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 « Seigneur Jésus,
apprenez-nous à être généreux,
à vous servir comme vous le méritez,
à donner sans compter,
à combattre sans souci des blessures,
à travailler sans chercher le repos,
à nous dépenser sans attendre d’autre récompense
que celle de savoir que nous faisons votre Sainte volonté. »

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N° 21 – Mars 2005

 

Sommaire :

-    Editorial

-    Dossier : - le Statu Quo

-    Extraits du Firman de 1852 établissant le Statu Quo

-    Une visite pastorale au I9eme siècle

-    Histoire : La guerre du Golfe

-    Un projet original : une banque du temps.

-    Le jeu d'échecs d'Ariel Sharon

-    Resto du cœur version israélienne

-    Pauvreté en Israël : regardons-les dans les yeux

-    Flashes d'espoir

-    Nouvelles au fil du mois...

-    Chant du mois et l'humour

Editorial

L'actualité en Israël n'est jamais simple ! Et la situation toujours complexe, le dossier sur le «Statu Quo » en témoigne. Cette expression est souvent entendue ici et vous verrez par vous-même tout ce qu'elle recouvre depuis des siècles ! Dire « il n'y a qu'à ! » c'est facile et bon marché, mais c'est faire fi de l'histoire de ce pays et des différentes puissances religieuses ou politiques qui ont exercé de véritables pouvoirs, des luttes multiséculaires qu'on ne peut rayer d'un trait de plume. Le « Statu Quo » en est la preuve avec aussi la capacité d'en majorer le pouvoir pour des réalités qui ne dépendent pas de lui.

Revenons maintenant à aujourd'hui. Il n'y a pas de doute que depuis quelques semaines, avec le nouveau gouvernement de l'Autorité Palestinienne, un véritable espoir de paix renaît au milieu des populations, espoir combien fragile mais néanmoins réel ! Quelques semaines d'accalmie sans attentats, et voilà qu'aujourd'hui, 26 février, en ouvrant la radio ce matin, on est de nouveau frappé par l'horreur : un attentat terroriste qui frappe des jeunes à Tel Aviv, une veille de Shabbath, attentat non encore revendiqué ! L'Autorité Palestinienne a réagi rapidement et positivement. Abou Mazen a déclaré à ses policiers « qu'il voulait des résultats et pas seulement des efforts » pour trouver les coupables.

Réalité complexe et paradoxale ! Dernièrement un article a attiré mon attention, après les « accords d'Oslo », c'était l'euphorie, les deux peuples espéraient arriver enfin à vivre en paix, et l'on est allé d'espoir en déception pour arriver enfin à l'Intifada El Aqsa et à un désenchantement total. Maintenant que l'on semble avoir atteint le fond de l'abîme, est-ce que cela va permettre d'envisager les chances d'une paix de compromis israélo-palestinien ? L'espoir est permis, et le plan de retrait progresse. Ariel Sharon a déclaré récemment que parmi les centaines, les milliers de décisions qu'il a dû prendre qui entraînaient la vie ou la mort, la plus difficile était bien celle du retrait !

Ce chemin vers la paix se prépare et des pas importants semblent commencer à être entrepris au niveau de l'Education. Un rapport récent de la Commission Dovrat fait couler beaucoup d'encre et j'ai pu lire différentes analyses sur des écoles en Israël où les enfants apprennent l'arabe. C'est évidemment plus facile lorsque dans une ville, comme Haïfa par exemple, on retrouve les deux populations. L'école de Neve Shalom, fondée par le Père Bruno Hussar, semble être un modèle et permet de poser les vraies questions. Je pense à la fierté d'un père de famille israélien disant : « quand j'emmène mes fils dans la Vieille Ville, ils arrivent à lire les affiches en arabe », et à une maman arabe, « ma fille apprend l'hébreu à l'école, je l'apprends aussi, je ne veux pas qu'elle me dépasse ! » Cet apprentissage de la langue est

un moyen indispensable pour que la communication s'élabore. Il est indispensable que les nouvelles générations apprennent, sinon à s'aimer, du moins à se connaître et à se comprendre pour pouvoir vivre ensemble ! Le chemin risque d'être long mais il est bon de voir qu'on commence à l'entreprendre et avec les plus jeunes.

Myriam Selz

Dossier du mois

Le Statu Quo

Tous les pèlerins qui visitent la basilique du Saint-Sépulcre ou de l’Anastasis, suivant sa dénomination occidentale ou orientale, sont choqués par la division des chrétiens en ce lieu. Chacun y a sa chapelle, son lieu de culte, ses icônes ou ses statues défendus avec âpreté. Les cérémonies, offices et processions s'y succèdent quand ils ne se superposent pas les uns aux autres dans l'harmonie ou la cacophonie suivant les moments et les lieux. Tout s'y répète d'une manière immuable et intangible comme figé pour l'éternité. Les groupes ne peuvent célébrer où ils veulent et quand ils veulent. Ils se heurtent à des religieux ou des laïcs, de l'une ou l'autre confession, à la mine plus ou moins avenante, qui leur font respecter un ordre qu'ils ne comprennent pas et dont la logique leur échappe bien souvent. Mais alors surgit le mot magique qui, s'il clôt toute possibilité de négociations, devrait leur ouvrir la compréhension: Statu Quo.

Définition

Alors qu'est donc ce Statu Quo ? Que régit-il exactement et d'où vient-il ? Une précision s'impose d'emblée. Souvent, par rapport à telle ou telle coutume ou tradition des Eglises locales ou des sanctuaires, on invoque le Statu Quo. Il y a là une usurpation du terme, mais qui révèle à la fois combien ce Statu Quo a une réputation qui étend son champ d'influence au-delà de la réalité -on ne prête qu'aux riches- et qui révèle aussi combien l'Eglise de Terre Sainte a été longtemps figée, se protégeant derrière des traditions qu'elle croyait inamovibles. S'il n'y a pas usurpation disons qu'il y a au moins confusion dans l'esprit de beaucoup entre une situation traditionnelle des rapports entre communautés et le « Statu Quo » au sens strict qui recouvre une réalité bien précise. C'est ce dernier qui fait l'objet du présent article.

Nous pourrions le définir ainsi : il s'agit d'un accord, issu d'un état de fait qui régit les rapports entre les communautés orthodoxes, latines et arméniennes dans la répartition des lieux, des temps de prière dans les sanctuaires où elles sont simultanément présentes, à savoir : la basilique du S. Sépulcre à Jérusalem, la basilique de la Nativité à Bethléem, le tombeau de la Vierge à Jérusalem et l'oratoire de l'Ascension sur le Mont des Oliviers. D'emblée nous voyons que le Statu Quo, stricto sensu, ne régit pas les rapports d'une manière générale entre les différentes confessions et qu'il ne concerne que quatre sanctuaires bien définis. Pour essayer de comprendre sa teneur il nous faut faire un peu d'histoire.

Il est essentiel à travers la présentation des événements de comprendre les mécanismes et les attitudes liés à une époque, à un lieu avec un état d'esprit particulier. Quels que puissent être les regrets, les contentements ou les appréciations sur l'histoire, nous ne devons surtout pas projeter sur les héritiers des acteurs d'alors, des jugements intempestifs.

Il n'est pas question non plus d'entrer dans des analyses et des appréciations tant historiques qu'ecclésiologiques dans le cadre de cet article, mais nous percevons bien qu'à travers ce petit sujet des questions beaucoup plus vastes sont sous-jacentes : le rapport entre Eglise locale et Eglise universelle ou autres Eglises nationales, l'ingérence du politique, tant au niveau diplomatique qu'au niveau des autorités locales exerçant le pouvoir.

Un enracinement historique

Lorsqu'on 1187, Saladin conquiert Jérusalem, il laisse intact les lieux saints et le culte chrétien. Cependant, il confie le saint Sépulcre à deux familles musulmanes et fixe une taxe d'entrée.

En 1333, les souverains de Naples obtiennent du sultan Malek el Nasser l'établissement définitif des Latins dans les sanctuaires qui seront confiés aux fils de St François. Aux témoignages des pèlerins, chaque nation1, on en compte pas moins de sept, a un lieu qui lui est réservé dans les différents sanctuaires.2 Il semble donc que si les droits n'étaient pas les mêmes pour tous, chacun jouissait d'un lieu « in perpetuum » et que « les sultans favorisaient cette situation et voulaient que tous les sujets chrétiens pussent officier dans les sanctuaires de Jérusalem et de Bethléem ».3

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1 Nation : terme désignant une communauté religieuse et juridique sous la direction d'un chef, dans le cadre structurel d'organisation des dhimmis dans l'Empire Ottoman.

