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 « Seigneur Jésus,
apprenez-nous à être généreux,
à vous servir comme vous le méritez,
à donner sans compter,
à combattre sans souci des blessures,
à travailler sans chercher le repos,
à nous dépenser sans attendre d’autre récompense
que celle de savoir que nous faisons votre Sainte volonté. »

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N° 35 – Mai/Juin 2007

 

EDITORIAL : JÉRUSALEM VILLE UNIFIÉE ?

Jean-Marie Allafort

Quarante ans se sont écoulés depuis que Moshé Dayan et Itzhak Rabin sont entrés en vainqueurs dans la Vieille Ville de Jérusalem par la porte des Lions. A cet instant, une nouvelle page de l’histoire de la Ville Sainte commençait à s’écrire.

Quarante ans plus tard, les Israéliens fêtent la réunification de Jérusalem alors que les Palestiniens commémorent quarante ans d’occupation. Les uns se réjouissent, les autres s’interrogent et souvent espèrent. Ils espèrent que Jérusalem deviendra la capitale du futur Etat palestinien et n’ont que faire de la réunification de la Ville Sainte sous souveraineté israélienne.

Quarante plus tard, Jérusalem est devenue une ville moderne qui a su préserver son caractère ancien. Elle s’est développée et agrandie. Sa superficie est aujourd’hui plus grande que celle de Paris. Des quartiers nouveaux voient le jour régulièrement.

Ses populations sont de plus en plus religieuses et pourtant elle a ses bastions laïcs. Elle rassemble les contraires.
Elle est plus que jamais dans l’histoire la ville sainte des trois religions avec ses 1198 synagogues, 69 mosquées, 158 églises et 72 couvents et monastères de toutes les confessions chrétiennes.

Jérusalem fascine et repousse. Elle ne laisse jamais indifférent.

Jérusalem échappe à celui qui ose prétendre la saisir peut-être parce qu’elle n’appartient à personne. La Bible nous dit que Dieu l’a choisie car elle n’était la propriété d’aucune tribu d’Israël ! Elle est à Dieu et échappe aux hommes.

Ce numéro d’Un écho d’Israël est largement consacré aux 40 ans de la réunification de la ville de Jérusalem. Nous abordons évidemment l’histoire avec la bataille de « la Colline des Munitions » et le témoignage d’un réserviste qui a combattu lors de la guerre des Six Jours. Un arabe chrétien de Bethléem nous donne sa vision de la situation après quarante ans. Nous abordons la question de l’occupation à travers cette organisation de femmes qui, chaque jour, viennent « surveiller » les soldats aux différents points de contrôle. Notre guide Loïc Le Méhauté nous conduit dans les ruelles du quartier juif de la Vieille Ville de Jérusalem. L’annonce de la découverte du tombeau d’Hérode fait grand bruit. Michel Remaud évoque ce personnage important de l’Histoire. Vous trouverez bien sûr nos habituelles rubriques : culture, flashes d’espoir, chant et humour.

 

HISTOIRE : LA BATAILLE DE JÉRUSALEM-EST EN 1967

Cecile Pilverdier

Moshé Dayan, nommé le 31 mai commandant du front sud, avait, lors d’une tournée à Jérusalem, demandé au général Uzy Narkiss, commandant du front centre : "En cas de coup dur, ne bronche pas. Il est peu probable que les Jordaniens s’excitent sérieusement. Laisse les faire leur baroud d’honneur. Envoie le maximum de tes gars dans le Sinaï. C’est là que tout se jouera."

Lévi Eshkol, Premier ministre, dès que la guerre a éclaté avec l’Egypte, a fait parvenir au roi Hussein par l’intermédiaire du général Od Bull de l’ONU, la missive suivante : " Israël ne prendra aucune initiative contre la Jordanie, mais si la Jordanie se livre à des actes hostiles, Israël réagira avec la dernière violence, et le roi Hussein devra en supporter les conséquences."
Le général Narkiss dit à ses hommes : " Mordez vous les lèvres, mais ne répondez pas, s’ils se contentent de faire du bruit pour sauver la face."

Des obus éclatent au centre de Jérusalem, à Rehavia, près de la Knesset, rue Agron, et les gens se mettent calmement à l’abri et rentrent chez eux. Au musée, l’on déménage les précieux manuscrits de la Mer Morte, au zoo le babouin et le lion de mer sont les premières victimes. Il y aura plus tard une quinzaine de civils tués.

La guerre des six jours

 

Cecile Pilverdier

 

Dans cette période de tension, les Israéliens donnent des avertissements, mais pas toujours coordonnés. Le 14 mai, le général Rabin avertit Damas que le régime syrien porte la responsabilité de la continuation du terrorisme

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La Défense depuis peu est décidée à ne pas laisser attaquer le mont Scopus ou le palais onusien du Gouverneur.
La radio de Ramallah annonce prématurément la chute du mont Scopus, enclave israélienne en territoire jordanien avec une garnison de 120 hommes peu armés en principe, mais qui a été régulièrement ravitaillée en armes dissimulées dans des caisses de biscuits.
Les Légionnaires montent les pentes sans riposte de la part des Israéliens, puis quatre Fouga Magister apparaissent et les Jordaniens battent en retraite sous le feu des policiers.

Au sud, le colonel Amitaï monte au palais du Gouverneur et déloge les Légionnaires dont 40 sont tués. Les Casques bleus sont conduits en Vieille Ville. Amitaï reçoit l’ordre de s’emparer du village de Sur Baher. Vers midi, le général Od Bull fait accepter aux deux parties le principe d’une trêve à Jérusalem, mais juste après, la Légion Arabe occupe le Palais du Gouverneur, position stratégique et siège de l’ONU depuis 1948. La guerre avec la Jordanie vient de commencer alors que du côté israélien elle n’était pas prévue.

Après Sur Baher, Amitaï se dirige en direction du sud, alors que la brigade blindée avec Uri Ben Ari à sa tête, composée uniquement de réservistes et stationnée à 10 kilomètres de Jérusalem, reçoit l’ordre de percer les défenses jordaniennes au nord et de se joindre aux défenseurs du mont Scopus qui est toujours isolé.
Uri Ben Ari qui a quitté l’armée en 1956, lance l’assaut sans avoir réorganisé ni regroupé ses forces. Les équipes de déminage étant dans le Sinaï, ce sont les sapeurs qui ouvrent un passage à la main dans les cinq rangées de barbelés.

Ben Ari fonce vers Beit Iksa et Tel El Foul pour bloquer l’arrivée de la 60ème brigade blindée du roi Hussein qui monte de Jéricho. A l’aube, Hussein a perdu 7 tanks Patton et Ben Ari 6 Sherman.

Mais cette nuit là, c’est à Jérusalem que tout se joue. Mordechaï Gur (Mota) avec son régiment de parachutistes de réserve 55, attendait près de Tel Aviv avec ses troupes pour être envoyés au Sinaï, et c’est vers Jérusalem qu’ils partent en bus. Ce sera la bataille de "la Colline des Munitions".

C’est une des batailles les plus dures et des plus sanglantes dans l’histoire de Tsahal, et elle est devenue le symbole du combat pour la Vieille Ville.

La "Colline des Munitions" est située au nord de Jérusalem entre le quartier de Cheikh Jérash dans la ville orientale (arabe) et le quartier Samuel ha Navi (juif). Son surnom lui a été donné car, pendant le Mandat britannique, on y gardait les réserves d’armes de l’école de police toute proche.

En mai 1948, pendant la guerre d’Indépendance, la colline a passé des mains des forces du Etzel aux forces de la Légion jordanienne. Après sa prise, les Jordaniens y ont construit des bunkers et des tranchées, et ceci jusqu’en 1967.

Le 5 juin, la guerre de Six Jours a commencé et dès que le palais du Gouverneur a été pris, les Jordaniens ont encerclé le mont Scopus, enclave israélienne en territoire jordanien depuis 1948.

Les forces de Mota Gur combattent à côté du régiment de Jérusalem et du régiment de tankistes "Harel", leur but étant de faire une brèche dans la ligne jordanienne au nord de la ville et de joindre le mont Scopus pour éviter sa prise par les Jordaniens. Les bataillons du régiment avaient chacun reçu sa propre fonction, et le bataillon 66 devait prendre "la Colline des Munitions" et l’école de police, puis le quartier de Cheich Djérash. Cette action a commencé à 2 heures 30, le lundi 6 juin ; deux compagnies ont franchi les barrières menant au site, l’une a "nettoyé" l’école de police et a continué son avance vers Cheikh Djérash. Le deuxième bataillon est arrivé au pied sud de la colline où il a subi de fortes pertes, aussi a-t’on décidé que le troisième bataillon enfoncerait la colline elle même et la prendrait des mains des Jordaniens. Couvert par l’artillerie, il s’est affronté à l’opposition très forte des Jordaniens qui a causé de nombreux blessés, surtout des officiers, ralentissant les combats dans cette zone.

Essayant de recommencer l’attaque, le 2ème bataillon a été appelé, puisqu’il servait de réserve et qu’il avait été arrêté à l’entrée de la colline.

Les forces ont avancé au milieu de combats terribles dans les tranchées, qui ont obligé de nombreux combattants à se découvrir au tir des soldats Jordaniens pour permettre de poursuivre le combat. Avec l’encerclement de la colline, les forces restantes des 2ème et 3ème bataillons sont arrivées au "grand bunker" et après six heures de durs combats, la bataille pour "la colline" a cessé.

Pendant le combat, 24 soldats israéliens sont tombés et des dizaines ont été blessés. Quinze parmi eux ont été décorés pour leur bravoure. Soixante dix légionnaires jordaniens sont également morts après "s’être battus comme des lions" a dit plus tard un soldat israélien à une mère jordanienne venue pleurer la mort de son fils.
Après la fin de ce combat, les parachutistes ont rejoint l’enclave du mont Scopus puis ont poursuivi la prise de la Vieille Ville.

Aux yeux de nombreux historiens militaires, cette bataille est reconnue comme l’un des moments décisifs de la prise de la ville orientale, mais il y a une autre évaluation qui dit que la façon dont la colline a été prise était mauvaise et que l’on aurait pu s’y prendre autrement.
Mardi, ce qui au départ était la sortie d’un siège se transforme en campagne militaire. Le front syrien est resté calme et la plupart des troupes est engagée contre le Royaume Hachémite. Ben Ari surplombe la ville sainte en attaquant la chaîne de collines entre Ramallah et Jérusalem : Givat ha Mivtar, Givat Ha Tsarfatit. La liaison est faite avec la brigade de Mota Gur.

Au sud, la brigade du colonel Amitaï attaque les Jordaniens dans le quartier d’Abu-Tor. Là aussi les Jordaniens se battent courageusement.

 

Tsahal à la porte des Lions

Le soir, la Vieille Ville est encerclée et très tôt, le mercredi matin, Narkiss téléphone à Mota Gur : "Plus vite les opérations seront achevées à Jérusalem, mieux se sera pour l’Etat d’Israël".

