IDOLES, IDOLÂTRIE
L’homme cherche la sécurité dans la vénération et le culte d’entités personnalisées d’où il croit tirer la vie. Celles-ci peuvent être des objets fabriqués ou des réalités réputées puissantes, comme les astres ou les forces qui président à la fécondité de la nature, typiquement Baal pour la végétation (cf. Is 55,10) et son épouse Astarté pour la maternité (Jg 2,11), plus ou moins identifiés au soleil et à la lune.
Un jour, Yhwh a arraché Abraham aux dieux qu’il servait (Gn 11,27-32 ; Jos 24,2-3 ; Jdt 5,5-8), mais sa postérité doit toujours répondre au même appel (Gn 35,2-11 ; Jos 24,14-24 ; cf. Dt 30,15-19), car l’être humain ne cesse de poursuivre des vanités sans s’interroger sur sa vie (Qo 1,2 ; Jr 2,2-5 ; Ag 1,5-7). Dans le Décalogue, Yhwh se présente comme l’auteur du salut, puis interdit toute image fabriquée (Ex 20,1-6), car l’homme est tenté d’adorer l’œuvre de ses mains (Dt 4,28). Le péché par excellence est l’idolâtrie, représentée par le veau d’or fait par Aaron lorsqu’en l’absence de Moïse le peuple voulait un guide à n’importe quel prix (Ex 32,1-5 ; 1 R 12,28). Elle est fustigée par les prophètes (Is 40,18-20 ; Os 8,1-6), car elle n’amène que des calamités (Jg 2,11-15 ; Jr 32,30-35 ; Ez 16,15-22). Elle est ridiculisée par les sages (Sg 13,11-19). Elle est la source de toutes les déchéances, en particulier violence et débauche (Sg 14,12-27 ; Rm 1,18-32). Elle déshumanise et rend muet (Ps 115,8 ; Ac 4,16-20). En fait, l’idolâtrie est le culte de soi-même (Is 48,3-5), car les idoles ne sont rien (1 Ch 16,26 ; Ps 81,10 ; Os 7,16 ; Sg 13,10-19), comme le montre le sacrifice d’Élie (1 R 18,18-50). Elles sont sourdes et muettes ou sibyllines (Ba 6,29-39 ; cf. 1 R 18,26-27) et ainsi rendent leurs adeptes sourds et muets (Ps 115,5-8 ; cf. Mt 9,32-33), et finalement impuissants (Jdt 5,18-21).
Tout au long de la Bible, les aléas de l’histoire font douter de Dieu : « Si Yhwh est avec nous, d’où vient tout ce qui nous arrive ? Où sont tous ces prodiges que nous racontent nos pères ? » (Jg 6,13 ; Is 53,1). Aussi la tentation de l’idolâtrie, source de toutes les immoralités, est-elle permanente (Jg 2,11-14), car les impies paraissent prospères (Jb 21,7-16 ; Ps 73,2-12 ; Jr 12,1-2). En particulier, la Loi avertit du danger des épouses étrangères, qui fatalement apportent leurs cultes (Nb 25,1-5 ; Dt 7,1-3 ; 1 R 16,29-33). En effet, des rois comme Salomon, malgré sa sagesse (1 R 11,1-10), ou le faible Achab (1 R 16,29-33) se sont laissés séduire, contribuant ainsi à la permanence de l’idolâtrie dénoncée par les prophètes (Os 2,2-15). Le mariage avec une étrangère est devenu le symbole de l’apostasie (Esd 10,2 ; Ne 13,26-27).
Le soleil et la lune ne sont que des objets célestes (Gn 1,14-19) : leur rôle dans le maintien de la vie dépend d’un plus grand qu’eux, mais il est invisible (Sg 13,1-9 ; Jn 1,18 ; Rm 1,20). Pourtant, les idoles attirent (Jg 6,25-32 ; 2 R 18,4), car on peut les voir et les toucher. De plus, les idolâtres paraissent réussir (Ez 26,1-4 ; 27,3-9.25-36). Pour éviter toute contamination, il est interdit de prononcer le nom des idoles (Ex 23,13) ; c’est aussi la raison de l’anathème prescrit lors de la conquête de Canaan (Dt 7,1-6). Par ailleurs, le roi Jéhu réprima férocement les fidèles de Baal (2 R 10,18-27).
Dès qu’il cesse de servir Dieu sans compromis (Dt 6,4), l’homme devient esclave du péché, qui rompt toute communion : argent (Mt 6,24), boisson (Tt 2,3), plaisirs (Rm 6,19), convoitises (Rm 7,7-9) ; même la Loi peut fonctionner comme une idole (Is 1,10-15 ; Mt 23,23-24 ; Ga 4,8).
Lors de la crise maccabéenne, la Judée était vassale d’Antioche, capitale de Syrie ; une partie des Juifs étaient fascinés par l’hellénisme (1 M 1,11), mais d’autres résistaient, d’où des persécutions (2 M 5,23-26), et finalement l’installation de l’Abomination de la Désolation sur l’autel des holocaustes (1 M 1,34 ; Dn 9,27 ; 11,31). Jésus annonce une profanation semblable, dans une période troublée où surgiront de faux Messies (Mt 24,15). Cela proviendra de Rome, qui au temps du NT effraie et fascine par sa puissance ; César est divinisé, comme dieu et fils de dieu ; gouverneurs et centurions lui rendent un culte (Jn 19,6-8.15 ; cf. Mt 27,54), et Jésus accuse les Juifs de le suivre, alors qu’il ne sème que la mort (Jn 8,44). Comme une prostituée, le monde exerce une séduction (1 M 1,11), car les civilisations sont riches et capables de ressusciter (Ap 13,14-18), mais leurs serviteurs ne connaissent pas la paix (Ap 14,11-13), car ils sont livrés à eux-mêmes, comme Adam (Gn 3,10). L’idolâtrie, qui alourdit tout, est incompatible avec le Royaume (1 Co 10,14.25-30 ; 1 Jn 5,21), dont le joug est léger (Mt 11,28-30).