2 Ludolphe de Sudheim, de itinere sancte liber, cité par S. Sayegh, p.4

3 S. Sayegh, p.5

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La situation politique locale et les rapports vont considérablement changer à partir de la conquête de Jérusalem par Sélim I en décembre 1516. C'est effectivement sous le régime ottoman et en partie en raison de son mode de fonctionnement que va se mettre en place le processus qui va aboutir à la création du Statu Quo dont l'élaboration connaît trois étapes : deux grandes périodes de convulsions pour le « Statu quo de fait » puis l'établissement « Statu Quo de droit » pour reprendre les catégories de S. Sayegh, auteur d'une étude sur la question4.

Les facteurs d'une évolution

Parmi les facteurs importants de cette évolution il faut noter le changement survenu au sein de l'Eglise orthodoxe de Jérusalem. Elle dépend du Patriarche de Constantinople et lors de la prise de Jérusalem elle a à sa tête un évêque d'origine arabe : Abdallah. A sa mort, c'est un Grec, Germain, qui est imposé comme évêque à la communauté, mettant fin à la lignée des évêques d'origine locale. Dans le même temps est fondée la confraternité hagiotaphite qui n'admettait pas en son sein d'Arabes orthodoxes et le patriarche Paisios (1645-1660) leur interdit la vie monacale, coupant ainsi au clergé local toute possibilité d'accéder à l'épiscopat. Le statut actuel du « Patriarcat orthodoxe grec-hellène de Jérusalem » fut élaboré en 1875 lorsqu'il devint autocéphale.

Dans le cadre de cette lutte entre communautés, où le pouvoir civil est appelé à trancher, différents arguments entreront enjeu auprès des autorités. Les Grecs, sujets du sultan, insistent sur le fait que les Latins sont des étrangers, ne payent pas le Kharadj. Etrangers, ils sont aussi accusés d'être des espions au service des puissances européennes. Les k puissances occidentales notamment par le biais de leur consul à Jérusalem se faisaient les avocats des Latins et des Franciscains, face au pouvoir local dans le cadre des capitulations5. Le sort de l'Eglise catholique latine ainsi lié aux puissances occidentales, était très tributaire des fluctuations des rapports politiques avec le régime ottoman.

Un autre facteur essentiel dans les rapports conflictuels entre chrétiens qui entra en ligne de compte fut la vénalité du régime, tant au niveau local qu'au niveau des autorités centrales, d'ailleurs fort lointaines. Cette attitude permettait ainsi au plus offrant de voir confirmer par le pouvoir civil ce qu'il présentait comme étant ses droits indépendamment de toutes considérations juridiques.

Une situation conflictuelle

Dans son ouvrage sur la question S. Sayegh parle d'un Statu Quo de fait pour la période allant de 1517 à 1852. L'expression, si elle est intéressante pour marquer la différence et la continuité avec la période postérieure, ne correspond pas à la réalité qu'un tel terme implique. En effet cette période se caractérise par une fluctuation conflictuelle de la situation. Nous ne pouvons entrer dans les détails épiques et douloureux de cette longue guerre des sanctuaires qui fut essentiellement une confrontation entre Latins et Grecs. Les plus petites communautés disparurent, notamment la communauté géorgienne affaiblie qui cédait toutes ses possessions aux Grecs vers 1629.

- De 1634 à 1636, les Latins perdent une partie importante de leurs droits au profit des Grecs. Un firman les rétablit I    dans leurs droits en 1636. En 1637, les Grecs reprennent les clés de Bethléem et du S. Sépulcre et personne ne peut officier sans l'autorisation du Patriarche. En 1690, un nouveau firman rétablit les Latins dans tous leurs droits.

En 1740, la France obtint des Capitulations qui furent interprétées comme un droit de protection des Latins (art. 33), comportant comme base ce firman de 1690. C'est ce que l'on appelle le « Statu Quo ante » qui est invoqué dans les revendications des Franciscains jusqu'en 1919.

En effet en 1757, les Latins furent évincés du S. Sépulcre et ils ne furent rétablis que partiellement dans leurs droits.

L'établissement du « Statu Quo » de droit 1852

Comme nous venons de le résumer succinctement la situation des différentes communautés et leurs droits ont énormément varié durant trois siècles, sous l'effet des différents facteurs que nous avons présentés. Alors comment va-t­on arriver à la fixation de ce Statu Quo qui sera finalement comme une glaciation d'une situation à un moment donné et qui sera appelé à perdurer ?

Le 31 octobre 1847, l'étoile marquant le lieu de la Nativité avec une inscription latine, preuve de la propriété, disparut. Ce sera, nous le verrons, l'origine de la guerre de Crimée. Cette question ne trouvant pas de solution immédiate, le Patriarche latin, nommé récemment à la suite de la restauration du Patriarcat la même année, s'appuyant sur la diplomatie française présentait une réclamation générale auprès de la Porte pour retrouver tous ses droits perdus en 1757.

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4. S. Sayegh, le Statu Quo des lieux saints, nature juridique et portée internationale, corona lateranensis 21, PUL, Rome, 1971

5. Capitulations : ou Imtiyazat traités concédant des privilèges commerciaux et sur la sécurité générale des personnes entre une puissance occidentale et l'empire ottoman.

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De son côté la Russie, dans le cadre de sa politique internationale se pose en protectrice des Grecs-Hellènes malgré tous les problèmes de rapports entre les Grecs et les Russes dans les détails desquels nous ne pouvons entrer.

A partir de 1850, la France réclame pour les Latins le retour à la situation « ante », celle des Capitulations de 1740 et du firman de 1690. De leur côté les Grecs, soutenus par la Russie, réclament le maintien de la situation « nunc », situation établie par le coup de force de 1757. Une commission mixte est créée par la Sublime Porte pour vérifier le bien fondé des réclamations des Latins. La Russie intervint alors récusant le traité des Capitulations de 1740. La commission est dissoute.

Les Turcs proposent alors comme solution de mettre en commun les sanctuaires possédés par l'un ou l'autre. Les deux refusent.

Le Firman du « Statu Quo » de 1852

Les Turcs décident donc de figer la situation telle qu'elle est et c'est le texte du firman de 18526. Il ajoute aux Grecs le droit d'officier une fois par an au sanctuaire de l'Ascension, sur le Mont des Oliviers.

La Russie continua sa ligne politique et envoya la mission Menchikoff à Constantinople pour renforcer le Statu Quo et obtenir un « protectorat » sur les chrétiens orientaux dans l'empire Ottoman. Sur le premier point elle acquit un certain succès. Les Turcs tardant à répondre sur le second point une crise est ouverte qui débouchera sur la guerre de Crimée (1854-1856).

La Pérennité du « Statu Quo »

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, le congrès de Paris, 1856, qui mit fin à la guerre de Crimée, ne parla pas du Statu Quo et de la question des Lieux Saints alors que celle-ci avait été l'une des causes immédiates de l'ouverture du conflit.

C'est à l'occasion du traité de Berlin 1878, que le Statu Quo de 1852 fut expressément mentionné. L'article 62 mentionne : « ...Les droits acquis à la France sont expressément réservés, et il est bien entendu qu'aucune atteinte ne saurait être portée au Statu Quo dans les Lieux Saints. » Ainsi il devenait solennellement définitif pour la diplomatie européenne et avait désormais une portée juridique de droit international.

Le climat d'animosité ne cessa pas pour autant entre communautés et la liste des incidents jusqu'à la première guerre mondiale qui mit fin au régime ottoman serait longue.

Le traité de Sèvres en 1920, qui règle"la question de la région, à la suite de la première guerre mondiale, dans son article 95 engage la puissance mandataire à créer une commission « pour étudier toutes questions et toutes réclamations concernant les différentes communautés religieuses ». Le texte inclut donc la question du Statu Quo. L'article 14 du mandat prévoit la même chose mais la commission ne fut jamais créée. L'autorité mandataire britannique se dote du droit d'intervention pour la sauvegarde des bâtiments8.

Dans l'histoire contemporaine, le royaume Hachémite puis Israël mentionna toujours la reconnaissance et le respect de l'intégralité des droits existants concernant les Lieux Saints. Les incidents entre communautés ne cessèrent pas pour autant.

Comment fonctionne le Statu Quo ?

En plus du firman de 1852 qui régit les grands principes, il y a une réglementation extrêmement minutieuse qui régit les droits et usages dans une sorte de droit coutumier : droit de passage, horaires et déroulement des offices ; droit de nettoyage, etc....Ce qui est le plus étonnant c'est qu'il n'existe aucune rédaction officielle de ce droit. Il existe en fait deux textes qui n'ont jamais été publiés.

Des principes de droits originaux

Les grands principes du Statu Quo sont en fait au nombre de trois :

« tout maintenir tel quel » c'est à dire qu'il n'y a aucun droit de changement depuis la place des tapis, le nombre des lampes jusqu'aux habitudes les plus bénignes. A fortiori on ne peut non plus rien ajouter. Tout changement serait source de conflit. C'est pourquoi l'horaire des Jours Saints est resté tel qu'il était avant les réformes liturgiques de Vatican II.