A 8 heure l’aviation pilonne les Jordaniens sur la colline Augusta Victoria alors que deux régiments d’infanterie, appuyés par les blindés, avancent du Mont Scopus et du musée Rockefeller. La porte des Lions est choisie pour l’assaut qui commence par dix minutes de tir d’artillerie qui touchent le dôme de l’église sainte Anne et répandent la terreur en Vieille Ville. Motti Gur avec son chauffeur fonce à travers la porte des Lions et c’est le parachutiste Zamouche qui arrive le premier devant le mur occidental avec un petit groupe, commandé par le colonel Stempel.

Le rabbin des armées Shlomo Goren sonne du shofar à s’en faire éclater les veines et peu après Moshé Dayan appelé par les Arabes "le diable borgne" et Ithzak Rabin, l’incroyant, l’efficace, glisse entre deux pierres un message griffonné :"Que la paix règne sur Israël."
Tout Israël baigne dans une atmosphère irréelle, de miracle. Tout a été si vite ! C’est un rêve de deux mille ans qui se réalise.

Trois jours plus tôt, Israël pensait ne pas combattre contre le roi Hussein. Chaque opération prévue avait un nom : le raid éclair de l’aviation, c’était "Focus", les blindés dans le Sinaï, c’était "Drap rouge", contre la Syrie, c’était "Marteau". La campagne contre la Jordanie reste l’opération sans nom de la guerre de Six Jours. Elle n’était ni souhaitée, ni prévue.

LIRE AUSSI : Uzi Narkiss raconte...c’était en juin 1967

 

UN RÉSERVISTE RACONTE LA GUERRE DES SIX JOURS

Antoinette Brémond

"En 1950 Jérusalem comptait environ 120 000 habitants. En dehors de la Vieille Ville et de ses remparts, la Nouvelle Jérusalem ressemblait à un ensemble de petits villages séparés par des champs, chaque village ayant son nom. Entre Rehavia et Katamon, des champs. Entre Katamon et Baka, Moshava Germanit et Talpiot, des champs. Peu à peu ces champs se sont construits et les noms des villages deviennent les noms des quartiers.

En 1967 il y avait déjà 200 000 habitants. D’autres quartiers s’étaient construits : Kyriat Yovel, Gonen, Beit Vegan, Beit Hakerem.... Mais Jérusalem était encore comparable à une petite ville de province. On y entendait l’hébreu et tant d’autres langues."

"Je suis mobilisé dès le début de la crise politique, à partir du jour de l’Indépendance, en mai 67. Quand les Egyptiens entrent dans le Sinaï, mon unité est mobilisée pour défendre Jérusalem. La crise s’amplifie. Dans l’armée israélienne, après 2 ou 3 jours de désarroi, l’ordre est donné de commencer des manoeuvres : entraîner les soldats et creuser des tranchées autour de Jérusalem. Le premier matin de la guerre, le 5 juin, nous avons été prévenus à 5 h du matin que nous serions transférés ailleurs. A 8 h, une unité de soldats plus âgés est venue nous remplacer. A 8 h 30 nous sommes partis vers notre quartier général. Vers 10 h. les Jordaniens ont ouvert les hostilités en commençant à bombarder tout Jérusalem".

"Vers 11h30 la Légion (l’armée jordanienne) s’empare sans difficultés de la Résidence de l’O.N.U en zone neutre. Une unité est dirigée vers ce secteur pour contre-attaquer. Notre unité, qui faisait partie d’un plan d’attaque général sur les points stratégiques du secteur, est envoyée vers le kibboutz de Ramat Rachel, à l’extérieur sud de Jérusalem. Tout le long de la route nous sommes bombardés sans grands dégâts. Arrivés aux abords de Ramat Rachel, nous subissons un tir de mitrailleuses très dense. Mais nous arrivons à prendre nos positions dans les tranchées qui entouraient le kibboutz. Nous avons alors bénéficié de la conception erronée de l’armée jordanienne qui, par principe, arrêtait de tirer dès la tombée de la nuit. Cela nous a permis de nous organiser. Dès le lendemain matin, le deuxième jour, les tirs d’artillerie et de mitrailleuses recommencèrent et nous n’avions aucune pièce d’artillerie à leur opposer. Malgré leur avantage, ils n’essayèrent pas de tenter une attaque sur nos positions.

"Vers midi deux avions légers israéliens apparurent tentant de neutraliser l’artillerie jordanienne. Aussitôt l’un des deux fut abattu. Pendant toute l’après midi des échanges de tir continuent et vers 18h surviennent trois "Vautours"(avions légers français). Cette fois-ci, ils arrivent à anéantir une partie de l’artillerie lourde jordanienne à Mar-Elias( monastère grec-orthodoxe de Bethléem), une position avancée des Jordaniens, au nord de Bethléem. Le troisième jour se passe à des échanges de tirs sans dégâts. Durant la nuit du troisième au quatrième jour, nous recevons en renfort deux tanks. Vers 12h, nous recevons l’ordre d’attaquer Mar-Elias et d’entrer à Bethléem. Vers 14h nous partons à l’attaque, protégés par les tirs de barrage de nos 2 tanks. Les défenseurs de Mar-Elias avaient fui. Nous avons pu pénétrer dans Bethléem sans résistance. Beaucoup d’habitants s’étaient réfugiés dans les couvents à l’entrée de la ville. Des moines se tenaient devant eux, brandissant de grandes croix pour les protéger. Nous avons continué notre chemin. Sur la route principale, les habitants restés chez eux étaient aux fenêtres ou dans leur jardin, stupéfaits. La propagande arabe ayant décrit les Israéliens comme étant des sauvages, tous avaient peur. Arrivés la nuit à l’extrême sud de la ville, nous avons campé dans une carrière. Des avant-gardes nous entouraient pour protéger le gros de la troupe. Nous étions tous épuisés, affamés, et avions très froid, l’intendance n’ayant pas pu suivre.

"Vers 10h du soir, nous avons appris la publication du cessez-le-feu entre la Jordanie et Israël, ainsi qu’entre l’Egypte et Israël. C’était le quatrième jour de la guerre. L’intendance est alors arrivée, apportant des couvertures et de quoi manger. Le lendemain matin, ayant réquisitionné les autobus arabes de la ville nous sommes partis pour Kfar Etsion, un kibboutz conquis en 1948 par la Légion jordanienne, à 20 kilomètres au sud de Bethléem. La Légion avait transformé ce kibboutz en un camp militaire. Là aussi, tous les soldats jordaniens avaient fui, laissant le camp intact. Nous nous y sommes installés à leur place. Il y avait toutes les commodités, tout ce dont nous avions besoin. Ils avaient tout laissé derrière eux, même les conserves ! Depuis ce camp nous avons commencé à patrouiller dans toute la région pour ramasser les armes, tout le matériel militaire abandonné.

"Nous sommes arrivés au petit matin du cinquième jour à Hébron dont les rues étaient désertes. Nous avons demandé au portier de service de nous ouvrir le portail du caveau des Patriarches. Il nous a refusé en nous disant que l’entrée dans la mosquée installée dans le caveau était interdite aux Juifs. Notre officier l’a giflé et il nous a ouvert le portail.

"A Hal Houl, nous empruntâmes une route secondaire qui descendait vers la Mer Morte. Ce fut alors la surprise : tout d’abord un tank intact, puis une quantité énorme de véhicules abandonnés enfin, un peu plus loin, 13 tanks en parfait état. Le quatorzième avait été bombardé par l’aviation israélienne et bouchait la route étroite. Un tank avait tenté de le doubler en descendant vers le wadi, mais s’était renversé, ce qui avait découragé les autres tanks. Avec beaucoup de mal nous arrivons à doubler ce tank brûlé en aplanissant les bas-côtés. Nous étions alors toute une caravane ayant ramassé tous les véhicules sur notre passage. En effet, au départ, nous étions un camion, deux jeeps et un command-car. Peu à peu, nous avons placé deux soldats dans chaque véhicule abandonné sur la route. Nous avions même chargé des jeeps sur le camion.

"Je dois dire que cette epopée m’a rappelé un passage de la Bible où il est décrit que les Assyriens, pris de panique, la nuit, s’enfuirent en abandonnant tout leur matériel.

"Nous avons pris le chemin de retour en traversant Beth Sahour et Bethléem. Là, les habitants, voyant les voitures et tanks jordaniens, commencèrent à pousser des cris de joie....puis déroutés de voir les soldats israéliens qui occupaient les véhicules, ils se retirèrent chez eux.

"Parallèlement, une unité spéciale prenait contact avec la population arabe de la région pour les rassurer et proposer à ceux qui avaient quitté la ville et s’étaient réfugiés dans des grottes, de rentrer chez eux. Ils contactèrent les dignitaires de la ville en leur demandant de transmettre ce message à la population : " Nous ne ferons aucun mal à la population. Revenez chez vous et reprenez votre travail et votre vie, comme avant.

"Un mois pour chercher ce que l’armée jordanienne en débandade avait abandonné sur les routes et dans les champs n’a pas suffi pour ramasser toutes les armes légères. Dans beaucoup d’endroits, la population locale arabe nous avait précédés. - J’avais 35 ans."

PS : Si le cessez-le-feu avec la Jordanie et l’Egypte avait eut lieu le quatrième soir, la guerre continua pourtant avec la Syrie sur de nombreux fronts, la Syrie n’acceptant le cessez-le-feu que le sixième jour.

 

QUARANTE ANS APRÈS, UN CHRÉTIEN PALESTINIEN DE BETHLÉEM TÉMOIGNE

Agnès Staes

Georges (pseudonyme) est né au Honduras. Ses parents, originaires de Bethléem, sont partis là-bas pour trouver du travail. Il est revenu avec eux, au pays, en 1967, deux mois avant la guerre des Six jours : guerre qui opposa Israël à la Jordanie. La Jordanie avait à cette époque une partie du pays de 1948 à 1967, là ou se trouve actuellement la Cisjordanie.

Beaucoup d’arabes chrétiens, comme lui, sont allés dans des écoles chrétiennes, et ont appris le français. En 1978 ayant fini l’école, il part à l’université américaine de Beyrouth. Au Liban éclate alors la guerre civile. Impossible pour lui de rester à Beyrouth. Georges part à l’étranger continuer ses études où il rencontrera sa femme. Ils se marient, et ont cinq enfants. Restés d’abord quelques années là-bas, ils sont rentrés maintenant à Bethléem depuis 1996. Deux ans plus tard, Georges entreprend des études à l’université de Bethléem pour être guide Aujourd’hui il travaille dans une agence de tourisme.

Le plus grand défi pour lui était de revenir à Bethléem. La tentation était grande de rester à l’étranger car ils possédaient maison, diplôme, un futur et pas mal d’argent. Pour Georges c’est une erreur de quitter le pays de ses parents. Le plus important pour lui est d’être revenu sur la terre de ses ancêtres. Ce pays est un pays très spécial ce n’est pas seulement sa propre maison mais celui des chrétiens et des juifs.

