déjà posée par Dieu à Adam dans le jardin d'Eden: "Où es-tu ?"

Attiré par une vie qui se laisse porter par l'infini, il participe ainsi au Tikkoun olam, autrement dit, à une réparation qui consiste à sauver ce qui subsiste de ce monde brisé pour en tirer le meilleur parti. En lui faisant prendre conscience de son destin, cette collecte effectuée au mois d'Adar invite un peuple, si souvent victime des émules d'Haman, à ne pas redouter les épreuves toujours susceptibles de survenir. Au moment où l'incertitude pourrait prévaloir, le demi-shéqel vient rappeler à la nation que les idées semées en elle peuvent, en fin de compte, pousser plus haut qu'on aurait pu le croire.

I.C.

Chant du mois et humour

Le chant du mois

Yohanan Elihaï

Jardin fermé –  Gan na'oul                                               

Auteur: Rachel

Musique: Shouki

Exécution: Shouki et Dorit

 

Qui donc es-tu? Pourquoi la main tendue

Ne rencontre-t-elle pas une main sœur?

Pourquoi les yeux levés, qui attendaient

Se sont baissés, embarrassés.

 

Jardin fermé, sans chemin pour l'atteindre

Jardin fermé, l'homme, jardin fermé !

Dois-je partir, ou frapper sur le roc

Et que le sang jaillisse?

 

 

Humour en finale

 

Une touriste juive habitant Neuilly, en promenade à Tel-Aviv remarque que sa montre ne marche plus. Elle commence à chercher une boutique d’horlogerie pour la faire réparer. Or, dans le quartier où elle se trouve, toutes les enseignes sont écrites en hébreu.

Elle trouve enfin un magasin dont la vitrine est remplie de toutes sortes d’horloges. Elle entre et dépose sa montre sur le comptoir, devant le propriétaire de la boutique.

- Pouvez-vous me réparer cette montre ?
- Non, madame, ça m'est tout à fait impossible.
- Mais pourquoi ? Il s'agit d'un modèle très ordinaire !
- Hélas, je ne peux pas vous aider. Je ne suis pas horloger. Je suis rabbin, et j'effectue des circoncisions.
- Mais alors, pourquoi ces horloges dans votre vitrine ?
- Chère madame, qu'aurais-je dû y mettre, à votre avis ?