« le consentement des communautés » il est impossible de faire des travaux sans l'accord des trois communautés. Ainsi face à un accord impossible entre communautés ce sont les puissances étrangères (Turquie, France et Russie) qui reconstruisirent le dôme du S. Sépulcre. Depuis de grands progrès ont été faits : campagne de restauration

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6 voir ce texte en annexe 1

7 De Clercq, recueil des traités de la France, Paris, 1880, t. XII p. 335

8 Antiquies Ordinance, 31 décembre 1929

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des années 1960-1970, mais on se souvient que les échafaudages du dôme demeurèrent fort longtemps avant qu'un accord ne soit conclu sur son décor !

« fixation des ayants droit » les mêmes communautés doivent rester dans les lieux saints : Grecs-Othodoxes, Latins et Arméniens. Les Coptes, les Syriens et Ethiopiens ne jouissent que de quelques droits. En conséquence l'Eglise catholique n'étant reconnue que sous le rite latin, les rites orientaux sont exclus. De la même façon pour les Orthodoxes les Slaves se trouvent exclus. Au niveau juridique ce Statu Quo, présente des particularités extrêmement intéressantes. En effet on ne sait pas s'il s'agit de droit de propriété ou d'une simple possession ou en d'autres termes on pourrait dire que « possession vaut droit ». Comme l'indique B. Collin : « c'est la notion de prescription acquisitive immédiate qui pourra s'exprimer par cet adage : le fait crée le droit »9 Principe surprenant qui conduit à une vigilance permanente de façon à rester effectivement en possession de ses droits sous peine de les perdre.

Le fait crée le droit. L'usage non contesté est preuve de droit. En d'autres termes, user de son droit c'est le maintenir ; cesser d'en user c'est le perdre. Pareillement, l'exercice d'un droit peut s'acquérir du simple fait de la non protestation des partenaires. On comprend facilement comment ces principes de fonctionnement génèrent une perpétuelle attention pour ne pas dire suspicion entre partenaires. Ils peuvent aussi créer une forme de connivence entre communautés se faisant des concessions mutuelles, avec tout ce que cela comporte d'aléatoire.

Conclusion

Les limites du Statu Quo sont grandes : juridiquement il ne s'appuie pas sur la reconnaissance d'une situation de droit mais de fait ; historiquement il est très marqué par son contexte. Il n'a pas empêché les conflits dans les sanctuaires.

Sa définition même est source de sclérose et d'immobilisme, quoique rien n'empêche d'évoluer à l'intérieur de ce cadre. Les principes de droit qui le régissent entraînent une servitude, un esprit de constante vigilance et de surveillance réciproque.

Il a l'avantage d'exister et de servir de référence.

Le scandale n'est pas le Statu Quo, le scandale c'est la division de l'Eglise. Au fond, n'est-il pas légitime que tous les chrétiens, dans leurs différentes expressions culturelles et ecclésiales, soient là, présents en ce lieu qui est le lieu d'enracinement, de la réalisation de ce que confesse tout chrétien : « Jésus est mort et ressuscité » ? Ce qui peut être un sujet de scandale légitime ce sont les batailles, les violences jusqu'à tuer pour s'assurer une reconnaissance de droit ou une possession exclusive.

En ces temps où l'œcuménisme est un souci pour beaucoup de chrétiens, on ne peut qu'espérer qu'il portera des fruits également sur cette situation. Des progrès ont été faits, des réalisations ont montré cette évolution mais des tensions demeurent et la négation de l'histoire ou des aménagements intempestifs révèle un état d'esprit qui tient à marquer son territoire.

D'une manière plus générale c'est la place des Lieux Saints (juifs et musulmans également), leurs statuts juridiques, leur protection, leur libre accès qui demeurent d'actualité. Il en est de même du statut des fidèles, des rapports entre communautés religieuses et également de leurs statuts civils. Nous voyons comment à travers la complexité de cette histoire, ses implications religieuses, politiques et diplomatiques, la question de la présence de tous à Jérusalem ne date pas d'aujourd'hui.

Fr. Louis-Marie, osb

Extraits du Texte du Firman de 1852 établissant le Statu Quo

Les Lieux en contestation entre les deux religions sont : la grande coupole de l'église du Saint-Sépulcre, la petite coupole qui est sur l'endroit appelé le Tombeau de Jésus, sur qui soit la bénédiction de Dieu !et qui existe dans la susdite église ; la Hadjir el Moughté-sil, le Golgotha, lequel se trouve également dans l'enceinte de l'église du Saint-Sépulcre : les voûtes de Sainte-Marie, la grande église qui est dans le village de Bethléem, ainsi que la Grotte, qui est le véritable endroit où Jésusque la bénédiction de Dieu soit sur lui !est né, et qui se trouve sous cette église, et le tombeau de la Bienheureuse Marieque Dieu la bénisse !

Vu que la grande coupole susmentionnée concerne l'église entière, les latins n'ont pas raison de prétendre à la possession exclusive, ni de cette coupole, ni de la petite coupole, ni de la Hadjir el Moughtésil, ni du Golgotha, ni des

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9B. Collin, essais de solutions au problème des Lieux saints,   p. 703

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voûtes de Sainte-Marie, ni de la grande église de Bethléem, ni de la Sainte-Crèche ; il faut laisser tous ces endroits dans leur état actuel. Dans les temps passés, on a donné une clef de deux portes de la grande église de Bethléem, et de la Sainte-Crèche à chacune des Nations grecque, latine et arménienne, mesure confirmée aussi par le Firman délivré à la Nation grecque l'année de l'Hégire 1170, et cette disposition restera la même. Mais comme il ne suit pas de là qu'il est permis de porter atteinte à l'état actuel des choses dans cette église, ou d'empêcher aux latins d'y officier, ou enfin de faire quelque chose de nouveau capable de gêner les autres, soit dans le passage de l'église pour aller à la Sainte-Crèche, soit sous d'autres rapports, on ne souffrira ou n'acceptera en aucun temps la moindre prétention à ces égards, de la part de qui que ce soit.

On ne fera aucun changement à l'état actuel des portes de l'église de Bethléem.

Considérant que, d'après les anciens et les nouveaux documents, les deux jardins appartenant au Couvent franc à Bethléem, sur lesquels les latins ont aussi élevé des prétentions, sont sous la surveillance des deux parties, ils resteront tels quels.

Les latins, se basant sur quelques firmans dont ils sont en possession, ont élevé la prétention que le Tombeau de la Bienheureuse Marie leur appartient exclusivement, mais ils n'ont pas raison en cela non plus. Seulement, comme actuellement les Grecs, les Arméniens, les Syriaques et les Coptes exercent leur culte dans ce Saint Tombeau, c'est-à-dire comme l'exercice du culte n'est pas restreint à une seule religion, il a été déclaré être juste de maintenir et de confirmer aux chrétiens catholiques la permission qu'ils ont ab antiquo d'exercer, eux aussi, leur culte dans un endroit où plusieurs nations exercent les leurs, mais à condition qu'ils ne feront aucun changement, ni dans l'administration, ni dans l'état actuel de ce monument.

 

Une visite pastorale en Orient au XIXème siècle

Témoignage de Mgr Euthyme Zoulhof, évêque melchite de Tyr, en 1888

Voici ce qu'est la visite pastorale dans les villages de son diocèse. Les habitants lui envoient un cheval avec une députation de vingt cavaliers. Il part avec son escorte ; alors une partie de l'escorte se met à galoper en avant, et à tirer des coups de fusil : à l'entrée du village, tout le monde est réuni pour recevoir l'évêque, les femmes d'un côté, les hommes de l'autre, les enfants en avant. Les femmes ont à la main des cassolettes où elles font brûler de l'encens. Le cortège se rend à l'église, discours de l'évêque, puis on le conduit à la maison où il doit descendre. Notez que dans les villages, une maison n'a jamais qu'une pièce. Dans un coin, le maître de maison et sa famille, dans un autre les provisions pour hommes et bêtes ; dans le 3ème les chevaux, chameaux, mulets, ânes, bœufs, vaches, etc. en plus les coqs et les poules. Le 4ème angle est donné à l'évêque, il y couche tout habillé sur un petit matelas posé à terre et se couvre d'une couverture de coton. Il y dort autant que lui permettent les bêtes de la maison : Mgr nous disait qu'ordinairement il n'y peut dormir, et quand il est trop fatigué, force lui est d'aller coucher à l'église. L'homme de Dieu dans la maison de Dieu. L'heure du repas venue, on étend au milieu de la maison un large tapis noir : au milieu du tapis on place un large plat, qui sert d'assiette à tout le monde. Les gens y puisent avec la fourchette d'Adam, l'évêque est gratifié d'une cuillère de bois. On boit de l'eau dans une cruche commune : dans les maisons plus huppées, l'évêque a sa cruche à lui. L'évêque visite toutes les maisons, l'une après l'autre. Il concilie les procès, arrange les différends, met ordre à toutes choses : il est juge civil, et ses jugements ont force de loi aux yeux du gouvernement turc. Mgr a la consolation de pouvoir dire que dans son diocèse personne ne manque à ses Pâques : si quelques-uns sont un peu en retard, la visite du prêtre ou au besoin de l'Évêque ramène vite au bercail la brebis paresseuse. L'évêque aime son peuple, et il en est aimé. Tous lui témoignent un respect vraiment filial. C'est le vrai père de la famille chrétienne ».