Georges partage souvent sa foi et connaît la providence de Dieu, il l’a expérimentée de nombreuses fois avec son épouse et ses enfants. Pour lui, il est important de faire face au problème, et ne pas chercher le bien-être par soi-même parce que Jésus pourvoit à toute chose. " Il est bon de savoir que quelqu’un prend soin de vous » partage Georges. En Europe, les gens reçoivent beaucoup du gouvernement mais ils ne sont pas heureux, les familles sont désunies, les enfants ne savent pas où aller. La situation est mieux au niveau économique mais il y a beaucoup de tragédies".

La situation est très compliquée car ils vivent avec des musulmans. Comment coexister sur cette terre si petite. Cette terre est la terre de la Bible où se trouve le message du salut. À Bethléem les chrétiens peuvent encore vivre et parler librement de leur foi. Il reconnaît la chance qu’il a d’être proche des lieux saints. Mais l’environnement n’est pas facile, les catholiques sont minoritaires. Mais pour Georges, Bethléem est une ville très spéciale. " Notre vie est difficile mais Jésus n’a pas promis le ciel sur la terre". dit-il. Son épouse aussi rencontre de nombreuses difficultés. Elle ne peut pas sortir toujours facilement dans ce monde musulman qui les entoure. Il y a aussi les difficultés au check point. Cela ne ressemble absolument pas au monde dans lequel elle a vécu.

En travaillant comme guide avec des pèlerins, Georges partage qu’il y a beaucoup de défis à relever. Beaucoup de pèlerins viennent en disant : « Je ne crois pas, je suis venu en pèlerinage pour accompagner ma mère, etc.. ». Mais il y a toujours quelque chose pour chacun ici, parce que le Seigneur est là. Le Seigneur est un Dieu de communication. Si les pèlerins sont bien guidés, ils vont être touchés par Jésus.

Cette terre est une terre spéciale qui a été témoin de la venue du Fils unique de Dieu (Jn 13), de l’effusion de l’Esprit (Ac 2).

Ensuite Georges aborde divers sujets concernant Israël, la présence musulmane ...

Depuis 1967, Georges voit des choses positives à la présence d’Israël. "Jusqu’à cette époque, les Palestiniens étaient très pauvres. Les Jordaniens collectaient tout l’argent pour la Jordanie. En 1967 beaucoup de Palestiniens se sont mis à travailler en Israël, ont gagné de l’argent et ont pu construire des maisons".

"Le Hamas a été créé en 1982. Ils ont entrepris les attaques suicides. Les Palestiniens ont commencé à avoir des problèmes énormes car Israël devait se défendre. Et pour cela Israël attaquait tout le monde même ceux qui étaient contre ces attaques suicides.

En 2000 : c’est le début le début de la deuxième Intifada. Les Palestiniens à ce moment là ont décidé d’utiliser les armes. Le première Intifada était la révolte des pierres. Lors de la seconde Intifada beaucoup plus de massacres ont eu lieu : beaucoup d’innocents sont morts des deux côtés. "Sharon est un grand premier ministre, au contraire de Barak son prédécesseur. Avec Barak, Israël bombardait les Palestiniens comme représailles aux attaques-suicides. Sharon, lui, entrait dans les villes palestiniennes et ne punissait que les responsables des attaques suicides. "Abou Mazen est le premier Palestinien qui a dit : les attaques-suicides sont du terrorisme. Il a été élu à 80% : Cela veut dire que 80 % de la population pense que les attaques-suicides sont des actes de terrorisme".

"En ce moment la période est plus calme car le Hamas est au gouvernement et il y a le mur.
"Le mur ? Il sépare les deux populations. Il a réduit de plus de 90 % les attaques-suicides. L’Autorité Palestinienne essaye aussi de travailler dans ce sens.
Mais quelques factions palestiniennes reçoivent des ordres par téléphone de l’extérieur (la Syrie. l’Iran) et ils essayent de nous créer des problèmes.
"Un jour le mur disparaîtra". Il y a deux ans, George a entendu le maire de Jérusalem dire :"le mur tombera comme c’est arrivé en Europe à Berlin".
"Ce n’est pas le seul mur qui existe au monde. Depuis 1964, à Chypre un mur aussi a été dressé, ce ne sont pas les juifs qui l’ont construit, mais les Turcs musulmans. Les murs ne sont jamais des solutions définitives. Un jour, il tombera quand il y aura les deux Etats. Quand la paix sera là, plus besoin de mur ! Non seulement vous pouvez avoir un mur entre deux pays mais il y peut y avoir aussi un mur dans les familles, un mur dans les couples : tous les murs doivent être détruits".

Au niveau politique : "Le conflit est très difficile car il n’y a pas de solution idéale. C’est le conflit le plus long du monde. Il y a beaucoup d’aspects à ce conflit, beaucoup de problèmes. Un des plus gros problèmes est la ville de Jérusalem. Un autre problème important est celui des réfugiés qui devraient revenir ici, ceux qui sont en Syrie, en Jordanie".

Pour Georges une solution sera peut-être trouvée à la seconde ou à la troisième génération. Le problème n’est pas seulement un problème de frontières, mais c’est un problème dans les coeurs. "Chacun pense qu’il est le seul à avoir le droit d’habiter sur cette terre. Les musulmans haïssent les juifs à cause des motivations religieuses. En Israël beaucoup de mouvements pour la paix se sont levés". La politique d’Israël : "C’est d’avoir de bons voisins palestiniens. Ils veulent un État palestinien indépendant. C’est eux qui font le premier pas pour la paix. Mais cela n’a pas encore changé du côté musulman. Le Hamas est dans le gouvernement et des fanatiques disent encore qu’il faut détruire Israël. Bien qu’Israël soit une bénédiction pour le Moyen-Orient".

" Beaucoup d’Arabes du Golfe viennent secrètement pour recevoir des traitements médicaux en Israël. Dans beaucoup de cas, Israël est une bénédiction pour le développement de la région, pour la sécurité... C’est comme si l’Europe était ici. Mais c’est aussi comme un mur qui arrête le fanatisme, pour ne pas avoir un autre Iran qui pourrait être le maître de cette région. Nous ne voulons pas qu’Al-qaïda règle la situation ici. Les Palestiniens ont besoin d’Israël".

Pourquoi les Palestiniens ont voté le Hamas ?

"Dans l’Autorité Palestinienne, pour la première fois, ils ont un accord politique. Avant, la population locale était sous les Ottomans pendant 400 ans, sous les Anglais pendant 30 ans, sous les Jordaniens pendant 20 ans, sous Israël. Ils sont Palestiniens depuis seulement 15 ans. Mais cela ne veut pas dire que dans l’Autorité Palestinienne les bonnes personnes sont présentes. Il y a aussi de la corruption. 800 millions de dollars ont été volés. La population a voulu punir ces gens corrompus, alors ils ont voté le Hamas. Tout le monde était content. Car l’Autorité Palestinienne n’était plus seulement le Fatah (parti d’Arafat). Maintenant l’Autorité Palestinienne comporte tous les partis : c’est quelque chose de nouveau.

C’est la seule réalité démocratique au Moyen Orient. La guerre civile n’a duré que quelques semaines, quelques éclats. En Irak, une fois libérée de Sadam, un gouvernement a été crée, puis ils ont sombré dans la guerre civile".

" Maintenant les Palestiniens ont un gouvernement d’unité nationale : le Fatah, le Hamas, et tous les autres. C’est la seule réalité avec plusieurs partis à l’exception d’Israël dans le Moyen-Orient. Ce n’est pas mal que les Palestiniens ont voté pour le Hamas. Nous étions mûrs pour cela".

Dans les pays arabes : " Les femmes ne peuvent pas voter, ne peuvent pas être représentées, ne peuvent pas conduire les automobiles. Chez les Palestiniens, quelques femmes sont maires, il y a une femme au gouvernement, les femmes conduisent les automobiles. Certaines musulmanes vont sans voile. Dans les autres pays, elles doivent toujours être avec des hommes pour sortir. Tout cela nous l’avons appris d’Israël " répète Georges. "Le parti travailliste en Israël peut décider des grèves. Les Palestiniens aussi font des grèves pour obliger le gouvernement à telle ou telle chose. Ils ont des partis, un Premier ministre avec un certain pouvoir. Ils sont après Israël la seconde réalité démocratique en Moyen-Orient".

La vie quotidienne avec les musulmans

"Les Palestiniens chrétiens qui sont moins de 2 % sont toujours en contact avec des Palestiniens musulmans. Le 25 décembre : c’est la fête nationale déclarée par l’Autorité Palestinienne pour Bethléem. Quand les musulmans font le Ramadan qui dure un mois, ils jeûnent. Les chrétiens les respectent. Ils évitent de manger, de boire, de fumer devant eux. Nous avons nos propres restaurants où ils peuvent venir, beaucoup de musulmans viennent parce que tout le monde ne veut pas faire le Ramadan".

"Dans un gouvernement démocratique, le risque est l’islamisation. 70 % de la population est contre le Hamas. Si aujourd’hui il y avait une autre élection, le Hamas ne reviendrait pas au pouvoir. Mais c’est important d’avoir le Hamas pour se débarrasser des 40 voleurs comme dans la caverne d’Ali Baba.

"À l’université, il y a des conseils d’étudiants qui représentent l’opinion publique. Il existe des élections dans ce conseil. Et on remarque que le Hamas est en train de perdre. Aujourd’hui ce serait 50 % le Hamas et 50 % le Fatah. Mais probablement aux prochaines élections, le Hamas n’aura que 20%. En Jordanie, les islamistes ont cru qu’il prendrait le gouvernement.

Pendant 11 mois de gouvernement de Hamas, les gens souffrent. À Gaza, quatre familles sur cinq ne mangent pas à leur faim".
"1948 : Israël a gagné la guerre de l’Indépendance. Les Israéliens ont eu raison car ils ont désarmé tout de suite les miliciens (Lehi, Stern, etc.). Ces mouvements juifs étaient considérés comme des mouvements terroristes.
Israël devait les détruire car il ne peut y avoir qu’une seule armée, qu’une seule police. En Palestine ce n’est pas fait, car ce n’est pas un État. Nous avons encore beaucoup de miliciens. Cette terre depuis la Terre de Canaan a toujours été un champ de bataille. Quand l’Iran ou la Syrie veulent quelque chose, cela se passe toujours en Israël".

Georges sait que tout le monde ne pense pas comme lui. Mais il n’a pas peur de dire ce qu’il pense. "Beaucoup aiment dire de mauvaises choses pour en tirer des bénéfices. Beaucoup aiment nourrir ce conflit avec la haine. Mais moi je suis de l’autre côté" termine Georges.

 

QUAND LES FEMMES SURVEILLENT L’ARMÉE

Antoinette Brémond

Tous les jours la radio nous informe que des Palestiniens recherchés ont été arrétés, et, parfois, qu’un projet d’attentat à la bombe a été déjoué. Cela nous rassure, mais une question reste là, en nous, sans s’exprimer : A quel prix ? Parfois nous entendons parler des checkpoints (point de contrôle)et des files d’attente, des humiliations....S’il est bien sûr nécessaire d’arrêter les terroristes, qu’en est-il des autres ? Et quels résultats, quelle influence sur les populations israélienne et palestinienne ?

Plusieurs Israéliens s’inquiètent en entendant parler de cette politique qui inflige à tout un peuple des mesures souvent draconiennes pour trouver des hommes dangereux et les neutraliser. Plusieurs associations se sont donc constituées pour essayer d’enrayer ce que certains appellent l’atteinte aux Droits de l’Homme.

En 2001, trois femmes israéliennes très impliquées dans la défense des Droits de l’Homme ont créé l’association Machsom-Watch. Ce nom a été formé d’un mot hébreu (machsom) signifiant barrage et d’un mot anglais (watch) signifiant observation, surveillance. Leur but, aller voir sur place, être présentes aux checkpoints, et essayer, par leur simple présence, d’améliorer la manière dont les soldats gèrent ces points de passage.

Actuellement elles sont 500 femmes à passer chaque semaine quelques heures à l’un ou l’autre de ces checkpoints.Ce sont des Israéliennes de la classe moyenne, laïques, cultivées, dont plusieurs viennent de familles habitant le pays depuis le début du vingtième siècle. Si leur point de vue politique est varié, elles ont un même engagement. Pour chacune, ces soldats des checkpoints pourraient être leurs fils, leurs petits fils ou ceux de leurs amis ou voisins. C’est là que beaucoup se posent des questions sur l’impact de ces checkpoints sur la société israélienne et l’avenir du pays.

Ce mouvement est réservé aux femmes. Leur présence tranquille et ferme impressionne. " En tant que civiles, notre regard est différent" précise Hanna Barag, l’une des responsables. " Au début notre but était de voir ce qui se passait aux checkpoints et d’en faire un rapport. Mais nous avons vite réalisé que notre présence même nous permettait parfois d’intervenir et d’influencer le comportement des soldats, facilitant ainsi le passage des Palestiniens, en particulier des malades, des enfants et des vieillards. Si notre groupe avait au départ un but plutôt politique, contre l’occupation et les checkpoints, il devint bientôt un groupe également humanitaire : défendre les Droits de l’Homme. Même si nous n’étions pas toutes d’accord de nous engager de cette manière, il était de plus en plus évident que nous ne pouvions pas simplement nous tenir là en observatrices, sachant que notre intervention pourrait aider, par exemple, une mère à franchir le checkpoint avec son enfant malade ayant besoin d’un traitement qui n’existe que dans les hôpitaux d’Israël."

Ces femmes sont là, deux par deux, le matin et l’après-midi. Elles regardent, et prennent éventuellement contact par téléphone avec l’armée ou la police pour les tenir au courant de ce qu’elles voient. En rentrant elle font un rapport. Que voient-elles ? Les actes de violence sont relativement rares. Par contre des dizaines ou centaines de personnes de tout âge attendant des heures sans savoir combien de temps cela va durer et s’ils vont pouvoir passer, est source de souffrance, d’humiliation, de détresse quotidienne.

Les checkpoints : passages surveillés

Nous savons tous qu’il y a des checkpoints pour entrer et sortir d’Israël. Ce que nous savons moins c’est que, à l’intérieur des Territoires, des centaines de checkpoints paralysent la circulation des Palestiniens désirant se rendre d’un village à une ville, d’une région à une autre. Formés de blocs de béton, de clôtures en métal, de fosses ou de monticules de terre, certains sont permanents, d’autres mobiles. Ce système, mis en place par mesure de sécurité pour saisir les terroristes recherchés, casse le tissu social palestinien, les empêchant de vivre une vie familiale, sociale, économique, éducative et professionnelle normale. Au niveau de la sécurité, on peut parler de réussite partielle à court terme. Mais à long terme ? C’est la question que se pose Hanna Barag.

Méthode de travail

Sept jours par semaine et deux fois par jour, quarante checkpoints sont supervisés par un petit groupe de femmes (2 à 3), du nord de Jénine au sud d’Hébron. A la fin de chaque mission, des rapports en hébreu et en anglais sont publiés sur leur site. En 2006, 3500 missions ont été effectuées. Cette même année , Machsom-watch a élargi son champ d’action en se rendant également sur des terrains militaires où sont arrêtés et jugés des Palestiniens.

"Même si nous avons élargi notre espace de travail", précise encore Hanna, "notre premier but reste l’amélioration des checkpoints."
  Tout d’abord suivre de près l’attitude des soldats et de la police.
  Essayer d’empêcher les actes de violence ou les mauvais traitements (rares).
  Noter tout ce que nous voyons, nos interventions, et les transmettre aux instances ayant autorité, l’armée, la police et le gouvernement, mais aussi aux medias, au public israélien.

La bureaucratie

Pour passer le checkpoint, il faut être en possession d’une carte magnétique remise par le D.C.O.( District Coordination Office). Cette carte est la condition préalable permettant d’obtenir les permis d’entrée en Israël ou dans les implantations. L’entrée est périodiquement refusé aux hommes de 16 à 35 ans désirant venir travailler en Israël. Obtenir ces permis nécessite de passer de bureaux en bureaux, certains étant en Israël. D’autre part, ceux qui, sans savoir pourquoi, sont sur une liste noire sont renvoyés chez eux. ...La bureaucratie... c’est la bureaucratie !

L’association Machsom -watch a donc décidé un jour de s’attaquer également à ce problème. Elle a envoyé 2000 lettres aux autorités leur demandant de rayer 2000 noms de la liste noire du service de sécurité. 35% des demande ont été acceptées. Certains s’en étonnent...

Les tribunaux militaires

Entre décembre 2005 et décembre 2006 Machsom -watch a également pu étudier 130 cas de détentions préventives décidés par 6 tribunaux militaires. Cela lui a permis de suivre de plus près la manière dont ces tribunaux travaillent, en tenant compte ou en violant les Droits de l’Homme.

En conclusion, des questions sans réponses

La position de Machsom-watch est claire : contre l’occupation et contre les checkpoints.

Pourtant une question fondamentale demeure pour ces femmes engagées : "En intervenant aux checkpoints pour y améliorer la situation des Palestiniens et les aider à "traverser" , ne collaborons-nous pas avec les forces de l’ordre ? Ne reconnaissons-nous pas, à notre insu, leur bien fondé ? L’armée ne nous utilise-t-elle pas comme "feuilles de vignes" ? N’avons-nous pas, par notre présence active, rendu parfois ces checkpoints plus tolérables et donc plus acceptables, pouvant donc continuer à exister ? "Quelle que soit la réponse que chacune de nous donne à ces questions, chacune continue pourtant à se rendre chaque semaine à son "poste de garde".

Hanna Barag, en concluant son rapport, reste sur cette autre problématique : "Malgré ces six années de mission, il y a encore des checkpoints et les Territoires sont encore occupés. Avons-nous véritablement une influence sur la situation, sur l’armée ? Nos rapports et téléphones fréquents aux autorités militaires pour les informer des éventuels troubles auxquels nous sommes confrontés ont-ils porté des fruits ? Notre travail est-il positif ? Avons-nous réussi notre "mission" ? Tout n’est pas si clair."

Machsom-watch, une association qui, par son engagement, est signe d’espérance pour les Israéliens et pour les Palestiniens.

 

CONNAISSANCE DU PAYS : VISITE DU QUARTIER JUIF RÉNOVÉ DANS LA VIEILLE VILLE DE JÉRUSALEM

Loïc Le Méhauté

Les ravages et les destructions occasionnés dans le quartier juif de la Vieille Ville par la Légion jordanienne au cours des combats de la guerre d’Indépendance (1948-49), devinrent indirectement une bénédiction pour Israël en 1967 après la réunification de la ville à la suite de la guerre des Six Jours.

En 1948 plus de 2 000 Juifs avaient été évacués de leurs pauvres demeures, plusieurs fois centenaires, construites dans le quartier juif au sein de la Vieille Ville, là où précisément habitaient, dans de somptueuses villas, l’aristocratie, l’élite juive et la caste sacerdotale à l’époque du deuxième Temple. La plus grande partie des vingt-sept synagogues et yeshivot (écoles talmudiques) du quartier avaient été détruites pendant les combats. Les autres lieux de culte servirent de latrines ou d’écuries... Cet exode ne fut pas une fin en lui-même car aujourd’hui dans ce quartier rénové de nouveaux habitants arpentent les ruelles, côtoyant les visiteurs israéliens et les nombreux touristes étrangers venus admirer ce chef-d’œuvre de reconstruction et d’aménagement des vestiges exhumés qui font revivre le passé juif de la capitale d’Israël à jamais. Comme l’avait prophétisé le prophète Jérémie, la ville sera reconstruite sur ses ruines : « Ainsi parle l’Éternel : Voici, je ramène les captifs des tentes de Jacob, j’ai compassion de ses demeures ; la ville sera rebâtie sur ses ruines [...]. » (Jé. 30. 18). Le texte biblique hébreu précise que Jérusalem sera reconstruite sur son tell (ses ruines).

 

 

Dès la réunification de la ville, le gouvernement entreprit un vaste chantier de restauration du quartier juif en prenant soin tout d’abord d’effectuer des fouilles archéologiques afin d’exhumer les ruines du passé, enfouies sous plusieurs mètres de gravats. Ceci ne correspond-t-il pas au cri du psalmiste : « [...]Mais toi Éternel tu régneras à perpétuité, et ta mémoire dure de génération en génération. Tu te lèveras, tu auras pitié de Sion ; car le temps d’avoir pitié d’elle, le temps fixé est à son terme ; car tes serviteurs en aiment les pierres, ils en chérissent la poussière [...]. » (Ps. 102. 13-23). La municipalité de Jérusalem, en collaboration avec la Direction israélienne des Antiquités, la Société de la réhabilitation et du développement du quartier juif, et le Ministère israélien des Affaires religieuses, fit revivre ce quartier en préservant son passé.

En déambulant à travers les ruelles du quartier juif, nos pas nous conduiront vers les différents musées et ruines qui agrémenteront notre visite.