Brigitte WACHÉ, Le Père Emmanuel, pasteur et fondateur à Mesnil Saint-Loup, Éditions du Livre Ouvert, p. 141-142.

HISTOIRE

De la guerre du Golfe au 13 septembre 1993.

En juillet 1990, les Etats-Unis tout comme Y.Arafat ne croyaient pas que Sadam Hussein déclencherait la guerre malgré ses menaces. Mais le 2 août, Sadam Hussein, soutenu par la Jordanie et Y .Arafat, envahit le Koweït. G.Bush contacte les pays alliés et organise une armée. Si l'Irak est attaqué, Israël ne sera pas épargné, promet S.Hussein.

6

Le 17 janvier 1991, les USA attaquent et Israël quelques heures plus tard reçoit les premiers scuds. Itzhak Shamir garde la tête froide et adopte une politique de retenue, car cette fois Israël n'est pas un des principaux acteurs et il laisse le champ libre aux USA et aux alliés. L'Irak est bombardé, l'objectif principal étant de détruire ses infrastructures militaires conventionnelles, atomiques, chimiques ou bactériologiques.

Sadam essaie d'entraîner Israël dans la guerre avec les 39 scuds lancés sur Tel-Aviv et Haïfa pendant six semaines. Les dégâts matériels sont importants, des milliers de maisons sont à reconstruire, il y a quatre morts et 300 blessés.

Pendant tout ce temps les USA font pression sur Israël pour qu'il n'intervienne pas, ce qui pourrait dissoudre la coalition difficilement réunie autour de G.Bush.

La défense, sous les directives de l'armée, s'organise dans les familles auxquelles ont été distribué des masques à gaz et où une pièce a été soigneusement calfeutrée.

Le 28 février, l'opération « tempête du désert » est terminée, le Koweït est libéré de ses envahisseurs, et les Israéliens retirent leurs masques, c'est le jour de Pourim !

Le 8 mars James Baker, secrétaire d'Etat américain arrive à Riyad, puis se rend au Caire, à Damas et en Israël. C'est le début de nombreux voyages vers les pays de la région pour essayer d'amener les parties à la table des négociations.

Le 19 août, l'URSS est secouée par un coup d'Etat à Moscou. C'est le début de la fin de l'URSS et les pays du Moyen Orient comprennent qu'il n'y a plus qu'une seule grande puissance, les Etats-Unis.

De nombreux immigrants russes arrivent en Israël. I.Shamir demande des garanties bancaires de 10 milliards de dollars pour leur intégration.

Après d'interminables préalables, le 18 octobre lors d'une conférence de presse à Jérusalem, Baker en compagnie de Boris Pankin le chef de la diplomatie soviétique annonce que la conférence régionale sur le Proche Orient se réunira le 30 octobre à Madrid avec les USA, la Russie, l'Egypte, Israël, le Liban, la Jordanie et la Syrie. L'OLP officiellement absente, contrôle les représentants palestiniens intégrés à la délégation jordanienne. I.Shamir préside lui-même la délégation israélienne.

C'est la première fois qu'Israéliens et Palestiniens sont face à face à une table de conférence de paix. Pour les Palestiniens c'est la reconnaissance par la communauté internationale.

Début février 1992,1.Rabin est élu à la tête du parti Travailliste et les élections du Parlement sont fixées au 23 juin. Des rencontres ont lieu entre l'OLP et I.Rabin, que la presse en les publiant, fera échouer.

Les Israéliens excédés par la politique du Likoud et les attentats, voteront pour le parti Travailliste. Quelques jours plus tard les contacts avec l'OLP reprennent.

Dans son discours à la Knesset où il présente son gouvernement, I.Rabin s'adresse aux Palestiniens des Territoires : « Le destin nous oblige à vivre ensemble, sur cette même terre. Notre vie se déroule aux côtés de et contre la vôtre. Vous avez échoué dans votre guerre contre nous. Un siècle d'effusions de sang et de terrorisme de votre part contre nous ne vous a causé que de la souffrance, de la douleur et des deuils. Vous avez perdu des milliers de vos fils et de vos filles et, constamment, vous avez fait marche arrière. Depuis quarante-quatre ans, vous vivez dans l'illusion. Vos responsables vous conduisent dans l'erreur. Ils ont raté toutes les occasions de paix. Ils ont rejeté toutes nos propositions de solutions et vous ont menés de catastrophe en catastrophe... Nous vous proposons l'autonomie, l’autogouvernement, avec ses avantages et ses défauts, car vous n'obtiendrez pas tout ce que vous voulez. Il est possible aussi que nous n'obtenions pas tout ce que nous voulons, prenez enfin votre destin en main...Si les Palestiniens devaient rejeter cette proposition, nous continuerions les pourparlers, mais nous nous conduirions dans les Territoires comme s'il n'y avait pas eu de négociations, et au lieu de vous tendre une main amicale, nous ferrions appel à tous les moyens afin d'empêcher la violence et le terrorisme. Le choix est entre les mains des Palestiniens des territoires... »

Le 21 juillet, I.Rabin doit rencontrer H.Moubarak au Caire, et Abou Mazen (Mahmoud Abbas) s'y prépare. De son côté le Norvégien Terje Larsen, proche des deux parties, continue à promouvoir l'idée de négociations secrètes à Oslo.

Les contacts directs entre l'OLP et Israël sont encore illégaux, et il faut que tout reste secret. De très nombreuses rencontres de préparation ont lieu entre Abou Ala (Ahmed Koreï), Hirshfeld, Hanan Ashrawi, Yossi Beilin...

Le 20 janvier 1992, les premières négociations secrètes entre Israël et l'OLP ont lieu à 80 kilomètres d'Oslo. C'est l'équipe de S.Peres qui mène celles-ci du côté israélien et cinq mois plus tard, I.Rabin accepte le projet de déclaration de principe sur un retrait militaire de la Bande de Gaza et de Jéricho.

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Parlant des accords d'Oslo quelques années plus tard, S.Peres nous dit ; « Les Norvégiens nous aidèrent avec la modestie, la discrétion et l'enthousiasme qui leur sont propres et qui permirent à nos délégations et à leurs chefs (Uri Savir pour Israël et Abou Ala pour les Palestiniens) de créer un climat propice au dialogue. Nous étions épaulés par l'Egypte. Je pense qu'une fois que je l'eus convaincu de l'importance de la première étape (Gaza) , le président Moubarak fut celui qui persuada les Palestiniens de venir, après que Rabin et moi-même eûmes accepté d'ajouter Jéricho au commencement du processus pour ne pas donner l'impression qu'il ne concernait que Gaza. Les Américains nous aidèrent aussi beaucoup : Warren Christopher, son équipe ainsi que Denis Ross, étaient attentifs à toutes nos idées, toujours prêts à nous assister de quelque manière que ce soit. Néanmoins, presque tout le poids reposait sur les épaules du Premier ministre Rabin et en grande partie sur celles du ministre des Affaires Etrangères, c'est-à-dire de moi-même. Nous avions la chance d'être parvenus à un terrain d'entente, après nous être affrontés pendant de nombreuses années : Nous avions décidé qu'à notre âge, avec notre expérience et notre prestige, nous devions prendre des décisions difficiles, inévitables et dérangeantes pour permettre à la jeune génération d'entrer dans une nouvelle ère sans avoir à supporter le poids du passé ni à surmonter les obstacles du présent.»

Le 13 septembre 1993, la poignée de main historique a lieu entre I.Rabin et Y.Arafat, en présence de Bill Clinton à la Maison Blanche.

Et pendant ce temps :

Le 20 mai 1991 Lech Walesa est en Israël pour la première fois et dans un discours à la Knesset il demande aux Juifs de pardonner à la Pologne pour ce qui s'est passé pendant la Shoah.

Le 21 mais 14 400 Juifs éthiopiens arrivent en Israël avec l'opération Salomon.

Le 16 octobre Ahmed Yassine, fondateur du Hamas est condamné à la prison à vie pour avoir encouragé à tuer des Juifs.