 

La citadelle de David

Tout d’abord, la Citadelle de David à la porte de Jaffa : ce très beau musée de l’histoire de Jérusalem relate toutes les périodes historiques commençant par la rencontre d’Abraham avec Melchisédech à Salem. Cartes, maquettes et plans nous éclairent sur les différents envahisseurs qui, au jour du carnage criaient : « Rasez, rasez jusqu’à ses fondements ! » (Ps. 137. 7), tandis que les déportés de Sion se lamentant sur la ville proclamaient solennellement : « Si je t’oublie, Jérusalem, que ma droite m’oublie ! Que ma langue s’attache à mon palais si je ne me souviens de toi, si je ne fais de Jérusalem le principal sujet de ma joie ! » (verset 6). D’une salle à l’autre, on passe par la cour intérieure de la citadelle contenant les vestiges du passé : muraille des rois asmonéens, fondations des trois tours hérodiennes, restes romains et byzantins, arches de la muraille croisée, surmontées des créneaux des fortifications ottomanes. C’est ici que la Xe Légion romaine, la Fretensis, assura la sécurité de Jérusalem pendant plusieurs siècles. Du sommet des tours, un panorama grandiose étale devant nous les différents quartiers de la ville intra muros, tandis qu’à l’horizon nous pouvons admirer les quartiers construits à l’est et l’ouest de la ville. Le musée accueille des expositions temporaires et des événements culturels. Il y a quelques années encore un magnifique Son et Lumière animait les soirées de la Citadelle. C’est grâce à la Fondation de Jérusalem, créée en 1966 par feu Teddy Kollek, ancien maire de la capitale, visionnaire et homme d’action (1965-1993), que ce musée et d’autres virent le jour ainsi que des parcs, des promenades, le stade Teddy, le zoo... En ces termes, il incitait les visiteurs à parcourir la ville : « Je suis heureux de vous inviter à découvrir quelques-uns des trésors de notre capitale. Jérusalem est riche de sites, rayonnant chacun d’une force profonde pour tous les hommes, quelle que soit leur croyance [. ..]. »

Pour les plus sportifs, une promenade sur le chemin de ronde des remparts de la ville a été aménagée : le circuit peut se faire de la porte de Jaffa, soit vers la porte des Brebis, soit vers la porte des Immondices.

De la Citadelle, pour se rendre au cœur du quartier juif « Lev ha-Hova », on traversera le quartier arménien dont les hauts murs protégent la population qui se souvient encore du génocide turc (1915-17).

Afin de se replonger dans le passé récent de ce quartier, un arrêt s’impose au musée ethnographique du Vieux Yishouv (ouvert en 1976) : la vie et les traditions de la communauté juive des XVIIIe-XIXe siècles sont bien retracées à l’aide d’objets usuels et cultuels des deux cultures ashkénazes et séfarades. Les deux synagogues témoignent de l’activité spirituelle présente dès le XVIe siècle.

Plus loin, c’est le Cardo romain-byzantin. Celui-ci fut également reconstitué au cours des fouilles archéologiques entreprises dans le quartier juif par le professeur Nahman Avigad pour le compte de l’Institut archéologique de l’Université hébraïque de Jérusalem. Entre 1969 et 1982 les fouilles intensives mirent au jour le Cardo (axe) : cette grande rue commerçante de 22,5 mètres de large, traversant la ville du nord au sud, était coupée à angle droit par une autre rue orientée d’est en ouest. C’est l’empereur Hadrien qui, après avoir passé la charrue pour délimiter la nouvelle colonie païenne d’Aelia Capitolina, ordonna la construction de temples, d’arches, de palais, de rues (cardo maximus et decumanus)... Sous le Cardo, la Première muraille des rois asmonéens témoigne encore des fortifications imposantes de la ville au IIe siècle avant notre ère. Aujourd’hui des magasins redonnent vie à cette partie du Cardo. Au-dessus de nos têtes nous pouvons admirer les arches de l’époque médiévale. Une copie de la mosaïque de Madaba (ville jordanienne) nous éclaire sur le passé glorieux de Jérusalem à l’époque byzantine. Le candélabre à sept branches exposé dans le Cardo est la propriété de l’Institut du troisième Temple. Cet Institut très fréquenté par les visiteurs, tant israéliens qu’étrangers, expose les objets rituels et les instruments de musique déjà réalisés pour le « futur Temple ».

L’animation du quartier nous fait oublier le drame du 28 mai 1948. Le musée « Un dernier jour » grâce aux photos, prises à la capitulation des défenseurs et des habitants juifs devant la Légion jordanienne, retrace les dernières heures du quartier. Le photographe John Philipps accompagnant les soldats jordaniens immortalisa par ses clichés sa conquête et sa destruction. Ce jour là, les 1 400 Juifs restant furent expulsés, 340 furent faits prisonniers. Au total 69 Juifs tombèrent pendant le siège qui avait déjà commencé avant le départ des forces britanniques.

La Muraille d’Ézéchias, laissée à ciel ouvert, témoigne des fortifications impressionnantes qui repoussèrent Sennachérib, l’ennemi assyrien, en 701 avant notre ère : « Ézéchias prit courage ; il reconstruisit la muraille qui était en ruine et l’éleva jusqu’aux tours, bâtit un autre mur en dehors [...]. » (2 Ch. 32. 5). Était-ce la muraille que Néhémie mentionne : « la muraille large » ? (Né. 12. 38). Tout près, d’autres restes d’une Tour israélite, ainsi que des traces de feu et des têtes de flèches nous font penser au combat et à la brèche de Nabuchodonosor en 586 avant notre ère. Á quelques mètres de là, au Centre Ariel, une maquette basée sur les écrits bibliques et sur l’archéologie représente la ville à l’époque du premier Temple. Les guides du musée, à l’aide d’un programme interactif, vous familiariseront avec le mode de vie des habitants de la cité biblique.

Le Musée archéologique Wohl dans le Quartier hérodien. Cette visite souterraine nous met en contact avec l’opulence des villas des prêtres qui officiaient dans la Maison du Seigneur : des fresques et des stucs recouvraient murs et plafonds tandis que des pavements de mosaïque décoraient même salles de bains et bains rituels (miqvé)... Des photos prises au cours des fouilles, des cartes, des plans et des hologrammes nous font revivre les heures de gloire de la Jérusalem hérodienne. Les artefacts exhumés des ruines sont une réminiscence de la vie raffinée de l’aristocratie. Ici, une menora gravée dans des stucs témoigne de l’importance du Temple. Au milieu des ruines, d’imposants piliers de béton soutiennent l’école talmudique, la Yeshivat Hakotel. A la sortie de ce musée, nos pas nous conduiront à la Maison brûlée « Beit Katros », vestiges et fondations de la demeure d’une famille de prêtres préposés à la préparation de l’encens du Temple. Sous des monceaux de cendre, les archéologues exhumèrent les débris éparpillés des objets qui ornaient cette villa. Le Talmud se souvient de cette famille de prêtres : « Malheur à moi à cause de la famille de Katros [...] ». Un mois après la destruction du Temple (9 Av) par les flammes, ce quartier résidentiel de la « Ville haute » tomba aux mains de Titus et de ses légions, le 8 Ellul de l’an 70. Un programme audio-visuel nous retrace l’histoire du quartier.

Les synagogues : la synagogue Ramban, fondée par Nahmanide venu d’Espagne au XIIIe siècle, fut le premier lieu de culte juif à l’intérieur des murailles après les croisades. Dans la lettre envoyée à son fils Nachman, il décrit la Terre sainte : « Et que vous dirai-je en ce qui concerne ce pays ? Grand est son abandon, et sa désolation. Plus le lieu est saint plus sa destruction est grande. Jérusalem est la plus ravagée, la Judée plus que la Galilée [...]. Nous avons trouvé une maison en ruine qui a des piliers en marbre et un dôme gracieux. Nous en avons fait une synagogue, car la ville est à l’abandon, et ceux qui veulent s’approprier des ruines peuvent le faire [...]. ». La Hourva, centre de la communauté ashkénaze, construite vers 1740 et achevée seulement au XIXe siècle porta le nom de « Ruine ». De nouveau en ruine en 1948 elle fait depuis quelques mois l’objet d’une reconstruction. Le complexe des Quatre synagogues séfarades, connu sous le nom de la synagogue Ben Zakkaï (rouverte en 1972, après restauration). C’est ici que sont attendus Elie et le Messie d’Israël !... Les ruines de la synagogue Tiferet Israël (Gloire d’Israël) laissée en l’état face à la synagogue souterraine des karaïtes (rénovée).

Des vestiges de la présence chrétienne dans ce quartier furent également préservés : l’église Sainte-Marie-la-Neuve de Justinien (VIe s.) ; l’hospice et l’église Sainte-Marie-des-Allemands (Chevaliers teutoniques, XIIe s.).

En se rendant au quartier Batei Mahaseh, dans un petit renfoncement, un mémorial nous rappelle les combattants juifs tombés entre 1947-48. Les demeures de ce quartier furent construites au milieu du XIXe siècle pour abriter les pauvres et les visiteurs. Sur la place, une somptueuse et robuste bâtisse repose sur une série d’arches, c’est la Beit Rothschild, construite en 1891. Sur la façade on peut admirer les armoiries de la famille. Ici les archéologues et les architectes s’établirent pendant la reconstruction du quartier. Des transactions en cours pourraient permettre aux Juifs orthodoxes d’en devenir les propriétaires comme pour d’autres biens immobiliers du quartier. D’ailleurs, la plus grande partie de la population est déjà religieuse (600 familles religieuses et les étudiants des yeshivot peuplent le quartier fort de 4 000 habitants...).

En longeant la muraille des Turcs on descend vers la porte des immondices. Ici, au sud du mont du Temple, un autre chantier de fouilles permit d’exhumer des vestiges de l’époque du deuxième Temple (rues, bains rituels, arche de Wilson...), de le période romaine-byzantine (villas, thermes, citernes), et de la présence islamique (palais des gouverneurs omeyyades de Damas)... Ce parc archéologique de Jérusalem mérite un détour ! Vous pourrez vous promener sur l’escalier monumental de 64 m de large qui conduisait à l’esplanade du Temple par une porte Double. Plus loin un autre escalier ainsi que des citernes et bains rituels furent mis au jour près de la porte Triple (porte de la prophétesse Houlda). Ces fouilles furent effectuées par le professeur Benjamin Mazar. Au sommet de l’angle sud-ouest de la muraille de soutènement d’Hérode, un prêtre sonnait de la trompette pour annoncer les fêtes et les shabbats. Une pierre portant l’inscription « l’emplacement des trompettes » fut découverte au pied de la muraille. A l’entrée de ce jardin archéologique, le Centre Davidson, par son exposition et sa reconstruction virtuelle interactive du deuxième Temple, vous aidera à saisir la beauté de l’œuvre d’Hérode le Grand. Cet emplacement, appelée l’Ophel, séparait la ville du roi David du mont du Temple.

Devant le Mur des lamentations rebaptisé après 1967 en Mur occidental (Kotel Ha-Ma’aravi)), d’anciennes maisons vétustes, abandonnées par la population arabe pendant la guerre des Six jours (quartier des Maghrébins) firent place à une esplanade permettant aux milliers de visiteurs de s’approcher et de prier tournés vers le lieu le plus saint du judaïsme.

Les fouilles archéologiques à la porte des Maghrébins, conduisant à l’esplanade des Temples, le Haram es Sherif des musulmans, firent récemment « la Une » des journaux. Le Waqf islamique accusa Israël de vouloir endommager la mosquée El Aqsa.