Le 17 novembre, douze Iraniens fuient leur pays par la Jordanie et demandent l'asile politique en Israël.

Le 3 février 1992, Ezer Weizman annonce qu'il quitte la vie politique. Le 10 février pour la première fois dans l'histoire du mouvement kibboutzique, les kibboutznikim pourront acheter des voitures avec leur argent personnel.

Le 9 mars, Menahem Begin meurt à 79 ans.

Le 17 mars, destruction de l'ambassade d'Israël à Buenos Aires par une voiture piégée.

Le 1er août, premières médailles olympiques pour Israël, une en argent au judo féminin et une en bronze.

Le 4 octobre, un cargo d'El Al s'écrase sur une banlieue d'Amsterdam.

Le 5 novembre sur la bande militaire de Tséélim dans le Néguev, cinq soldats meurent et six sont blessé par erreur dans un exercice.

Le 17 décembre lors de nombreux attentats contre Israël, le gouvernement transfère 429 terroristes du Hamas et du Jihad islamique au Liban.

Le 24 mars 1993, Ezer Weizman est élu septième Président de l'État.

A cette époque il y a plusieurs crises gouvernementales entre le parti religieux Shass et le parti Meretz de Gauche présidé par Shoulamit. Aloni, ministre de l'Education.

Le 7 juillet à Séphoris, découverte d'une splendide mosaïque datant des premiers siècles.

Le 18 août, 26 ans après le vote de sa construction, la nouvelle gare routière de Tel Aviv est inaugurée.

Le 30 décembre 1993 première signature d'un accord de relations diplomatiques entre Israël et le Saint Siège.

Cécile Pilverdier.

Un projet original : une banque du temps

Une banque du temps - tu investis ton temps et tu as un crédit de temps à la banque. Ou plus simplement : tu donnes une heure de temps et tu en reçois une heure. Cette idée très pragmatique, bien anglo-saxonne, vient d'un Américain Edgar Cahane qui créa la première banque du temps basée sur ce slogan : le temps c'est de l'argent. Actuellement, aux États-Unis, il y a plus de 200 modèles de projets, la plupart dans le secteur de la santé et de l'environnement. Ces banques du temps fleurissent en Angleterre, (depuis l'an 2000) au Japon, au Brésil, en Hollande... et en Israël.

Une banque du temps libre s'est ouverte au cœur du Saron, à Pardessia et à Jérusalem. C'est une initiative et une création de la collectivité, fruit d'une collaboration entre le conseil des parents, les parents, les employés de la ville, les conseils régionaux et les élèves. Le but est d'améliorer la qualité de vie des membres et d'activer un élan de partage. La méthode "aide ton voisin et quand tu seras dans le besoin ton voisin (ou un autre) t'aidera" est basée sur l'égalité, une heure d'aide signifie une heure dans la banque du temps. Les participants gèrent leur temps dans la banque en donnant une aide dans des domaines très variés qu'ils choisissent, et ils peuvent profiter du crédit de temps au moment voulu.

Les moyens pour développer le temps-argent sont nombreux, depuis le baby-sitter jusqu'à l'arbitrage au tribunal de justice pour les jeunes. Un jeune qui donne ses services pour garder les enfants d'un membre de la banque reçoit d'un autre membre des cours privés pour son frère. Une personne âgée paralysée dans sa maison est aidée par un jeune qui lui apporte les médicaments. A son tour, elle donne dans sa maison des cours de traduction à une nouvelle immigrante, et celle-ci enseigne les mathématiques à un jeune qui a des difficultés dans cette matière.

Les collectivités ayant peu de moyens financiers et beaucoup de temps peuvent "vendre" leur temps pour recevoir les services dont elles ont besoin et qui leur sont refusés par manque de crédits.

Le principe de base est que tout homme peut créer, construire et donner. L'impulsion à donner est universelle, mais il faut transformer les liens unilatéraux "tu as besoin de moi" en liens réciproques "nous avons besoin les uns des autres". Cette entraide permet une participation de tous les membres et développe les talents de ceux qui se croient démunis - personnes âgées, handicapés. La "personne à problèmes" qui reçoit une aide n'est pas passive, mais elle s'engage à donner. Cela casse le cercle "besoins-dépendance".La banque du temps en est à ses débuts en Israël et elle affronte plusieurs défis, entre autres comment actualiser les modèles traditionnels de l'aide et comment construire un nouveau contrat qui fait de celui qui reçoit non un consommateur passif, mais un régisseur de son temps et de ses possibilités.

La banque du temps, enfin, est un moyen efficace pour créer des liens sociaux dans une société urbaine où chacun peut vivre de façon très individualiste.

Site internet en hébreu: www.bankhazman.org.il

Suzanne Millet

 Le jeu d'échecs d'Ariel Sharon

Ces temps derniers, plusieurs personnes m'ont fait des réflexions sur le retrait de la Bande de Gaza que je pourrais résumer ainsi : Si Israël se retire de la Bande de Gaza, c'est qu'ils ont une intention maligne à l'encontre des Palestiniens. Sharon a forcément un plan machiavélique qui se manifestera trop tard et sera, bien entendu, en défaveur des Palestiniens.

Depuis plus de quatre ans les médias nous ont présenté les Israéliens comme les seuls responsables de la situation et les Palestiniens comme des victimes.

Nous avons déjà beaucoup parlé dans nos précédents numéros de ce présupposé qui relève d'un genre hollywoodien de la réalité, commode à bien des égards mais profondément vicieux.

Un célèbre éditorialiste du quotidien Yediyot Aharonot, Nahoum Barnéa, comparait la semaine dernière la politique de Sharon à un jeu d'échecs. En se séparant de la Bande de Gaza, il sacrifie la tour au profit de la reine c'est-à-dire les grandes implantations de Judée et de Samarie proches de la ligne verte.

Sharon, le faucon, n'est pas devenu une colombe en l'espace de quatre ans mais, il est ce qu'il a toujours été : un homme réaliste, un homme qui a le sens des affaires de l'État. Que l'on soit pour ou contre sa politique, on ne peut lui dénier cette qualité.

Sharon sait très bien que s'il peut, non sans difficultés d'ailleurs, déplacer 9000 personnes, 250 000 c'est une autre histoire. Quand on voit l'énorme logistique engagée pour le démantèlement de 21 implantations de la Bande de Gaza et de 4 au Nord de la Samarie, on comprend que pour des implantations comme Ariel en Samarie c'est perdu d'avance.

La prochaine étape, après la Bande de Gaza, sera le démantèlement de toutes les petites implantations illégales à l'intérieur de la Judée et de la Samarie. Suivant sa logique, il peut encore sacrifier un cheval pourvu que la reine soit préservée.

Il n'y a là aucun plan machiavélique ni aucun complot contre personne mais un projet politique suite au constat d'une situation politique, sociale mais aussi sécuritaire à un moment donné.

Jean-Marie Allafort

Resto du cœur : version israélienne

« Le peuple juif, qui a survécu à tant de difficultés en exil, dépend essentiellement du pouvoir de la communauté à entendre les battements de cœur de chacun de ses membres et à les écouter attentivement. A travers les générations, le peuple juif n'est jamais resté sourd aux pleurs d'un de ses frères et ne l'a jamais laissé sombrer dans un irrésistible désespoir ».

Ainsi s'exprime Doudi Zilberschlag le fondateur et le président de l'association « Meïr Panim » et d'ajouter, après avoir évoqué le drame de la division historiquement sans précédent de la société israélienne : « La gentillesse et l'assistance sont la Mitzva (bonne action) qui nous permettra de nous réunir à nouveau, les religieux et les laïcs, les Ashkénazes et les Sépharades, les nouveaux immigrants et les sabras (Juifs nés dans le pays). »

II y a cinq ans, en 2000, Doudi et Rivka Zilbergschlag, couple religieux de Jérusalem, perdent un enfant, un fils, Meïr, d'une grave maladie du système digestif. En mémoire de leur fils ils créent une chaîne de restaurants gratuits. Leur ambition est de nourrir tous les pauvres, afin que nul n'ait jamais faim en Israël. Commencé modestement par l'ouverture d'un restaurant gratuit près de la gare routière centrale à Jérusalem, Meïr Panim est implanté actuellement du Nord au Sud dans onze localités.

Des milliers de personnes viennent manger à midi dans l'un ou l'autre de ces restaurants, au menu varié, se sentant respectés et accueillis. D'autres viennent prendre le repas emballé pour le manger ailleurs, souvent à la maison, en famille. En plus de cela, Meïr Panim livre des milliers de repas chauds aux handicapés et aux personnes âgées dont ils reçoivent les adresses par les services sociaux. Une attention particulière est donnée aux rescapés de la Shoah : visites, repas, colis alimentaires, chauffage, couvertures.