La visite du Tunnel du Kotel, creusé le long de la muraille de soutènement d’Hérode le Grand, est un « Must » pour comprendre les entrailles de la ville ! Le Ministère israélien des Affaires religieuses est responsable de la gestion de certains lieux saints de la ville dont ce tunnel qui longe le Mur occidental. Une maquette amovible nous aide dans notre compréhension du développement de la ville au fil des siècles. On admirera : deux grosses pierres de plus de 500 tonnes, une rue hérodienne, des citernes de l’époque croisée, une immense salle construite sous les Ayyubides ou les Mamelouks (XIIIe-XIVe s.), une carrière, et un tunnel asmonéen creusé dans le roc pour alimenter en eau le mont du temple. Devant la porte de Warren on se souviendra d’une prophétie de Jérémie : « L’Éternel avait résolu de détruire les murs de la fille de Sion [...]. Ses portes sont enfoncées dans la terre [...]. » (La. 2. 8, 9). Le tunnel débouche au niveau de la Première station du Chemin de croix dans le quartier musulman. Quand les autorités israéliennes ont ordonné le percement d’une sortie à la fin du tunnel, il y eut une levée de boucliers de la part des autorités musulmanes. Depuis le début des recherches archéologique dans la Vieille Ville et autour des remparts, les autorités musulmanes des pays arabes font pression sur Israël par le biais de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) afin de préserver le patrimoine culturel de Jérusalem-Est. Israël considère ces griefs du monde arabe comme argument politique contre l’État juif.

Tous les travaux d’excavation et de reconstruction avaient pour but de faire de ce quartier non seulement un musée, qui retrace le passé victorieux de Jérusalem, mais aussi un lieu de résidence agréable et spacieux. Les fouilles prouvèrent la présence juive à Jérusalem malgré l’occupation étrangère.

Sur le mont du Temple aucune recherche archéologique ne fut entreprise par les autorités israéliennes car, après la guerre des Six Jours, le gouvernement israélien qui avait ordonné à l’armée de ne pas endommager les deux lieux saints musulmans, remit le mont aux mains du Waqf, l’organisme musulman chargé d’entretenir les biens de l’islam.

 

CULTURE : VISITE D’UNE SALLE D’ART JUIF PRÈS DE LA GRANDE SYNAGOGUE DE JÉRUSALEM

Suzanne Millet

« Vois-tu ce que je vois ? » Demande Abraham à son fils Isaac, quand après trois jours de marche pour aller au « lieu » que Dieu lui « indiquera » pour « faire monter » son fils, il voit enfin de loin le « lieu ». Isaac répond : « Je vois une belle montagne couronnée d’un nuage ». Abraham pose alors la question aux deux jeunes gens qui les accompagnent : « Vous ne voyez rien ? » et ils répondent : « Nous ne voyons rien, sinon des déserts ». « Peuple semblable à l’âne, qui ne voit rien et ne sait rien ! Restez ici avec l’âne ! »

À partir de cette question que le midrash met sur les lèvres d’Abraham : « Vois-tu ce que je vois ? » Nous sommes invités à regarder des oeuvres d’art sur le sacrifice d’Isaac, différentes représentations de ce drame ancré dans le coeur du peuple juif comme révélateur de la foi et exemple de sacrifice personnel. Et, suivant les midrashim qui commentent la Tora, les questions se posent : « Que pensait Abraham pendant cette marche ? Que pensait Isaac ? Comment Sarah a appris ce qu’avait vécu son fils et en a rendu l’âme ? Qu’est-ce que ce couteau ? Ce bois ? Ce bélier ? ».

Dans cette même salle, avec comme fil conducteur cette question : « Vois-tu ce que je vois ? » sont exposées des peintures d’enfants, de 7 à 16 ans, de Lettonie. Un concours fut organisé en 2005 en Lettonie sous la direction du ministère de l’Education et des Sciences, grâce aux documents des archives gouvernementales des communautés juives de ce pays. 80 écoles furent contactées, 20 ont répondu. Les élèves recevaient un calendrier avec les photos des anciennes synagogues, toutes détruites, brûlées pendant la seconde guerre mondiale. Il s’agissait :

1) de dessiner la synagogue de leur ville
2) d’imaginer la vie des Juifs dans le passé
3) d’exprimer la relation entre le passé et l’avenir

Ce concours avait pour but de promouvoir la connaissance des Juifs et du judaïsme dans ce petit pays où il y avait 94 000 Juifs en 1940 et 40 synagogues.

 

Heichal Chlomo

Les communautés ont été détruites et les centres communautaires, les synagogues brûlés. On connaît très bien la vie de ces communautés et leurs lieux de rencontre, les synagogues qu’on appelait « les petits temples » grâce au livre de Rabbi Nathan Barkan : « Les synagogues et les rabbins de 1914-1940 ». Rien que dans la ville de Riga, il y avait 43 000 Juifs de toutes tendances depuis les religieux antisionistes en passant par les religieux sionistes, les sionistes socialistes jusqu’aux socialistes nationalistes du Bund (parti socialiste ouvrier siégeant au Parlement). Il est difficile d’imaginer que ce sont des enfants non juifs ne connaissant pas de juifs autour d’eux qui ont fait ces dessins, tant la représentation de ces synagogues est riche en symboles juifs. Il y a une vingtaine de dessins qui ont été primés à Riga.

Elina, 15 ans, Riga. Avec cette légende « Toutes les routes mènent à la synagogue ». Une synagogue vue de haut, comme encastrée dans la ville, et formant une flèche sans doute vers Jérusalem. En haut, à gauche, comme dans le lointain, flottent discrètement les drapeaux de nations. En haut à droite, un visage de profil tout lumineux, tourné vers la synagogue : Est-ce Jérusalem ? le peuple ? la terre d’Israël ?

Christa, 15 ans. « L’histoire de la vieille église ». Une représentation comme abstraite des murs d’une église avec des signes juifs. Un morceau de partition de musique brûlé, une page d’un livre de prières, une étoile de David, une Tora : un livre avec une étoile de David dessus.

Alexandre, 16 ans. Le choeur d’une synagogue est dessiné dans un rouleau de la Tora ouvert.

Lina, 16 ans. « L’étoile de l’espérance » une synagogue qui brûle, des soleils, des étincelles, des étoiles dans les flammes qui sortent de la synagogue. Au centre, en haut, au-dessus de la synagogue en feu, une étoile de David plus grande comme nouvellement créée.

Rina, 15 ans. « Je suis dans l’espace et dans le temps ». Des yeux entourés de cheveux au-dessus ou plutôt de flammes, et sous ces yeux comme un fleuve de feu coulant sous la synagogue.

Deux enfants de sept ans ont représenté la synagogue pour la fête de Souccot : des toiles, des enfants, des guirlandes, un plat de fruits colorés.

Enfin deux dessins côte à côte, de la même synagogue de Preili, deux enfants de 14 ans. L’un représente une maison en bois, la synagogue de Preili, aux couleurs chaudes et gaies à la fois, avec des enfants, un chat, un homme, de la verdure. L’autre représente quatre pierres tombales noires dans la neige, un arbre dénudé, et un bouquet rouge au pied d’une grande pierre. Sur celle-ci une sorte de menora à six branches (6 millions de morts de la Shoah ?). Au milieu des dessins, on nous rappelle deux grandes figures juives de Lettonie. Le rabbin Abraham Kook (1865-1935) et Simon Doubnov (1860-1941).

Le rabbin Kook fut le premier grand rabbin ashkénaze sur la terre d’Israël. Il est bien connu pour son esprit de conciliation entre les religieux et les laïques.
Simon Doubnov fut un très grand historien du monde juif. Il s’est fait le porte-parole du nationalisme (non sioniste) juif de la diaspora. Il a écrit « L’histoire du peuple juif ». Il est fusillé à Riga par les Allemands à 81 ans.

Revenons à l’Aquedat Itzhak : la ligature d’Isaac, comme on dit dans la tradition juive. Chaque génération du peuple juif exprime sa propre foi, son obéissance, son espérance et son appel au sacrifice. Le bélier est la matière du sacrifice, c’est le support de l’esprit. Au milieu de la salle trône un gros bélier massif sculpté bois. Il est entouré de panneaux avec les photos de deux grandes synagogues lettoniennes qui n’existent plus et d’un panneau où sont inscrits tous les noms des lieux où vécurent les communautés juives de Lettonie.

Dès que l’on pénètre dans la salle, on ne peut pas ne pas être frappé par l’immense tableau de Reuven Rubin sur Jérusalem. C’est vraiment « la haute et splendide montagne couronnée d’un nuage » que vit Isaac. Au premier plan, au bas de la montagne un mur et un portail ouvert pour entrer et monter sur la colline. A-t-il pensé à ce portail qui existe au bas du quartier Montefiore ? Puis la montagne avec Jérusalem au sommet toute lumineuse et à l’horizon une montagne encore plus haute, couronnée d’un nuage. Le « lieu » que vit Abraham ou Dieu fait reposer sa Présence.

Une broderie, décoration de soucca, Bukara avant 1880, représente trois scènes :
1) la montée d’Abraham et d’Isaac sur la montagne : Deux cyprès, signe de la présence de Dieu. Abraham porte le feu et le couteau, Isaac le bois et un livre de prières. Les deux jeunes gens, avec leurs noms brodés : Eliezer et Ismaël, sont assis sous un arbre et fument tranquillement un narguilé, l’âne attaché près d’eux.
2) le sacrifice : le bélier dans un buisson, un grand arbre, le feu, Isaac est couché, lié sur un genre d’autel et l’ange prend le couteau de la main d’Abraham. Il y a toujours les deux cyprès.
3) Rebecca fait boire les chameaux d’Isaac, une longue caravane.
Un plat d’argent représente Abraham comme un guerrier turc, l’air terrible, il s’apprête à tuer son fils, un sabre à la main. Par contre les deux jeunes gens se reposent dans un paysage pastoral et paisible. Comme dans la broderie précédente, deux mondes se côtoient : celui du drame de ceux qui ont vu et entendu et celui de ceux qui « n’ont pas vu et ne savent rien ».

Une poupée russe peinte montre Sara debout et Isaac petit enfant couché. D’après un midrash, Sara a demandé à son fils ce qui s’était passé et elle a rendu l’âme quand elle a entendu que si l’ange n’avait pas arrêté Abraham, son fils aurait été tué par son père.

Cette visite d’une seule salle, la plus petite de ce musée, avec la combinaison de ces deux expositions tellement différentes, nous fait bien saisir le fait que la « matière » n’étant plus là, « l’esprit » demeure. Chaque génération, chaque pays, sinon chaque individu perçoit l’événement (la ligature d’Isaac) différemment, mais la réalité spirituelle demeure.
Comme le directeur du musée me le disait : « Il ne s’agit pas de contempler de l’extérieur de belles oeuvres mais d’entrer dans la vie juive »....Comme ces enfants de Lettonie qui ont tellement bien su « entrer » dans ces synagogues, les représenter avec leur perception d’enfants et donner vie et sens à ce qui matériellement n’est plus.

 

AUTOUR DE LA FIGURE D’HÉRODE

Michel Remaud

Beaucoup de revues et de sites Internet ont fait écho, de façon plus ou moins approximative, à la découverte de ce qui est très vraisemblablement le tombeau d’Hérode, et plusieurs d’entre eux ont fait un amalgame plus ou moins réussi entre le compte-rendu de cette découverte et l’histoire du massacre des innocents (Mt 2,16-18), auquel le professeur Ehud Netser, sauf erreur, n’a pas fait allusion dans sa conférence de presse. C’est du moins l’occasion d’évoquer l’arrière-fond de cet épisode dans la tradition juive.

Le livre de l’Exode raconte comment Pharaon, inquiet de voir les Hébreux se multiplier en Égypte, avait décidé l’extermination de tous les nouveaux-nés de sexe masculin (Ex 2,8-16). Dans le texte biblique, il s’agit d’une simple mesure d’ordre en quelque sorte démographique, destinée à empêcher le peuple hébreu de proliférer. Les sources juives anciennes ont amplifié ce récit en lui donnant une toute autre signification. On trouve par exemple dans un targum cette paraphrase du verset 1,15 de l’Exode : « Or Pharaon dit (que tandis qu’) il dormait il avait vu dans son songe que tout le pays d’Égypte était posé sur le plateau d’une balance et un agneau, le petit d’une brebis, sur l’autre plateau de la balance et le plateau où se trouvait l’agneau s’abaissait. Aussitôt il envoya quérir tous les magiciens d’Égypte et leur confia son songe. Immédiatement Jannès el Jambrès, chefs des magiciens, ouvrirent la bouche et dirent à Pharaon : “Un fils est destiné à naître dans l’assemblée d’Israël par le moyen de qui toute la terre d’Égypte est destinée à être dévastée.” C’est pourquoi Pharaon, le roi d’Égypte, avisa et dit aux accoucheuses juives etc. » (Traduction R. Le Déaut). D’autres sources présentent des variantes qu’il n’est pas question de transcrire ici, mais qui confirment cette réinterprétation du texte biblique : si Pharaon décide l’extermination de tous les nouveaux-nés, c’est pour éliminer celui d’entre eux qui constitue une menace pour son propre pouvoir.

On peut aisément faire le parallèle entre Pharaon et le roi Hérode, les magiciens consultés par le premier et les scribes interrogés par le second, Moïse et Jésus, qui échappent l’un et l’autre au massacre qui avait pour but de les éliminer, tandis que des enfants innocents sont exterminés. Il serait hautement invraisemblable que ce rapprochement soit fortuit, alors que Matthieu ne cesse de mettre en lumière, dans son évangile, les rapprochements entre Moïse et Jésus. Ajoutons que les noms des magiciens, dont le livre de l’Exode ne dit rien, se retrouvent dans la deuxième épître à Timothée (3,8), signe de l’antiquité de cette tradition.

Il n’entre pas dans notre propos de discuter l’authenticité de l’épisode de la visite des mages et du massacre des innocents. Relevons seulement que ces récits s’inscrivent parfaitement dans l’histoire et la géographie. L’Hérodium, dont Hérode avait fait une de ses résidences, ne se trouve qu’à sept kilomètres de Bethléem, et l’on peut dire qu’Hérode avait fait du massacre des innocents une de ses spécialités, faisant mourir ceux qu’il soupçonnait de menacer son pouvoir, à commencer par ses propres fils. Flavius Josèphe nous raconte même quelle mesure il avait imaginée pour que son peuple pleure sa mort. Sachant à quel point il était détesté, il n’ignorait pas que sa disparition serait inévitablement cause de joie. Il avait donc ordonné de rassembler tous les notables dans l’hippodrome de Jéricho, sans leur révéler la raison de cette convocation, et de les tuer tous dès qu’il serait mort, afin qu’il n’y eût « personne dans tout son royaume qui ne répandit des larmes » à la nouvelle de son trépas. L’historien ajoute que l’ordre ne fut pas exécuté, la sœur et le beau-frère d’Hérode ayant pris l’initiative de faire libérer au dernier moment les notables enfermés.

Et Flavius de conclure : « ... il ne s’est jamais vu une si épouvantable inhumanité que la sienne, de vouloir, lorsqu’il était prêt d’abandonner la vie, qu’il n’y eût point de famille où quelqu’un des principaux ne souffrît la mort par son ordre, afin que le royaume se trouvât en même temps tout en deuil, sans pardonner à ceux même qui ne l’avaient point offensé et dont il n’avait aucun sujet de se plaindre ; au lieu que, pour peu que l’on ait de bonté, on pardonne à ses ennemis lorsque l’on se trouve réduit en cet état. »

 

FLASHES D’ESPOIR : HISTOIRE DE L’AUTRE

Yohanan Elihaï

Un projet inhabituel, une gageure pour des peuples en guerre : écrire ensemble l’histoire des deux nations depuis le début des hostilités.

Un livre où sur la page de gauche on lit le récit de ce qu’ont vécu les pionniers juifs de 1917 (déclaration Balfour) jusqu’à la première Intifada en 1987, et sur la page de droite le récit des choses telles qu’elles ont été reçues et vécues par les Palestiniens. Le texte est paru en 2004 en français sous le nom “Histoire de l’autre”, éditions Liana Levi, 1, place Paul Painlevé 75005 Paris. L’éditeur présente ainsi le livre :

"L’institut Prime, une ONG fondée par des professeurs israéliens et palestiniens, a réuni dans ce livre utilisé dans les lycées des deux pays, l’histoire côté Palestiniens et côté Israëliens autour de trois dates clés : la déclaration Balfour de 1917, la guerre de 1948 et la première Intifada de 1987. La mise en parallèle des deux récits permet de mieux comprendre les divergences.

  Deux peuples, deux récits.

En temps de guerre, les nations racontent l’histoire d’un seul point de vue - le leur -, le seul considéré comme « juste ». Les héros des uns sont les monstres des autres. L’histoire, les droits et la culture de « l’ennemi » sont niés. Le conflit israélo-palestinien ne déroge pas à la règle. Ainsi, la guerre de 1948 est appelée « la guerre d’Indépendance » par les Israéliens et « la Catastrophe » par les Palestiniens.

Six professeurs d’histoire palestiniens et six professeurs d’histoire israéliens ont décidé d’écrire un livre qui réunisse l’histoire côté Palestiniens et côté Israéliens autour de trois dates clés - la déclaration Balfour de 1917, la guerre de 1948 et la première Intifada de 1987. Le texte arabe a ensuite été traduit en hébreu, et réciproquement. Utilisé depuis décembre 2002 dans de nombreux [voir plus loin des faits plus nuancés] lycées d’Israël et de Palestine, cet ouvrage constitue un défi et, nous l’espérons, un pas vers la paix."

Les deux auteurs principaux sont Dan Bar-On, professeur israélien de Psychologie Saciale et Sami Adwan, professeur palestinien d’Education, et le projet a été présenté à l’UNESCO le 19 novembre 2004.

Le journal Libération du 8 avril 2004 commentait le livre en ces termes :

« Dans les périodes de guerre et d’affrontements, les élèves des écoles ne connaissent qu’une partie de l’histoire, la leur, qu’ils supposent être vraie, constatent, en préambule, les initiateurs du projet. Souvent l’enseignement se trouve engagé dans un processus d’endoctrinement. (...) Les héros des uns sont les méchants des autres. Nous croyons qu’il est temps de former les professeurs à être des bâtisseurs de paix, à enseigner aux élèves leur propre histoire et celle de l’autre. »

[...] Les lecteurs de l’Hexagone portés à s’attribuer une impartialité protégée par la distance peuvent, dès les premières lignes, y tester la relativité de leurs a priori : c’est à... Napoléon, en effet, que les Palestiniens attribuent, d’emblée, la paternité des projets de « création d’un Etat juif en Palestine ». Cela, dès 1799, soit « bien avant l’émergence du mouvement sioniste » et, a fortiori, de la déclaration Balfour par laquelle le ministre des Affaires étrangères britannique assurera, en 1917, la Fédération sioniste de son soutien à l’établissement d’un foyer juif en Palestine. Mise en perspective significative : pour les Israéliens, la déclaration est le premier acquis d’un processus juridique international reconnaissant la légitimité des revendications sionistes sur la « Terre promise » et fondant la création d’Israël. Les Palestiniens, eux, y voient le point de jonction entre la volonté de domination occidentale sur le Proche-Orient et le mouvement sioniste. [...]

Et le journal concluait :
“Un manuel...dont le meilleur enseignement reste qu’on n’en sait jamais assez...”

La préface de ce livre est de Pierre Vidal-Naquet, juif français bien connu, non sioniste modéré, qui souhaite l’existence de deux États. Il se réjouit de l’effort commun et dit entre autres :

[...] Le fait essentiel et nouveau, absolument nouveau, est l’existence même de ce manuel. Le discours commun est pour l’instant impossible et le demeurera longtemps. Il n’empêche, les professeurs qui ont rédigé ces quelques pages l’ont fait dans un respect réciproque de l’autre. [...] Il est proprement prodigieux d’avoir tenté cette expérience. Que ce manuel soit dédié à la mémoire d’un instituteur palestinien, Youssouf Tumaizi, mort prématurément le 19 août 2002, est magnifique.

Les auteurs ont choisi trois moments de cette longue histoire : la déclaration Balfour qui, en novembre 1917, donne le coup d’envoi à la réalisation de l’utopie sioniste, laquelle se concrétise peu à peu jusqu’au Livre blanc de 1939 qui, à une date dramatique, marque un coup d’arrêt ; la guerre de 1948, qui est pour les uns une guerre d’Indépendance et, pour les autres, l’année de la Catastrophe ; troisième moment enfin, l’Intifada qui, depuis le 9 décembre 1987, a secoué les territoires occupés et entraîné les accords précaires d’Oslo.

Il y a dans toute histoire nationale quelque chose d’irrémédiablement subjectif et il serait infantile de s’en étonner et plus encore de s’en indigner. Comment le vécu des deux peuples ne serait-il pas incompatible ? [...] Certains silences sont assez étonnants. Personne ne parle de la rencontre, le 17 novembre 1947, de Golda Meir avec le roi Abdallah de Transjordanie. Il s’agit pourtant d’un événement capital car, par cette rencontre, Israël s’entendit en somme avec le roi pour qu’il n’y ait pas d’Etat palestinien.

Certes, de part et d’autre, on est parfois dans le mythe. Si la colonisation comme « retour » relève du mythe, que dire de la définition du « Mur occidental », dit mur des Lamentations, comme appartenant à la mosquée El Aqsa et devant commémorer non le Temple mais l’envol du prophète Mahomet sur la jument Bouraq ? Il n’est pas certain non plus que le roi David ait conquis Jérusalem sur un peuple arabe. Et de toute façon à quoi servent, de part et d’autre, ces légendes ? Les deux peuples ont été traumatisés, les Israéliens par le souvenir du génocide, les Palestiniens par celui de l’expulsion. Il serait puéril de leur demander d’écrire la même histoire. Il est déjà admirable qu’ils acceptent de coexister dans deux récits parallèles.

Je souhaite bon vent à cette magnifique entreprise.