Un programme scolaire s'est aussi mis en place pour apporter des repas chauds aux enfants défavorisés des écoles et jardins d'enfants.

Restaurants ouverts à tous, sans distinction, Juifs, Arabes, Druzes, Bédouins. Aucune question, aucun papier nécessaire, aucune « tenue » exigée, chacun peut s'y sentir accueilli avec respect. Une occasion aussi pour les solitaires, les veufs, les veuves, les marginaux, les handicapés, d'être avec d'autres.

Le service est offert par des bénévoles, des jeunes, des adultes religieux ou non, aidés d'autres volontaires envoyés par le département de réhabilitation du service des prisons. Certaines personnes, elles mêmes dans le besoin, servent aussi parfois le repas.

A ce projet initial, avant tout « alimentaire », s'ajoute chaque année de nouvelles offres d'entre aide. Koah Latet (la force de donner), collecte des meubles et de l'électroménager d'occasion, les répare et les redistribue ; se mettent également en place des cours de formation professionnelle, des clubs pour enfants défavorisés, une distribution de jouets pour enfants atteints du cancer, dans certaines villes, une distribution de cartables et de fournitures scolaires.

Le dernier projet : offrir des repas aux enfants nécessiteux du Néguev. Avec l'installation d'une cuisine centrale à Kyriat Gat, 30 000 repas sont transportés quotidiennement par des camions réfrigérés.

En France cette association est connue grâce entre autre à une émission télévisée en 2004. Beaucoup de communautés juives françaises y participent financièrement.

Pour plus de renseignements consulter ; www.meirpanim.org

 

Pauvreté en Israël : Regardons-les dans les yeux

C'était le slogan de cette campagne lancée le 15 février par ELEM, une association caritative en lien avec la municipalité de Jérusalem. Une collecte au profit des plus démunis : enfants en difficulté, jeunes et adultes sans abri vivant dans la rue.

Certaines écoles s'étaient mobilisées ce jour là. Avec l'accord des parents, après la classe, les élèves, deux par deux, avec l'emblème de ELEM (adolescent), quadrillaient le quartier, d'appartement en appartement, pour collecter des fonds.

Les jeunes cet hiver, à Jérusalem, environ 140 de 18 à 26 ans vivaient dans la rue, s'abritant la nuit dans une école désaffectée du centre ville. Si les structures sociales sont assez fortes et bien équipées pour s'occuper des enfants et adolescents jusqu'à leur majorité, à 18 ans les jeunes leur échappent. Pour remédier à cela, plusieurs organisations privées se mettent en place : ELEM, l'une d'elles, aide sans condition, sans poser de questions, sans exiger du jeune qu'il passe par un centre de désintoxication, par exemple, comme sont obligés de le faire les différents services municipaux. ELEM rejoint les jeunes là où ils sont et comme ils sont : plusieurs fois par semaine, il poste sa camionnette au square Sion, de 22h30 jusqu'au petit matin. Les jeunes qui sont là sont très divers : des Juifs orthodoxes marginaux, des Arabes, des jeunes venant des

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Territoires, des nouveaux immigrants, mais aussi des jeunes de « bonne famille ». Ceux qui sont là après le dernier bus, à minuit, sont ceux qui n'ont nulle part où aller. Ils tournent autour de la camionnette ; on peut y manger, y boire chaud, jouer, être à l'abri. Il y a même une artiste, envoyée par le musée de Jérusalem, qui propose des leçons de dessin, de peinture... « Gagner la confiance de quelques uns, de ceux que la vie a blessés. Nous ne changeons pas leur vie, mais parfois, dans nos contacts avec eux, nous offrons la vie là où il n'y a que la mort. Permettre au jeune par notre respect, de garder ce qui lui reste de dignité ».

Beaucoup de ces jeunes sont venus de Russie, la plupart sans famille, grâce à l'Agence juive. Certains n'ont pas réussi à s'insérer dans la réalité israélienne, et peu à peu se sont coupés de la société : solitaires, étrangers, ne parlant pas l'hébreu. D'autres viennent de familles israéliennes, des jeunes filles abusées, des jeunes ne supportant pas la violence. Très vite ils s'installent dans le monde de la drogue pour oublier. Vient ensuite la prostitution. Chaque année il y a des morts dans la rue. Un arrangement tacite existe entre ELEM et la police.

GALGAL (la roue), une autre association pour les sans abris a un centre d'accueil dans la rue de Jaffa ouvert de 6 heure à 22h trois fois par semaine. Il offre un repas chaud, une douche, des habits, une bibliothèque en Russe et procure des services médicaux, des avocats. «Avec ELEM, nous sommes les premiers maillons de l'aide possible, acceptant ces jeunes comme ils sont tout en essayant de les convaincre de se tourner vers les services municipaux pour y recevoir leur carte d'identité, une subvention et une prise en charge dans un centre de désintoxication. Tout d'abord gagner leur confiance ! Une jeune femme, habituée de GALGAL, ayant dit en passant à l'une des volontaires qu 'elle n 'était plus allée au cinéma depuis plus de onze ans... elles partent ensemble voir le film « Océan 12 ». Cela n'a rien changé à sa vie ; elle est encore à la rue, elle se drogue encore mais elle a vécu un moment fort, positif, et a gagné un peu de confiance. Pour ces jeunes « blessés ».la confiance en quelqu'un est un premier secours ».

Les adultes.

SHEKEL (un sou), une autre organisation humanitaire est chargée par la municipalité de s'occuper des adultes sans logis. Il y en a quelques centaines à Jérusalem, 60% de plus que l'année dernière. La moyenne d'âge est de 42 ans. 85% sont des hommes, 65% des alcooliques, 30% se droguent, 28% sont déficients mentaux. Plus de 80% sont des immigrants de l'ex URSS. Mais cette année, le nombre des Israéliens d'origine, augmente. Il y a quelques années c'était inimaginable que des Israéliens vivent dans la rue. Avec la politique financière de privatisation et la diminution de l'assistance publique, certains n'ont plus d'autre choix. On ne s'aperçoit même plus qu'ils sont là, à notre porte.

Serge était médecin en Russie. Il vient en Israël avec sa femme et son fils en 1990. Ne pouvant trouver un emploi de médecin, il travaille comme infirmier. Se sentant amer et humilié il commence à boire. Du coup il perd sa place à l'hôpital. Un jour il bat sa femme, les voisins appellent la police. Il n'a plus le droit de rentrer à la maison. Ce qui lui reste : le banc d'un parc, un vestibule. Il mange aux « soupes populaires » et commence à mendier pour acheter de la vodka. Trois fois il essaye de se désintoxiquer mais retombe. Il veut mourir, n'ayant plus aucun contact avec les siens. « J'ai même oublié ce qu'est un homme normal ». Quatre ans dans la rue. Puis peu à peu, grâce à SHEKEL, il remonte la pente ; un abri, un centre de réhabilitation, un appartement partagé avec d'autres, un travail de lave vaisselle, en attendant d'avoir son propre appartement. « Je sais que je ne serrai plus jamais médecin, c 'est dur. J'ai encore envie de boire. Mais je veux revoir mon fils et vivre. Oui, essayer ».

Jusqu'en 1990, la plupart des nouveaux immigrants de l'ex URSS vivant dans la rue avaient en Russie une vie normale. Et ce sont les difficultés d'intégration qui les ont conduits là. Mais actuellement plusieurs de ces sans abris étaient déjà des sans abris en Russie, l'Agence juive les ayant recrutés dans la rue.

Malgré l'augmentation du budget municipal pour l'aide aux démunis et les nombreux services de thérapie créés, tous les sans abris ne sont pas prêts à s'en sortir. Beaucoup ont peur de l'échec, peur de perdre le peu qu'ils ont encore.

Pour la société, les sans abris sont souvent « transparents », sans visage, « absents ». On donne un shekel parfois, mais sans regarder l'homme, la femme. Pourtant ils existent, ils sont des nôtres.

Oui, regardons les dans les yeux.

(D'après un article du Jérusalem Post du 11-02-05)

Antoinette Brémond.

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Flashes d'espoir

Le Dr Eyad El-Sarraj, psychologue pour enfants à Gaza, se plaignait souvent dans le passé des conséquences de l'occupation surtout chez les enfants enfermés, apeurés eux aussi, par le feu de la guerre -comme les enfants israéliens de la petite ville de Sdérot avec les Kassams (roquettes du Hamas) - mais faire des comparaisons n'est pas mon propos aujourd'hui...