A noter que le texte français, traduit de l’arabe et de l’hébreu, semble être un condensé des trois livrets composés dans notre région dans les deux langues. En effet le troisième volume doit paraître dams le proche avenir, occasion pour Or Kashti de nous donner dans le journal Ha-aretz du 9 avril dernier un long compte-rendu du travail. Voici quelques passages de l’article (le tout remplirait 4 pages) :

“Cet enseignement de l’Histoire fait découvrir qu’il n’y a pas qu’une seule vérité historique”, dit Rachel Zamir, une enseignante de l’Histoire dans une école de Tel-Aviv, qui a utilisé ces livrets ces dernières années. “Les étudiants comprennent vite la complexité, leur conscience reçoit l’existence de l’autre, et pour moi c’est un succès quand un étudiant demande qui a raison dans le conflit, en comprenant qu’il y a de la justice dans les deux camps.”
[...] Toutefois le ministre de l’éducation, Limor Livnat, du Likoud, apprenant début 2004 qu’il y avait une telle initiative (quelques professeurs faisaient déjà leurs essais), donna l’ordre d’arrêter l’initiative. Mais Rachel Zamir avait déjà fait son expérience durant une année.

[...] Le côté palestinien aussi faisait cela sans bruit, seulement quelques enseignants testant le texte dans leurs classes. “Il n’est guère facile d’enseigner l’Histoire d’Israël dans un camp de réfugiés”, remarquait l’un d’entre eux.

Le Prof. Adwan estime que quelques milliers de Palestiniens ont eu l’occasion d’étudier au moins une partie de ces textes. Il ajoute : “Certains élèves ont refusé d’étudier la version israélienne et ont quitté la classe. D’autres ont dit que c’est de la propagande sioniste qui déforme les faits. D’autres encore se sont demandé si les Israéliens, eux, étudiaient la version palestinienne. Mais il y a eu des réactions plus positives.”

Rachel Zamir de son côté remarque : “Pour moi, comme professeur enseignant l’Histoire, le fait que les étudiants comprennent qu’un même lieu peut avoir deux noms différents est déjà un succès. [...] Bien des étudiants ont reconnu que la position palestinienne a quelque chose de logique, certains ajoutant : Si j’étais à leur place, n’ayant pas d’État, je ferais peut-être pareil.” Au point qu’à un certain moment, Rachel Zamir s’est demandé si elle ne sapait pas la ‘juste cause’ du sionisme chez ses élèves. Mais au total, ils ne changeaient pas vraiment leur attitude pour l’essentiel. Et elle conclut : “Finalement nous avons planté une graine qui va pousser, et préparer une capacité psychologique plus grande d’envisager un compromis.”

Il y a encore, des idéalistes, mais bien réalistes, dans une situation apparemment désespérée.

 

AUTRES FLASHES D’ESPOIR

Yohanan Elihaï

Un concert de solidarité réunit des voisins israéliens et palestiniens

Des habitants juifs de zones proches du village de Jabal Mukaber, près de Jérusalem Est, sont venus soutenir cette semaine leurs voisins palestiniens lors d’un "concert de l’espoir". Ce concert était organisé en solidarité avec les habitants du quartier de Sheikh Sa’ad, qui pourraient être coupé du reste du village à cause du tracé controversé de la barrière de sécurité. Organisé par le Centre judéo-arabe de Jabal Mukaber, dont le slogan est "de voisins à voisins", le concert a attiré quelque 300 personnes, moitié juifs et moitié arabes.

"Le mur séparerait des gens de leur famille, de leur tissu social, de leur gagne-pain et des possibilités de soin", a dit Hillel Bardin, habitant de Talpiot-Arnona, qui fait partie du comité d’organisation de ce concert. "Nous voulons un autre tracé, qui contournerait le village au lieu de le traverser. Si la sécurité peut être obtenue sans détruire la vie de ces gens, ce serait sans aucun doute beaucoup mieux."

Les tribunaux ayant annulé ce tracé, le ministère de la défense a fait appel. Le verdict devrait être connu dans quelques jours. (Ha’aretz, 4 mai 2007)


Coexistence virtuelle

Des entrepreneurs israéliens et palestiniens sont en train de co-développer un système d’exploitation pour le Web 2.0 nommé G.ho.st, ordinateur virtuel gratuit accessible à partir de n’importe quel navigateur. Selon les concepteurs, ce programme "complètera Windows, et à terme, le remplacera." A première vue, G.ho.st ressemble à n’importe quelle start-up ambitieuse, mais un examen plus précis de son équipe palestino-israélienne révèle autre chose.

G.ho.st, abréviation de Global Hosted Operating System, est un "ordinateur virtuel", système d’exploitation à partir du web qui permet à ses utilisateurs d’avoir accès en ligne à leur bureau, à partir de n’importe quel navigateur.

L’entrepreneur israélien Tsvi Shreiber est le fondateur et l’artisan en chef du projet qu’il a monté avec ses fonds privés, utilisant en partie les bénéfices réalisés par la vente lucrative de sa société Unicorn à IBM. Avec des bureaux à Jérusalem et à Ramallah, presque tous les 15 employés de G.ho.st sont des citoyens arabes israéliens ou viennent des territoires palestiniens.

Shreiber a connu son associé Tareq Maayah par une relation commune. Ayant fait ses études aux Etats-Unis, Maayah s’est formé une expertise dans ce domaine en dirigeant les technologies d’information et de communication chez Siemens, et en faisant partie du conseil d’experts du ministère palestinien de la poste et des télécommunications.

G.ho.st prône la collaboration : pas seulement en ligne, mais aussi dans la vraie vie. Shreiber et Maayah ne prouvent pas seulement que la coexistence est possible, ils promeuvent aussi l’idée sur le plan financier, en reversant 10% des bénéfices à la Fondation G.ho.st pour la paix. Leur but est de "promouvoir la paix au Moyen-Orient par la collaboration commerciale et sociale des individus des deux côtés sur le terrain.

La technologie G.ho.st est en phase de test. Certains pourraient ressentir un malaise à l’idée d’avoir leur bureau en ligne, pour des raisons de sécurité des informations. Pour Shreiber, les services de G.ho.st sont "sûrs et professionnels". La société utilise les services de stockage d’Amazon, qui garantit à l’utilisateur le secret de l’information.

Le modèle économique de G.ho.st revient à se faire payer par les fournisseurs de services qui vendent leurs services par l’intermédiaire du bureau G.ho.st, alors que l’utilisateur profite gratuitement de ces services.
Pour Shreiber, la société pourrait même se passer de publicité, pour que le service soit aussi "user-friendly" que possible. (Yediot Aharonot, 5 mai 2007)


Oliviers de la paix

Citons cette fois un message reçu par e-mail, un article de Ha-aretz traduit par Gérard, de la Paix Maintenant en France, avec son accord bien sûr :

[une petite brève pour se faire plaisir. Nous avons suffisamment dénoncé l’arrachage d’oliviers palestiniens par les colons (1) pour nous réjouir un tout petit peu] Ha’aretz, 18 avril 2007 http://www.haaretz.com/hasen/spages/849675.html

Israël, la Jordanie et l’Autorité palestinienne vont planter 4 millions d’oliviers

Trad. : Gérard pour La Paix maintenant

Le vice-premier ministre israélien Shimon Peres et le ministre de l’agriculture Shalom Simhon ont créé une commission chargée de discuter de la plantation de 4 millions d’oliviers conjointement avec la Jordanie et l’Autorité palestinienne, pour la production d’huile d’olive. D’après ce plan, lancé par Peres, cette huile d’olive sera commercialisée sous une marque commune dans les trois pays.

Les jeunes arbres seront plantés essentiellement dans des oliveraies déjà existantes. Peres s’occupera du financement du projet, et Simhon supervisera sa mise en oeuvre. A la demande de Simhon, le Fonds national juif participera, en fournissant les jeunes plants et en préparant le terrain avant la plantation.

Au cours de cette réunion, il également été décidé qu’Israël et l’Autorité palestinienne coopéreraient en luttant contre la mouche de l’olive, un fléau qui cause des millions de dommages et nuit à la rentabilité de ce secteur. Ces dommages sont particulièrement importants dans les territoires de l’Autorité palestinienne, où ils sont estimés à 100 millions de shekels. Lors d’un salon de l’industrie du vin et de l’huile d’olive, à Vérone, Israël et l’Autorité palestinienne ont partagé un stand, dont la presse italienne s’est largement fait l’écho.

(1 ) Voir par exemple : "Qui va s’occuper des destructeurs d’oliviers ?" http://www.lapaixmaintenant.org/article1191, et "Des colons abattent 200 oliviers près de Naplouse" http://www.lapaixmaintenant.org/article1189 Mais aussi : "Israéliens et Palestiniens plantent ensemble 1.200 oliviers"

 

CHANT DU MOIS ET HUMOUR EN FINALE

Yohanan Elihaï

Chant du mois : Déluge

Rona Keinan

Si cette fois l’on survit au déluge,
Chaque sourire sera autre, blessé,
Et si je le répète, encore et encore,
Tu resteras vingt ans, ou... jusqu’au soir.
On a appris à patienter, à renoncer,
A surveiller chaque parole.

Tout se figera, soudain,
Si nous avons un instant au coin d’une rue,
Pour nous serrer dans nos bras, et puis partir,
Comme s’il était possible de relâcher,
D’aimer moins fort.

Avec un sourire effreiné je reviendrai
Faire payer les promesses, casser le mur,
Et t’illuminer,
Encore que rien ne soit plus grand
Que la souffrance qui se fredonne
Sous un autre nom qu’on lui donne.

Tout se figera, soudain,
Si nous avons un instant au coin d’une rue,
Pour nous serrer dans nos bras, et puis partir,
Comme s’il était possible de relâcher,
D’aimer moins fort.

Et l’humour en finale...

et d’abord une correction (avec un sourire - c’est la rubrique "humour"), à propos de l’histoire du numéro précédent. Un lecteur a dit que cette histoire d’un collecteur d’impôt rappelait les accusations antisémites : les Juifs soutirent de l’argent !
Une double réponse :

  j’ai oublié de dire que, au fond, cela se passe peut-être à Paris et qu’alors le collecteur d’impôts était sans doute un non-juif.

  et puis, à vrai dire, j’ai pris cela dans un livre d’histoires juives, écrit par un Juif...

Et maintenant l’histoire d’aujourd’hui :

Un prêtre et un rabbin se promènent dans la campagne (depuis le Concile tout est possible).
Le rabbin explique au prêtre que dans le judaïsme on remercie Dieu tout le temps : il y a une bénédiction pour toute circonstance : au matin d’un nouveau jour, pour un nouveau fruit, une bonne nouvelle, la beauté de la nature... Le prêtre est un peu jaloux.
Mais voilà qu’un oiseau qui passe lâche sur l’épaule du rabbin un "petit souvenir".
Le prêtre demande alors avec un sourire :

  Pour cela aussi vous avez une bénédiction ?

  Euh... oui, bien sûr : Béni sois-tu Seigneur, qui n’as pas donné des ailes aux vaches.
(Non, non, ce n’est pas une histoire anti-cléricale).