Toujours est-il que dans l'atmosphère actuelle le docteur écrit dans un article "Cette fois, je suis optimiste". Espérons qu'il ne sera déçu par personne, malgré les extrémistes de tous bords. Son analyse des chances et des dangers se termine par une histoire personnelle :

« Récemment j'ai été retenu, avec quelques-uns de mes collègues, à un poste de contrôle. Dans le poste-fortin de béton, par la petite ouverture je voyais la face d'un soldat apparaissant et disparaissant. A ma grande surprise, il s'adressa à moi : "Vos amis me disent que vous êtes psychiatre, je peux vous poser une question?" "Euh,... oui," répondis-je, sur mes gardes. "Docteur, j'ai un problème: je vis dans une implantation à Hébron, et je veux en partir." Je cachai ma surprise et jouai mon rôle de médecin, écoutant le jeune soldat à la figure d'enfant. "Mes parents veulent rester, mais je sais bien qu'il n'en sortira que davantage de victimes. Je n'aime pas ce qui se passe ici. Mais je ne veux pas blesser mon père et ma mère qui donnent leur vie pour moi." Je répondis : " Le mieux est de parler franchement avec eux de vos sentiments, et de les convaincre de votre décision. En tout cas, mon ami, je veux vous dire une autre chose." Le soldat sourit, dans l'attente, et je continuai: "En vous décidant à me parler de vous-même, vous m'avez rendu fier de l'humanité et sûr de son avenir." Il sortit son bras par le trou et me serra la main en disant : "Je vous crois" ».

Le 3 mars prochain se tiendra une journée d'étude à l'université Ben Gourion de Beer-Shéva, sur le sujet : « De l'influence du service dans les Territoires sur les soldats - et les différentes formes de la contestation. »

Une des nombreuses manifestations de la réflexion courageuse et franche sur les problèmes de ce pays.

Il y a des années des soldats israéliens dispersaient une manifestation violente à Jénine. Un jeune homme qui passait en auto dans la ville avait été blessé à la tête au point d'en rester handicapé pour la vie. Les soldats affirmèrent qu'ils n'avaient pas tiré sur l'auto, mais sur les jambes des manifestants. En fait, il n'y avait pas eu d'examen sérieux des circonstances, ni de la voiture, et les choses en étaient restées là ("cas pas clair"...). Vu l'état de son fils, le père a interjeté appel devant la Haute Cour de Justice et l'État d'Israël doit maintenant payer des indemnités à la victime. Mieux vaut tard que jamais, (dans Haaretz du 10 février)

A la première page du supplément hebdomadaire de Haaretz, des photos de victimes israéliennes et en dessous des victimes palestiniennes, et le titre : "Les deux faces des tirs de Kassams".

Un soldat posté à un point de contrôle au sud de Naplouse avait maltraité et humilié une dizaine de Palestiniens lors de leur passage. Il a été dégradé et mis en prison. Son action avait été filmée par un groupe de cinéastes du Corps de l'Education de l'armée qui circulait dans la région.

Le tribunal militaire a critiqué l'armée, lui reprochant de mettre à ces postes délicats des jeunes sans préparation et non des officiers ayant de l'expérience de ce genre de problèmes. Les juges ajoutèrent que les soldats devaient considérer le respect de la dignité humaine comme une valeur suprême, même s'ils faisaient face à des situations de tension face à une population hostile, dont les citoyens n'obéissaient pas forcément à leurs ordres.

Cela rappelle le rabbin militaire interviewé récemment à la radio. À propos de soldats qui avaient maltraité des prisonniers qu'ils venaient de désarmer, il disait nettement: "Ne pas oublier qu'un ennemi désarmé a droit au respect, étant, comme tout homme, une image de Dieu."

Dire que toutes ces belles réactions reflètent l'image dominante dans le quotidien d'Israël serait naïf, on le voit bien par tout ce que nos nouvelles rapportent. Mais c'est une partie bien réelle de cette image, qui permet de continuer d'espérer.

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Ces jours-ci on entend de nouveau parler d'une fillette tuée par balle dans la bande de Gaza. Encore ces soldats... ou bien ? L'armée embarrassée enquête, et conclut ne pas avoir tiré dans cette région ce jour-là. Donc deux versions de l'événement, comme toujours. Non, cette fois-ci, après enquête de la partie adverse, les Palestiniens disent clairement :

"En fait, ce n'est pas l'armée israélienne, c'est un groupe de pèlerins palestiniens qui, revenant du Hajj à La Mecque, ont fait la fête en tirant "en l'air" et... l'un d'eux a causé involontairement la mort de la fillette.

Si chacun commence à dire la vérité, décidément tout devient possible.

Yohanan Elihaï

Nouvelles au fils du mois...

Décès de l'écrivain humoriste Ephraïm Kishon - 29 janvier

Ephraïm Kishon, l'un des plus célèbres écrivains et humoristes israéliens dont les œuvres sont traduites en 37 langues s'est éteint ce samedi 29 janvier d'une crise cardiaque à l'âge de 80 ans dans sa maison en Suisse. Il sera inhumé en Israël mardi prochain dans le vieux cimetière de la rue Trumpeldor de Tel Aviv.

Né à Budapest en 1924 où il a passé son enfance et son adolescence, il a été déporté par les nazis, mais a réussi à s'enfuir du camp de concentration de Sobibor en Pologne. Il a ensuite immigré en Israël en 1949 et s'est installé dans le Kibboutz Kfar Hahoresh. Il a débuté une carrière d'écrivain en commençant pas des chroniques humoristiques dans le quotidien Maariv où il écrira pendant 30 ans.

En 1951, Kishon a publié son premier ouvrage où il décrivait avec humour les premiers pas d'un nouvel immigrant.

Parallèlement, il a fondé sa propre compagnie théâtrale avant de réaliser 7 films dont la plupart sont devenus des "classiques" pour le public israélien. Il fut le premier humoriste à critiquer ouvertement le gouvernement de gauche au pouvoir depuis la création de l'Etat d'Israël.

En 2003, il a obtenu le Prix d'Israël, la récompense la plus prestigieuse de son pays. "Ephraïm Kishon est une lumière échappée du feu de l'Holocauste qui a porté très haut la satire dans le monde", a affirmé le jury de ce prix pour justifier son choix. Dans un de ses 50 livres, l'auteur avait pour sa part écrit que les nazis "ont commis une erreur en laissant vivre un humoriste". Dans ses ouvrages, chroniques et films Ephraïm Kishon tout en se moquant des travers de la société israélienne a également dénoncé, en maniant l'arme de l'humour, les injustices, la pauvreté, le chômage ainsi que les humiliations dont ont été victimes les nouveaux immigrants sépharades, originaires des pays arabes à leur

> arrivée en Israël. Ces ouvrages les plus célèbres en français sont les petites filles de Loth et les sacrés fils d'Abraham. Ariel Sharon a ouvert le conseil des ministres par un hommage à l'écrivain disparu en déclarant : "Ephraïm Kishon est mort hier mais son œuvre culturelle subsistera pour nous et pour les générations futures."

Rédaction

Pour ou contre le Plan de séparation ? - 25 février

Après la grande manifestation du mois dernier regroupant des dizaines milliers de participants, principalement des habitants du Goush Katif, du nord de la Bande de Gaza et des Territoires, autour de la Knesset, ayant comme devise 'transfert, nous ne partirons pas', ayant dressés des tentes pour plusieurs jours et arboré la couleur orange (signe de la résistance comme en Ukraine) on pourrait croire que tous les religieux sont contre le plan de séparation et simplifier en donnant cette équation : « religieux égal de droite, donc contre le plan de séparation. »

Un article de Jérusalem Post du 23 février dément cette équation.

Ce mardi, un groupe de religieux se disant de gauche, conservatif, reconstructioniste, humaniste, se définissant comme orthodoxe moderne du mouvement Bina dresse une tente, face à la Knesset, pour soutenir le plan de séparation du gouvernement. Pendant toute la journée, sous cette tente surnommée 'mère de la paix' se sont tenues des conférences informant le public de leur position.

Bina, un mouvement religieux pour promouvoir l'identité juive et la culture israélienne a tout un programme d'aide aux familles démunies du sud de Tel Aviv. Son coordinateur, Nir Broide, capitaine de réserve dans l'armée israélienne, explique ce qui l'a motivé à dresser cette tente devant la Knesset : « J'ai vu aux nouvelles télévisées, lors de l'évacuation d'une implantation illégale, un de ses habitants arracher le béret de l'officier en fonction en criant : 'tu

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devrais avoir honte de te dire Juif. J'ai compris que nous, Bina, Juifs religieux, devions faire de quelque chose pour témoigner de notre soutien aux forces de l'ordre. »

« Nous nous opposons à l'interprétation unique du lien qu'il y a entre notre Torah et la restauration du pays selon les frontières bibliques. Nous sommes là pour soutenir le processus démocratique. »

Le principal orateur est Ari Elon, 54 ans, frère des rabbins Moti et Benny, fils de Menahem, le premier Juif orthodoxe élu à la Cour Suprême. Après plusieurs années où il enseigne à Philadelphie, il décide de rompre avec l'orthodoxie. Sous la tente, il parle de coexistence pacifique. Comment obtenir la paix ? La loi pour poursuivre la paix. Pour lui, il est fondamental de développer une culture juive pluraliste parmi les orthodoxes traditionnels et les laïcs.

« Notre pays et son langage ont été acquis par des sionistes laïcs, mais sa culture et sa tradition demeurent jusqu'à maintenant le bastion de l'orthodoxie institutionnalisée. Le rêve sioniste ne se réalisera jamais et le peuple ne pourra pas vraiment entrer dans son intégrité tant que la Bible, le talmud, les midrashim et la littérature rabbinique restent sous la seule autorité des rabbins orthodoxes. »

Elon, qui se définit politiquement de gauche, admet que les droits des habitants des implantations de Gaza sont piétines, tout spécialement pour les jeunes qui y sont nés. « Mais il n'y a rien à faire, dit-il, c'est le prix à payer. Tant que nous n'avons pas réparé les dommages causés aux Palestiniens, notre mission sioniste échouera. » Les participants marquent le coup en distribuant des rosés aux voitures qui s'arrêtent aux feux rouges.

Qui a tord, qui a raison ?

Antoinette Brémond

Attentat à Tel Aviv : la folie meurtrière de la haine - 26 février

Captivé par le film 'le seigneur des anneaux', j'ai été surpris par un bruit d'explosion qui semblait proche ce vendredi vers 23h20. Sur le moment mes amis et moi-même avons pensé à un attentat mais très vite nous avons repoussé cette éventualité. La paix est de retour et il n'y a aucune raison objective pour que les organisations terroristes palestiniennes fassent un attentat. Nous avons donc pensé à une explosion d'une bouteille de gaz jusqu'à ce que l'un d'entre nous reçoive un appel : il semble que ce soit un attentat. Mes amis étant journalistes, nous nous sommes immédiatement rendus sur les lieux. Des dizaines d'ambulances et de voitures de police se dirigeaient vers la promenade du bord de la mer. Un terroriste s'était fait exploser à l'entrée d'une discothèque au coin de la rue Jonas et de la promenade Herbert Samuel. Depuis plusieurs jours, il fait très beau et les soirées sont agréables. Beaucoup de jeunes étaient donc de sorties en ce jour de repos en Israël. Tel Aviv, surnommée « la ville qui ne s'arrête jamais », est connue pour ses nombreuses soirées qui attirent beaucoup de monde. Le terroriste n'a pas réussi à pénétrer dans la discothèque puisqu'il y avait des agents de sécurité à l'entrée. Il s'est fait sauter à l'extérieur.

Les blessés sont évacués en vitesse. Les voitures, garées autour, sont carbonisées. Les vitrines du kiosque vendant des frites et des saucisses, en face, ont volé en éclat. Le petit snack bar, situé juste à côté de l'entrée de la discothèque, est complètement soufflé. Il ne reste plus rien.

Une odeur de suie enveloppe l'atmosphère et des morceaux de chair sont dispersés un peu partout jusque sur les capots des voitures. Les volontaires de l'organisation Zaka, qui s'occupe de ramasser les corps après les attentats, ne sont pas là. Ce sont des religieux qui respectent le shabbat. Suivant la loi juive, on ne peut violer ce jour de repos que pour sauver des vies. Dans ce cas précis, il ne s'agit que de morts. Ce sont les forces de sécurité et de sauvetage qui s'occuperont des deux corps recouverts d'une couverture gisant sur le trottoir.

L'attentat a fait 5 morts et 49 blessés. Il aurait pu être beaucoup plus meurtrier s'il avait eu lieu une heure plus tard. L'un des officiers de police explique aux journalistes présents que cet attentat est particulièrement inquiétant car il a surpris les forces de sécurité. Il n'y avait aucun signe avant-coureur. Le terroriste pour arriver à Tel Aviv a du bénéficier d'une aide d'arabes israéliens. Il est relativement facile de faire un attentat à Jérusalem mais en plein cœur de Tel Aviv, il faut une logistique bien préparée. Le chef de la police d'Israël, dans une conférence de presse sur les lieux, insistera sur le fait que la population peut continuer ses activités comme d'habitude. Mais pour cette nuit, les discothèques n'afficheront pas complet. En rentrant chez moi, peu de monde se pressait à l'entrée des night-clubs de la rue Allenby.

Le dernier attentat suicide remonte au 1er novembre dernier, il avait été revendiqué par le Front populaire de Libération de la Palestine (FPLP). Trois Israéliens ont été tués et une trentaine blessés par le terroriste qui s'était fait exploser au marché central de Tel-Aviv, non loin du bord de mer. En 2004, il y a eu 14 attentats suicide qui ont fait 55 morts et des centaines de blessés. 116 attentats ont été déjoués par les services de renseignements israéliens et les forces de sécurité.

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Les analystes politiques vont maintenant tenter d'expliquer pourquoi cet attentat a eu lieu cette nuit à Tel Aviv. Qui est derrière cette action terroriste ? Pourquoi un attentat 24 heures après la formation du gouvernement palestinien ?

Il faut le faire. C'est important.

Mais une seule chose me semble essentielle en écrivant ces lignes : la folie meurtrière d'un attentat comme celui-ci ne peut jamais être justifiée pour aucune raison que ce soit qu'elle soit palestinienne ou pas. La haine est gratuite. Il faut beaucoup d'effort pour faire un petit pas vers la paix. Il suffit d'un attentat suicide pour tout faire basculer vers le chaos. Le chaos, je l'ai déjà vu cette nuit...

Jean-Marie Allafort

Le chant du mois

Pour varier un peu, cette fois nous ferons connaissance d'une autre chanteuse israélienne, Gali Atari, de famille Yéménite. Elle avait gagné le prix de l'Eurovision en 1979 pour le chant Haleluyah. Elle exécute de beaux chants composés par d'autres ; ce qu'elle leur donne, c'est sa voix et de son style d'exécution.

Voici quelques couplets de Bereshit (Au commencement) :

Au commencement, était le néant, ténèbre et silence,

Puis de la voix de ù/eu surgit la beauté de la terre,

Au dessus des lits des fleuves se polirent les diamants des étoiles

Dans l'herbe nouvelle couraient des êtres sans paroles,

L'homme était une molécule dans le flux de l'infini,

Que dieu dans sa sagesse gardait pour la fin.

Depuis nous avons grandi, depuis nous sommes devenus forts, Nous avons conquis le trône et la couronne, Nous avons forci, mais pour aider nos enfants, Nous sommes démunis, impuissants.

Pour l'homme solitaire une côte fut modelée en femme,

« L'arbre de la connaissance contient la mort. Votre vie en dépend »

Mais à leurs pieds se glissait le serpent :

« Mangez, mangez, leur soufflait-il, devenez dieux,

dévorez le fruit, et vous comprendrez mieux

Ce que veut dire la force et ce qu'est le pouvoir ».

Et nous avons perdu le jardin Comme eux déjà l'avaient perdu. Oui, les parents fixent le prix Que paieront les enfants.

depuis nous avons grandi, depuis nous sommes devenus forts, Nous avons conquis le trône et la couronne, Nous avons forci, mais pour aider nos enfants, Nous sommes démunis, impuissants.

et l'humour en finale...

Eveiller la pensée personnelle, c'est ce que faisait le rabbin Hirsch, par ses problèmes talmudiques, ou ses histoires bien concrètes. Il demanda un jour à ses élèves :

- Deux voleurs entrent dans une maison par la cheminée, ils arrivent en bas, l'un propre, l'autre tout noir, lequel des deux va se laver ?

-Le noir ! répond aussitôt l'un des disciples.

- Mais non, mon fils, ils se regardent, et le noir voit l'autre tout blanc et ne bouge pas. Celui qui est propre, voyant l'autre tout noir, court se laver. Donc, je reviens sur ma question : deux voleurs... (et il redit la même chose)... lequel ira se laver.

Tous en chœur :

- Celui qui est propre !

- Mais non, mes enfants : si deux voleurs descendent par une cheminée, ils sont tous les deux sales.

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Et, dans le même esprit, un autre jour, le rabbin leur demande :

-  Je remplis ma baignoire, je donne à chacun de mes enfants une petite cuiller et une tasse, et je leur demande de vider la baignoire. Que fera le plus malin ?

- Il se servira de la tasse ! s'empresse de dire l'un des disciples.

- Non, mon fils, il retirera le bouchon de la baignoire.

Y.E.    

Livres conseillés :

-  Frédéric Encel et François Thual, Géopolitique d'Israël : dictionnaire pour sortir des fantasmes, seuil, 2004

- Shmuel Trigano, les frontières d'Auschwitz, livre de poche, 2005